I.1 Les facteurs structurels
Ces facteurs résultent non seulement de l'inadaptation
du système bancaire formel aux réalités sociales,
culturelles et économiques, mais aussi de la faiblesse de celui-ci.
Cette faiblesse se caractérise par : le manque d'innovations
financières, la faible diversification spatiale et la faible profondeur
financière. De plus, après les restructurations, les banques sont
apparues encore plus fragiles. Elles sont restées de petite taille,
alors que la globalisation financière conduit à la formation des
conglomérats financiers multispécialisés. Cette recherche
de la petite dimension les amène d'ailleurs à restreindre la
nature de leurs opérations qui sont faiblement diversifiées.
Les produits offerts sont pratiquement toujours les
mêmes que ceux d'il y a vingt ans comme si aucune évolution ne
s'était produite, et comme si la fonction d'intermédiation
était restée immuable (Bebolo-Ebé, 1998). Les banques sont
restées étrangères à leur clientèle, et ont
adopté des comportements de rationnement de crédit, expliquant
ainsi le paradoxe d'une forte liquidité bancaire et, une croissante
lente voire une diminution régulière du volume de crédits.
Ce qui a entraîné l'exclusion du financement, d'une frange
importante de la population qui, pour résoudre ses besoins recourt
à la micro finance.
Dès lors, l'expansion de la microfinance trouve
là son explication. D'autres facteurs peuvent également justifier
leur émergence.
I.2 Les facteurs autonomes
Les facteurs autonomes sont liés aux
caractéristiques intrinsèques des micro finances, qui
intègrent l'individu dans une dynamique sociale, mais également
présentent des caractéristiques techniques répondant aux
habitudes des populations et à leurs besoins spécifiques.
La microfinance est considérée comme un moyen de
lutter contre la pauvreté c'est pourquoi elle intéresse les
bailleurs de fonds internationaux, en l'occurrence, la Banque Mondiale, le
Fonds Monétaire International et les banques régionales de
développement. Elle repose sur des relations de proximité,
l'allocation des ressources l'est toujours à court terme. Au total la
microfinance contribue au financement de l'activité économique
pour des durées et des montants courts. D'où son expansion.
II. LES INSTITUTIONS DE MICROFINANCE DANS LE PAYSAGE
FINANCIER CAMEROUNAIS
L'émergence de la microfinance est une manifestation de
la vitalité et du développement de la finance informelle, et elle
s'est enracinée dans trois évolutions. Le financement local, le
secteur privé, et le crédit (Lelart, 2002). Même si la
microfinance fait très souvent référence au micro
crédit, sa contribution au financement des petites activités
économiques est indéniable. C'est ainsi qu'un certain nombre de
caractéristiques peuvent être admises, dont, l'une d'elle est une
question de taille comme son nom l'indique.
Il s'agit d'un petit crédit, d'un montant peu
élevé, sensiblement inférieur au crédit qu'une
entreprise ou un ménage peut solliciter d'une banque. La Banque Mondiale
retient un plafond de 30% du PNB par habitant, ce qui représente pour le
cas du Cameroun à près de 100.000 FCFA ou 150 euros. Ce
crédit est donc sollicité par des personnes dont le revenu est
sinon moyen du moins bas. Ce sont souvent les fonctionnaires, des associations
de personnes. Les chiffres ci-dessus étant déterminés par
rapport à un PIB moyen au niveau du pays, le montant peut être
inférieur au niveau d'un débiteur donné. C'est bien
pourquoi le micro-crédit est considéré comme un
crédit pour les pauvres. Ce micro-crédit peut être
demandé pour plusieurs mobiles ; mais il l'est principalement pour
développer une activité génératrice de revenu,
qu'il s'agit d'une ancienne ou d'une nouvelle activité. C'est pourquoi
le micro-crédit est souvent considéré comme un moyen de
lutter contre la pauvreté et qu'il intéresse la banque mondiale
et les banques régionales de développement. Enfin, les
emprunteurs n'ont guère de garantie personnelle à offrir. Mais
comme les candidats sont nombreux dans chaque quartier ou chaque ville, ils se
connaissent et la solidarité africaine agissant, ils se constituent en
groupes restreints au sein desquels chacun s'engage pour les autres. C'est
ainsi que les taux de remboursement sont prohibitifs.
Cependant, la différence reste grande entre les
banques, et les institutions de microfinance. Les banques accordent des
crédits en créditant des comptes, elles créent la monnaie
qu'elles prêtent, elles n'ont pas besoin d'en disposer au
préalable, elles ne « perdent » rien jusqu'à
ce qu'il y ait retrait et qu'elles soient obligées de rembourser le
dépôt en billets. Les flux monétaires sont
déconnectés de leur activité de crédit. Ils
dépendent de l'usage que font leurs clients du crédit
accordé, en chèque ou en billet, et le rythme de leurs
dépenses et de leurs recettes. Au niveau d'une grande banque, et plus
encore au niveau d'un pays de l'ensemble des banques. Ces flux sont
relativement stables. Il en est tout autrement pour les institutions de
microfinance. D'une part, elles accordent du crédit en donnant de
l'argent, en billets ou en chèque, elles ne créent pas de la
monnaie, elles doivent en avoir avant d'en prêter. D'autre part, elles
doivent être remboursées si elles ne veulent pas être
contraintes de cesser leurs opérations rapidement.
