2 La situation économique de
l'Afrique
La situation économique actuelle de l'Afrique
subsaharienne ne peut être comprise sans une analyse de son histoire et
plus particulièrement de ses caractéristiques
économiques.
2.1 L'exploration et la colonisation
Depuis le 15ème siècle, les portugais
longeaient les côtes du continent africain, essentiellement pour
contourner l'Afrique et ainsi trouver la route des Indes.
La traite des esclaves noirs vers l'Amérique du Nord a
commencé au 16ème jusqu'au 19ème
siècle. Au début, il s'agissait de comptoirs commerciaux
situés en bord de mer, la traite à l'intérieur des terres
était effectuée par des populations indigènes
attirées par l'appât du gain ou voulant juste se
débarrasser de leurs ennemis. Les conséquences de cette traite
dans l'histoire de l'Afrique sont importantes. L'historien Joseph Ki- Zerbo a
montré que l'Afrique avait atteint un haut niveau de
développement politique, social et culturel : « La traite des
Noirs fut le point de départ d'une décélération,
d'un piétinement, d'un arrêt de l'histoire africaine. Je ne dis
pas de l'histoire en Afrique, mais d'une inversion, d'un retournement de
l'histoire africaine. Si on ignore ce qui s'est passé au travers la
traite des Noirs, on ne comprend rien à l'Afrique ».[15]
A l'exception de la traite des Noirs, les peuples d'Afrique
vivaient de cueillette, de la chasse et d'agriculture. Les liens avec le reste
du monde étaient assez limités.
La colonisation, et son lot de violence, a commencé au
milieu du 19ème siècle. En 1885, sept pays
européens (l'Allemagne, l'Angleterre, la Belgique, l'Espagne, la France,
l'Italie et le Portugal) se partageaient et opéraient un
véritable pillage du continent africain. Après la défaite
allemande de la première guerre mondiale, l'ensemble des territoires
appartenant à l'Allemagne ont été redistribués aux
vainqueurs.
A part les exceptions du Liberia et de l'Ethiopie, dans les
années 30, l'ensemble du continent est entièrement
colonisé et spolié.
2.2 La décolonisation
Dès 1950, le début des mouvements de
décolonisation firent leur apparition en Afrique du nord. En 1957, le
Ghana devient le premier pays d'Afrique sub-saharienne à obtenir son
indépendance. Au début des années 1960, une grande partie
de l'Afrique est déjà décolonisée à
l'exception de certains pays comme la guinée équatoriale (1968)
et les différentes colonies portugaises (1973-1975).
Pendant les colonies, les postes principaux étaient
attribués aux européens. Peu d'usines avaient
été implantées. La capacité et la diversité
de production étaient donc faibles. « Quand avec Kwame
Nkrumah, Amilcar Cabral et les autres, nous nous battions pour
l'indépendance africaine, on nous répliquait
: «Vous ne pouvez même pas produire une aiguille,
comment-voulez-vous être indépendant ? » Parce que, pendant
cent ans de colonisation, on nous avait affecté à ce rôle
précis : ne pas produire même une aiguille, mais des
matières premières, c'est-à-dire dépouiller tout un
continent. » Citation de Joseph Ki-Zerbo. [15]
La bi polarisation du monde après la
2ème guerre mondiale (Est-Ouest) a poussé les
anciennes métropoles exclusivement occidentales, qu'elles aient
décidé d'accorder l'indépendance ou qu'elles en aient
été contraintes, à chercher un moyen pour conserver un
contrôle sur les anciennes colonies. Dans bien des cas, ils ont
placé des hommes de confiance au pouvoir qui leur permettaient de servir
leurs intérêts économiques et stratégiques.
L'exemple de la France et toute la région de la francafrique est assez
éloquent : le premier président de Côte-d'Ivoire, Felix
Houphouët-Boigny, est un ancien ministre du gouvernement français,
au Sénégal avec Léopold Sedar Senghor ou bien encore au
Gabon avec Léon M'Ba qui a été rétabli par
l'armée française lors du coup d'état de 1964.
En 1955, lors de la conférence de Bandung, des pays se
sont levés pour dépasser le clivage Est - Ouest et ainsi
crée un troisième monde1. Ces dirigeants
poussées par la liesse populaire avec de véritables
idéologies d'autonomie ont vu le jour en Egypte avec Gamal Abdel Nasser,
au Congo avec Patrice Lumumba, au Mali avec Modibo Keita, au Togo avec Sylvanus
Olympio, en Guinée avec Sékou Touré, au Ghana avec Kwame
Nkrumah, en Tanzanie avec Julius K. Nyerere ou bien encore en Zambie avec
Kenneth Kaunda. Les différents pays représentés lors de la
conférence de Bandung revendiquaient l'indépendance, le
non-alignement sur les deux blocs, la paix et surtout le « trade but
not help » prônant ainsi un commerce juste pour permettre de
financer le développement des pays à l'aide de sources propres et
indépendamment de l'influence de l'un des deux « blocs ». Ces
valeurs seront à nouveau utilisées dans le consensus de
Monterrey. Ces différentes tentatives, de courte durée, ont
connus des fortunes diverses. Les anciennes métropoles sont souvent
intervenues pour placer leur homme de confiance, comme au Congo avec
l'assassinat de Patrice Lumumba, comme au Mali avec le coup d'état de
1968 qui renverse Keita pour instaurer la dictature de Moussa Traoré.
De manière générale, on peut dire
qu'après les premières années euphoriques de
l'indépendance, très peu de pays sont réellement
souverains politiquement et indépendants à la fin des
années 1960.
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