REPUBLIQUE DU
BENIN
MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
Faculté de Droit et de Sciences Politiques
Chaire Unesco des Droits de la Personne et de la
Démocratie
ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE
UNIVERSITE D'ABOMEY-CALAVI
MEMOIRE PRESENTE EN VUE DE L'OBTENTION DU DIPLOME
D'ETUDES APPROFONDIES (DEA) EN DROITS
DE LA PERSONNE ET DE LA DEMOCRATIE
THEME
LE ROLE DE L'EGLISE DANS LE PROCESSUS DE DEMOCRATISATION EN
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO (1990-2006)
NECESSITE ET PERSPECTIVES
Présenté et soutenu par
Sous la direction du
Jimmy MUNGALA FETA Professeur
Théodore HOLO
Agrégé de droit public et Sciences
politiques
Professeur Titulaire de droit
public
Année académique 2005-2006
AVERTISSEMENT
La Chaire Unesco n'entend donner aucune approbation ni
improbation aux opinions émises dans le mémoire. Ces opinions
doivent être considérées comme propres à son
auteur.
DEDICACE
A mes très chers parents Anicet MUNGALA ASSINDIE SANZONG
et Solange KAMBIDI NSIA KINGUEM
Comme parlait un poète, je dirai aussi :
Je reviendrai au soir
Nimbé d'un soleil de saison sèche
Remettre dans vos coeurs
Ô tendres berceurs de mon sommeil juvénile
Le bonheur familial que j'emportais ce jour-là
Dans le brouillard mouillé d'un matin d'hivernage
Je mettrai sous vos têtes
Toutes mes couronnes de lauriers
Et dans vos mains tremblantes de douleur parentale
Je mettrai la récolte de ma sueur fructifiée
Merci pour tout.
REMERCIEMENTS
C'est ici l'occasion pour nous de témoigner notre
reconnaissance à ceux qui, d'une manière ou d'une autre, par leur
apport, ont rendu possible la rédaction de cette étude. Nous
pensons particulièrement :
1. Au professeur Titulaire Théodore HOLO, notre
directeur qui n'a ménagé aucun effort pour nous encadrer
malgré ses nombreuses occupations. Il est plus que coauteur de cette
oeuvre
2. A Son Excellence Monsieur le professeur Victor TOPANOU
3. A l'administration de la Chaire UNESCO de
l'Université d'Abomey-Calavi notamment Mme Joséphine AFFAGNON
pour leur marque de confiance en notre candidature et pour la qualité de
la formation
4. À tous les enseignants de la Chaire UNESCO de
l'Université d'Abomey-Calavi
5. Au campus Numérique francophone de Cotonou qui nous
a servi de cadre de recherche incontournable
6. A la Chaire UNESCO de l'Université de Kinshasa pour
nous avoir facilité les formalités d'accès à la
formation et à l'ensemble du personnel pour la confiance et le soutien
manifestés
7. Au Doyen honoraire Professeur Grégoire BAKANDEJA de
la Faculté de Droit de l'Université de Kinshasa pour son
implication et sa confiance manifestées à cette formation
8. À mes très chers parents, Anicet MUNGALA et
Solange KAMBIDI dont la présence morale, l'attention suivie et
l'assistance matérielle nous accompagnent toujours et partout
malgré la distance physique sans oublier Papa Jean-Paul MUNGALA, Papa
Christian MUNGALA (paix à son âme), Papa Romain MUNGALA, Tonton
Longin MBELA, l'Abbé Georges MBOMA, Oncle Nicaise MBOMA, Oncle
Déo KAMBIDI, Tante Pascaline MUNGALA et les autres.
9. Aux familles KAMBIDI, MUNGALA et aux familles parentes et
alliées, à tous mes frères et soeurs qui m'ont soutenu
tout au long de ma formation notamment Daniel Yamba Yamba MUNGALA, Au Couple
Eugène & Ma Solange MUSOKI MUNGALA , Pomie MUNGALA, Au Couple Biko
& Anta-Caroline DIONE MUNGALA, Au Couple Oscar & Lucie MUNGALA, Tantine
MUNGALA, Mimi MUNGALA, Jeff MUNGALA, Emmanuel MUNGALA, Désiré
MUNGALA, Diana MUNGALA, Yodith MUNGALA, Jonas MUNGALA, Noëlla ABANAKYELO,
etc. sans oublier Gauthier et Camy KAPAY, Joël HAMBURE, Gisèle
& Mathilde NGONIEM, Pitchouna KAMBIDI ( paix à son âme),
Doudou MUNKANA ; vous m'avez plus que soutenu par vos prières, vos
conseils et votre réconfort moral
10. Aux Parents Edouard et Marie NDAMBO, Maman Marie TSHITALA,
Maseba Vicky BWANGA, tous les enfants de la famille NDAMBO, Christelle
SHAMAMBA, Sisi MUKUNGU, Nancy EYENGA, Laurette MBIYA, Laurence BEKOUSSANRI et
les autres qui m'ont soutenu dans leurs prières et dont la distance n'a
pas réduit la familiarité étroite
11. À vous, Patience BONDONGA, Philippe FAYEN, Fiston
ANGELESI, Patrick KITENGE, Nico Valdo KULABUNA, Alain KOLONGA & Francis T.
MANDIANGU, Jacques NGBANZO, Maxim LONGI MASAMBA, Fouddah MAHAMAT, Hugues Robert
A. RAMAZANI, Hassan LEYA MUTAMBA, Laurent MUMBERE, Timothée NDJOKU
DJIMBO, Paulin VONANON, Arsène GNAMEY et toutes les autres personnes non
citées qui se reconnaitront pour votre soutien moral et
l'intérêt remarquable manifesté à cette
formation;
12. À ma bien aimée Mimiche-Murielle KATSHAMA
MWAMBA pour les prières, le soutien moral et l'attachement affectif
témoignés
13. À la Communauté rd congolaise au BENIN
notamment aux Pasteurs Rémy EMONGO et Guy MALUMBA, à Freddy
MENGA, Ephraïm BALEMBA GUBANDJA pour son attention indispensable, aux
frères et soeurs congolais et autres membres du groupe de prière
pour le réconfort moral
14. Aux auditeurs de la Chaire UNESCO de Cotonou de la
promotion 2005-2006, particulièrement à ceux qui nous ont
été proches et avec qui nous avons constitué une
fraternité à savoir Allah RAMADJI NABAYE, Brice MBOUMBA, Ibrahim
TAMOU, SA'ABI HAFIZOU (paix à son âme), Ali MAIGA, Ibrahim TAMOU,
Mlle Léocadie BAFA'A, sans oublier Sylvestre PAKABOMBA qui, pour nous,
est plus qu'un frère.
PRINCIPAUX SIGLES ET ABBREVIATIONS
ACEAC: Association des Conférences
Episcopales d'Afrique Centrale
ACDI : Agence Canadienne de
Développement International
AFDL : Alliance des Forces
Démocratiques pour la Libération
CALCC: Conseil de l'Apostolat des Laïcs
Catholiques du Congo
CARTEC : Coordination des Actions pour
la Réussite de la Transition de l'Eglise Catholique
CCE : Collectif Chrétien pour
les Elections 2005
CEI : Commission Electorale
Indépendante
CEJP : Commission
épiscopale Justice et Paix
CENCO: Conférence Episcopale Nationale
du Congo
CEPAS : Centre d'Etudes Pour l'Action
Sociale
CEZ : Conférence Episcopale du
Zaïre
CETA : Conférence des Eglises de
Toute l'Afrique
CEVB : Communauté
Ecclésiale Vivante de Base
CIAT : Comité International
d'Accompagnement de la Transition
CNS : Conférence Nationale
Souveraine
CVR : Commission Vérité
et Réconciliation
ECC : Eglise du Christ au Congo
FAD : Fonds Européen de
Développement
FARDC : Forces Armées de la
République Démocratique du Congo
FAZ : Forces Armées
Zaïroises
HCR : Haut Conseil de la
République
HCR-PT: Haut Conseil de la
République-Parlement de transition
LINELIT: Ligue Nationale pour les Elections
libres et Transparentes
MLC : Mouvement de Libération du
Congo
MPR : Mouvement Populaire de la
Révolution
MONUC : Mission de l'Organisation des
Nations Unies au Congo
PAPD : Programme d'appui à la
paix et à la démocratie
PAREC: Paix et Réconciliation au
Congo
RCD : Rassemblement des Congolais pour
la Démocratie
RDC : République Démocratique
du Congo
RFI : Radio France Internationale
ROC : Réseau des Observateurs
Chrétiens
UDPS : Union pour la Démocratie
et le Progrès Social
UE : Union européenne
USORAL : Union Sacrée de
l'Opposition Radicale et Alliés
SOMMAIRE
AVERTISSEMENT
i
DEDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
PRINCIPAUX SIGLES ET ABBREVIATIONS
v
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIÈRE PARTIE : LA PROBLEMATIQUE DE
L'INTERVENTION DE L'EGLISE DANS LE TEMPOREL EN RD CONGO DE 1990 À
1997
9
CHAPITRE 1: LA PARTICIPATION DE L'EGLISE À
L'ACCOMPAGNEMENT DU PROCESSUS DE DÉMOCRATISATION
12
Section 1. Les actions et enseignements
pastoraux
12
Section 2. Une présence rayonnante et
émergente de l'Eglise
22
CHAPITRE II : LA PARTICIPATION DE L'EGLISE AU
SEIN DES INSTITUTIONS DE TRANSITION
31
Section1. L'exercice par l'Eglise du pouvoir
temporel
31
Section 2. La reprise en main de la situation par
le pouvoir du Maréchal MOBUTU
40
DEUXIEME PARTIE : DU REVEIL POLITIQUE
53
DE L'EGLISE, 1997 A 2006
53
CHAPITRE 1 : ENGAGEMENT POLITIQUE DE
L'EGLISE
55
Section 1 : Dynamisme lors des rencontres
politiques
57
Section 2 : L'Eglise et les Institutions politiques
de transition
62
CHAPITRE 2 : L'EGLISE ET LES NOUVEAUX DEFIS
71
Section 1 : Nécessités
pré-électorales
71
Section 2: Perspectives d'avenir
83
CONCLUSION GENERALE
98
BIBLIOGRAPHIE
103
EPIGRAPHE
L'Eglise apprécie le système démocratique
comme système qui assure la participation des citoyens aux choix
politiques et garantit aux gouvernés la possibilité de choisir et
de contrôler leurs gouvernants ou de les remplacer de manière
pacifique lorsque cela s'avère opportun.
Cependant, l'Eglise ne peut approuver la constitution de
groupes dirigeants restreints qui usurpent le pouvoir de l'Etat au profit de
leurs intérêts ou à des fins idéologiques.
Jean-Paul II
INTRODUCTION GENERALE
Depuis Mathusalem, au sein des sociétés
traditionnelles comme modernes, l'intervention du pouvoir spirituel dans la
gestion et l'administration du pouvoir temporel a, généralement,
été objet de controverses, car, elle fut tantôt
tolérée, tantôt désapprouvée, tantôt
saluée. Mais, malgré le débat que soulève notre
réflexion, il faut noter, avant tout, que de nombreuses études,
réflexions et rencontres, prenant la forme de monographies, d'analyses
historiques ou d'approches prospectives ont été
réalisées.
Cependant, au delà de la multitude d'analyses, un
questionnement central s'impose : Comment comprendre, analyser et
expliquer la place de l'Eglise dans le processus de changement que connaissent
les sociétés africaines confrontées aux défis de la
démocratie et aux valeurs laïques? C'est dans cette optique que se
situe la problématique de notre travail portant sur `'le rôle de
l'Eglise dans le processus de démocratisation en République
Démocratique du Congo''. L'une des qualités s'origine dans le
fait que cette réflexion s'inscrit dans une perspective `'historique
actionnaliste'' au sens où l'entend Alain Touraine.
En effet, étymologiquement, "Église" est la
traduction du terme grec « ekklésia » que l'on
trouve dans le Nouveau Testament, et qui signifie « assemblée des
croyants », c'est-à-dire, de ceux qui ont été
appelés par Dieu pour former une communauté.
Le terme « ekklésia »
lui-même est la traduction de l'hébreu
« qâhâl » qui dans l'Ancien Testament
désigne le peuple de Dieu assemblé. Toutefois, en tant que mot
ayant plusieurs acceptions, l'Eglise peut aussi se définir
comme un « édifice où se réunissent les
chrétiens pour célébrer leur culte »,
« une société religieuse fondée par
Jésus-Christ, Eglise corps du Christ » ou
«une communauté chrétienne » ou
encore « une communauté des hommes et des femmes,
liés entre eux par une même foi....et qui reconnaissent
l'autorité des mêmes chefs » ou encore comme
« l'ensemble des personnes professant les mêmes doctrines
ou visant le même but »1(*). Ainsi, dans ce sens, l'on parle des Eglises
catholique, protestante, orthodoxe, copte etc. pour
désigner la communauté des fidèles qui croient aux
doctrines catholique, protestante, orthodoxe, etc.