Ces flux monétaires sont donc pour elles directement
liés à leurs opérations de crédit, ils
dépendent du rythme des nouveaux crédits qu'elles accordent et
des anciens qui leur sont remboursés. Leur encaisse soit toujours
susceptible de fluctuer fortement, que ce soit l'ensemble des institutions ou
pour chacune (Lelart, 2002).
SECTION III : LES RECOMMANDATIONS DE POLITIQUE
ECONOMIQUE
Depuis les travaux de Gurley et Shaw (1960), il est reconnu
que le niveau d'évolution du secteur financier influence positivement le
taux de croissance à long terme de l'économie. A cet effet, afin
que le système financier camerounais puisse jouer son rôle dans le
processus de financement de l'économie via une allocation efficiente des
crédits, cette étude suscite un certain nombre de
recommandations. Celles-ci vont du parachèvement de la restructuration
du système financier, à l'assainissement complet de
l'environnement macroéconomique.
I. L'ACHEVEMENT DE LA RESTRUCTURATION DU SYSTEME
FINANCIER
La restructuration bancaire comme le relève Touna Mama
(2002) doit déboucher sur une politique plus agressive de collecte de
l'épargne et une politique plus audacieuse de distribution de
crédit. Il ne saurait y avoir de politique de crédit fiable sans
système bancaire sain et jouissant de la confiance du public. Or, il est
étonnant que les banques restructurées comme la BMBC soient peu
après, obligées de fermer malgré la surveillance de la
COBAC. Si les banques commerciales persistent dans la politique de distribution
des crédits qui consiste à privilégier essentiellement le
court terme au détriment des moyen et long terme, alors, il faut
absolument créer les banques spécialisées dans le
financement du développement.
En fait, le système financier actuel doit
être réorganisé et élargi afin de couvrir un certain
nombre de secteurs que les banques commerciales ne veulent assumer. Il s'agit
notamment du financement de l'agriculture, des PME et des financements longs.
L'impulsion devra alors venir de l'autorité
monétaire pour donner à la politique de crédit des
orientations plus conformes à "l'esprit de développement". La
forme à donner au système financier devrait alors s'inscrire dans
cette logique pour qu'enfin les techniques et les instruments à donner
à ce système contribuent à remodeler le canal du
crédit bancaire. Aussi, les banques commerciales classiques sont encore
réticentes à intervenir dans les secteurs précités,
puisqu'elles travaillent avec des capitaux à courts termes
déposés par leurs clients sur lesquels, elles ne veulent prendre
des risques inconsidérés. Il faut donc imaginer de nouveaux
mécanismes, notamment des mécanismes d'atténuation du
risque qui permettront aux banques commerciales de s'engager davantage. Le
développement du crédit-bail, la création de fonds de
garanties, la création des sociétés de cautions mutuelles
professionnelles et de sociétés de capital-risque, pourraient en
plus d'une banque spécialisée dans le financement des PME
permettre de résoudre le problème. Il doit également
être envisagé, la création d'autres institutions plus
spécialisées.
I.1 La création d'institutions
financières spécialisées
L'architecture actuelle du système bancaire camerounais
suite à la liquidation d'institutions spécialisées telles
que la Banque Camerounaise de Développement (BCD) en 1989,
révèle un vide de financement qui se doit d'être
comblé.
Il s'agit donc de créer des banques de
développement dont, la gestion serait plus rigoureuse et qui
utiliseraient outre l'épargne nationale, les fonds alloués par
les institutions financières internationales pour le financement du
développement. Elles devraient, en outre, à travers plusieurs
guichets, créer de la monnaie destinée exclusivement au
financement du développement. A côté de ces banques, on
peut envisager d'autres institutions telles que des crédits
d'équipement aux PME, les banques de développement
régionales au niveau provincial ou départemental, et les fonds de
garantie des investissements. La nécessité
d'accélérer le processus de la mise en place des premières
cotations au niveau de la bourse des valeurs mobilières de Douala
demeure pressante. Du reste, il est essentiel, dans les structures
financières à recréer au Cameroun, de se rappeler que la
priorité est le développement. Aussi, la Banque Centrale devra
recentrer ses objectifs vers les besoins de financement de l'économie
réelle. Car, au-delà des objectifs traditionnels de
stabilité des prix, d'équilibre extérieur, de croissance
du PIB et de réduction du chômage, le développement
économique est bien l'objectif ultime de la politique monétaire.
Il est également nécessaire que le système financier
camerounais s'intègre véritablement dans le mouvement actuel de
globalisation financière.
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