INTRODUCTION
Introduction
Selon Harlet et Forno (1992), les mauvaises herbes sont des
plantes nuisibles préjudiciables à la production agricole, qui
poussent à un endroit où elles ne sont pas
désirées. Lorsque les plantes sont introduites dans un nouveau
milieu, leurs ennemis naturels sont généralement laissés
dans le milieu d'origine, et quand les conditions physiques et biotiques sont
favorables dans le nouveau milieu, ces espèces introduites, se
développent exagérément et deviennent indésirables.
Par ailleurs, il peut arriver que les activités humaines altèrent
l'environnement au point de compromettre l'équilibre assuré par
les ennemis naturels. Dans ce cas une population indigène de plantes
préalablement inoffensives peut devenir agressive et constituer un
danger. C'est le cas de Imperata cylindrica, une herbe indigène
transplantée et entretenue par les paysans béninois pour des
raisons de construction (Ahanchédé, 1988), qui est devenue
redoutable à cause de son expansion favorisée par
l'appauvrissement des terres. I. cylindrica est actuellement devenue
pantropicale dans sa distribution (Evans, 1987 Holm et al, 1977).
C'est une plante, avec un double potentiel de régénération
grâce à ses rhizomes abondants, et à ses graines facilement
dispersées par le vent. Les rhizomes prolifèrent très
rapidement et peuvent produire 4,5 millions de repousses par hectare (Soerjani,
1970) pouvant atteindre 40 tonnes de poids frais à l'hectare (Terry
et al., 1997). Un seul fragment de rhizomes peut
régénérer 350 pousses en 6 semaines (Eussen, 1980) et
atteindre 2,73 m de longueur en 109 jours (Wilcut et al. ,1983).
I. cylindrica affecte plusieurs cultures dont le maïs, le manioc,
l'igname, le niébé, l'arachide et le coton en Afrique occidentale
(Chikoye et al., 1999 ; 2000 ; 2001 ; Ayeni et al., 2004). A
cause de la compétition pour l'eau, les nutriments, et la lumière
(Atchade, 2004), et aussi à cause de ses rhizomes pointus qui
endommagent les tubercules, les pertes de rendement dues à l'infestation
de I. cylindrica sont très sévères. Elles peuvent
atteindre 80% pour le manioc et 50% pour le maïs (Chikoye et al.,
2001) et peuvent contraindre les paysans à l'abandon des terres, ce qui
contribue à l'exode rurale et au désespoir. (Ayeni et
al., 2004 ; Avocanh, 2005).
Face à la menace de I. cylindrica, les paysans
à faibles revenus ont recourt à l'usage de méthodes de
lutte mécanique (sarclage et arrachage) qui ne sont pas efficaces
bien qu'elles nécessitent beaucoup de main d'oeuvre et de temps de
travail (Brook, 1989), ou
au brûlis qui a montré ses limites, car la
régénérescence se produit après seulement 72 heures
(Avocanh, 2005). L'une des méthodes les plus efficaces est l'utilisation
des plantes de couverture (par exemple Mucuna sp.) ou les essences
forestières qui réduisent sensiblement l'infestation en diminuant
la quantité de lumière indispensable au développement de
l'adventice (Atchade, 2004). En effet, l'augmentation de la pression
démographique entraîne la destruction des forêts au profit
des terres cultivables et les terrains une fois mis à nus, deviennent
susceptibles à l'invasion de I. cylindrica dont le
développement est normalement handicapé par le couvert
végétal fourni par les essences forestières ou les plantes
de couverture.
Malheureusement, l'espoir suscité par l'utilisation des
plantes de couverture s'estompe de jour en jour car dans les régions
à fortes densités de populations les petits producteurs
n'acceptent pas de consacrer leurs maigres ressources (terre et main d'oeuvre)
pour une culture sans intérêt immédiat (sans valeurs
alimentaire ni commerciale). Par ailleurs, selon les paysans, les plantes de
couverture mobilisent les terres, ce qui les empêche de produire les
cultures vivrières durant la petite saison (Vissoh et al.,
2004).
Au vue des facteurs qui limitent l'adoption des
recommandations de la recherche, il est alors impérieux de
réfléchir aux solutions alternatives pour recréer
l'équilibre biologique où I. cylindrica serait
contrôlé par d'autres composants de l'environnement. Dans les
nombreux efforts de recherche de solutions, on peut citer l'utilisation des
champignons agents de luttes biologiques contre les mauvaises herbes qui est
l'une des plus récentes approches de lutte (Evans, et al.,
2001). Aussi, Beed et al, (2004) ont démontré
l'efficacité des bioherbicides exotiques et indigènes contre les
biotypes africains de Imperata cylindrica. Or, à cause du
fauchage, le brûlis, et la déforestation pour la production
agricole, I. cylindrica colonise de grandes surfaces et ses ennemis
naturels et pathogènes présents dans le milieu ne seraient pas de
ce fait suffisants pour le contenir et ont besoin donc d'être introduits
en quantité suffisante (approche mycoherbicidique). Au Bénin, le
constat de lésions foliaires sur les plantes de I. cylindrica
est une évidence à l'existence de pathogènes
indigènes capables de contrôler les infestations. Certes, la
partie la plus redoutable de la plante est constituée par les rhizomes,
cependant les pathogènes foliaires peuvent occasionner une
déplétion des
hydrates de carbones qui constituent les réserves
fondamentales des rhizomes, en drainant et en suçant les ressources
nutritives de la plantes. Elles peuvent aussi produire des toxines
systémiques qui pourront tuer l'herbe et réduire de ce fait le
potentiel d'infestation. Puisque les paysans souhaitent une application de
mycoherbicide, un produit à base de champignon qui tue les herbes, dans
le but d'une approche de lutte durable (Ayeni et al., 2004), cette
étude se propose de contribuer à la lutte intégrée
contre I. cylindrica par une approche de lutte biologique basée
sur l'utilisation de champignons pathogènes indigènes. Pour
atteindre cet objectif, la démarche suivante a été
adoptée :
· Faire l'inventaire des pathogènes de I.
cylindrica au Bénin ;
· Caractériser morphologiquement les isolats
inventoriés et confirmer leur pathogénicité;
· Sélectionner les souches et espèces de
champignons plus virulents et donc capables de lutter contre I.
cylindrica.
|