6.4- ESTIMATION DES PARAMETRES D'EFFICACITE
Il s'agit de quelques paramètres qui rendent compte de
l'effort de travail des producteurs. Ces paramètres sont : la marge
nette de l'exploitant et de sa famille, le revenu agricole par actif agricole
familial, le revenu agricole par journée de travail et le revenu
agricole par membre de
66 ménage. Ces paramètres permettront de voir
si les efforts consentis par les producteurs sont compensés par les
gains obtenus
Pour y parvenir, les autres coûts non encore pris en
compte ont été d'abord estimés avant de passer aux
paramètres en question.
6.4.1- Estimation des autres coûts liés
à la production
Il s'agit des amortissements, des coûts de transport, des
intérêts sur crédit et du salaire des ouvriers
permanents.
· Coûts fixes
Dans la production agricole, les exploitants utilisent
certains outils de travail durant plusieurs cycles de production. Au nombre de
ces outils, figurent ici : la hache, la pioche et le fer à limer. Ces
différents matériels doivent être amortis au cours de
chaque année de production. Un amortissement linéaire a
été adopté conformément à la durée
d'utilisation de chaque équipement.
Tableau 26 : Présentation des
coûts fixes moyens
Systèmes de culture
|
A
|
B
|
C
|
D
|
Ensemble
|
Coûts fixes moyens annuels
|
1676,042
|
2036,8
|
1675
|
849,667
|
1768,113
|
Coûts fixes moyens / ha
|
148,024
|
170,542
|
106,591
|
134,983
|
151,943
|
|
Source : Enquêtes, 2004
De ce tableau 26, il faut retenir que les provisions pour
amortissements sont peu différentes suivant les systèmes de
cultures. Ces provisions sont si faibles qu'on pourrait même les
négliger.
· Salaires de la main-d'oeuvre permanente et
intérêt sur crédit
Ces coûts ont été estimés de la
même manière que les coûts fixes ou encore les coûts
des outils utilisables durant une seule année de production.
· Charges de transport
Les charges de transport correspondent au coût de
déplacement des produits du village au marché de Glazoué.
Bien que les paysans ne vendent pas uniquement sur ce seul marché, il
s'agit du marché le plus éloigné du village, et en plus,
ce sont les prix des produits sur ce marché qui ont été
utilisés pour déterminer les marges de production. Les prix
unitaires sont calculés à partir du rapport entre le prix du
transport du sac de chaque produit et une estimation de la capacité du
sac. Le tableau 27 présente les prix unitaires de transport des
différents produits agricoles.
Tableau 27 : Coûts de transport
unitaire des produits agricoles en francs CFA par Kg
67
Produits
|
Prix unitaires
|
Produits
|
Prix unitaires
|
Igname
|
10,000
|
Niébé
|
6,250
|
Maïs
|
7,142
|
Soja
|
6,250
|
Riz
|
8,333
|
Voandzou
|
7,810
|
Arachide
|
6,250
|
Sésame
|
8,333
|
|
Source : Enquêtes, 2004
6.4.2- La marge nette
Il s'agit du revenu agricole de l'exploitant après une
année de production. C'est le revenu du ménage après
déduction de toutes les charges. C'est le fruit du travail familial en
une année. Il permet d'apprécier l'apport de chaque
système de culture à la formation du revenu du ménage. Les
tableaux 28 et 29 présentent respectivement les marges nettes par
système de cultures et par spéculation.
Tableau 28 : Marge nette par
système de cultures en 2003
Marge nette
|
A
|
B
|
C
|
D
|
Ensemble
|
Marge totale
|
1.325.193,00
|
1.118.972,30
|
630.566,36
|
356.224,33
|
1.044.763,80
|
Marge par Ha
|
88.498,26
|
87.459,12
|
48.286,37
|
42.347,10
|
78.343,21
|
|
Source : Enquêtes, 2004
Dans l'ensemble le producteur et sa famille pourraient gagner
en moyenne 78.345 francs CFA sur un hectare de son exploitation par la
production végétale (tableau 28). Toutefois, ce revenu net par
hectare varie beaucoup d'un système de culture à un autre. En
effet, les revenus agricoles nets à l'hectare des systèmes A et B
font plus du double de ceux des systèmes C et D. Cette importance de ces
marges est sans doute à imputer à la production de l'igname dans
ces deux premières catégories, à l'opposé des deux
autres catégories qui n'en produisent pas. Le tableau 30 montre les
marges nettes par spéculation. On peut retenir de ce tableau :
- Les spéculations qui contribuent à placer la
catégorie A en tête par rapport à la marge nette
sont d'abord l'igname et le maïs, ensuite l'arachide et le
soja et enfin le sésame.
- Pour la catégorie B, l'obtention d'une marge nette
élevée est le fait d'abord de l'igname et de
l'arachide, ensuite du maïs et du soja et enfin du riz.
