Partie 1 : Adaptation de l'action publique aux enjeux de
demain : des structures territoriales plus pertinentes avec des nouveaux
outils de gestion
En l'espace de peu de temps nos territoires ont connu de
profonds bouleversements. Lors du dernier siècle, l'industrialisation a
poursuivi son ancrage et conditionné de nouveaux modes de production et
de consommation. Les infrastructures de déplacements se sont
modernisées et ont rapproché, tel une carte isochrone, les
territoires entre-eux. Qui pouvait envisager, il y a seulement 50 ans, habiter
à plus de 30 km de son lieu de travail ? Puis les moyens de
communication prennent le relais en inter-connectant les
sociétés. Ces changements structurels ont des
répercussions sur le comportement des individus qui peuvent
dorénavant se déplacer, communiquer, travailler, consommer,... de
manière différente.
Enfin c'est le célèbre phénomène de
mondialisation qui affecte les territoires par ses composantes :
- La production de masse où toutes les
activités humaines s'inscrivent dans un système
global d'échange. Ceci contribue à transformer
ce qui est sacré, exceptionnel, particulier, artisanal,
réservé à un cercle restreint en quelque chose de banal,
compétitif et facilement accessible.
- La globalisation de l'argent induit par
l'augmentation des mouvements financiers
internationaux facilités par l'ordinateur, Internet et la
dématérialisation des titres au sein d'un système bancaire
mondialisé.
- L'internationalisation des entreprises, rendue
facile par l'effondrement des prix de
transport et la réduction des barrières aux
investissements étrangers. L'intégration de nouveaux pays dans
les circuits internationaux avec des coûts de main d'oeuvre
compétitifs incite certaines entreprises à délocaliser.
- La volatilité des investissements qui a
pour conséquence de développer des entreprises
temporaires sans attaches territoriales. Les entreprises qui ont
une histoire sur un territoire se font de plus en plus rares.
- L'externalisation du système productif.
De nombreuses grandes entreprises lèguent
certains champs de production ou de services à des sous
traitants. Ces firmes en réseau ou en interrelation peuvent fragiliser
tout un bassin d'emploi lors de crises économiques.2
Ce développement impacte fortement les territoires qui
sont obligés de s'adapter. Ainsi les découpages administratifs
évoluent mais aussi le pilotage politique. La tendance est de
décentraliser le pouvoir politique au plus près des habitants
afin d'avoir une réactivité face aux changements rapides. A cela
s'ajoute l'enjeu crucial de la prise en compte de l'environnement qui souffre,
aux dires de la majorité des scientifiques, des activités
humaines.
Cette première partie s'efforcera, à partir de
l'exemple de l'aire urbaine de Toulouse et du Sicoval, d'expliquer la mutation
des territoires pour répondre aux nouveaux enjeux du siècle.
2 MOREAU DEFARGES P. La mondialisation, Que
sais-je ?, Presses Universitaires de France, 1997
7
8
Ce sont d'abord les limites administratives et les
compétences locales qui évoluent puis c'est le pilotage des
politiques qui s'est adapté pour intègrer les principes du
développement durable.
La mise en place d'un système d'évaluation en
continu : L'Agenda 21 du Sicoval
A. Création du Sicoval dans la
géopolitique de l'aire urbaine toulousaine
1. La particularité de Toulouse : beaucoup d'espace
disponible pour de nombreux nouveaux arrivants
La métropole toulousaine a connu ce dernier
siècle une forte augmentation de sa population. L'arrivée d'abord
de réfugiés espagnols fuyant le fascisme de Franco, puis le
rapatriement des pieds-noirs et l'arrivée d'une main d'oeuvre
immigrée nord-africaine ont permis à la ville de s'agrandir et
d'offrir une main d'oeuvre pour les secteurs du bâtiment et de
l'aéronautique. Le recensement de 1968 comptabilise alors plus de 370
000 toulousains alors qu'au début du siècle ils n'étaient
que 150 000. Cet afflux de nouvelle population se concentre d'abord dans la
ville centre et dans les faubourgs. C'est à partir des années 70
que la ville de Toulouse perd en habitants au profit de la
périphérie (phénomène national ; les unités
urbaines de plus de 100 000 habitants diminuent en moyenne de 0,62%).
Le changement des représentations sociales : « le
rêve pavillonnaire » loin des méfaits et pollutions de la
ville, la démocratisation de l'automobile et les politiques de soutien
de l'Etat (aide à la pierre) incitent de nombreux ménages
à s'installer en périphérie des villes où le
foncier est disponible à prix abordable.
Dans le cas de Toulouse, les populations s'installent d'abord
le long des grands axes de circulation où les petits villages de
campagne voient leur environnement défiguré par des nouveaux
lotissements pavillonnaires.
Evolution de l'aire urbaine toulousaine 1962 -
19993
1962
|
1968
|
1975
|
1982
|
1990
|
1999
|
329 044 hab.
|
474 208 hab.
|
584 661 hab.
|
644 089 hab.
|
797 373 hab.
|
964 797 hab.
|
2 com.
|
90 com.
|
152 com.
|
195 com.
|
255 com.
|
342 com.
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Aire urbaine
« Une aire urbaine est un ensemble de communes, d'un seul
tenant et sans enclave, constitué par un pôle urbain, et par des
communes rurales ou unités urbaines (couronne périurbaine) dont
au moins 40 % de la population résidente ayant un emploi travaille dans
le pôle ou dans des communes attirées par celui-ci. »
INSEE
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3 INSEE/AUAT, L'Atlas de l'aire urbaine de
Toulouse, 2002
9
L'aire urbaine toulousaine est l'une des plus étendues de
France, elle regroupe sur une superficie de 401 518 hectares près d'un
million d'individus.
Son accroissement montre que les comportements des
ménages ont changé. On effectue les diverses activités de
la vie quotidienne (travailler, consommer, s'amuser,...) sur plusieurs
territoires. Les pouvoirs publics ont dû s'adapter à cette
extension des bassins de vie en délaissant la commune au profit de
structures de gestion plus adaptées. La difficulté pour les
acteurs locaux sera de créer des territoires s'adaptant aux nouveaux
modes de vie tout en gardant une proximité politique avec la
population.
Il faut toutefois nuancer le phénomène en
rappelant que la métropole toulousaine possède un poids
démographique conséquent avec la présence de 40,4% de la
population totale de l'aire urbaine (soit 435 000 habitants) et une
concentration importante d'emplois, services et commerces.
Dans le cas de Toulouse, l'avènement d'une nouvelle
gestion politique se fait très tardivement. Ainsi à la fin des
années 60, c'est l'une des seules aires urbaines qui ne se dote pas
d'une formule intercommunale.
D'une part, la ville-centre est très étendue et
n'a pas besoin de négocier avec ses voisines pour gérer son
expansion et d'autre part, il n'y a pas vraiment de banlieues jusqu'au
début des années 70 : les communes périphériques
(aujourd'hui intégrées dans l'aire urbaine) sont rurales et
craignent la domination de la ville-centre. L'intercommunalité est alors
dénoncée comme un produit étatique et gaullien par les
élus locaux souvent radicaux-socialistes.
Une fois n'est pas coutume, c'est la périphérie
toulousaine qui va être précurseur dans le regroupement
intercommunal.
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