Mais, il sied de signaler qu'au fil des ans, surtout dans le
contexte africain caractérisé par la
solidarité/hospitalité, on est arrivé à parler
aujourd'hui de l'Eglise-Famille de Dieu.
Au demeurant, comme l'idée de communauté
transparaît dans le mot Eglise, nous l'emploierons à la fois au
sens strict comme au sens large pour désigner l'ensemble des confessions
religieuses.
Dès sa genèse, en effet, l'Eglise
chrétienne a joué un rôle majeur dans la régulation
et le changement social des sociétés. Cette assertion est
d'autant plus vraie que l'on ne peut pas s'imprégner de « la
dynamique des civilisations européennes sans
considérer l'action socialisatrice et
mobilisatrice »2(*) de l'Eglise chrétienne, plus
spécifiquement de l'Eglise catholique romaine. C'est le cas de l'Europe,
jusqu'au début du 20e siècle, où même les
Etats laïcs, comme la France, la Belgique et le Portugal reconnaissaient
« la place de l'Eglise »3(*).
Malgré que ce rôle majeur se voit notamment
à travers le caractère conflictuel qui a défini
« les relations entre l'Etat et l'Eglise »4(*) au cours de l'histoire, il a
permis à la société civile (siècle des
lumières, réforme protestante, révolution
française, différents concordats) de sortir l'Etat de la tutelle
de l'Eglise.
De plus, avec le principe de la séparation des pouvoirs
religieux et politique, dans la plupart des Etats du monde, un équilibre
social certain a pris corps entre les deux ordres. Généralement,
en Afrique, du moins dans la seconde évangélisation et du point
de vue sociologique, avec la problématique de l'acculturation et de
l'inculturation, les religions chrétiennes s'inscrivaient dans l'oeuvre
coloniale.
C'est pourquoi, à l'exception des Etats musulmans en
Afrique, la laïcité procède
essentiellement de la colonisation même si les
Eglises chrétiennes de l'Afrique du Nord et l'Eglise Catholique dans le
Royaume du Congo sont antérieures à la colonisation
(XVIe siècle.). Celle-ci est venue renforcer le
caractère laïc des Etats africains dans ces contrées du
continent noir.
Cette lutte avait également permis de mettre fin
à la résistance des structures d'aliénations
(colonisation) qui assujettissaient le peuple, car, sans cela, aucune
inculturation ne saurait voir le jour. Tel fut le cas en RD Congo où la
lutte de l'Eglise pour la valorisation de l'être humain est souvent
source de conflits entre Eglise et pouvoir politique.
Nous évoquons le bras de fer entre le Président
MOBUTU et l'Eglise catholique qui entraîna quelques incidents
fâcheux dont l'exil à Rome de Joseph-Albert Cardinal MALULA et la
nationalisation des écoles et universités des réseaux
confessionnels catholique et protestant. Mais, fidèle à sa
mission d'évangélisation, elle a continué à oeuvrer
en faveur de la promotion des droits humains.
Ainsi, l'Eglise, consciente de sa mission pastorale, ne
pouvait assister, sans réagir, à la gestion autocratique du
pouvoir mobutiste. Son engagement s'est mieux affirmée au lendemain du
vent de démocratisation. Du reste, dans cette quête du changement,
l'Eglise catholique apparaît comme le fer de lance de toutes les
confessions religieuses, d'une part, à travers ses écrits, ses
paroles, ses faits tels qu'ils se livrent à l'observation, d'autre part,
en raison de la majorité numérique de ses fidèles, de son
leadership moral et intellectuel, de sa méthode d'implantation à
la base.
Dans les statistiques actuelles admises en RD Congo,
les Congolais sont dans leur majorité très attachés au
principe de laïcité; la typologie y relative se présente
comme suit :
50% de catholiques, 20 % de protestants (62 Eglises dont des
Eglises pentecôtistes regroupées au sein de l'Eglise du Christ au
Congo, ECC), 16,5 % de kimbanguistes (Eglise afro-chrétienne
fondée en 1930 par Simon KIMBANGU), petites minorités
d'animistes, musulmans (principalement implantés dans l'Est du pays),
Juifs et Orthodoxes, Témoins de Jéhovah. De nombreuses sectes et
micro-Assemblées de Dieu, fraternités de prière, groupes
bibliques, évangélistes... se compteraient en milliers,
parsemées sur toute l'étendue du territoire national. C'est ce
qui explique essentiellement l'accent mis sur la très influente Eglise
catholique tout au long de notre réflexion.
Cependant, pour tenter de dépasser le cadre purement
monographique de ce rôle, il nous importe de scruter des questions qui
devraient permettre de mieux comprendre la problématique que pose
l'Eglise en tant que l'un des acteurs majeurs de ce processus de
transformation de la société:
- Quelle est la législation qui fonde et justifie
l'action de l'Eglise dans `'l'historicité'' des peuples
africains ?
- La lumière du monde a-t-elle éclairé
les peuples de Dieu ou les a-t-elle plongés dans
l'obscurité ? Le "bon grain a-t-il réussi
à convertir l'ivraie" ou "l'ivraie aurait-elle plutôt corrompu le
bon grain" (Mt 13, 24-30) ?
- Quels sont les objectifs poursuivis par l'Eglise en tant
qu'acteur historique de ce changement ? Quelles sont les stratégies
avancées et les perspectives envisagées ?
- Face aux partenaires dans ce processus de changement (Etat,
Société civile...) quel est le type de relations que l'Eglise
entretient ?
- Quelles sont la mobilité et la
nécessité de son message face à une société
de plus en plus confrontée aux effets de la mondialisation?
Aussi, nous tenterons, au terme de nos interrogations, de
jeter un regard qui postule notre énoncé à même
d'élucider les différentes questions posées. D'abord, il
est important de noter que l'intervention délibérée de
l'Eglise africaine dans le processus de changement n'est ni un fait de hasard,
encore moins un effet de mode. Elle s'inscrit dans la mission reçue du
Christ de proclamer l'Evangile à toute la création et
d'évangéliser le monde.
Par nature prosélytiste, l'Eglise est consciente que
son rôle d'évangélisation doit pouvoir s'adapter
(inculturation du message) à un monde de plus en plus
matérialiste qui, sur le plan spirituel, s'accorde davantage au principe
de la relativité des valeurs. D'où, cette mission de porter la
Bonne nouvelle (du Christ) dans toutes les couches de l'humanité, et par
son impact, la transformer de l'intérieur elle-même.
Ensuite, malgré qu'elle soit détachée du
temporel, au fil des ans dans l'histoire des Nations, son combat a
continué pour le respect de la dignité de la personne humaine,
car, souvent la vie en temps difficile (conflits, guerres, pauvreté)
contrecarre l'évangélisation et expose les chrétiens
à chercher la survie en dehors des valeurs chrétiennes et
humanitaires.
De plus, en tant que gardienne des valeurs humanitaires et
évangéliques telles que « l'égalité des
droits des hommes et des femmes, les droits fondamentaux de l'homme, dans la
dignité et la valeur de la personne humaine »5(*), l'Eglise a compris qu'il faille
non seulement être en mesure de s'inscrire dans cette dynamique de
changement, mais également, aller au devant des attentes
matérielles des Africains en inaugurant un discours qui tienne compte de
tous les aspects qui concourent à la dignité de la personne
humaine et à son développement intégral.
Du reste, en bonne position au sein de la
Société civile, elle s'est investie dans la transformation de la
vie politique et la conversion des mentalités en encourageant
l'émergence d'un grand nombre de groupes d'intérêts
diversifiés à grand rayonnement dans le nouveau contexte
pluraliste, et ce, en apportant une visibilité particulière aux
communautés à la base contrairement aux réseaux
d'obédience clanique, tribale et ethnique.
Qui plus est, le Chrétien s'identifie comme la
lumière et le sel de la terre, ce qui se comprend pour le
Chrétien de s'impliquer aussi dans le temporel (Matthieu 5, 13-16).
Enfin, comme un peu partout sur le continent où elle s'est
distinguée, l'Eglise, en RD Congo, ne pouvait que s'impliquer dans la
dynamique de changement auquel aspire l'Afrique en servant d'acteur
d'avant-garde dans les luttes pour l'avancement et l'aboutissement du processus
de démocratisation et de réconciliation, pour une participation
active et décisive dans la marche des Nations vers l'ouverture au
pluralisme politique.
S'agissant de l'intérêt de notre
réflexion, il sera question de rappeler la volonté manifeste du
peuple congolais, et d'évoquer l'ampleur des effets positifs
constatés depuis la tenue de la Conférence Nationale Souveraine
(CNS) en 1992. Aussi, il sied de noter qu'en tant qu'étape du processus
de démocratisation, la transition politique en RD Congo a connu
plusieurs péripéties dont des épisodes faucheux et
douloureux pendant une longue période. Quoi de plus normal qu'une
perspective « diachronique »6(*) s'impose et qu'une vue dynamique consécutive
au caractère mouvant inhérent à tout processus nous
amène à présenter les faits dans un ordre
chronologique.
Dans la quête démocratique qui s'est
imposée comme le seul rempart pour rompre avec le système
monolithique tant décrié de la IIème République,
l'Eglise a apporté une contribution très remarquable à
l'édification d'une société digne et respectueuse des
valeurs universelles et humaines. Dans ce pays à
majorité chrétienne, l'Eglise a joué un rôle
fondamental dans la maturation de la conscience nationale, l'éveil
politique et la participation citoyenne, la dénonciation des
fléaux nationaux, etc.
Au sujet de l'Eglise catholique de la RD Congo, Jean-Dominique
GESLIN souligne que celle-ci a pris une part active dans le jeu politique, pour
« marquer sa volonté de peser sur le processus
électoral en tant que force morale dans ce pays majoritairement
catholique »7(*). Dans
la même perspective, l'hymne national de la RD Congo, LE DEBOUT
CONGOLAIS, est l'oeuvre d'un Jésuite le Père BOKA à qui la
Nation toute entière ne cessera de rendre un vibrant hommage. Par
ailleurs, la Conférence Nationale Souveraine fût
présidée de main de maître par l'Archevêque de
Kisangani, Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA.
Notre réflexion présente également le net
avantage, de démontrer que l'oeuvre de l'Eglise, dans le processus de
démocratisation, s'inscrit dans une problématique complexe
tendant à concilier la vérité évangélique
à l'impérieuse nécessité
d'évangéliser l'homme dans toutes ses dimensions
temporelles : sociale, culturelle, politique et économique.
La loi divine, qui veut qu'on rende « à
César ce qui est à César, à Dieu ce qui est
à Dieu », sert de socle à l'approche terrestre du
message évangélique dans ses aspects de la dignité de
l'homme. Autant évaluer l'apport de l'Eglise en RD Congo nous
paraît d'un intérêt énorme, autant la présente
étude s'efforcera de répondre aux questions suscitées dont
l'intérêt tant théorique, scientifique que pratique semble
évident.
Du point de vue scientifique, l'analyse du rôle de
l'Eglise dans le processus de démocratisation en Afrique
intéresse à juste titre les chercheurs, juristes, sociologues,
politologues, et autres théologiens, etc. étant donné que
les conflits internes ou interétatiques qui sévissent
actuellement à travers le monde et spécialement en zone africaine
confrontée à des crises identitaires, religieuses et politiques
troublent la paix et la sécurité internationales.
Bien plus, nous pouvons nous interroger avec Serge BLAIS, qui
se demande si l'on peut une fois penser à « la fin de
l'apartheid sans le soutien des syndicats, des organisations d'Église,
de défense des droits humains, de la presse indépendante,
etc. »8(*). C'est
dire que dans cette quête, les autres composantes de la
société civile susmentionnées doivent demeurer des relais
propices des messages pilotés par l'Eglise.
Sur le plan pratique, l'intérêt de cette
implication est grand pour les peuples, car, bien comprendre, d'un point de
vue sociopolitique, la mission de l'Eglise dans le processus de
démocratisation amorcé, dans bon nombre d'Etats d'Afrique, permet
à chaque croyant de connaitre sa part de responsabilité dans
l'action de son Eglise pour la bonne marche de son Etat aux fins de servir de
relais à temps et à contre temps. Aussi, est-il important que le
peuple évite la tendance manifeste de se limiter aux seuls acteurs ou
décideurs politiques en présence, oubliant le plaidoyer
mené par l'Eglise pour influencer les décideurs et modifier ou
infléchir certaines évolutions politiques.
Par ailleurs, ce choix nous paraît d'autant plus
intéressant que le conflit armé en RD Congo a
présenté des allures d'embrasement non pas seulement
régional en Afrique centrale et dans la sous- région des
Grands-lacs Africains, mais aussi des tensions au niveau continental, voire
mondial au point de nécessiter les efforts et l'implication de l'Eglise,
de la communauté aussi bien nationale, continentale qu'internationale en
vue de restaurer et de consolider la paix. De ce point de vue, c'est toute
notre hypothèse de départ qui se trouve décantée
après avoir situé la problématique du rôle de
l'Eglise dans une Afrique engagée inéluctablement sur le chemin
de la démocratisation. Ainsi, il ya lieu de comprendre que tout
l'intérêt de notre étude se trouve finalement dans la
capacité d'entrevoir les perspectives qu'offrent les Eglises africaines
confrontées à la lancinante question de l'émergence d'un
Etat de droit, régi par les principes de la transparence et de la
bonne gouvernance, préalables notamment à la réduction de
la pauvreté en vue d'un développement durable. Cet aspect nous
parait essentiel et fondamental pour la survie de la Nation Congolaise. Tant
d'intérêts justifient la délimitation du sujet dans le
temps et dans l'espace.