Cette catégorie a une marge nette très
proche de celle de la catégorie A, bien que les paysans
présents ne cultivent pas le coton. - Les catégories C et D
qui ne produisent pas l'igname tirent une grande partie de leur marge
nette de la culture du voandzou et du maïs. Ces deux
catégories ont des marges nettes non
négligeables pour le niébé (elles ont les
meilleures marges nettes/ha pour cette spéculation).
La catégorie C présente la marge nette par
arachide la plus élevée de toutes les catégories.
68 Cela signifie donc que cette catégorie s'investit
beaucoup dans la production de cette spéculation.
- D'une manière générale, les
spéculations qui ont les marges/ha les plus élevés sont
dans l'ordre décroissant l'igname, le riz, le voandzou, l'arachide, le
soja et le maïs. Mais, Le riz et le voandzou ne sont pas très
représentatifs car cultivés par peu de producteurs. Ce qui permet
de retenir l'igname, l'arachide, le soja et le maïs. Ces quatre cultures
font aujourd'hui parti des principales cultures de la région auxquelles
les producteurs accordent assez d'importance.
- Le coton et le niébé ont les marges les plus
faibles et de ce fait contribuent peu au revenu.
Il est à retenir que l'igname est la
spéculation la plus rentable de toutes les spéculations et celle
qui contribue le plus au revenu agricole du ménage. En effet, l'igname
contribue à plus de 37% de la marge nette totale. Sa participation au
revenu dépasse de loin celle des autres spéculations. La marge
nette par hectare de l'igname équivaut respectivement à 12,79 ;
11,17 ; 5,20 ; 4,95 ; 4,50 ; fois celle du coton, du niébé, du
maïs, du soja et de l'arachide qui sont les autres cultures principales de
l'exploitation agricole. L'igname est la spéculation la plus rentable de
l'exploitation agricole. L'hypothèse H2 de la recherche se trouve donc
confirmée et par conséquent, l'igname est la spéculation
la plus rentable des systèmes de production.
Des résultats similaires sont obtenus par des
études antérieures notamment celles effectuées par l'INRAB
(1999) et Adégbidi (2003). En effet, dans une étude
économique de la production de l'igname, menée en 1999, l'INRAB a
montré que l'igname peut faire dégager des profits
théoriques non négligeables à l'hectare. Suivant les
localités, l'étude a révélé que le profit
peut varier entre 350.500 et 542.500 francs CFA. L'étude
réalisée par Adégbidi (2003), dans le village de Bagou
révèle que l'igname est une culture très rentable dont la
marge dépasse de loin celle du coton auquel les paysans attribuent plus
de la moitié de la surface totale emblavée.
Selon la première étude, la
réalité est tout autre car les superficies emblavées par
exploitation sont petites et les rendements sont faibles (7 à 13 tonnes)
par rapport aux potentiels (20 à 30 tonnes). Ainsi en dépit de
ses performances sur le plan économique, la production de l'igname est
tributaire d'un certain nombre de contraintes majeures, notamment le manque ou
l'insuffisance de terres fertiles, l'insuffisance de semenceaux de bonnes
qualités et l'action néfaste des nuisibles (INRAB, 2001).
Quant à la seconde étude, elle
révèle qu'en se basant sur les prix de marché pour
évaluer les marges de production, il n'est pas certain qu'on puise
être en mesure de comprendre la logique qui guide le paysan dans ses
choix et ses combinaisons (Adégbidi, 2003). Cette étude aboutit
aussi à la conclusion suivant laquelle, il existe des contraintes qui
limitent la production de l'igname. Au nombre de celles-ci, l'auteur a
souligné la nécessité pour le paysan d'avoir
accès
69 à des friches ou des jachères de longues
durées pour pouvoir installer sa plantation d'igname ou encore,
l'accès à la main-d'oeuvre pendant certaines périodes
critiques.
La supériorité de la rentabilité de
l'igname peut t-il amener à affirmer que les systèmes de
production à base d'igname sont économiquement les plus efficaces
?
Les systèmes de cultures A ( igname et coton) et B
(igname sans coton) présentent en effet, les marges nettes agricoles
totales les plus élevées. Les marges nettes de ces deux
systèmes de cultures font respectivement 2,10 et 3,72 puis 1,77 et 3,14
fois celles des systèmes de cultures C et D. Ce même constat est
fait au niveau de la marge nette par hectare. En effet, les marges nettes par
hectare des systèmes de cultures A et B font ici respectivement 1,83 et
1,81 puis 2,04 et 2,06 fois les marges nettes des systèmes de cultures C
et D. Il est donc clair que les systèmes de cultures à base
d'igname sont ceux qui obtiennent les marges de production les plus
élevées.
