Jean zay, ministre des beaux arts 1936-1939, étude de cas sur sa politique cinématographique( Télécharger le fichier original )par Lisa Saboulard Université de Toulouse II Le Mirail - Master 1 Histoire Contemporaine 2010 |
Remerciements Je remercie mes directeurs de recherche pour leur soutien tout au long de cette année universitaire calme, ainsi que le personnel de la bibliothèque, pour leur aide si particulière ... Je tiens également à exprimer ma gratitude envers Justine Roland et Frédérique Liévin, pour leur soutien psychologique, Thomas Gutleben pour son soutien logistique, ainsi que toute l'équipe de relecture et de correction : Maelle Le Ligné, Laure Sablayrolles, Laura Jegou, Tom Le Grusse et Damien Troy. Enfin, je remercie tout l'équipe du foyer d'Histoire pour son accueil chaleureux et sa bonne humeur tout au long de la rédaction de ce mémoire. Sommaire Introduction générale.............................................................................. p 4 I) étude générales............................................................................... p 8 Bibliographie............................................................................... p 9 Historiographie............................................................................. p 26 Présentation des sources.................................................................. p 38 Approche méthodologique................................................................ p 47 Problématique.............................................................................. p 49 II) Etude de cas................................................................................... p 50 Introduction................................................................................. p 51 1) Un domaine sinistré..................................................................... p 52
2) Un environnement réorganisé......................................................... p 77 3) Un milieu réformé...................................................................... p 97 Conclusion.............................................................................. p 117 III) Annexes.................................................................................... p 118 Table des illustrations............................................................................ p 142 Introduction GénéraleJean Zay est né le 6 août 1904 à Orléans d'un père juif et d'une mère protestante. Il est gagné rapidement par la passion de la culture à travers le domaine littéraire, lieu de vraies réussites pour sa génération. Mais face à la tentation d'une carrière littéraire, l'appel de la politique est trop fort. Il approche très tôt ce domaine grâce à son père, directeur du quotidien radical-socialiste local. Il fréquente les cercles républicains, devient membre de la Ligue des Droits de l'Homme, responsable de la Ligue de l'enseignement, et entre à la loge maçonnique en 1926. En 1928, il devient un avocat aux talents oratoires
reconnus1(*) : sa passion
pour la culture est reflétée dans l'exercice de sa profession.
Néanmoins, il n'en oublie pas pour autant sa vocation politique et met
sa carrière professionnelle au service de son ambition. Réélu député en 1936, Jean Zay est choisi par Léon Blum car, selon lui, « il faut un jeune à l'éducation nationale »2(*). Effectivement, à la tête de ce ministère auquel est rattaché le secrétariat des Beaux Arts, Jean Zay devient, à 32 ans, le plus jeune ministre de la troisième République. Il reste à son poste sous les divers gouvernements qui se succèdent jusqu'à sa démission le 2 septembre 19393(*) afin de rejoindre l'armée combattante. « S`il n` y a pas d'art d'État, l'État doit faire que l'art touche le plus grand nombre possible de Français ». Cette phrase est prononcée non pas en 1936, mais en 1951 par André Malraux dans ses Voix du silence publiées cette même année. Malraux, déjà spectateur en 1936 du mouvement du Front populaire résume la pensée générale de l'époque d'avant-guerre. En effet, le gouvernement du Front populaire s'est attaché à la démocratisation de l'art et à la popularisation du savoir, exprimées aussi bien par l'action des différents mouvements associatifs que par les mesures gouvernementales4(*). Cet élan collectif fut accompagné par la « défense de la culture » à travers une politique de la « main tendue » par les socialistes, thématique antifasciste par excellence, fortement mobilisatrice. En juin 1937, Georges Huisman, directeur général des Beaux-arts sous le gouvernement d'Edouart Daladier rappelle dans la revue Europe la nécessité de « faire pénétrer la culture artistique et technique dans les foules populaires qui en furent trop ou longtemps privées ». Cependant, en complément de la philosophie du mouvement du Front populaire, il ne serait pas pensable de tenter d'expliquer l'action de Jean Zay sans la replacer à travers l'idée qu'il a lui-même de l'action politique.
