Moyen terme aristotélicien et médiation dans les organisations( Télécharger le fichier original )par Guillaume RIVET UFR Poitiers sciences Humaines et Arts - Master2 professionnel médiation dans les organisations 2008 |
UNIVERSITE DE POITIERS Sciences Humaines et Arts Moyen terme aristotélicien et médiation dans les organisations Guillaume RIVET Master2 professionnel médiation dans les organisations 2008/2009 Sous la direction de Jean-Claude BOURDIN Laurence CORNU 25 juin 2009 IntroductionLorsque l'on cherche une définition ayant un sens philosophique à « médiation » dans un dictionnaire, nous pouvons trouver celle-ci : « Articulation entre deux êtres ou deux termes au sein d'un processus dialectique ou dans un raisonnement1(*) ». C'est sur l'ambivalence de ce mot que se fonde la problématique de ce mémoire de recherche médiation dans les organisations. Il ne s'agit pas là d'une coïncidence qui tiendrait à un quiproquo, mais plutôt d'une complémentarité de sens. La tâche incombe de montrer que l'articulation entre les êtres et celle entre les termes reposent sur des similitudes qui sont dignes d'intérêt. Le caractère médian de la pratique de la médiation et du moyen terme tel qu'il a été formalisé par Aristote est donc l'épicentre de cette recherche. La problématique devient comment le moyen terme dans le syllogisme d'Aristote éclaire la pratique de la médiation dans les organisations. Il sera question aussi bien des formes que peut revêtir la médiation dans les organisations que des modalités du syllogisme. Cependant, par commodité et par économie, il ne sera vu dans ce mémoire que les figures exposées par Aristote et non celle des logiciens du Moyen-âge et des logiciens modernes. En effet, le but n'est pas d'exposer dans le détail les subtilités du syllogisme, mais de s'en servir comme d'un motif permettant de mieux signifier la pratique de la médiation dans les organisations. Le syllogisme aristotélicien étant formel, seul comptant pour lui la validité ou la non-validité du raisonnement et non son contenu, il semble se prêter assez bien à une formalisation qui puisse s'appliquer à des contenus divers. Il en est de même avec la médiation, puisque son domaine est aussi étendu que celui du conflit : « c'est en toute matière qu'un conflit peut naître et opposer des personnes physiques ou morales et c'est donc en tous domaines et entre toutes personnes qu'un accord peut apaiser ce conflit et que l'intervention d'un tiers peut permettre de faciliter cet accord2(*) ». L'art du syllogisme3(*) ne peut alors qu'éclairer la pratique de la médiation. C'est la raison pour laquelle la philosophie est tant utile à la médiation dans les organisations, puisque si la pratique donne la connaissance par excellence des choses singulières grâce aux sensations, seule la science de la philosophie permet d'acquérir la connaissance en vue de laquelle chaque chose doit être faite : « les gens d'expérience savent le fait, mais ignorent le pourquoi, tandis que les autres acquièrent la connaissance du pourquoi, c'est-à-dire de la cause. Pour cette raison aussi, nous jugeons que ceux qui dirigent ont, en chaque domaine, plus de valeur et plus de savoir que ceux qui exécutent et qu'ils sont plus sages parce qu'ils savent les causes de ce qu'ils produisent ; quant aux <exécutants>, ils produisent comme certains êtres inanimés aussi produisent, sans savoir ce qu'ils produisent, de même que le feu brûle »4(*). Autrement dit, l'aspect théorique donne les règles qui permettent l'enseignement de l'art de la médiation5(*). En effet, l'expérience est la connaissance des singuliers, tandis que l'art est celle des universels et des causes. Dès lors, le moyen terme du syllogisme peut être conçu comme appartenant à l'universel, la médiation dans les organisations étant la connaissance des singuliers. Cette analogie admise, il faut préciser que l'art doit diriger l'action, pour la raison que « ceux qui dirigent ont, en chaque domaine, plus de valeur et plus de savoir que ceux qui exécutent et qu'ils sont plus sages parce qu'ils savent les causes de ce qu'ils produisent »6(*). Par contre, du point de vue de l'action, l'art n'est pas supérieur à l'expérience puisque « les gens d'expérience réussissent mieux que ceux qui possèdent une définition sans l'expérience7(*) ». C'est sans doute pourquoi tous les médiateurs ne sont pas philosophes. Nous retrouvons cette problématique quand les chefs d'entreprises regrettent que le Master de médiation dans les organisations ne s'intéresse pas davantage aux entreprises. Les entreprises estiment pouvoir accueillir des étudiants dans le cadre des stages si la formation universitaire fait la démarche d'amener à repenser collectivement l'institution de l'entreprise. La relation entre l'art et l'action reste donc pleinement d'actualité. Ce point sera développé dans la dernière partie, mais du point de vu de la vertu. Il est important d'insister sur le fait que, tout comme la médiation se différencie de l'arbitrage et de l'expertise, le syllogisme se distingue à la division. C'est d'ailleurs par là que commencera le raisonnement, afin de dégager le terrain de la recherche. Ce travail accompli, nous mettrons à jour la structure commune entre le syllogisme et la médiation. En effet, de la même manière que le médiateur fait le lien entre les médiés et disparaît lors de la résolution du conflit, le moyen terme dans le syllogisme est présent dans les prémisses et disparaît dans la conclusion. Nous verrons ensuite que le syllogisme et la médiation reposent sur des conditions sans lesquelles ils perdraient leurs validités ainsi que leurs identités. Il restera à mettre en exergue le caractère intrinsèquement vertueux du moyen terme et du médiateur avant de pouvoir conclure cette étude. Nous emploierons parfois le néologisme médié pour désigner les parties en présence dans la médiation. * 1 Le Petit Larousse illustré 2007, p. 676. * 2 NOUGEIN H.J., REINHARD Y., ANCEL P., RIVIER M. C., BOYER A., GENIN P., Guide pratique de l'arbitrage et de la médiation commerciale, Paris, Éditions du Jurio-Classeur, 2004, p. 143. * 3 Voir Partie II, a, p. 14. * 4 ARISTOTE, Métaphysique, traduction DUMINIL Marie-Paule et JAULIN Annick Paris, Éditions GF Flammarion, 2008, p. 73 (Métaphysique, Livre A, 981b). * 5 Ibid., p. 72 (Métaphysique, Livre A, 981 a). * 6 Ibid., p. 73 (Métaphysique, Livre A, 981 b). * 7 Ibid., p. 73 (Métaphysique, Livre A, 981 b). |
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