Tableau 29 : Marge Nette (MN) par
spéculation
A B C D Ensemble
MN totale
|
MN / Ha
|
MN totale
|
MN / Ha
|
MN totale
|
MN / Ha
|
MN totale
|
MN / Ha
|
MN totale
|
MN / Ha
|
68.335,46
|
32625,38
|
0,00
|
0,00
|
39.502,04
|
14281,97
|
0,00
|
0,00
|
59.560,07
|
27.042,60
|
513.351,17
|
229.675,72
|
431.582,91
|
349.983,19
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
463.492,48
|
345.960,72
|
167.013,79
|
73.769,40
|
169.286,67
|
70.805,47
|
77.557,22
|
46.216,54
|
25.729,29
|
68.643,20
|
150.125,64
|
69.837,19
|
127.075,61
|
52.777,82
|
82.098,39
|
40.418,18
|
49.321,05
|
36.500,57
|
38.375,39
|
29.569,97
|
89.562,38
|
43.138,49
|
305.550,34
|
80.8.35,34
|
183.331,51
|
59.398,40
|
136.487,73
|
50.517,88
|
154.742,46
|
84.194,68
|
211.343,77
|
66.564,61
|
170.418,83
|
82.911,11
|
211.117,76
|
79.060,28
|
270.992,04
|
82.889,15
|
57.443,44
|
42.128,84
|
194.276,20
|
76.953,61
|
79.226,96
|
29.296,04
|
53.830,13
|
30.945,59
|
87.615,69
|
37.810,80
|
60.147,60
|
27.432,84
|
67.547,72
|
30.958,00
|
0,00
|
0,00
|
52.325,67
|
95.446,78
|
165.218,16
|
140.225,58
|
136.447,07
|
108.800,87
|
103.976,74
|
112.598,73
|
92503,69
|
138.730,00
|
120.195,36
|
207.212,71
|
51.517,76
|
129.544,41
|
0,00
|
0,00
|
107.574,31
|
183.619,69
|
|
Cultures
Coton Igname Soja Sésame Maïs Arachide
Niébé Voandzou Riz
Source : Enquêtes, 2004
6.4.3- Revenu agricole par journée de
travail
Ce revenu est obtenu en faisant le rapport entre la marge
nette à l'hectare et le nombre de journées de travail
nécessaire pour réaliser cette marge. Le nombre de
journées de travail est la somme de contraintes exigées par les
différentes activités culturales ou par système de
cultures. Les tableaux 30 et 31 indiquent respectivement les contraintes
techniques de la production d'un hectare de chaque spéculation et les
revenus pas spéculation et par système de cultures.
Il faut retenir du tableau 30 que l'igname est la
spéculation qui exige le plus de travail. Elle est suivie par le coton
et le riz. Par rapport à la contrainte de main-d'oeuvre, ces trois
cultures pourraient alors êtres concurrentes dans l'exploitation
agricole. Etant donné le manque de terre pour cultiver le riz, ce serait
donc l'igname et le coton qui seraient concurrentes si nous prenons en compte
la contrainte de travail.
Tableau 30 : Contraintes techniques
liées à la production d'un hectare de cultures
Spéculations
|
Main-d'oeuvre/ha
|
Spéculations
|
Main-d'oeuvre/ha
|
Coton
|
112
|
Arachide
|
62
|
Igname
|
208
|
Niébé
|
53
|
Soja
|
68
|
Voandzou
|
70
|
Sésame
|
53
|
Riz
|
100
|
Maïs
|
62
|
-
|
-
|
|
Source : Enquêtes, 2004
L'examen du tableau 32 montre peu de différence entre
le revenu agricole par journée de travail. Les cultures qui
présentent les revenus les plus élevés sont l'igname, le
riz, et le voandzou. Le coton, le niébé et le sésame ont
un revenu par journée de travail inférieur à 1000 francs
CFA.
Tableau 31 : Revenus agricoles par
journées de travail
Cultures
|
A
|
B
|
C
|
D
|
Ensemble
|
Coton
|
291,30
|
0,00
|
127,52
|
0,00
|
241,45
|
Igname
|
1633,06
|
1682,45
|
0,00
|
0,00
|
1663,27
|
Soja
|
1084,84
|
1041,26
|
679,65
|
1009,46
|
1027,02
|
Sésame
|
995,80
|
762,60
|
688,69
|
557,92
|
813,93
|
Maïs
|
1303,79
|
957,93
|
814,88
|
1357,85
|
1073,62
|
Arachide
|
1295,48
|
1135,32
|
1295,14
|
658,26
|
1202,40
|
Niébé
|
552,75
|
583,88
|
713,41
|
517,60
|
584,11
|
Voandzou
|
0,00
|
1363,52
|
2003,22
|
1554,30
|
1608,55
|
|
Riz 1387,30 2072,15 1295,44 0,00 1836,20
Source : Enquêtes, 2004
En considérant que le revenu par journée de
travail est celui qui exprime le mieux les efforts de production de
l'exploitation, on peut constater qu'en dehors du coton et du
niébé qui ont des revenus trop bas, les autres sont acceptables
dans l'ensemble. Les résultats montrent aussi que, par rapport à
ce paramètre, l'igname ne présente plus une nette
supériorité comparativement aux autres cultures. Le paysan
pourrait alors gagner le même revenu en emblavant une grande superficie
des autres cultures si la terre ne constitue pas une contrainte pour lui.
|
|