Chapitre 4 :
Profil épidémiologique des
envenimations
scorpioniques : Analyse des dossiers
d'hospitalisation de l'hôpital provincial de
Beni Mellal
Résultats
Dans ce chapitre, nous allons présenter une
étude de 178 dossiers d'hospitalisation des patients envenimés
par le scorpion. Ces dossiers sont répartis au niveau du service de
réanimation de l'hôpital provincial de Beni Mellal entre 2005 et
2007. A souligner qu'il n'y a pas de dossiers d'hospitalisation avant
l'année 2005 à ce service.
I- Etude descriptive des caractères
épidémiologiques
1-Description générale de la population
étudiée
Le tableau I représente les caractéristiques
épidémiologiques, cliniques et évolutives des patients
hospitalisés suite à une envenimation scorpionique et qui ont
été admis au niveau du service de réanimation de
l'hôpital provincial de Beni Mellal.
Tableau I: Caractéristiques des patients
envenimés
Les caractéristiques Variables Moyenne ou
effectif
(%)
Age moyen
% enfants 15 ans
Sexe
Masculin Féminin Sexe ratio (M/F)
Période
] 6h-18h] ]18h-6h]
Temps post piqûre moyen Milieu
Rural
Urbain
13,36 #177; 13,50* ans
123 (73%)
107 (60%)
71 (40%) 1,5
52 (34%) 98 (66%) 3,35 #177; 3,65* heures
78 (92%)
7 (8%)
|
Classes à l'admission Classe II
Classe III
|
130 (73%)
47 (27%)
|
Durée d'hospitalisation moyenne
Evolution
Guérison
Décès
12,31 #177; 11,75* heures
136 (80%)
33 (20%)
* Ecart type A la lumière de ces résultats, on
constate que l'âge moyen des patients hospitalisés est de 13,36
#177; 13,50 ans avec une proportion de 73% des cas enregistrée chez les
enfants d'âge inférieur ou égal à 15 ans. Par
ailleurs, les hommes sont plus touchés que les femmes avec un
sexe ratio de 1,5. La plupart des envenimations surviennent
entre 18h et 6h du matin (66%). De plus, 92% des cas sont enregistrés
dans les zones rurales. En ce qui concerne les caractéristiques
cliniques, 130 cas d'envenimation sont arrivés á l'hôpital
avec des signes généraux et 47 cas avec des signes de
détresse vitale. Pour l'évolution, elle est favorable pour 136
cas mais malheureusement fatale pour 33 cas.
2- Distribution des hospitalisations selon les
caractères étudiés
2-1- Distribution des hospitalisations selon
l'année
Le tableau ci-après montre la répartition des
patients hospitalisés selon les années.
Tableau II : Répartition des
hospitalisés selon l'année
Année
|
Effectif
|
Pourcentage
|
2005
|
63
|
35,4
|
2006
|
59
|
33,1
|
2007
|
56
|
31,5
|
Total
|
178
|
100
|
De 2005 á 2007,178 cas d'hospitalisation ont
été répertoriés au niveau du service de
réanimation de l'hôpital provincial de Beni Mellal. Ce nombre a
suivi une courbe décroissante, passant de 63 cas en 2005 à 56 cas
en 2007. Cette diminution peut être dûe à la rationalisation
de la prise en charge, grâce à l'existence d'un arbre de
décision clair et facile à appliquer.
2-2- Distribution des hospitalisations selon les
mois
La distribution des hospitalisations selon les mois montre une
augmentation importante des patients hospitalisés en été
avec un pic élevé en juillet (91cas), ce qui représente
presque la moitié (51%) des hospitalisations.