Par rapport à l'espace, notre étude se limitera
à l'Afrique en général et spécialement à la
République Démocratique du Congo qui constitue le cas pratique de
la présente étude.
Par rapport au temps, notre réflexion remontera au
déclenchement des processus de démocratisation en Afrique
à partir de l'an 1990, lequel a vu la RD Congo,
`'ex-Zaïre'' répondre au rendez-vous de
l'histoire, jusqu'en 2006, année électorale historique qui a mis
fin à la plus longue période de transition démocratique
africaine (16ans) avec l'installation des nouvelles institutions
légitimes et légales issues des urnes.
Il sera également question, suivant la méthode
historique-actionnaliste, de tenter de comprendre les différentes
interventions de l'Eglise dans les processus de démocratisation, afin
de découvrir sa mission et d'examiner son action dans les
différents Etats africains pour dégager une constance et
apprécier à sa juste valeur son rôle dans ce même
processus au niveau de l'Afrique en général et de la RD Congo en
particulier. Par ailleurs, nous ne manquerons pas de souligner la
difficulté majeure rencontrée lors de la collecte des
données spécifiques se rapportant à notre sujet.
Néanmoins, le recours à la technique documentaire a rendu
possible la consultation des documents officiels et privés, ainsi que
des supports visuels et audiovisuels dont l'essentiel disponible sur Internet a
été précieux pour enrichir notre réflexion.
Quant à la méthode dialectique, elle nous a
permis de nous interroger, en ce siècle de profondes mutations sociales,
sur comment entrevoir à partir de ce rôle, des pistes de solution
et des perspectives qui garantissent la pérennité de l'action
historique de l'Eglise dans la refondation des Etats africains, plus
singulièrement de la RD Congo. Pour ce faire, nous nous sommes
proposé de retracer le parcours, dans le temps, de la contribution de
l'Eglise à l'éclosion émergente de la démocratie
contemporaine, d'où, la subdivision du travail en deux parties de deux
chapitres chacune.
La première partie qui s'étend de 1990-1997 se
penche sur la problématique de l'intervention de l'Eglise dans le
temporel, c'est-à-dire, de la manière dont l'Eglise a
été acteur du processus de démocratisation, notamment, son
implication dans le temporel, à travers la tenue effective de la CNS et
la mise en place des institutions démocratiques issues desdites assises.
La deuxième partie qui se penche sur le réveil
politique de l'Eglise, aborde la période allant de l'avènement de
l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération (AFDL)
depuis le 17 Mai 1997 jusqu'à l'investiture du président Joseph
KABILA KABANGE le 6 décembre 2006, grâce à l'organisation
historique des élections après plus de 40 ans de crise de
légitimité du pouvoir. Il sera entre autres question d'examiner
les défis pré-électoraux, électoraux et
postélectoraux actuels en RD Congo. Il s'agira d'analyser l'action de l'Eglise tout au long
des différentes rencontres ayant abouti à la signature des
différents accords tels que L'ACCORD DE CESSEZ LE FEU DE LUSAKA ET
L'ACCORD GLOBAL ET INCLUSIF (au Dialogue Inter Congolais) jusqu'à la
tenue historique des élections de 2006.
PREMIÈRE PARTIE : LA
PROBLEMATIQUE DE L'INTERVENTION DE L'EGLISE DANS LE TEMPOREL EN RD CONGO DE
1990 À 1997
Avant toute chose, il convient d'évoquer par une
analyse générale, la problématique de l'intervention de
l'Eglise dans le temporel en situant l'origine de notre réflexion dans
le double contexte historique mondial et continental du bipolarisme
incarné par la guerre froide.
Partant du principe évangélique qui dit
`'Rendre à César ce qui est à César, et
à Dieu ce qui à Dieu'', principe de
responsabilité et de responsabilisation, il me parait loyal de formuler
l'interrogation suivante : `'l'Eglise, en général, et celle
de la RD Congo en particulier, a-t-elle la légitimité
d'intervenir dans les affaires temporelles ? Comment expliquer qu'à
travers l'histoire, l'Eglise se soit impliquée dans les problèmes
d'ordre temporel`'?
En effet, s'il est vrai que cette loi divine établit le
rôle que chacune des parties en présence est appelée
à jouer, il est également vrai que l'Eglise tire son fondement du
lien intrinsèque qui existe dans l'engagement de la religion en faveur
des libertés, plus précisément de la démocratie. De
plus, plusieurs auteurs se sont efforcés à démontrer la
pertinence de ce fait à travers des analyses que le professeur AIVO a
qualifiées de « relation fusionnelle entre les croyances
chrétiennes et le principe même de la
démocratie »9(*).
C'est le cas, d'un coté, de Léo MOULIN qui a
rapporté que, dans l'histoire et la vie de l'Eglise, elle a
été pendant des lustres « la seule institution
où le principe de l'élection par les gouvernés se soit
maintenu : le clergé et les peuples choisissent librement, tout au
moins en principe leurs évêques »10(*), de l'autre, de Georges
BURDEAU qui a mis en exergue le lien entre l'action catholique et le recentrage
du peuple à l'origine de l'aménagement du pouvoir politique
contemporain.
Dès lors, l'on considère cette époque
comme l'origine de la culture démocratique qui fonde l'intervention de
l'Eglise dans la troisième vague démocratique consistant en la
« pédagogie de libération fondant la lutte contre les
régimes totalitaires au lendemain du Concile Vatican
II »11(*).
Cependant, dans son application, il est apparu des
controverses suscitées par cette pédagogie de libération
venue de l'Amérique latine exprimée en termes de
résistance de l'Eglise face aux dictatures militaires. En Afrique,
l'engagement de l'Eglise s'est manifesté également dans ce qui a
été qualifié des Etats véritables vampires pour la
liberté et la dignité de la personne humaine. Mais, il a fallu
attendre que le monde soit marqué à la fin des années 1980
pour que l'Afrique noire francophone bascule dans le cycle des mutations
politiques et idéologiques.
Pour l'Eglise catholique de la RD Congo, le Concile Vatican II
reste un tournant décisif. En effet, à l'instar des pressions
tous azimuts au niveau international, l'Afrique en marche vers le pluralisme
politique, à partir de 1990, a connu la contestation des pouvoirs
dictatoriaux par l'Eglise, dans la plupart des cas, à travers la
conjonction d'initiatives croisées de la plus haute hiérarchie
des confessions religieuses et de leurs représentations locales, et des
mouvements associatifs, syndicaux, des médias, de sensibilités
politiques chrétiennes et d'autres, acquises au changement.
En RD Congo, devant la gravité de la crise multiforme
et généralisée, les institutions officielles avaient
perdu toute crédibilité : l'urgence avait fini par imposer
la nécessité de repenser la restructuration et le fonctionnement
du pays, car, le peuple ne se reconnaissait plus dans le mode de gestion
qu'incarnait, en premier, le chef de l'Etat à travers le verrouillage de
tous les pouvoirs qui, du reste, devenaient inopérants,
contreproductifs et contre-indiqués. C`était le cas du temps du
marxisme-léninisme au Congo-Brazzaville, au Bénin et de
l'idéologie de l'authenticité au Zaïre (RD Congo),
transportée par ailleurs au Togo, etc.
Devant cette impérieuse exigence, l'Eglise congolaise
refusa d'être cantonnée à son rôle spirituel parce
qu'elle est consciente que les valeurs qui façonnent la
société et modulent les comportements humains s'opèrent de
plus en plus en dehors de l'Eglise.
Soulignons que cette analyse a capté au degré
similaire quelques princes de l'Eglise comme le vénérable Mgr
Isidore DE SOUZA du Benin qui a légué à l'Afrique et au
monde un message chrétien relatif à la politique. C'est une
grande leçon qui disait en substance que l'on peut faire la politique,
mais sans se laisser inféoder par elle. De plus, les chrétiens
qui se laissent emporter par elle, oublient tout simplement le discours
libérateur de Jésus-Christ, susceptible de favoriser une mutation
constructive.
Par conséquent, bien que cela soit un devoir
contraignant pour l'Eglise, se mouvoir dans le temporel devenait une
nécessité en tant que veilleur et éveilleur des
consciences.
Voilà pourquoi, l'Eglise s'est illustrée, d'une
part, par sa participation à l'accompagnement du processus de
démocratisation (chap.1), d'autre part, de manière active au sein
des institutions de transition (chap.2).
CHAPITRE 1: LA PARTICIPATION DE
L'EGLISE À L'ACCOMPAGNEMENT DU PROCESSUS DE DÉMOCRATISATION
Autant les années 1960 ont été celles des
indépendances africaines, autant la décennie 1990 a
été celle de l'ouverture au pluralisme politique. Presque partout
en Afrique, la démocratisation a consisté à quitter
l'assujettissement du parti unique pour rentrer dans la conformité
d'une pluralité réelle des partis politiques qui introduit le
principe de l'alternance au pouvoir.
C'est pourquoi, il convient de situer la participation de
l'Eglise dans le débat démocratique qui constitue à la
fois un cadre d'expression de la liberté des personnes et offre à
l'Eglise la possibilité de participer aux débats et aux
décisions de société. Evoquer notamment sa participation
à l'accompagnement dudit processus revient à parler des actions
et enseignements pastoraux (Sect.1), et à se référer,
à une présence rayonnante et émergente (Sect.2).
Section 1. Les actions et
enseignements pastoraux
Le contexte sociopolitique de l'heure a suscité un
engouement dans le chef des populations qui souhaitaient tourner la page de la
dictature mobutiste. Face à cette aspiration au changement, il devenait
plausible que le vent de démocratisation qui soufflait aussi sur
l'Afrique noire francophone ne pouvait laisser indifférente l'Eglise.
Ainsi, dans le souci de communier avec le peuple de Dieu en RD
Congo, l'Eglise est sortie du temple pour porter et servir de courroie de
transmission des revendications populaires dans le but d'infléchir le
pouvoir resté insensible devant le spectacle des congolaises et
congolais meurtris et lassés des diverses crises (politique,
économique socioculturelle, morale, et même spirituelle), bref de
la crise des valeurs.
Par le biais des actions et enseignements pastoraux, qui sont
des messages d'interpellation et d'espérance aux peuples et aux
dirigeants, cette sortie du temple de l'Eglise se perçoit comme un
rôle d'avant-garde (§1), malgré les vicissitudes que comporte
tout processus de changement (§2).
Paragraphe 1. Un rôle d'avant-garde
Au lendemain des bouleversements politiques provoqués
par la chute du Mur de Berlin le 9 novembre 1989 qui ont atteint l'Afrique
subsaharienne dont la RD Congo, le peuple a cru à l'action de l'Eglise
tout en saluant l'engagement pastoral de servir la Nation comme un rôle
d'avant-garde. De plus, en tant que vecteur démocratique, ce rôle
s'est davantage manifesté à l'occasion de deux importants
événements qui sont venus faire avancer l'ouverture des
réformes profondes. Il s'agit de la transition démocratique, un
contexte favorable au changement (A) et le Mémorandum historique des
évêques catholiques qui demeure un instrument déterminant
(B).
A. La Transition
démocratique, un contexte favorable
La chute du Mur de Berlin le 9 Novembre 1989 et les
bouleversements politiques importants qui en résultaient dans le monde
entier ont donné un nouveau souffle aux transformations des institutions
politiques et socioéconomiques en Afrique. Dans cette quête en vue
notamment d'affronter les défis de la misère sociale des peuples,
il est intéressant de souligner le concours très remarquable que
le clergé africain a apporté aux processus de
démocratisation en Afrique. Son entrée en scène a sans
conteste modifié les rapports de force en présence.
Né des aspirations
générales des peuples à transformer les règles de
fonctionnement de l'Etat, ce vent de démocratisation en RD Congo a
conduit les forces vives de la Nation, dont l'Eglise, à donner de la
voie dans le débat démocratique. En effet, à l'initiative
du Maréchal-président MOBUTU, le processus de
démocratisation était engagé pour répondre surtout
au nouveau contexte de transition politique qui soufflait sur l'Afrique dont
nous pouvons dégager les fondements et analyser les mécanismes de
ses actions.
Au plan politique, il était question d'apporter des
réponses adéquates à la situation de crise que
reflétait le mécontentement grandissant du peuple contre le
pouvoir dont la léthargie s'observait dans le fonctionnement de l'Etat.