Dès sa majorité, en effet, il estime que
« l'intellectuel ne peut pas ne pas prendre parti dans la
controverse qui chaque jour sur le forum dresse les citoyens les uns contre les
autres »7(*) Ces initiatives composent une réponse au rude contexte culturel auquel fait face le ministre lors de sa prise de fonction. En effet, la crise économique générale et ses répercussions néfastes donnent au tableau du monde culturel, vers 1936, ses couleurs les plus sombres. En plus de celle-ci, de nouveaux modèles culturels à travers les États-Unis ou l'Union Soviétique font de l`ombre aux vieilles cultures européennes et un fort volontarisme culturel venant des pays autoritaires étrangers met à mal le rayonnement français. Enfin, l'Europe est en retard dans la prise en considération des nouvelles technologies telles que le disque phonographique et la radio diffusion qui modifient considérablement le domaine culturel à l`époque. La radio a néanmoins un rôle primordial pour le Front populaire. C'est à l'antenne de « Radio Paris » que Maurice Thorez, le 17 avril 1936, prononce son discours historique de la « main tendue », accompagné de slogans classiques tel que « pain, paix, liberté » et évoquant la réconciliation du peuple de France derrière la campagne électorale amorcée qui fait un usage actif de la T.S.F. L'utilisation de ce média de masse a une profonde importance dans tout un pan de l'action culturelle du gouvernement et Jean Zay utilise efficacement ce moyen de communication, tout comme ses retombées économiques nouvelles. « La radio est le plus récent des moyens d'expression modernes et est arrivée au monde toute nue sans répertoires et sans artistes. [...] Elle puise largement dans la richesse artistique du pays telle qu'elle l'a trouvée»9(*). Ainsi, celui-ci pallie le manque de budget des Beaux Arts en prélevant du budget de la radio - relevant du ministère de La Poste - un crédit pour subventionner les théâtres et concerts indépendants. Malgré ce point positif, la radio reste une sévère concurrence aux spectacles plus traditionnels. Ces nouveaux médias sont accompagnés par une crise culturelle spécifique aux années trente due aux répercussions de la crise économique. Que le cinéma lui-même dans une conjoncture techniquement florissante - avec l'avènement du cinéma parlant - n'a pas complètement réussi à échapper aux difficultés économiques est déjà un signe. La production nationale baisse quantitativement : de 156 films en 1933, elle est passée à 128 en 1935, le chômage augmente et les salles sont fragilisées par une baisse du public10(*). Hors du cinéma, la crise est encore plus brutale : avec un franc surévalué depuis 1931, toute l'exportation française se trouve pénalisée. Dans le monde du spectacle, la semaine de 40h par la loi de 1919 ne se met pas en place et les travailleurs intellectuels sont fortement touchés ou menacés par le chômage. C'est dans ce contexte de crise culturelle que Jean Zay n'a de cesse de mettre en oeuvre une politique dynamique. Concernant les musées et le patrimoine, il renforce les mesures de protection des bâtiments, créé le musée d'art moderne et celui des arts traditionnels et populaires. Le théâtre voit ses subventions augmenter et connait une réunion des théâtres nationaux permettant d`insuffler un renouveau national. Quant au septième art, il n'est pas en manque avec le lancement d'une profonde réforme qui aurait du permettre l`assainissement de certaines de ses sections - comme le milieu de la production - une professionnalisation, un meilleur soutien de l`Etat. Le ministre jette également les bases d'une définition légale du droit d'auteur. Il porte notamment un regard particulier sur l'Art en permettant la prise en compte de l'art moderne accompagné par une valorisation des artistes. Malgré toutes ces idées, rares sont celles qui voient réellement le jour et aboutissent vu le manque de temps, de moyens financiers et de volonté politique autre que celle d'un seul homme et de sa petite équipe. Mais, la mise en oeuvre de ces mesures, avec une vue d'ensemble, reflète pour certains les prémices d'une réelle politique culturelle. De fait, le côté visionnaire de Jean Zay s'est illustré à travers la récupération de ses projets par différents gouvernements tels que Vichy qui reprendra son statut sur le cinéma ou encore Malraux qui a continué sa logique environnementaliste en ce qui concernant la prise en compte du patrimoine. C'est à travers cet aspect visionnaire que j'ai choisi ce sujet qui plus est en rapport direct avec mes motivations professionnelles. En effet, j'ai toujours été intéressée par le monde culturel et notamment le septième art, d`où l`intérêt pour mon étude de cas qui portera sur la réforme du domaine du cinéma que prévoyait Jean Zay. De plus, même si le milieu de la recherche ne me déplait pas, j'aimerais vivement l'an prochain intégrer un master professionnel ayant trait au domaine de la gestion, de l'administration culturelle. * 1 voir à ce sujet la maîtrise de Pierre-Olivier Aguinalin sous la direction d`Antoine Prost, « le barreau au service d'une ambition politique : maître Jean Zay à Orléans dans les années trente », Paris, 2000. Selon celui-ci, Jean Zay « a su insuffler une atmosphère théâtrale à ses procès, grâce autant à son éloquence qu'à la force de l'ironie, de l'indignation, de l'indulgence et du pathétique qui le rendait incomparable. L'avocat Zay s'y révèle sous de multiples facettes : juristes, enquêteur, confesseur, historien, moraliste voir acteur ». * 2 Zay J., Souvenirs et solitude, p 282. * 3 Une période exceptionnellement longue pour un ministre de la IIIème République. * 4 Ory P, La belle illusion, culture et politique sous le signe du Front Populaire, 1935-1938, éditions Plon, Paris, 1994. * 5 6 Prost A. (dir.), Jean Zay et la gauche du radicalisme, Presses de Sciences Po, Paris, 2003. * 7 Phrase citée par Nicole Debrand, « Jean Zay écrivain », dans le fascicule de l'Association « Jean Zay au Pantéhon » paru en avril 2007 et diffusé par le Grand Orient de France , p 17. * 8 Ruby M., la vie et l'oeuvre de Jean Zay, Librairie gedalge, Paris, 1969. p 303. * 9 Zay J., souvenirs et solitude, p 219. * 10 Guillaume-Grimaud G., Le cinéma du Front Populaire, P. Lherminier, Paris, 1986, p19. |
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