100
91
45
6
0 1 1 1
n= 1 7 8
18
9
6
0 0
60
90
80
70
50
40
30
20
10
0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 Mois
Figure 1 : Répartition des
hospitalisations selon les mois
2-3- Distribution des envenimations selon l'heure de la
journée
Les envenimations scorpioniques surviennent à tout moment
de la journée avec une dominance le soir et plus fréquemment
entre 18 heures et 6 heures du matin (soit 66%). Cependant 34% des
envenimations sont survenues entre 6 heures et 18 heures.
Pour repérer la période la plus sensible, nous
avons subdivisé le jour en 8 périodes comme le montre la figure
2.
]6-9] ]9-12] ]12-15] ]15-18] ]18-21]
]21-24] ]24-3] ]3-6] Période (heure)
45
42
40
34%
]6h-18h]
35
34
66%
n=51
]18h-6h]
30
n=98
25
20
17
15
15
12
12
10
10
7
5
0
n=149
Figure 2 : Répartition des envenimations
selon la période
Il ressort de cette figure que le nombre le plus
élevé des envenimations est enregistré pendant la
période entre 1 8 heures et 24 heures avec 51% des cas. On note aussi
19,4% des cas entre 6 heures et 12 heures puis 14,8% des cas entre 24 heures et
6 heures et enfin 14,8% des cas entre 12 heures et 18 heures.
2-4- Distribution des hospitalisations selon l'origine et
le sexe
Les résultats de la répartition des
hospitalisés selon leur origine et leur sexe sont résumés
dans le tableau suivant :
Tableau III : Répartition des
hospitalisés selon leur origine et leur sexe
|
n
|
%
|
Total
|
x2
|
Origine Urbain Rural
|
7 78
|
8 92
|
85
|
59,3 (p<0,001)
|
Sexe
Masculin Féminin
|
107
71
|
60 40
|
178
|
7,28 (p=0 ,007)
|
Sur 178 cas, l'origine des patients n'est signalée que
dans 85 cas. Les résultats du tableau III montrent que les patients
hospitalisés d'origine rurale sont plus nombreux que ceux d'origine
urbaine. En effet, les premiers représentent 92% tandis que les seconds
ne représentent que 8% (x2=59,3 ; p<0,001). Cette
différence peut être expliquée par la forte
répartition des éspèces scorpioniques dans le milieu
rural.
En outre, les hommes sont plus touchés (60%) par
rapport aux femmes (40%). Ainsi, le calcul de x2 montre une
différence très significative entre les deux sexes
(x2= 7,28 et p= 0,007). Cela peut expliquer une
surreprésentation des hommes dans les séries
hospitalières.
2-5- Distribution des hospitalisations selon
l'âge
La figure 3 donne la répartition des patients
hospitalisés en fonction des classes d'âge.
6
14
51
28
Figure 3: Répartition des
hospitalisés selon les classes d'âge
D'après cette répartition, l'âge moyen des
patients hospitalisés est de 13,36 #177; 13,50 ans. Par contre la classe
d'âge la plus touchée est celle de 2-5 ans avec 30,2% des cas.
De plus, la comparaison entre les deux tranches d'âge
(< 15 ans ou > 15 ans) permet de montrer que la majorité des
hospitalisés sont des enfants d'âge inférieur ou
égal à 15 ans avec 73% des cas. Alors que les adultes ne sont
touchés que dans 27% des cas.
2-6- Distribution des hospitalisations selon le temps
post piqûre
Les résultats de la distribution des hospitalisés
selon le TPP sont consignés sur la figure 4.
n=142
70
60
50
69
36
40
30
18
19
20
10
0
[0-1[ [1-2[ [2-3[ >3
Temps post piqûre (heure)
Figure 4 : Répartition des
hospitalisés selon le temps post piqûre
Tel qu'illustré dans la figure, la plupart des patients
(48,5%) ont pu consulter dans un délai supérieur ou égal
à 3 heures. Cela témoigne que la population n'est pas totalement
sensibilisée à ce péril ou l'éloignement et la
difficulté de transport vers les structures sanitaires. Seulement 18 cas
(soit 12,7%) qui ont pu consulter dans un délai ne dépassant pas
une heure.
