La problématique de la gouvernance locale dans la région de l'est-Cameroun: une analyse de la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua( Télécharger le fichier original )par Bertille Arlette JIOKENG NDOUNTIO Universite Catholique d'Afrique Centrale - Master en Gouvernance et Politiques publiques 2010 |
CONCLUSION GENERALELa présente étude ambitionnait la compréhension de la problématique de la gouvernance locale dans la Région de l'Est-Cameroun à travers l'analyse de la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua. Cette région est, en effet, considérée comme l'une des plus sous-développées, à cause de son enclavement et de la mauvaise gestion des ressources qui la caractérisent. Dans le même temps, le maire est considéré comme l'acteur central, voire incontournable de la gouvernance locale compte tenu de sa proximité avec la population. Cependant, au delà de la littérature sur la participation de la population a la gestion des affaires locales, l'on ne s'est pas beaucoup intéressé à ce que pense ladite population de l'autorité locale qu'est le maire et de son action publique locale. La question centrale était de voir, comment la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua favorise-t-elle leur adhésion à l'action publique locale ? Pour répondre à une telle interrogation, une hypothèse principale et deux hypothèses secondaires nous ont paru nécessaires. Ainsi, l'adhésion et la participation des populations de la ville de Bertoua à l'action publique locale dépendent fortement de la perception qu'elles ont du maire. Subséquemment, plus le maire est un personnage proche des populations, plus celles-ci adhèrent à son action en s'attachant, notamment, à ses qualités personnelles, mais aussi, plus l'action de la commune touche les réalités des populations, plus elles se sentent poussées à s'y impliquer. Ce travail, conçu sous l'estampille de l'interactionnisme symbolique et de la théorie des représentations sociales, a permis d'examiner la relation qui se développe entre le maire et les populations pour comprendre, au final, l'impact qu'elle pouvait avoir sur l'adhésion des populations à l'action publique locale. L'étude a également permis de saisir des éléments tels que le code de communication entre maires et populations, la façon avec laquelle les populations de Bertoua définissent ensemble les différents aspects d'un vécu quotidien et, surtout, comment elles se positionnent dans leur environnement afin de le maîtriser. Pour ce faire, il a été démontré, dans une partie première, que le maire est une autorité dont les attributions sont définies par des textes juridiques. Cette définition pré et post- décentralisation effective, a dévoilé une reconfiguration juridique des attributions du maire. Ainsi, il acquiert plus d'autonomie et se voit confier une mission de promotion du développement dans sa circonscription. La première partie a, de ce fait, permis de comprendre que la proximité du maire semble se limiter à une proximité purement géographique puisque les populations ne connaissent pas le maire et considèrent qu'il n'est pas proche d'elles. Aussi, plus qu'un lien direct et logique entre représentations et pratiques, l'appréciation de l'action du maire est apparue comme un facteur déterminant de l'adhésion à ses décisions. Cette appréciation, positive ou non, fait appel au capital sympathie du maire et à sa capacité à mobiliser les forces locales. Comprendre la dyade maire-population a donc supposé de considérer la satisfaction des populations en ce qui concerne leur implication, mieux, leur participation à la prise des décisions. Cela suppose également de pouvoir prendre en considération les contraintes qu'imposent les diverses facettes de la fonction de maire. En effet, il n'est pas toujours aisé, pour un maire, de tenir compte de toutes les revendications des populations. Le « choix difficile148(*) » prend tout son sens lorsqu'il est, désormais, question d'intérêt général et c'est la raison pour laquelle penser et établir un cadre de communication suffisamment intégratif entre l'administration municipale et les populations se pose comme une nécessité. A cet effet, la seconde partie de l'étude a permis de saisir la communication et l'implication des citoyens à l'action publique locale comme des données d'une légitimité questionnée. L'analyse de la communication entre maire et population, a laissé se profiler une persistance des schèmes stato-centrés. En effet, le maire à Bertoua est assimilé à une autorité déconcentrée aux attributs de puissance publique et la dimension politique du maire enjoint une attitude de « rejet » de l'autorité municipale par les populations. Dans le même ordre d'idées, cet état des choses entraine des effets sur l'adhésion voire la reconnaissance de l'action publique locale. Les populations qui se plaignent principalement, de l'absence de plateformes d'expression et de concertation, considèrent le maire comme une autorité distante de « sa » base, base qui l'a pourtant porté à cette fonction par l'expression de son vote. Par ailleurs, cette partie de l'étude a permis d'envisager les populations dans une situation, sinon de philosophie de la méfiance, tout au moins de crise de la confiance en l'élu local qu'est le maire. La légitimité de ce dernier s'est trouvée être en pleine refondation. Bien que le maire soit une autorité élue et, partant, issue de la volonté du peuple, les populations semblent ne plus se reconnaitre en lui. Cet état de fait aura permis de confirmer les hypothèses de travail que nous avons émises au début de cette recherche. On serait tenté dès à présent de penser que la faute revient entièrement au maire qui n'associe pas la population au processus de décision et d'opter illico pour la conclusion selon laquelle le maire n'est pas important puisque les populations ne font que s'en plaindre. Il reste, toutefois, comme le souligne Chantal BELOMO en analysant la perception de l'Etat camerounais par le citoyen, que « quelque soit la perception que le citoyen (fut-il vendeur ou paysan) peut avoir à son [l'Etat] égard, elle ne peut altérer en rien le fait qu'il demeure une constance irremplaçable et irréductible de la société...149(*)». Ceci pour dire que, malgré les reproches qui lui sont faits, le maire est une autorité dont a besoin la population car elle est, ne serait-ce que de façon supposée, la mieux placée pour entendre et gérer les besoins des populations. Il reste qu'un accent particulier est à mettre sur la nécessité, pour le maire, de collaborer avec la population et d'encourager l'entreprise des autres acteurs du développement. Au terme de nos recherches nous ne saurions, toutefois, prétendre avoir exploré toutes les questions que pose la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua. La place du Délégué du Gouvernement, super-maire, le rôle des autorités déconcentrées, les stratégies du maire en tant qu'acteur politique ou même la psychologie de l'acteur municipal, sont autant de questions qui n'intéressent, certes, pas notre objet d'étude de façon directe, mais qui pourraient faire l'objet de travaux futurs. Nous espérons que cette étude, malgré ses imperfections ou à cause d'elles, inspirera à d'autres le désir d'explorer ces pistes de recherche. * 148 P. DURAN, disponible sur disponible sur http://www.ceras-projet.com/index.php?id=1956. * 149 C. BELOMO, op. cit., p. 218. |
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