Il a fallu que l'Eglise s'implique réellement dans le débat sur
le fonctionnement et la conduite régulière de la chose publique
pour devenir une pièce sociale maitresse dans le processus de
changement, encore que, ses messages obéissent au principe
d'inculturation. Forte de l'autorité morale influente qu'elle exerce sur
les détenteurs du pouvoir, l'Eglise par son intervention a
occupé davantage l'espace comme acteur privilégiée pour
aborder la question concernant la condition humaine (matérielle,
politique) parce que celle-ci influe sur la spiritualité des individus,
sa principale cible pastorale.
Par effet d'amplification, l'on peut à ce niveau
çi, faire référence à tous les Magistères
que l'Eglise catholique a élaborés, notamment à la suite
du Marxisme et des théories libérales consécutives
à la révolution industrielle et à la laïcisation de
la société occidentale (encycliques, etc.). Cependant, il
convient de s'interroger sur les stratégies utilisées et les
facteurs ayant concouru à leur influence en vue de dégager les
mécanismes par lesquels l'Eglise s`est illustrée face aux
mutations sociopolitiques.
Comme annoncé ci-haut, au lendemain du mouvement de
démocratisation enclenché depuis les réformes
initiées en URSS par le président Michael GORBATCHEV et les
effets induits qui progressivement, emportaient les systèmes
totalitaires de l'Europe de l'Est, l'exigence du peuple en ex-Zaïre (RD
Congo) était que le Maréchal-président MOBUTU engage lui
aussi un dialogue avec l'opposition pour éviter, par contagion,
à la Nation les tragiques événements d'ailleurs.
C'est de là qu'il prit la décision d'annoncer,
le 14 janvier 1990, son initiative d'engager des consultations nationales
à travers le pays, car, il était conscient de courir des risques
en observant le mimétisme pluraliste pointé sur l'Afrique. Mais,
en réalité, le `'Guide'' voulait seulement contenir et devancer
le mouvement de désobéissance civile dans le pays. Cela
transparaissait dans ses propos devant le corps diplomatique le même
jour, lorsqu'il insistait sur « la nécessité d'une
libéralisation politique par la vertu de la palabre directe qui prend en
compte les réalités africaines et non importées de
l'extérieur »12(*).
S'agissant de ce choix contraignant mais décisif pour
le Maréchal-président, un débat public a été
engagé à travers la vaste campagne dite Consultations populaires
du 29 janvier au 29 mars 1990. Selon le Professeur MWAYILA TSHIYEMBE, ces
consultations populaires ont eu le mérite de permettre au Chef de l'Etat
et à sa délégation de recueillir « les avis de toutes
les couches socioprofessionnelles, à tous les échelons, et ce,
dans tous les secteurs sur le fonctionnement du Parti-Etat »13(*). Dans ce sens, 6.128
mémorandums (dont 128 venus de la diaspora) qui ont été
adressés de toutes parts réclamaient la fin du système
politique de la IIème République et l'instauration d'un
système démocratique pluraliste.
Dans leur grande majorité, les populations ont
exprimé leurs aspirations à la liberté et exigé
l'ouverture démocratique à travers une réforme
complète du système de gestion gouvernementale et de
fonctionnement de l'Etat. Du reste, presque tous les analystes politiques
s'accordent, avec la tendance majoritaire du peuple, à reconnaître
que la contribution majeure de l'Eglise catholique, par son leadership, par la
pertinence et la qualité de son mémorandum adressé au chef
de l'Etat a sans doute été l'élément
détonateur ayant mûri la position du Marchal-président
à lâcher du leste.
C'est le cas de Vincent KAMBERE qui affirme :
« publié à une période particulièrement
difficile de l'histoire de notre pays, ce document de la Conférence
Episcopale a été pour les consciences chrétiennes une
sorte de phare qui éclaire l'histoire de nos sociétés
lacérées par les misères de toutes sortes et une
réelle interpellation pour les détenteurs du
pouvoir »14(*). Cet écrit qui encourage les
autres forces vives à ouvrir davantage l'oeil et le bon, sert de balise
dans la poursuite de la transformation sociale recherchée en RD Congo,
mérite d'être analysé.
B. Le Mémorandum historique du clergé
catholique
Répondant à l'appel
lancé par le président de la République, le 14 janvier
1990 lors de la traditionnelle présentation des voeux des corps
Constitués à Kinshasa, le Comité Permanent des
Evêques catholiques a, à l'issue d'une session extraordinaire
tenue à Kinshasa du 7 au 9 mars 1990, en vertu de ses qualités et
responsabilités pastorales, trouvé opportun d'adresser un
Mémorandum au Chef de l'Etat sur le fonctionnement des institutions
nationales, ce qui constitue l'une des contributions de l'Eglise catholique au
débat public sur la situation générale du pays.
Le Mémorandum des évêques, comme on le
nomme, a épinglé parmi les causes de la crise de
légitimité : le système politique hybride de
gouvernement ( le libéralisme et le totalitarisme),
l'institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution (MPR,
1970) et sa transformation en Parti-Etat (MPR parti-Etat, 1974)
basé sur un régime présidentiel où le chef de
l'Etat est le premier responsable à la fois des instances dirigeantes du
parti et du pouvoir exécutif, la gestion des finances de l'Etat comme
une caisse du parti-Etat sans référence à la loi
financière contraignante, le lourd endettement intérieur et
extérieur.
Bref, la mauvaise gouvernance de la chose publique
avec ses corollaires : impunité, corruption, forte tendance
à l'inversion de l'échelle des valeurs notamment au niveau des
critères de recrutement, d'appréciation et de promotion qui
l'emportaient généralement sur la vertu et la compétence.
Une autre critique concernait l'une des sources d'inspiration du système
politique zaïrois à savoir le principe du recours à
l'authenticité prôné par le président MOBUTU en 1972
dans sa fougue contre l'impérialisme occidental. Bien que valable en
soi, celui-ci a été mal géré.
De plus, voyant la dégradation continue de la situation
, le clergé catholique ne pouvait pas du tout accorder sa
bénédiction à un pouvoir politique qui entretenait
l'exploitation éhontée du congolais par le congolais, encore que,
plus d'une fois dans le passé, il avait élevé la voix pour
indiquer aux décideurs les effets pervers de l'absence de capitalisation
de la paix sur tous les plans par les différents gouvernements
successifs, lesquels ont conduit le pays à partir de 1996 à des
situations telles que : la guerre de libération, les rebellions, la
guerre d'agression avec des pillages systématiques des ressources
naturelles et minières.
Toutes ces guerres ont plongé le pays dans
l'insécurité et le chaos surtout avec la présence sur le
territoire national des multitudes de milices, des groupes armés
incontrôlés ainsi que des armées étrangères.
Dès lors, la forte tension qui gagnait les citoyens a permis de
comprendre qu'il s'agissait d'une quête de liberté et de
démocratie. Face à cette imposante pression sur les dirigeants
africains pour le virage démocratique par la remise en cause de leurs
systèmes des gouvernements, il est apparu très vite
évident que, comme un peu partout ailleurs sur le continent, le
régime mobutiste n'avait plus le choix de l'orientation politique
à suivre.
Hormis son caractère de dénonciation des
antivaleurs jadis qualifiées de fléaux, des pistes de solutions y
ont été proposées. Elles ont tourné autour du refus
du totalitarisme de l'Etat en faveur du pluralisme politique et de la mise en
place des Institutions de la Transition en vue de l'instauration d'un nouvel
ordre politique qui mettrait l'homme au centre de tout développement. Le
mécanisme approprié, pour ce faire, consistait en l'organisation
d'un débat public à l'échelon national, afin que tous les
secteurs de la vie nationale soient soumis à une évaluation sans
complaisance face à leurs politiques qui ont conduit le pays dans le
chaos.
A nos yeux, le discours du 24 Avril 1990 qui
annonçait l'ouverture au pluralisme politique pouvait être
perçu en termes d'autopsie d'une politique décriée et
rejetée par la majorité du peuple. Cette politique était
caractérisée par ce qu'on appelait les fléaux congolais
qui se traduisaient, entre autres, par le clientélisme, l'amateurisme,
la loi du plus fort, méfaits de la politique de monopartisme
qu'incarnait le Parti-Etat.
La large diffusion du Mémorandum des
évêques catholiques avait fait prendre conscience aux congolais au
point que son retentissement inattendu provoqua non pas seulement
« l'indignation du chef de l'Etat en tant que
premier destinataire »15(*), mais surtout des effets
démultiplicateurs après l'entrée en scène des
médias. Qui plus est, l'Eglise, à elle toute seule, ne pouvait
parvenir à bon port sans l'appui informationnel de la population et des
médias pour prolonger et vulgariser son message tant la profondeur du
mal était incommensurable.
C'est pourquoi, il importe de connecter spécifiquement
à présent l'apport des medias qui ont joué un rôle
déterminant dans la lutte pour le changement politique, encore que, la
libéralisation politique a ouvert la voie à la
libéralisation de la presse. Avant le 24 avril 199O, on connaissait
quelques stations privées de Radiodiffusion et de chaînes de
Télévision, seulement deux journaux à Kinshasa (Salongo et
Elima), un journal à Kisangani (Boyoma), un à Lubumbashi
(Mujumbe).
Mais dès l'avènement du processus de Transition,
la presse tant écrite qu'audio-visuelle a montré que le nouveau
journalisme devenait celui du combat et emboitait le pas au combat de
société que mène l'Eglise, ce qui explique l'apparition
des titres évocateurs de lutte comme : Le Soleil, L'Observateur, Le
Volcan, L'Evénement, La Conscience , Umoja, La Libération, Le
Potentiel, Demain le Congo, Le Phare, La Référence Plus, Le Soft,
L'Étincelle, La Rafale, Forum des As, L'Ouragan, L'intrus, L'Apostrophe,
Le Maximum, La Tempête des Tropiques, La Flèche, La
République, La Prospérité, des journaux satiriques et
caricaturaux Grognon, Pili-pili, Pot Pourri, etc. qui appelaient la population
à prendre conscience, à se libérer du vieil homme peureux
vis-à-vis de la gestion dictatoriale, à se mettre ensemble,
à travailler à l'unisson pour briser toutes les épreuves
qui jonchent le chemin vers le changement radical.
En outre, ces journaux, véritables programmes
politiques s'adressaient aussi aux acteurs politiques pour les convertir
à la promotion des valeurs morales dans la gouvernance. Tout en
décriant la dictature et ses pratiques, les revues missionnaires,
Renaitre, Afrique Espoir, Congo Afrique, Documentation et Informations Afriques
(DIA) etc. réputées pour des analyses fouillées sur les
questions sociales et politiques prêchaient la renaissance du Congo par
la conversion des mentalités afin de redonner confiance et espoir. Les
Radiodiffusions et Télévisions aussi bien religieuses
Elykia(catholique) Radio Maendeleo, Sango Malamu (protestante) Rtk
(kimbanguiste) et Rtmv, Rtp, Atv (Églises de Réveil) que
privées profanes (Cctv , Rtga , Canal Kin Tv, Horizon33 , Cmb,
TropicanaTv, Cebs , Raga Tv, Antenne A) et bien d'autres encore ont
contribué à offrir de nouvelles tribunes d'expression, de
participation citoyenne et politique , de conscientisation et de recherche de
la paix.
En réponse, il n'est pas risqué
d'affirmer que la réaction du pouvoir dictatorial était suivie
des vicissitudes au processus de changement dont les avancées obtenues
et les perspectives envisagées pour la sortie de crise furent
sabotées.
Paragraphe 2. Les vicissitudes au processus de changement
Un mois seulement après son discours historique du 24
avril 1990, le Maréchal-président se rétractera à
l'occasion d'un discours dit de clarification. Ce changement spectaculaire
créa de fortes tensions politiques dont l'essentiel se
caractérisait par de nombreux obstacles et obstructions du pouvoir (A)
pour bloquer le processus politique dans lequel le peuple avait placé
tous ses espoirs légitimes. A cette occasion, l'Eglise catholique
lança un appel à travers un message de vérité et de
conscientisation (B) qui invitait toutes les parties à
privilégier l'intérêt national.
A. Obstacles et Obstructions du
pouvoir
Le contexte de l'heure caractérisé par
l'exigence populaire des réformes avait embarrassé
sérieusement le pouvoir mobutiste. Aussi, face à la pression
populaire grandissante pour un changement démocratique appuyé par
la Communauté internationale, et par souci du maintien et de la
conservation du pouvoir, le Maréchal-président se trouvait-t-il
réellement devant un véritable dilemme.
Prenant au sérieux les menaces qui fusaient de partout,
le Maréchal-président réussît momentanément
à reprendre l'initiative en prononçant le 24 avril 1990, le
célèbre discours dans lequel il fit des concessions importantes.
Elles consistaient en la séparation nette entre le parti et l'Etat, la
réhabilitation des trois pouvoirs traditionnels (législatif,
exécutif et judiciaire comme seuls organes constitutionnels), la
dépolitisation de la fonction publique, de l'administration
territoriale, de l'armée, de la gendarmerie, de la Garde civile et des
services de sécurité, l'instauration du multipartisme à
trois et du pluralisme syndical, la révision de la Constitution en vue
de l'adapter à la période de transition ainsi que la mise en
place d'une commission constitutionnelle chargée d'élaborer la
Constitution de la Troisième République qui sera soumise au
referendum.