2-7- Distribution des hospitalisations selon les classes
à l'admission
La répartition des hospitalisés en fonction des
classes à l'admission montre que les patients admis en classe II (avec
des signes généraux d'envenimation scorpionique) sont plus
nombreux que ceux admis en classe III (avec des signes de détresse
vitale). En effet les premiers représentent 73% tandis que les seconds
représentent 27% seulement.
27%
Classe III n=47
Classe II
n=130
73%
n=177
Figure 5 : Répartition des
hospitalisés selon les classes à l'admission
2-8- Distribution des hospitalisés selon la
durée hospitalisation
La figure ci-après représente la répartition
des hospitalisés selon la durée hospitalisation.
5
0
n=92
16
4
67
[0-12[ [12-24[ [24-36[ [36-48[ 48
Durée d'hospitalisation (heure)
Figure 6 : Répartition des
hospitalisés selon la durée hospitalisation
On note un nombre important des patients envenimés (67
cas) soit 72,8% hospitalisés au sein du service de réanimation
pour une durée inférieure à 12 heures, alors que 17,4% (16
cas) sont retenus de 12 à 24 heures, 4,3% (4 cas) de 24 à 36
heures et 5,4% (5 cas) pour une durée supérieure ou égale
à 48 heures. La durée moyenne d'hospitalisation est de 12,31
#177; 11,75 heures.
Pour connaitre la relation entre la durée
d'hospitalisation et le temps post piqûre, la figure suivante montre que
la durée d'hospitalisation dans certains cas varie en paralèlle
avec le temps post piqûre.
80
75
70
65
60
55
50
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30
Temps post piqure
Figure 7 : Corrélation entre la
durée d'hospitalisation et le TPP
En outre, le calcul du coefficient de corrélation entre la
durée d'hospitalisation et le temps post piqûre affiche une valeur
de -0,2 non significative (p = 0,06).
2-9- Distribution des hospitalisations selon les signes
cliniques
Le tableau IV montre les signes généraux les plus
fréquents chez les patients lors d'une envenimation scorpionique.
Tableau IV : Répartition des
hospitalisés selon les signes
généraux
Signes cliniques Fréquence
Pourcentage
Vomissement 142 80,2
Hypersudation 124 70,1
Tachycardie 104 58,8
Fièvre 73 41,5
Douleurs abdominales 70 39,5
Hypertension 48 27,3
Priapisme* 70 66
* Ce signe est spécifique au sexe masculin
On trouve en premier lieu les vomissements observés
chez 80,2% des cas hospitalisés suivi par l'hypersudation avec 70,1%.
Pour le priapisme, signe qui n'apparaît que chez le sexe masculin, ce
symptôme est signalé dans 66% des hospitalisés de sexe
masculin. En second lieu on constate, la tachycardie (58,8%), la fièvre
(41,5%), les douleurs abdominales (39,5%) et l'hypertension (27,5%).
2-10- Distribution des hospitalisations selon les
détresses vitales
Le tableau ci-dessous donne la répartition des
hospitalisés selon les détresses vitales.
Tableau V: Répartition des
hospitalisés selon les détresses vitales
Détresse vitale Fréquence
Pourcentage
Cardiocirculatoire 43 24,3
Respiratoire 33 18,6
Neurologique 26 14,7
Les résultats obtenus mettent en évidence une
prédominance de la détresse cardiocirculatoire (24,3%) suivie de
la détresse respiratoire (18,6%). Alors que la détresse
neurologique ne constitue que 14,7% des cas.
Les patients hospitalisés présentent soit une seule
détresse vitale soit deux détresses ou bien trois
détresses à la fois pour le même patient.
