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La problématique de la gouvernance locale dans la région de l'est-Cameroun: une analyse de la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua

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par Bertille Arlette JIOKENG NDOUNTIO
Universite Catholique d'Afrique Centrale - Master en Gouvernance et Politiques publiques 2010
  

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Paragraphe 2. Une personnalité publique à rôle diffus

Le maire, élu local et acteur de proximité du développement local, est une personnalité que les populations de la ville de Bertoua n'arrivent toujours pas à « connaitre » véritablement. Cela est dû au fait que son rôle, bien que précisé dans les lois camerounaises sur la décentralisation, ne soit pas rendu opérationnel auprès desdites populations. En réalité, ces populations ne maitrisent pas les contours de la fonction de maire en ce qui concerne son rôle et son action. « Il faut reconnaître ici que les acteurs sociaux sont engagés dans des pratiques plurielles que reflète leur multi-appartenance institutionnelle et leur identité fragmentée. Dans leurs rapports aux institutions ils expérimentent une ambivalence et des ambiguïtés que les macroanalyses traditionnelles ne parviennent pas à saisir. D'où l'importance de mieux appréhender le contexte de l'action de même que les rapports sociaux et politiques engagés dans sa définition59(*) ». La décentralisation implique une coordination des échelles de pouvoir. Elle doit intégrer dans les faits une structure de négociation, une interface entre les pouvoirs locaux institutionnels et les pouvoirs locaux classiques ou émergeants60(*) (Associations sportives et culturelles (ASC), groupements féminins, pouvoir coutumier, délégués de quartier...). Pour ce faire, il est nécessaire de « mieux jauger ces pouvoirs à la lumière de leur efficacité dans l'encadrement des populations et appréhender les articulations tendues entre des pouvoirs de natures et d'ambitions différentes61(*) ».

Il existe, par ailleurs, une « complexité» dans la définition des compétences des différents acteurs locaux comme le maire, le délégué du gouvernement voire le gouverneur. Les relations entre ces intervenants sont souvent marquées de conflits de compétence qui embrouillent les populations. « On ne sait pas si c'est le maire ou le délégué représentant le ministre du développement urbain et de l'habitat qui doit s'occuper des poubelles dans la ville », nous confiait un enquêté. Fort de ce constat, ces mêmes populations affirment « ne pas être au courant des activités des mairies. »62(*).

De plus, lorsqu'on parle de l'importance du maire dans le processus de décentralisation, les populations de Bertoua sont confuses, sinon « perdues ». Les débats politiques suscités par la discussion sur la décentralisation proprement dite ont porté un écho médiatique notable. Il en a résulté une certaine « popularisation » voire une vulgarisation du terme décentralisation mais aussi, pour beaucoup, une incompréhension du concept.

En effet, un nombre non négligeable d'habitants de Bertoua qui sont à même de lui donner un contenu en ont une compréhension erronée ou confuse. Le plus souvent, ils assimilent à la décentralisation les autres aspects de la réforme territoriale. Elle est ainsi régulièrement confondue avec le découpage territorial suite à la publicité faite, sous l'intitulé de la décentralisation, aux aspects les plus épineux de cette question. C'est sans doute la raison pour laquelle ils assimilent le maire à une personne qui perpétue des façons de penser traditionnelles et non pas la nouveauté ou la modernité qu'inspire à leur avis la décentralisation.

« Certes, l'Etat moderne a pris en charge ou socialisé bien des fonctions qui appartenaient à la sphère privée. Mais il le fait pour une large part par le biais des communes alors même que nombre des besoins des populations, notamment l'éclairage public, l'acheminement de l'énergie, la fourniture d'eau potable, l'évacuation des eaux usées ou des ordures, les transports publics, ont été socialisés. Chacun d'entre nous est devenu ainsi davantage dépendant des municipalités »63(*). La fonction de maire semble s'être démultipliée entrainant ainsi une nécessaire professionnalisation. Mais aussi l'image que reflète le maire est une donnée sensible dans la fédération des populations au profit de l'élaboration et de la mise en oeuvre de son action publique. Les « nouvelles écharpes pour le maire64(*) » posent donc la question de la figure du maire et de l'image qu'en ont les populations.

*

* *

Au terme de ce chapitre, l'on comprend que le maire est une autorité dont les attributions sont définies par des textes juridiques. Avant la décentralisation, ces textes lui confèrent, notamment, un rôle de rassemblement des administrés sur « son » territoire mais son action est très contrôlée par l'Etat central. Avec la décentralisation, les attributions du maire sont reconfigurées sur le plan juridique. Il acquiert plus d'autonomie et se voit ainsi confier une mission de promotion du développement dans sa circonscription.

Au delà de ces prérogatives, le maire est une autorité qui vit dans une commune et partant, est censé être connu de ses administrés. Seulement, nos enquêtes révèlent que le maire est une autorité méconnue des populations de la ville de Bertoua. Il apparait comme une autorité dépourvue de notoriété et comme une personnalité publique aux rôles diffus. Ainsi, près de soixante-dix pour cent (70%) de la population de Bertoua ne connait pas le maire, la plupart d'entre elle ne sachant même pas ce que c'est qu'un maire. Les enquêtés disent ne pas connaitre le maire parce qu'il n'est pas proche d'eux. De cette méconnaissance du maire, naît une certaine image qui détermine la participation des populations à l'action publique locale.

* 59 P. HAMEL, « La gouvernance une perspective valable afin de repenser la coopération et les conflits ? », in Cardinal L. et C. Andrew sous la dir., La démocratie à l'épreuve de la gouvernance, Ottawa, 2001, Les Presses de l'Université d'Ottawa, p. 87-99.

* 60 S. MANSOUR TALL, «La Décentralisation et le Destin des Délégués de Quartier à Dakar (Sénégal)», in Le bulletin de l'APAD, N° 15, Les dimensions sociales et économiques du développement local et la décentralisation en Afrique au Sud du Sahara, mis en ligne le 20 décembre 2006, disponible sur http://apad.revues.org/document567.html, consulté le 19 mai 2010 à 10h30 min.

* 61 J.-L PIERMAY, « Dynamismes et pouvoirs locaux en Afrique centrale : une chance pour l'encadrement urbain ? », in: Jaglin, S. & A Dubresson, 1993, p. 285.

* 62 F. ONGODO, B. CISSE A. Et A. CAPIEZ, « Gouvernance urbaine en Afrique : une étude comparative de la perception de la qualité du management urbain et de la performance des collectivités locales maliennes et camerounaises », communication pour la Revue francophone de Gestion, 2006, disponible sur http: www.cidegef.refer.org/douala/Fouda_capiez_cisse.doc, consulté le 12 avril 2010, à 8h44 min.

* 63 P. MARTINOT-LAGARDE, disponible sur http://www.ceras-projet.com/index.php?id=1956, consulté le 29 mai 2010, à 16h.

* 64 Ibid.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand