A. LE CLIVAGE AFRIQUE NOIRE- AFRIQUE BLANCHE.
Le Maghreb tient en Afrique une place particulière qui
lui a valu le surnom d'Afrique blanche. Ce surnom fait référence
à la supposée ambigüité de sa position par rapport au
projet panafricain mais aussi à son métissage car si le Maghreb
est indéniablement africain par les lois géographiques, il
entretient des liens millénaires avec la péninsule arabique.
Il est clair que le Maghreb a accordé moins
d'importance au panafricanisme que les pays d'Afrique subsaharienne, en
témoigne la ligne de conduite panarabe des pays du Maghreb à la
première conférence panafricaine organisée sur le sol
africain au Ghana où les dirigeants maghrébins et Nasser le
premier préférèrent miser sur l'unionisme arabe. Cependant
l'unionisme ne les empêcha pas de se positionner favorablement à
une union africaine et cet engagement s'accentua avec l'échec d'un
Maghreb panarabe. En 1963, les pays du Maghreb participèrent à la
conférence d'Addis-Abeba qui donna naissance à l'OUA, n'est-ce
pas Kadhafi qui lança l'appel à la rénovation de l'OUA
à Syrte prouvant les pays maghrébins pouvaient s'impliquer
politiquement dans le projet panafricain, le président Bourguiba ne
déclara-t-il pas que la Tunisie était une terre de pointe et de
liaison, ouverte au monde et profondément enracinée corps et
âme dans le continent africain ?
Les raisons politiques ne sont pas les seuls à avoir
été évoquées. L'argument identitaire est aussi
utilisé. En effet on peut dire que l'identité des pays du Maghreb
a été très tôt imprégnée par l'Islam
et par la civilisation arabe. Du VIIème au XIIème siècle
le Maghreb connut une islamisation totale avec l'invasion
des Almohades ; cette invasion et l'islamisation qui
s'ensuivit scella les liens qui unissent identité nord-africaine et
Islam : la culture et l'identité nord-africaine sont liés
à l'Islam. Cet aspect permet d'expliquer la préférence
première de ces Etats pour le panarabisme dont ils se sont sentis
toujours plus proches. Cependant au regard de l'histoire l'Afrique
subsaharienne et le Maghreb partage une histoire commune et un patrimoine
commun : une histoire à travers l'Egypte antique, à travers la
Nubie, à travers les rapports entre nos anciens empires et les
cités maghrébines ; par le patrimoine car l'islamisation d'une
partie non négligeables du continent a tissé des liens
indéfectibles qui persistent mais surtout par la civilisation
berbère qui est un pont à travers le Sahara.
Les divergences d'intérêt, de culture ne
suffisent pas à expliquer la persistance du clivage qui demeure entre
l'Afrique du Nord et l'Afrique subsaharienne car le panafricanisme recherche
justement à dépasser ces limites de race, d'ethnie, de tribu et
de religion. Il appartient aux élites et aux masses de rechercher la
convergence plutôt que de laisser les différences retarder
l'évolution du continent vers une unité profitable à
tous.
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