En clair, sur papier, le Chef de l'Etat a donc détruit
littéralement les bases de son régime par "l'abolition de
l'institutionnalisation du MPR"16(*) (Mouvement Populaire de la Révolution) et de
ses organes. Aussitôt, à Kinshasa, à Kisangani et à
Bukavu notamment, des manifestations de joie ont voulu «hâter la
démocratisation du régime», trop longtemps attendue. Mais,
cette ouverture démocratique, décrétée par le
Maréchal-président, lui-même, a aussitôt
été bloquée par une volte-face officielle suivie d'un
avertissement.
En effet, l'explosion de joie et les espoirs
légitimes suscités par ce discours précité furent
de courte durée, car, un mois plus tard, une grande déception
s'empara du peuple à l'occasion d'un autre discours dit de clarification
le 03 mai 1990 devant l'Assemblée Nationale. Bien qu'il ait
rectifié certains propos précédemment tenus, après
avoir réalisé « le vide juridique»17(*) créé, ce
discours fut un véritable coup asséné au processus de
démocratisation qu'il venait d'initier un mois auparavant, car, il le
vida largement de son contenu, notamment sur son appartenance au Mouvement
Populaire de la Révolution.
Pourtant, en proclamant la fin du monopartisme, le
président de la République augurait une ère nouvelle de
liberté et de démocratie. En qualifiant les bonnes paroles du
Maréchal-président de discours d'intention, le professeur Anicet
MUNGALA ajoute: « Ainsi, contrairement [...] le président
MOBUTU se rétractera le 03 mai 1990 lors d'un discours de clarification
au parlement pour confirmer son appartenance au Mouvement Populaire de la
Révolution tout en limitant le nombre de partis politiques à 3 et
contre toute attente, il nommera le 04 Mai 1990, un premier ministre, le
professeur LUNDA BULULU, sans consulter les autres forces politiques en
présence »18(*).
De toute évidence, il apparaissait visiblement que le
Maréchal-président a voulu ouvrir les portes démocratiques
avant qu'elles ne soient enfoncées. D'ailleurs, plusieurs
constitutionnalistes congolais et africains dont Joseph OWONA et Me Robert
DOSSOU19(*) l'ont
qualifié de discours constituant. Ce changement brusque et
inattendu a poussé la majorité du peuple, comme l'a
souligné le professeur MUNGALA, à déduire que
« l'idée de consultation populaire émergea pour
contourner le puissant courant de la Perestroïka et de la Glasnost
initié en Europe communiste et repris en Afrique sous forme de
négociation pour le changement démocratique par l'organisation
des conférences nationales »20(*). Cette appréhension confirmait
également les intentions larvées mais saisissantes contenues dans
le discours présidentiel du 03 mai 1990 devant la représentation
nationale, lesquelles s'étaient vite traduites en actes à travers
un ensemble d'obstacles et obstructions apparus pour saper le
processus politique.
Le pouvoir avait utilisé, comme il en avait l'habitude,
toutes les manoeuvres dilatoires, la corruption à prix d'argent, la
création d'une multitude de partis satellites du MPR, mensonges,
tricheries, intimidations... De façon ouverte, l'Eglise plaidera en
faveur de la poursuite du processus de démocratisation en
réclamant dans plusieurs messages, « la fin de
l'imbroglio politique et la tenue de la Conférence Nationale
Souveraine »21(*). Ses appels seront suivis d'un message d'espoir
adressé par les confessions religieuses pour la recherche d'un consensus
national en associant toutes les couches de la population aux
côtés des acteurs politiques.
En outre, unis par la foi chrétienne face au climat
délétère où la méfiance, la crispation, la
peur et les inquiétudes étaient au quotidien, les chefs
hiérarchiques des Confessions religieuses (Catholique, Protestante,
Orthodoxe, Musulmane et Kimbanguiste) adressèrent pour « la
1ère fois un message commun à toute la population,
pour que la CNS soit un lieu privilégié d'écoute mutuelle,
de dialogue, de concertation et de réconciliation »22(*) en insistant sur l'urgente
nécessité d'engager le dialogue pour redonner le souffle au
peuple qui plaçait tous les espoirs dans l'aboutissement du processus
enclenché vers la démocratie.
Cet appel fut un réel stimulant à
« l'élan général du peuple vers la
démocratie et de se libérer de la peur entretenue sciemment par
le régime en place »23(*) pour se maintenir ou conserver le pouvoir en dehors
des voies démocratiques. Dans cette perspective, l'Eglise décida
de maintenir le cap à travers un discours de vérité et de
conscientisation.
B. Discours de
vérité et de conscientisation
Dans sa principale charge pastorale de s'occuper du salut des
âmes et de sauver les corps qui les abritent, l'Eglise a
été, plus d'une fois, amenée à élever sa
voix au nom du peuple dont elle partage au quotidien les joies et les espoirs,
les tristesses et les angoisses, ce qui explique l'urgence de rappeler au
pouvoir politique à ses responsabilités encore que des
interrogations fusaient de partout sur les réelles intentions du pouvoir
d'empêcher définitivement le processus politique vers
l'instauration de la démocratie.
De plus, cet appel de l'Eglise a le mérite de rassurer
dans la justice, la transparence et la vérité les individus,
groupes d'individus, classe politique dirigeante et toutes les forces sociales
et politiques en présence. Mais, il faut noter que le peuple
congolais a plus d'une fois payé le prix fort dans son cheminement vers
la démocratie, car, cette expression de liberté était
perçue comme une humiliation pour le régime agonissant du
Maréchal-président MOBUTU.
Parmi les répressions subies par les congolais, on peut
retenir : les massacres des chrétiens le 16 février 1992,
les assassinats d'évêques, le sabotage des édifices et
temples, le plasticage des imprimeries de la presse écrite libre (les
imprimeries du Zaïre du Groupe Elima en octobre 1991, les imprimeries
Terra Nova la nuit du7/8novembe 1992, les installations du journal le potentiel
le 26/27décmbre 1992, etc.)
Aussi, il faut souligner que l'Eglise, cette autorité
morale d'une grande influence en RD Congo a, à certaines occasions,
fait l'objet de réelles discordes avec l'Etat, car, les deux parties ont
fréquemment vécu des relations en dents de scies
même depuis l'époque du Zaïre. Pour illustrer ces
tensions, nous évoquons :
-Le `'Te Deum`' chanté le 19
décembre 1965 lors de la clôture du Concile Vatican II, Mgr
l'archevêque de Kinshasa, Joseph-Albert MALULA dira au président
MOBUTU, présent dans la cathédrale : « C'est
pour nous un réconfort que notre gouvernement s'associe à nous
pour fléchir avec nous les genoux devant Dieu [...]. Monsieur le
président, l'Eglise reconnaît votre autorité, car,
l'autorité vient de Dieu. Nous appliquerons fidèlement les lois
que vous voulez bien établir. Vous pouvez compter sur nous, dans votre
oeuvre de restauration de la paix à laquelle tous aspirent si
ardemment »
-Le Te Deum le 18 Août 1966 en présence du
président MOBUTU, Mgr Joseph-Albert MALULA, Archevêque de
Kinshasa, dira au nom du peuple : « je voudrais être
ici le pauvre au milieu de l'abondance [...]. Nous voulons vous dire
à vous nos gouvernants : sachez que notre peuple attend de vous un
peu de soleil, notre peuple attend de vous un peu de joie ». Dans la
même foulée, l'on peut évoquer la déclaration du
clergé de l'Archidiocèse de Kisangani en 1968 : «
[...] les efforts actuellement tentés pour mettre en place une
administration moderne sont viciés à la base par le fait qu'on
confie des responsabilités importantes à des personnes qui n'ont
ni la formation ni la compétence requises.
Par ailleurs, l'utilisation des élites intellectuelles
et formées est souvent peu judicieuse soit parce que les responsables
actuels craignent d'être confrontés à des
éléments plus jeunes et mieux formés soit parce qu'on
nomme ces technocrates sans leur donner des moyens requis pour qu'ils puissent
travailler efficacement. On stérilise ainsi les talents et on les
détourne du service de la fonction publique (...) ».
L'engagement de l'Eglise de se déterminer par rapport
à l'Etat s'est davantage affirmé à partir du
concept « Une Eglise congolaise dans un Etat
Congolais »23(*)
énoncé par Mgr Joseph-Albert MALULA. C'est ainsi que dans
ses prises de position en tant que pouvoir spirituel, l'Eglise n'a cessé
d'interpeller les dirigeants politiques, leur rappelant la priorité de
mettre au devant le bien commun sur les intérêts particuliers.
Elle agit comme contrepoids, groupe de pression à l'endroit des
détenteurs du pouvoir temporel à la lumière de
l'Evangile.
Dès lors, on peut avancer que l'Eglise entretient des
rapports de collaboration permanents avec l'Etat et les autres partenaires
internes et externes dans la réalisation de nombreuses tâches et
actions salvatrices en faveur de la population surtout dans certains secteurs
publics prioritaires (éducation, santé, développement
rural, etc.) et dans le domaine communautaire. Cette vaste entreprise de
l'Eglise dans le social, participe activement, de façon remarquable
à son émergence et/ou son implantation au sein des
communautés à la base.
Section 2. Une présence
rayonnante et émergente de l'Eglise
Dans la quotidienneté des populations, sa
présence incontestable se manifeste dans les secteurs éducatif et
socioprofessionnel, encore qu'elle constitue une référence, voire
un modèle même pendant les moments de grande
instabilité politique perturbant le bon fonctionnement des structures
étatiques et communautaires à la base. Cet atout lui permet de
renforcer d'un côté, sa place comme partenaire social
privilégié de l'Etat (§1); de l'autre côté,
l'entente et la cordialité dans le cadre de l'oecuménisme dans le
processus de démocratisation (§2).
Paragraphe 1. L'Eglise, partenaire social
privilégié de l'Etat
Le secteur socio-éducatif en RD Congo constitue un des
champs d'action où l'Eglise excelle en réalisations pour la
satisfaction des attentes et besoins des populations. A l'instar des pouvoirs
publics et des privés non conventionnés, presque chaque
confession religieuse possède ses écoles. Selon les statistiques
fournies par la Coordination Nationale des écoles conventionnées
catholiques, en 2006 celle-ci gérait 11811 écoles dont 8869
écoles primaires (avec 2702.469 écoliers), 2942 écoles
secondaires, (avec 647.039 élèves), 41491enseignants dont 5629
femmes.
Face aux défis importants à relever par l'Etat
dont le secteur de l'enseignement en cette période de basse conjoncture,
les pouvoirs publics ne sauraient seuls tout faire. C'est pourquoi, il est de
son avantage de se faire aider par des structures comme les confessions
religieuses, étant donné que l'oeuvre éducative exige le
respect des valeurs éthiques; encore qu'elles sont également
expérimentées dans la promotion des valeurs citoyennes et
l'organisation des enseignements aussi bien primaire, secondaire
qu'universitaire qui, par ailleurs, demeurent d'obédience nationale.
Par ailleurs, pendant la longue étape de la Transition,
la RD Congo était quasiment en rupture avec la coopération
internationale, ce qui explique le fait que les différents
réseaux confessionnels d'enseignement national ont pu
bénéficier d'une multitude d'initiatives, d'aides
bilatérales et multilatérales en termes d'apport au renforcement
des capacités en infrastructures, en support pédagogique, en
mobilité et transfert des compétences professionnelles.
Un regard rétrospectif nous renseigne que parmi les
trois universités nationales en RD Congo, deux sont d'origine
confessionnelle (catholique /Lovanium-Université de Kinshasa et
protestante /Université de Kisangani). Alors qu'avant
l'indépendance, l'opinion générale coloniale
considérait qu'ouvrir une Université au Congo était
prématuré et une erreur dangereuse, un petit groupe de
catholiques isolé a par idéal et par humanisme chrétien,
créé la première Université au CONGO :
L'Université Lovanium (Université de Kinshasa) ouverte le 15
janvier 1954 suivi plus tard par les protestants, promoteurs de
l'Université de Kisangani.
Dans son livre `'L'école trahie'', le Père
Martin EKWA bis ISAL, s.j. écrit : « L'ouverture des Instituts
Supérieurs Pédagogiques (ISP) destinés à former
des enseignants qualifiés pour les classes du cycle d'orientation fut
aussi une étape à la fois décisive et prometteuse. Le
Bureau de l'Enseignement Catholique se lança avec une audace surprenante
dans la création des Instituts Supérieurs Pédagogiques
(ISP) à Kinshasa en 1961, à Boma en 1963, à Bukavu en
1965, à Kikwit et à Lubumbashi en 1966, à Bunia et Mbuji-
Mayi en 1968 » 24(*).