Parmi l'ensemble des patients hospitalisés, 18 cas
présentent des signes de ces trois détresses vitales, 30 cas
avaient les deux détresses cardiocirculatoire et respiratoire, 21 cas
présentaient détresses cardiovasculaire et neurologique et 21 cas
des détresses neurologique et respiratoire. Les figures 8,9 et 10
ci-dessous montrent les corrélations de ces détresses vitales
entre elles. On note une forte corrélation entre la détresse
respiratoire et la détresse cardiocirculatoire, avec un coefficient de
corrélation r =0,74 et p< 0,001. La détresse neurologique est
aussi corrélée d'une part avec la détresse
cardiocirculatoire (r =0,54 ; p< 0,001) et d'autre part avec la
détresse respiratoire (r =0,66 ; p< 0,001).
Absence Présence
Détresse vitale cardiovasculaire
Figure 8 : Corrélation entre DVC et
DVR
Absence Présence
Détresse vitale neurologique
Figure 9 : Corrélation entre D VN et
DVC
Absence Présence
Détresse vitale respiratoire
Figure 10 : Corrélation entre DVR et
DVN
2-11- Distribution des hospitalisations selon le
traitement
Le tableau suivant montre les différentes familles
thérapeutiques préconisées chez les patients
hospitalisés.
Tableau VI: Répartition des
hospitalisés selon le traitement
Famille thérapeutique
|
Nom commercial
|
Fréquence
|
%
|
Antalgique
|
Doliprane
|
76
|
42,9
|
Antiémétique
|
Primperan
|
43
|
24,3
|
Cloprame
|
80
|
45,2
|
Analeptique cardiaque
|
Dobutrex
|
150
|
84,7
|
Adrenaline
|
2
|
1,1
|
Antispasmodique
|
Atropine
|
3
|
1,7
|
Anti-convulsivant
|
Hypnovel
|
6
|
3,4
|
Gardenal
|
3
|
1,7
|
Antibiotique
|
Floxapen
|
1
|
0,6
|
Anxiolytique
|
Valium
|
15
|
8,5
|
Anti-hypertenseur
|
Loxen
|
1
|
0,6
|
Anti - inflammatoire
|
HSHC
|
10
|
5,6
|
Autres
|
Serum salé 9%0
|
113
|
63,8
|
Serum glucosé 5%
|
64
|
36,2
|
Hemacel
|
1
|
0,6
|
O2
|
38
|
21,5
|
Les thérapeutiques utilisées sont très
diverses parmi lesquels les analeptiques cardiaques représentés
par Dobutrex est préconisé chez 84,7% des cas. Par contre le
sérum salé 9%0 a été administré chez 63,8%
des cas et le sérum glucosé 5% chez 36,2% des cas. D'autre part,
les antiémétiques comme Cloprame ont été
préconisés chez 45,2% des cas, alors que Primperan a
été prescrit á 24,3%. Pour les autres familles
thérapeutiques, 42,9% des cas ont reçu des antalgiques
principalement Doliprane et 21,5% des cas ont utilisé
l'oxygénothérapie.
2-12- Distribution des hospitalisations selon la
référence
n=1 5 1
48%
Référés
n=73 n=78
Non référés
52%
Figure 11 : Répartition des
hospitalisés selon la référence
Il apparaît de la figure ci-dessus que 48% des cas sont
référés par d'autres structures sanitaires vers
l'hôpital provincial de Beni Mellal. Cet hôpital est
consideré comme la structure de référence, car il est bien
équipé et possède des services de soins intensifs pour la
prise en charge des patients envenimés. Les non
référés représentent 52% des cas.
2-13- Distribution des hospitalisations selon
l'évolution
La figure 12 indique la répartition des
hospitalisés selon leur évolution.
n=169
20%
Décès
n=33
Guérison
n=136
80%
Figure 12 : Répartition des
hospitalisés selon leur évolution
Il ressort que 80% des patients hospitalisés sont
guéris et 20% des cas sont décédés. Le taux de
létalité hospitalière est de 18,5%.
|