2.2.3.2- Matériel de plantation
La disponibilité semencière existant dans
l'agriculture actuelle est souvent considérée comme un frein pour
la production de l'igname tandis que la valeur monétaire
élevée des semences est donnée comme un facteur pesant
lourdement sur le coût de production (Dumont, 1998). En effet, l'igname
se multiplie traditionnellement par voie végétative et exige de
grandes quantités de tubercules pour assurer la reproduction (Degras,
1986). Il faut environ 10.000 semenceaux de 150 à 200g ou 60.000
mini-semenceaux de 25g pour planter un hectare de tubercules consommables
(Orkwor et Adeniji, 1998). Dumont (1998), fait remarquer que dans l'ensemble,
l'agriculture arrive à assurer ses besoins en semences mais qu'il est
aussi certain que les exploitations peuvent difficilement changer leur
échelle de production.
2.2.3.3- La terre
L'igname est très exigeante en fertilité du
sol, surtout les variétés précoces (Bonneval, 1999). Elle
est généralement placée en tête d'assolement dans
des sols très riches en humus (Gbèdolo, 1991 ; Knoth, 1993 ;
Adanguidi, 2001). De nos jours, les terres fertiles deviennent de plus en plus
rares, obligeant à des migrations temporaires vers les zones à
faible densité de population, elles aussi en constante diminution
(Adanguidi, 2001). Du fait du système de culture qui ne compense pas le
départ des nutriments, la terre est abandonnée pour de nouveaux
défrichements après 2 ou 3 ans (Biaou et Tchégnon, 1995).
Cela conduit à la destruction des terres et à une agriculture non
respectueuse de l'environnement, donc non durable.
2.2.4- Relation avec le coton
La relation entre l'igname et le coton est
différemment interprétée ou présentée par
les auteurs. Selon Dumont (1995), la production cotonnière n'aurait pas
un effet négatif sur celle de l'igname ; bien au contraire, la
stratégie de production cotonnière des exploitations passerait
par l'aménagement d'un stock vivrier faisant appel aux ignames. Selon
Adanguidi (2001),
12 l'implication de cette thèse serait que le
développement de la culture cotonnière entraînerait donc
celui de l'igname. C'est cette thèse que défend Sidi (1987),
lorsqu'il stipule qu'il existe une complémentarité entre le coton
et les cultures vivrières.
Adégbidi (2003) pense que du point de vue de
l'allocation de la main-d'oeuvre, les deux cultures seraient concurrentes. En
effet, le coton exige la mobilisation d'une main-d'oeuvre aussi importante que
la culture de l'igname. Cette situation conduit à une régression
des superficies emblavées pour l'igname alors que celles du coton
augmentent sans cesse. Ces résultats viennent corroborer ceux de Tossou
(1985), quand il a indiqué l'existence d'un goulot d'étranglement
entre les deux cultures du point de vue allocation de la main-d'oeuvre.
Cette concurrence entre le coton et les autres cultures a
été signalée dans d'autres pays. Madi (2000), dans une
étude menée au Cameroun a démontré que les
producteurs mobilisaient les ressources tout d'abord pour la satisfaction des
besoins minima vitaux d'autoconsommation et ensuite pour la production
cotonnière. Schwartz (1985), au Togo a constaté qu'il
était pratiquement impossible pour le paysan de combiner dans la
même année, le cycle de l'igname avec celui du coton.
Cette concurrence entre les deux cultures qui se partagent
des terres de plus en plus pauvres contraint les populations à la
migration. C'est ce qui explique la création de nouvelles zones de
colonisation à Savè et Ouessè où on note
actuellement une forte production d'igname dans le département des
Collines.
Ce débat sur la concurrence ou la
complémentarité entre le coton et les cultures vivrières
est bien résumé par Ton (2001). Selon cet auteur tout au long de
la saison, les paysans doivent effectuer des arbitrages entre
différentes cultures à propos du temps, de la main-d'oeuvre et
des biens d'équipements qui pousse à supposer l'existence d'une
concurrence entre les deux types de cultures. Il mentionne que, malgré
la concurrence, il semblerait que les cultures soient complémentaires
à l'examen des volumes de production car l'augmentation de la production
de coton n'a pas conduit à une réduction des superficies
cultivées en vivriers. Ses idées sont renchéries par
LARES-APEIF (1996) qui a montré que les arrières effets des
intrants utilisés pour la culture du coton permettent aujourd'hui
d'accroître de plus de 30% les rendements de certaines cultures
vivrières comme le maïs (cas du développement spectaculaire
que le maïs a connu dans le Borgou au cours des 15 dernières
années). Cet auteur présente aussi le coton comme un handicape au
développement des cultures vivrières. Pour lui, bien que, les
enquêtes ne confirment ou n'infirment aucune des deux thèses, on
peut remarquer globalement que plus de 50% des gros producteurs de coton
enquêtés s'adressent au marché à un moment ou
à l'autre de l'année pour s'approvisionner en produits vivriers
(leur propre production se révélant insuffisante).
|