Ainsi, l'Eglise croit fermement que la promotion du bien
commun passe nécessairement par l'éducation qui remoule la
conscience et amène l'individu à la maturation d'un être
viable et fiable, c'est-à-dire, doué de raison et de
liberté. Autrement dit, transmettre les connaissances théoriques
permet le partage des expériences de l'humanité et des
qualités morales. Et ces dernières n'étant pas
innées, elles doivent s'apprendre en société,
entendons : la famille, l'Eglise, l'école, les mass médias,
les groupes de réflexion, organisations et autres institutions à
vocation éducative.
Notons qu'en principe, la tâche éducative
relève d'abord de la responsabilité de l'Etat. Toutefois, devant
la crise qui a institutionnalisé l'inversion des valeurs et
généralisé l'opinion selon laquelle les études ne
sont pas indispensables pour accéder à de hautes fonctions,
l'Eglise a perçu à juste titre que l'éducation doit
devenir plus une tâche commune, une tâche communautaire si l'on
veut éviter de mettre en péril tout le système
éducatif. C'est dans cette optique que nous considérons d'abord
l'éducation comme le chemin par lequel viendra l'instauration d'un ordre
nouveau, le lieu où les libertés fondamentales doivent
s'exercer.
Sans négliger les apports des uns et des autres, nous
mettons souvent en exergue la prédominance de l'Eglise Catholique dite
« Eglise-mère » dans le langage courant en RD Congo,
lequel reconnait implicitement même au niveau national, la permanence de
son leadership.
A. Leadership permanent de
l'épiscopat catholique
Comme souligné ci-haut, l'Eglise congolaise en
général a servi et sert de canal de transmission des
revendications populaires dans le cadre de sa mission pastorale. Quant à
l'Eglise catholique, elle a, de façon ininterrompue, assuré et
assumé le leadership moral, intellectuel et social au sein des
confessions religieuses. Son image s'est accrue à telle enseigne qu'elle
a acquis la réputation de prendre les risques d'affronter l'Etat en
apparaissant au devant de la scène sociopolitique nationale de
façon plus que perçante quel que soit le régime en place,
avec des écrits portant des titres suggestifs tels que
répertoriés par Mgr Professeur Faustin Jovite MAPWAR
BASHUTH :
[« Respectons la vie et la personne humaine (20
janvier 1996) ; Non à la guerre, Oui à la paix et à
la justice (29 octobre 1996); Lève-toi et marche (31janvier1997);
Conduis nos pas Seigneur, Sur les chemins de la paix(1998) ; Sois sans
crainte, la situation dramatique actuelle et l'avenir de la RD Congo(19
novembre 1999); Courage le Seigneur ton Dieu est au milieu de toi
(juillet2000); Tous pour les intérêts supérieurs de la
Nation (2 mars 2001); L'espérance ne déçois jamais, le
dialogue du peuple congolais dans la liberté, la justice et la
vérité (7 juillet 2002); Quel avenir pour le pays ? (6
juillet 2003); J'ai vu la misère de mon peuple, trop c'est trop (15
février (2003); Pour l'amour du Congo, je ne me tairai point (14
février 2004); Frères, que devons-nous faire? L'heure des
responsabilités a sonné (3 juillet 2004); Voici le temps
favorable, voici maintenant le jour du salut (5 février 2005); Pourquoi
avoir peur? L'avenir du Congo dépend de son peuple (22 juillet 2005);
Levons-nous et bâtissons ! Pour un Congo nouveau (mars 2006); Pour
une fin de transition apaisée, le peuple avait le coeur à
l'ouvrage (22 juin 2006); La vérité vous rendra libres, le
verdict des urnes dans la transparence (5 octobre 2006); Avance en eau
profonde, la foi dans l'avenir du Congo (5 décembre
2006) »25(*)].
En outre, cette place de choix très
considérée dans la vie nationale qu'elle occupe tient
également de ses prises de position sur la conduite, le
fonctionnement et la gestion de l'appareil étatique. En effet, l'Eglise
catholique est restée la plus dynamique de toutes les autres
communautés religieuses existantes à travers notamment l'ampleur
de sa production. Celle-ci est d'une richesse indéniable composée
des messages, déclarations, points de presse, appels, lettres pastorales
adressés aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne
volonté et une série de mémorandums à l'attention
des dirigeants politiques. Comme fer de lance de toutes les confessions
religieuses nationales, son rayonnement se trouve être étendu
largement par le biais de sa vaste implantation sur toute l'étendue du
pays, son investissement dans les grandes infrastructures des domaines
sanitaire, médical et les oeuvres à impact visible (de petites et
moyennes unités de production, génératrices de revenus et
d'emplois) sans compter la publication, la diffusion des manuels
éducatifs, etc.
Durant toutes les étapes de l'histoire politique de la
RD Congo, particulièrement la longue période de transition
démocratique (16 ans), elle a été amenée à
prendre des positions énergiques qui ont déterminé les
esprits et les comportements citoyens. En tant qu'Eglise-mère, elle
reste la seule qui organise des communautés ecclésiales vivantes
de base dans toutes les entités territoriales
décentralisées jusque dans les coins les plus reculés du
pays.
Ces micros structures constituent des relais efficaces pour
véhiculer les messages de l'Eglise, ce, malgré la montée
vertigineuse des assemblés évangéliques chrétiennes
appelées communément Eglises de réveil. Soulignons,
à ce sujet, que suite à la crise multiforme qui a ravagé
bon nombre de foyers, le sursaut religieux a percé au moyen d'une
stratégie thématique intéressée qui leur a permis
de gagner plusieurs adeptes.
B. l'Emergence des Eglises de
Réveil
Bien que toutes ne soient pas logées à la
même enseigne, il importe de noter que depuis l'accentuation de la crise
généralisée , plusieurs personnes non satisfaites et
déçues de ne pas obtenir gain de cause facile avaient
quitté les rangs des Eglises chrétiennes traditionnelles à
la recherche de la solution-miracle au sein des Eglises dites de
Réveil dont la plupart ont centré leurs discours et thèmes
sur l'immédiateté de la guérison, du mariage, des miracles
et de la prospérité en vue de gagner la notoriété
au sein de la société.
C'est ainsi que de nombreuses personnes, voire des familles
entières, conquises par ce charme, ont intégré ces rangs.
A ce jour, leur impact ne fait l'ombre d'aucun doute, car, en dehors de
l'évangélisation, elles sont considérées aussi par
une grande frange de la population comme des lieux d'espérance de
conversion des mentalités, de transformation de la
société, de l'amélioration de conditions de vie mais
surtout des refuges. Malheureusement, il sied de souligner que le peuple de
Dieu a connu pas mal de déchantement et continue superbement
à dénoncer des pasteurs qui ont su manipuler la
naïveté et la misère des Congolais.
C'est le cas notamment qu'il suffisait de toucher son poste
téléviseur pour que le miracle se produise. Mais plus le temps
passait, plus les Congolais se rendaient compte de la supercherie. L'effet
positif de ce réveil a, en effet, permis à bon nombre d'adeptes
de sécher les rangs, qui plus est, si le pasteur avait réussi
à se constituer une relative prospérité, les
fidèles eux, avaient fini d'économiser les illusions. Comme une
mode, que d'Eglises de ses pasteurs ne désemplissent, car, plus personne
n'y croit.
Qu'a cela ne tienne, bon nombre de pasteurs ont oeuvré
dans l'organisation de plusieurs journées de prières et d'actions
de grâce, campagnes de sensibilisation, etc. pour l'instauration de la
démocratie, partant de l'audience qui leur a permis d'influer dans les
rapports de force sur l'échiquier politique national. C'est le cas de:
l'Armée de l'Eternel du Général Sony KAFUTA ROCKMAN ;
Armée de Victoire du pasteur KUTHINO FERNANDO avec son
événement controversé `'Sauvons le Congo''; des pasteurs
Jean-Oscar KIZIAMINA KIBILA du Ministère de la PUISSSANCE ; MUTOMBO
KALOMBO du Ministère AMEN ; Denis LESSIE d'Arche de NOE, etc.
Tant d'autres actions ont enrichi leur contribution
participative tout au long du processus ayant conduit aux élections
historiques de 2006. Soulignons également que cet ancrage a permis
l'élection de deux des pasteurs très en vue à savoir
Jean-Oscar KIZIAMINA KIBILA et EJIBA comme députés nationaux
à l'Assemblée Nationale.
Paragraphe 2. L'impact de
l'oecuménisme dans le processus de démocratisation
Le processus de démocratisation en RD Congo a
été l'une des occasions qui a contribué au renforcement de
l'oeuvre oecuménique. En effet, remontant de plusieurs années,
bien avant l'avènement dudit processus, cette pratique fut
instituée dans le souci de renforcer la foi et l'unité
spirituelle, de rapprocher les personnes et les coeurs, d'établir des
synergies, de mobiliser des ressources permettant de mener des actions
concrètes et non véhiculer des utopies dans les chantiers
politique, économique, social, culturel, spirituel, moral qui
constituent actuellement la RD Congo.
Pour se faire entendre, il fallait parler d'une même
voix, gommer les divergences dues à la taille des groupes, à des
affirmations dogmatiques prétendant posséder toute la
vérité et/ou aux intérêts partisans. Comme les
écritures saintes l'enseignent, la mission de l'Eglise doit se placer
dans la continuité de celle de Jésus-Christ dont elle se
réclame être le disciple. C'est pour cela que, pour mener à
bien son oeuvre, Jésus-Christ avait affiché à tout moment,
le comportement d'un Homme libre pour écouter, guérir, aimer
l'autre; bref, libre pour faire le bien.
Ainsi, devant l'urgence, il était indispensable de
faire de la sauvegarde de la Nation le point de jointure et de convergence.
Malgré quelques incidents enregistrés ça et là, cet
engagement dans l'expérimentation de l'oeuvre oecuménique a
permis à l'Eglise de dépasser le cap du travail en ordre
dispersé et les clivages doctrinaux à travers le
développement d'une Chaîne de Solidarité Agissante
où l'on privilégie la recherche du bien commun pour la
dignité du peuple congolais.
A. La Chaîne de Solidarité Agissante
Rentrant dans leur réalisation pour le salut de la
Nation, la période de transition a vu naître la Chaîne de
Solidarité Agissante au niveau de l'Eglise congolaise. Née le 27
juillet 1997 à l'initiative des chefs des Confessions
chrétiennes, elle est un service inter-ecclésial
représenté en une plate-forme oecuménique des commissions
Justice, Paix et Sauvegarde de la création. Pour réaliser ses
objectifs, la Chaîne dispose de six Commissions Nationales Permanentes
qui gravitent autour du Comité Directeur.
Ces commissions sont des organes techniques chargés
chacune d'activités spécifiques. Les quatre commissions
permanentes nationales sont :
- La commission éducation civique et
élections
- La commission protection et promotion des droits de
l'homme
- La commission gestion des catastrophes et des
urgences.
- La commission paix, réconciliation et
résolution des conflits
Plus que saluée, elle a représenté une
opportunité louable et salutaire, en se fixant comme objectifs, d'une
part, de réaliser en commun les objectifs traditionnels dévolus
aux commissions Justice, Paix et Sauvegarde de la création, d'autre
part, la protection et la promotion de la justice. Bien que les ennemis
s'appuient souvent sur la division, selon l'adage « Diviser pour
mieux régner », qui a conduit à l'affaiblissement
littéral de l'Etat, pour empêcher les Congolais de faire
tête en bloc, l'engagement de l'Eglise n'a pas varié, car, sa
mission doit plus consister à libérer les Congolais de l'emprise
de l'esclavage dans tous les domaines fondamentaux, en commençant par la
libération du coeur qui passe notamment par le
changement des mentalités.
Etant donné qu'il existe au sein de l'Eglise une
interaction entre ses membres, cette solidarité agissante en
chaîne ne devrait pas seulement concerner les chefs hiérarchiques
des confessions religieuses mais également les fidèles,
c'est-à-dire, qu'il n'y ait pas d'un coté, une hiérarchie
qui dicte, qui s'exprime, donne les ordres et ordonnance tout, et de l'autre
coté, un peuple, des fidèles infantilisés et passifs, une
masse diffuse qui exécute aveuglement les ordres/recommandations de la
hiérarchie.
C'est pourquoi, au regard de divers enjeux et défis de
la démocratisation/ Elections, défis de la paix, de
l'unité et /ou de la réconciliation nationale, défis
des droits humains, devant le défis de la pauvreté
généralisée, il était impérieux de voir
cette osmose entre les communautés chrétiennes produire des
résultats probants. Pour y parvenir, elles devaient travailler en
collaboration pour mener des actions concrètes qui viseraient à
affronter les défis ci-haut évoqués.
B. Les actions en collaboration
Les confessions religieuses ont justement
appréhendé la portée de la stratégie de l'Union
fait la force, la stratégie de la force solidaire. En effet, des actions
en communion libèrent ses initiateurs et bénéficiaires de
la peur de l'insécurité, de l'incertitude du lendemain, de la
dictature avilissante, des pesanteurs socioculturelles et religieuses et les
arment d'un courage plein de témérité pour affronter toute
forme d'exploitation de l'homme par son semblable, l'exploitation des
gouvernés par les gouvernants, les antivaleurs qui sont légion et
qui déshumanisent la vie des congolais.
