Les enjeux de la transmission dans la prise en charge de l'enfant en CMP: la construction de sens( Télécharger le fichier original )par Camille PATRY Université Paris Descartes, Institut Henri Piéron - Master 2 pro psychopathologie et psychologie clinique 2010 |
ProblématiqueA travers ce stage, j'ai l'occasion d'appréhender les différentes dimensions de l'exercice du psychologue clinicien en CMP pour enfants. En prime abord, cela me permet d'approcher les spécificités de l'intervention auprès de l'enfant. Le petit patient que nous rencontrons est un sujet en pleine évolution, et ce à travers un processus de développement qui n'est pas linéaire. Dès lors, les symptômes peuvent faire partie des aléas du développement, et nécessitent une aide afin que les difficultés puissent être dépassées. Outre la souffrance qu'ils provoquent, il s'agit de faire au mieux afin qu'ils ne mettent pas en péril le processus développemental dans son ensemble. Qui plus est, cette expérience me sensibilise à la complexité de la prise en charge d'un sujet aux prises directes avec son environnement. Comme l'énonce Houzel (2004), « la famille est à la fois le lieu d'inscription de l'enfant dans une généalogie et dans une filiation, inscription nécessaire à la constitution de son identité et à son processus d'humanisation et le lieu de confrontation aux trois différences fondatrices (...) : la différence de soi et de l'autre, la différence des sexes et la différence des générations »1(*). Dès lors, le développement de l'enfant dépend étroitement des qualités de son lien à l'environnement, et en premier lieu à la famille. C'est par ce lien que s'effectuent les transmissions qui font le lit de la construction psychique de l'enfant. Qu'il soit dysfonctionnel et les transmissions seront brouillées, amenant ou renforçant la souffrance de l'enfant. On comprend ainsi, et c'est bien l'une des particularités du soin des enfants, qu'il est impensable d'envisager la prise en charge sans y inclure la famille. A partir de ce constat, comment le clinicien peut-il se positionner par rapport à la transmission afin de favoriser une mise en liens créatrice de sens ? A travers la transmission, son rôle ne serait-il pas de soutenir les liens entre les différents acteurs de la vie de l'enfant en miroir à l'importance des liens familiaux pour l'enfant ? Avant tout, il me semble important de signifier le sens que revêt le terme de transmission. Approfondissant la définition commune de faire passer ce que l'on possède en la possession d'un autre, Sassolas (2009) insiste sur l'attitude active de l'ensemble des sujets impliqués dans ce processus. Il implique une véritable appropriation de ce qui se transmet par le sujet récepteur « cocréateur de ce qui lui est transmis », à hauteur des processus engagés dans l'identification. A travers les transmissions verbales, corporelles, émotionnelles ou autres, Grange-Ségéral (2009) affirme que « la transmission s'effectue par des opérations psychiques en grande partie inconscientes dans un double mouvement des données parentales sur les enfants et des données en provenance des enfants sur les parents »2(*). Alors, l'une des fonctions du clinicien consistera à analyser le lien parents-enfant afin qu'il puisse se modifier, et ce en partie à travers la transmission de sa compréhension de la dynamique familiale. Néanmoins, comme pour tout patient, nous devons le secret professionnel à l'enfant ; et c'est parce qu'il nous fait confiance qu'il pourra externaliser ce qu'il ressent, que cela soit en mots, ou à travers ses comportements ou ses jeux. Ainsi, quels sont les enjeux de l'appréciation de ce qui doit être communiqué ou non entre les parents et l'enfant ? Nous avons remarqué préalablement que la prise en charge au sein du CMP fait intervenir plusieurs professionnels. Il s'agit donc de concevoir le rôle du psychologue au sein d'une équipe pluridisciplinaire, en plus de sa fonction thérapeutique pour l'enfant. Or, l'exercice de ces différentes fonctions se doit bien d'être cohérent, ce qui m'amène à me questionner sur les aspects de cette prise en charge pluri-focale, mais aussi l'impact de la transmission des informations avec l'équipe, toujours dans une perspective de « mise en sens ». Enfin, il est admis que le 2nd lieu d'inscription pour l'enfant, après la famille, est l'école. C'est d'ailleurs souvent par le biais de celle-ci que la demande de soin s'effectue. Ce fait témoigne bien de ce que la souffrance de l'enfant s'exprime aussi à l'école, et qu'elle y est prise en compte. De même, quand ce n'est pas l'école, cela peut être toute autre institution recevant l'enfant, lieu qui se trouve parfois dépourvu face au fonctionnement de l'enfant et/ou de la famille. Ceci est d'autant plus d'actualité depuis l'application de la loi du 11 février 2005 favorisant l'intégration des élèves handicapés en milieu scolaire ordinaire, mais laissant parfois les enseignants démunis. En conséquence, dans quelles mesures le clinicien, mandaté par le CMP, peut-il restituer sa compréhension de la personnalité de l'enfant auprès des autres institutions et quelle en est la portée pour le bien-être de l'enfant ? * 1 HOUZEL, D (2004). Les enjeux de la parentalité. In : L. Solis-Ponton (Dir), La parentalité, Défi pour le troisième millénaire. Paris : PUF. p. 70. * 2 Grange-Ségéral, E (2009). Les « choses » de la transmission. In : M. Sassolas (Eds), Transmissions et soins psychiques. Toulouse : Erès. p. 190. |
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