Mais, il sied de rappeler que le sens d'engager les actions en
collaboration constitue une exigence sociologique, une remise en question de
soi, un certain brisement; nonobstant les dissimilitudes qui pouvaient
apparaître. De ce fait, le souci d'éviter de retomber dans des
considérations religieuses, politiques, ethniques, culturelles,
doctrinales, économiques qui les affaibliraient et les diviseraient, a
exigé d'elle non seulement de dépasser ces obstacles de plusieurs
ordres (doctrinal, idéologique et politique, ethnique, culturel,...),
mais également d'éviter toute improvisation et tout amateurisme
dans l'agir.
Mieux encore, dans le souci de pro activité, force est
de reconnaître également le mérite d'avoir associé
les assemblées chrétiennes dites Eglises indépendantes,
à la réflexion et à la réalisation des actions
concertées et engagées par les Eglises Chrétiennes. Face
aux grandes questions cruciales du pays, les premières citées qui
drainent de foules de fidèles devaient être mises à
contribution par obligation de résultat. Ces actions comportaient
à la fois la préparation des hommes dans une approche
participative et la constitution du matériel de travail susceptible
d'amener les fidèles, peuple de Dieu à la citoyenneté
responsable, à l'amour de Dieu et de la Patrie si nous pouvons emprunter
l'expression latiniste «Pro Deo Pro Patria ».
Cela dit, les actions en collaboration dans cette
1ère phase de la transition ne pouvaient être
fructueuses que dans la mesure où il y avait organisation et
coordination de toutes les communautés des enfants de Dieu sans
prétention aucune de supériorité des unes sur les autres.
Par conséquent, il était capital de mettre sur pieds des
stratégies d'actions et de s'engager à les réaliser sur le
terrain, main dans la main, pour mettre en déroute les
détracteurs internes et externes de la RD Congo.
C'est le cas de mentionner les réalisations suivantes
parmi les nombreuses organisées dans le cadre de l'accompagnement du
processus de démocratisation :
1. La tenue des journées de Consultations Nationales
sur la marche du pays du 28 février au 11 mars 2000. Organisées
sous les auspices des Chefs de confessions religieuses en prévision du
dialogue inter congolais, lesdites journées ont été
appuyées par la Conférence des Eglises de toute l'Afrique (CETA).
Elles ont été couronnées par un culte oecuménique
célébré dans la Cathédrale du Centenaire Protestant
à KINSHASA/LINGWALA.
2. Le PAREC (Programme OEcuménique de Paix,
Transformation des Conflits et Réconciliation)
piloté par le Révérend Pasteur NGOY MULUNDA
de l'Eglise Protestante Méthodiste. Cette institution s'investit dans la
gestion des conflits, spécifiquement dans la démobilisation et la
réinsertion des enfants soldats, le ramassage et la destruction des
munitions et des armes légères.
3. La création par les confessions religieuses de la RD
Congo d'un cadre de concertation, de dialogue sur lequel va se fonder le vaste
programme de préparation citoyenne notamment pour l'Education Civique et
Electorale. Le protocole d'accord y relatif a été
signé le 24 juillet 2004 à KINSHASA.
Au demeurant, malgré que le rôle de l'Eglise au
milieu du village reste d'actualité dans le contexte post-conflit
particulier à la RD Congo, il faut cependant, s'interroger sur le fait
qu'elle n'arrive pas dans sa diversité à atteindre le
résultat escompté. Ce constat amer a souvent tourné autour
d'un manque de prise de position coordonnée entre elles dans certaines
circonstances, comme par exemple, pendant la période très
mouvementée partant de l'organisation du referendum constitutionnel des
18-19 décembre 2005 jusqu'à celle des premier et second tours de
l'élection présidentielle et des élections
législatives. Cela dénote des préoccupations sur le
rôle de l'oecuménisme qui, pourtant, doit arriver à
corriger de telles défaillances.
Toutefois, il y a lieu de reconnaître que cette
initiative a permis d'offrir des opportunités du genre `'rapprocher les
vues des différentes communautés religieuses en présence,
colmater les brèches par la conciliation entre protagonistes,
éveiller des consciences, etc. De plus, cette osmose religieuse qui
s'est manifestée presque partout en Afrique, a permis de conforter le
crédit de l'Eglise à telle enseigne que son rôle a
été remarquable dans la conduite des Nations vers l'ouverture au
pluralisme politique et au sein des institutions démocratiques dont le
cadre de définition des phases transitoires fut d'abord la
Conférence nationale souveraine en tant qu'un cadre,
un forum national réunissant les délégués de tous
les corps constitués de la Nation en vue de réfléchir sur
le devenir du pays.
Partout en Afrique où se sont tenus ces forums,
l'Eglise y a pris souvent une part active, voire décisive, pour pousser
l'avancement, l'aboutissement des processus de démocratisation et de
réconciliation enclenchés. En RD Congo, son poids sociopolitique
considérable lui a valu ainsi sa participation au sein des Institutions
de transition.
CHAPITRE II : LA
PARTICIPATION DE L'EGLISE AU SEIN DES INSTITUTIONS DE TRANSITION
D'entrée de jeu, il est important de préciser
que l'Eglise s'ouvre au monde pour l'évangéliser, pour lui
annoncer l'Evangile afin que ce monde se convertisse à sa lumière
et croie. Comme l'a souligné le Pape Jean Paul II dans son encyclique
« Redemptoris missio »26(*), l'Eglise a évolué dans sa conception
de son immixtion dans le temporel : son action, qui s'inscrit dans la
durée, est une continuité de sa mission de défenseur des
valeurs chrétiennes, de porte-parole des sans voix, des
marginalisés de la société face aux régimes qui
avilissent les populations dans les différents Etats.
Ainsi, « la mission de l'Eglise est plus
urgente que jamais, elle a peut être changé de visage, mais reste
celle qui doit s'engager parce que l'être missionnaire appartient et vit
dans le même monde et cela suppose qu'elle devait intéresser aussi
bien les fidèles que ceux qui vivent en dehors
d'Elle »27(*).
Ceci expliqué que l'Eglise en général, et le clergé
catholique en particulier, ait connu une fulgurante ascension à travers
sa participation à la gestion du temporel.
Voilà pourquoi, presque partout en Afrique, notamment
en RD Congo, l'Eglise, avec le soutien du peuple, s'est s'impliquée dans
l'exercice du pouvoir temporel (Section1), en dépit de l'aboutissement
final de ces conférences qui n'a pas été satisfaisant
partout, car ici et là, les régimes monopartites ont tenté
et parfois réussi une récupération des dividendes à
leur profit. Tel a été, par exemple, le cas de la RD Congo
(ex-Zaïre) avec la reprise en main de la situation par le pouvoir du
Maréchal-président MOBUTU (Section2).
Section1. L'exercice par l'Eglise
du pouvoir temporel
S'il est admis que les politiques mises en place par les
pouvoirs publics ont engagé l'Etat dans le chaos, il convient
également d'admettre que l'exercice par l'Eglise du pouvoir temporel fut
une conséquence logique du déficit de confiance apparu dans le
chef des populations. En effet, au fil des ans, l'Eglise a, par son
engagement, grandement contribué à la maturation de la conscience
nationale, l'éveil politique des citoyens, la dénonciation des
fléaux nationaux, etc.
Dans le même ordre d'idées, l'initiative des
confessions religieuses (Communauté des Eglises Baptistes Unies,
Communauté Evangélique du Congo, Armée du Salut)
d'obédience protestante a emboité le pas en mettant sur le
marché pendant cette Transition « un manuel d'éveil
citoyen, agréé par le Ministère de l'Enseignement
Primaire, Secondaire et Professionnel au n° MINEPSP/SG/80/0858/2004 pour
la classe de Sixième Secondaire»28(*).
La collaboration acquise de l'Eglise soeur suédoise
(Mission Evangélique Suédoise et Conseil Suédois de
Mission) traduit clairement le vouloir agir de l'Eglise congolaise à
poser en amont et en aval pour aider à l'instauration des principes
démocratiques tant recherchés par la jeunesse. En amont, il est
question de préparer un modèle de citoyen, défenseur des
valeurs chrétiennes et des valeurs humanitaires; alors qu'en aval,
devant l'hégémonie des antivaleurs, les notions du Civisme-Morale
intériorisées visent à influencer les comportements
/attitudes des responsables d'écoles de ces jeunes à la
croisée des chemins entre la poursuite des études en
faculté et l'entrée dans le monde d'emploi, chacun d'eux avec ses
réalités spécifiques. Son impact diversifié l'a
propulsée au devant de la scène politique suite aux fortes
pressions des forces vives, sociales et politiques qui réclamaient la
convocation d'une CNS.
Analyser l'exercice par l'Eglise du pouvoir temporel revient
donc à démontrer comment son autorité morale a
influencé la marche de l'Etat vers la démocratie, et ce, en
prenant la direction de la conférence nationale (§1), avant de
relever les obstacles à l'ascension des clergés catholiques
à la direction des conférences nationales (§ 2).
Paragraphe 1. La direction de la conférence nationale,
un engagement politique salutaire
Partant des réflexions menées sur le
déroulement des transitions africaines, l'action de l'Eglise dans
l'effondrement des régimes autoritaires a été
annonciatrice. Cependant, il importe de préciser que
« certains Etats ont subi, plus que d'autres, une influence beaucoup
plus grande des confessions religieuses ; tout comme certaines confessions
religieuses, par leur importance sociale, auront marqué plus que
d'autres l'évolution politique de leur pays»29(*).
A ce propos, évoquer l'unité d'actions à
travers son soutien aux revendications légitimes des congolais, mais
dans la diversité de leurs dogmes devrait caractériser
l'engagement de l'Eglise dans le processus de démocratisation
A. L'unité dans la diversité
Tantôt en silence, tantôt avec fracas, l'Eglise en
RD Congo a cheminé avec le peuple dans sa quête du changement.
Malgré leur disparité, les confessions religieuses ont, toutes
tendances confondues, accompagné le peuple dans sa lutte pour la
démocratie véritable.
Dans la plupart des cas, l'exigence des peuples africains,
là où se sont tenues les Conférences Nationales,
était de voir un évêque présider l'instance. Sa
proximité au quotidien de la précarité des conditions de
vie des populations le met en position de choix pour plaider leur cause.
L'exemple est inspiré du Benin qui est considéré comme
Pionnier dans cette expérience africaine. Mais, face aux efforts
vainement conjugués de partout pour rompre de façon pacifique
avec la dictature, le peuple congolais se retrouvait devant un dilemme : se
laisser abattre dans la résignation ou payer le prix fort pour renverser
le régime implacable du Maréchal-président MOBUTU.
Consciente de la force qu'elle constitue et par souci de
vérité, de transparence et de neutralité dans la conduite
du processus de démocratisation, l'Eglise a été mise en
exergue tant au niveau de la Conférence Nationale dite Souveraine qui va
réfléchir sur l'histoire nationale, établir les nouvelles
règles de jeu et définir le cadre institutionnel devant remplacer
l'ancien système dictatorial, qu'au niveau des Institutions de la
Transition, d'où, il importe d'évoquer la prise en charge directe
du temporel par l'Eglise.
B. La prise en charge directe du
temporel
Autrefois, le rôle des acteurs sociaux internes dans les
changements politiques intervenus a fait l'objet de tensions avec le pouvoir.
Ainsi, l'Eglise est comptée parmi ces acteurs, partant de son
investissement dans les débats politiques, pour l'instauration et/ou
pour l'aboutissement de l'ouverture démocratique sur le continent.
S'agissant du contexte susvisé, le professeur CONAC
souligne : « ce processus s'est dans la majorité des cas
évertué à mettre en place des phases provisoires
qualifiées de transitions démocratiques qui sont des
périodes au cours desquelles un pays modifie ses structures politiques
pour passer d'un régime autoritaire à un régime
démocratique »30(*).
Comme un peu partout sur le continent, la traduction d'une
lassitude des populations à l'égard de régimes
dictatoriaux, prédateurs et inhumains a révélé la
preuve d'une saga magistrale sur le dos des peuples réduits en
clochards, ce qui sera à la base des crises multiformes qui ont fini par
imposer l'urgence et la nécessité de repenser autrement le
fonctionnement des Etats.
En RD Congo, du fait de la crise multiforme, toutes
les institutions nationales se trouvaient discréditées au point
de ne plus être en mesure de tenir un nouveau dialogue constructif avec
le peuple pour concevoir un nouveau projet de société pouvant
servir de cadre de réalisation du consensus national. Mais, ce qui est
encore positif à souligner, c'est la grande diversité d'acteurs.
En effet, le contexte congolais obéissait essentiellement au fait que
non seulement le peuple de Dieu chrétien en majorité mais aussi
des non-chrétiens étaient fortifiés dans leur
détermination par l'exigence d'ouverture à la
démocratisation, appuyée par la pression extérieure
agissant sur la dynamique interne.
Ainsi, saisissant le coche au bond, l'Eglise n'a pas
reculé dans son action évangélisatrice pour conduire le
peuple à la liberté et à la démocratie. Dans ces
conditions, le peuple s'était obligé de trouver une
manière d'assumer directement sa responsabilité devant la
situation de crise. En voulant se mettre en conférence pour obéir
à la tradition africaine de la palabre, le peuple a fondé son
espoir de voir un homme de DIEU exercer les charges temporelles en tant que
président du forum national en vue d'opérer des choix courageux,
difficiles mais vitaux pour sauver l'Etat du chaos.
Par contagion d'idées, l'exemple très
remarquable du Benin a servi de locomotive en tant que premier Etat du
continent dans l'action et l'engagement politiques d'un évêque
à la tête d'une grande institution politique qui présida
à la destinée nationale. La barque était si bien
menée par son capitaine, aidé de tout l'équipage, que
l'Etat et ses habitants ont tiré profit de la prime de
démocratie.
Comme le souligne MUKUNA MUTANDA, « dans cette
entreprise de régénération d'une société
plutôt dégénérée, certains pays africains
comme le Congo, le Bénin, le Togo, le Gabon et le Zaïre (RD Congo),
ont vu leurs Conférences Nationales présidées par les
Evêques »31(*). Il s'agissait de : Messeigneurs
Isidore de SOUZA, archevêque coadjuteur de
Cotonou, au Bénin ; Ernest KOMBO,
évêque d'Owando, au Congo; Laurent MONSENGWO
PASINYA, archevêque de Kisangani, au Zaïre;
Philippe FANOKO KOSSI KPODZRO
évêque d'Atakpamé, au Togo; et BASILE MVE
ENGONE, évêque d'Oyem, au Gabon (...) qui
ont rayonné et prédominé dans cet investissement
remarquable en faveur de la démocratie. A l'exception du Niger et du
Mali, quelques Etats ont connu ces moments historiques de Conférence
Nationale selon diverses configurations (forum, consultation, instance des
réformes des Etats monopartites et dictatoriaux.)
C'est le lieu de saluer avec grande admiration et respect le
peuple béninois qui, face au contexte politique tendu, a joué un
rôle déterminant dans le choix salutaire d'un prélat
catholique en la personne du très vénérable Feu Mgr
Isidore DE SOUZA. A travers cet engagement de l'Eglise Catholique qui a
préféré mobiliser ses éminences au service de la
Nation, cet acquis fut un signal fort qui traduisait sa détermination
pour un changement démocratique viable à la fois pour le
Bénin et un exemple pour toute l'Afrique entière.
Le même choix d'un évêque en RD Congo,
comme président de la Conférence Nationale Souveraine (CNS) fut
un couronnement du long et laborieux investissement de l'Eglise portée
par les autres corps sociaux dans la lutte pour l'avènement d'une
société réellement démocratique.
Plusieurs mobiles justifient cette perception du peuple qui a reçu
et accueilli comme un signe d'espoir et un don du ciel cette désignation
avec l'acquiescement des autres communautés religieuses, conscientes de
leur mission pastorale.
L'Eglise catholique pour sa part, gardienne des valeurs
chrétiennes depuis des siècles, déclarera avoir
accepté cette charge comme « un don et un bien de l'esprit du
Christ, car, la figure de Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA, Archevêque de
KISANGANI, traduisait l'expression générale de la volonté
populaire et signe de la communion véritable entre l'Eglise et le peuple
de DIEU»32(*).
Cette prémonition résulte de
l'appréhension de la majorité des citoyens qui pense que la
politique n'est jamais une entreprise de neutralité, mais un jeu
dangereux où ses stratégies basées sur les rapports de
force laissent le flanc au mensonge et à la démagogie. Dès
lors, la présence de l'Eglise par le Prélat dans la recherche des
solutions à la crise multiforme a auguré un réel signe
d'espoir malgré les obstacles majeurs à surmonter dans la
dynamique du vent de changement véritable.
Paragraphe 2 : Les obstacles à l'ascension du
clergé catholique à la direction de la conférence
nationale
En préliminaire, il convient de relever que l'Eglise
catholique avait d'abord exprimé ses réticences à voir son
évêque assumer cette importante charge politique au sommet de
l'Etat. Elle était désireuse de voir un laïc présider
aux destinées de la Conférence Nationale Souveraine, étant
entendu que cette responsabilité ne relevait ni de la vocation, ni de la
mission pastorale d'un évêque conformément aux dispositions
du Saint-Siège interdisant formellement aux prêtres, religieux et
religieuses ainsi qu'aux évêques de solliciter ou briguer un
mandat politique pour des raisons évoquées
précédemment.
Ensuite, deux autres obstacles majeurs sont apparus quant
à l'ascension du clergé catholique à la direction des
conférences nationales souveraines sur le Continent. En plus du Vatican
réticent et attaché à sa position officielle de laisser
aux laïcs la charge de gérer la res publica (A), les pouvoirs
dictatoriaux en place, soucieux de maîtriser l'orientation de ces
conférences nationales, craignaient que l'ascension du clergé
à la tête de ces forums ne les fasse échapper à leur
contrôle (B).
A. Les réticences du
Vatican
Pour comprendre les réticences du Vatican, il importe
d'abord d'examiner quelques spécificités du catholicisme,
étant donné que Mgr le président du bureau de la CNS en RD
Congo en est l'émanation. En effet, selon LUNDIONGO NDOMBASI, deux
canons du code de droit canonique de 1983 sont en rapport avec l'engagement
politique des ministres de Dieu/clercs (Evêque, Prêtre, Religieux,
Diacre, Consacré) à savoir :
1- Le Canon 285, &3 qui
dispose : « Il est interdit aux clercs de remplir les
charges publiques qui comportent une participation à l'exercice du
pouvoir civil ». 33(*)
2- Le Canon 287 &2 qui
énonce : Les clercs « ne prendront pas une part active
dans les partis politiques ni dans la direction des associations syndicales
à moins que, au jugement de l'autorité ecclésiastique
compétente, la défense des droits de l'Eglise ou la promotion du
bien commun ne le requièrent. Les clercs se limiteront à
éclairer les consciences des fidèles laïcs, les former
à prendre leurs responsabilités afin d'imprégner le monde
d'esprit évangélique ».34(*)
Dans le même ordre d'idées, les
évêques du Congo écrivaient : « Dans
les circonstances présentes, même s'il y avait des pressions, il
est exclu de penser que le clergé pourrait assumer un rôle
quelconque de suppléance dans la conduite des affaires de
l'Etat. ».35(*)
C'est ici le lieu de saluer la mémoire du Pape Jean-Paul II qui a servi
l'Eglise avec détermination et engagement dynamique, car, globalement,
son action constante et la contribution diffuse du Saint-Siège dans la
réalisation du rêve démocratique dans le monde ont
suscité plus qu'un intérêt. Grâce à leur
rôle révélateur sur la conscience populaire, ses
nombreux déplacements ont provoqué un renouveau dynamique dans le
chef des peuples opprimés. Tels furent les cas contre le totalitarisme
communiste, la chute du mur de Berlin et la fin des dictatures africaines.
Dans son engagement pour la paix, la liberté et la
démocratie, le Pape Jean-Paul II a pris son bâton de
pèlerin pour fustiger et dénoncer les affres des pouvoirs
dictatoriaux contre la volonté des peuples. Unanimement, il est admis
qu'il a joué un rôle capital même dans la chute du mur de
Berlin, etc. Cependant, sans le dire ouvertement à ses
évêques, le Pape Jean-Paul II avait malgré tout
accepté cette voie. En effet, saluant la présence du Pape lors de
sa visite officielle au Bénin du 02 au 05 février 1993, le
président du Bénin, Nicéphore Dieudonné SOGLO avait
clairement mis en exergue « le rôle éminent joué
par l'Eglise catholique, en la personne Mgr Isidore DE SOUZA, dans la
renaissance de la patrie »36(*).
En réponse, le Pape Jean-Paul II salua
l'expérience béninoise comme « un vaste effort de
renouvellement qui stimulera les autres nations du continent
africain »37(*).
Mais, tout en affichant son soutien au processus de démocratisation des
Etats africains demeurés sous le joug des dictatures, le Pape Jean-Paul
II s'était clairement prononcé sur le fait
que « cette
action temporelle exceptionnelle de la
hiérarchie de l'Eglise devait prendre fin dès que
possible »38(*). Tout en saluant et félicitant
l'apport de Mgr Isidore DE SOUZA en tant que président de la
Conférence des Forces Vives de la Nation, le Saint-Père, devant
les sept évêques du Bénin, avait attiré leur
attention sur les limites strictes à l'action politique des
prêtres : « Je suis très heureux du grand service
que la hiérarchie de ce pays, en la personne de Mgr Isidore DE SOUZA, a
rendu à la Nation à une heure importante et je vous en
félicite. D'une manière générale, je forme le voeu
que celui qui a cru devoir accepter exceptionnellement, par esprit
évangélique, une mission temporaire d'ordre politique revienne
sans tarder à sa mission propre, la charge d'âmes, pour laquelle
il a reçu l'ordination. En effet, dans ce domaine, il convient que le
relais soit passé aux fidèles laïcs dès que possible,
selon ce que déclare le catéchisme de l'Eglise catholique : `'il
n'appartient pas aux pasteurs de l'Eglise d'intervenir directement dans la
construction politique et dans l'organisation de la vie
sociale''».39(*)
Soulignons également avec le professeur AIVO que
« le Vatican s'était très subtilement occupé du
global comme sa vocation universelle, laissant ainsi aux Eglises nationales, le
soin d'un engagement plus ciblé, plus approprié et en proportion
avec le degré de dangerosité du régime en
place »40(*).
Ceci expliqua, entre autres, que le front le plus efficace de la fronde
religieuse fut mené de l'intérieur du continent, car, bien que
membre de la Société civile, l'Eglise catholique africaine s'est
démarquée des autres corps sociaux par « son mode
d'action qui a eu au moins le mérite d'avoir placé les pouvoirs
africains dans une crise de légitimité
morale »41(*).
En RD Congo, l'Eglise catholique se rendit à
l'évidence qu'il s'agirait pour Elle et son évêque d'«
un service exceptionnel de charité en faveur du bien de la
communauté nationale »42(*). Face à ce qui est apparu comme un dilemme
cornélien, le Saint-Siège a dû reculer sur les limites
édictées en acceptant que des prélats s'impliquent dans
ces processus. A ce sujet, la commission pour l'interprétation du code
canonique a, dans sa réponse du 25 avril 1992, dit :
« Tout en tenant compte de l'intention de la Sacrée
Congrégation Consistoriale, cette intention est que , si , en vertu de
la Constitution de l'Etat, les Cardinaux, Archevêques ou Evêques
sont de droit sénateurs et le Saint Siège a de quelque
manière approuvé cette situation, ces derniers
précités peuvent, sans permission spéciale, remplir cette
fonction, à condition d'assurer l'accomplissement de leurs obligations
par leur vicaire général ou d'une autre façon. Dans tous
les autres cas, les Cardinaux, les Archevêques et Evêques, tant
résidentiels que titulaires, ont besoin de l'autorisation du
Saint-Siège »43(*).
Par ailleurs, la hiérarchie épiscopale nationale
ajoutera : « au nom de la charité, à la demande de leurs
peuples et de leurs conférences épiscopales respectives, le
Saint-Siège a autorisé certains Evêques africains, dont
Monseigneur Laurent MONSENGWO, à jouer un rôle de premier plan
dans les forums à caractère politique»44(*) encore que cette fonction
fût provisoire et dépourvue de prérogatives strictement
politiques.
Sachant bien que le choix de Mgr MONSENGWO à la
tête de la CNS s'imposait dans l'opinion tant politique que sociale,
l'Eglise catholique l'avait accepté comme « un engagement
social et un service à la Nation »45(*) face à une situation
qui procédait de l'exception et du provisoire.
Toutefois, il est important de retenir que les clercs ne doivent pas
s'éloigner des préoccupations réelles de la
société et de la politique,
quand bien même il leur est défendu de faire de la
politique active. Ainsi, évangéliser devient
construire une Nation où Dieu est au centre de tout engagement et
où la paix, l'amour, la cohabitation pacifique, la justice sont des
donnes capitales à la démocratie.
Mais, l'opposition ouverte du pouvoir en place intervint pour
tenter de détourner la direction du vent, qui plus est, de toutes les
confessions religieuses, c'est bien Elle qui s'affirmait de plus et
apparaissait constamment comme la cible privilégiée à
abattre par l'Etat mobutiste.
B. L'opposition ouverte du pouvoir
en place
Au-delà des réticences surmontées du
Vatican et en dépit des signaux rassurants, l'opposition ouverte du
pouvoir du Maréchal-président MOBUTU intervint pour tenter de
détourner l'opinion. Elle identifiait dans le clergé son plus
virulent détracteur, avec ses multiples dénonciations et prises
de position qui revêtent diverses formes (prédication,
communiqués signature des manifestes ou pétitions, participation
à des manifestations pacifiques, conférences de presse).
Celles-ci ont, en grande partie, influé dans les blocages
observés dans le camp présidentiel pour la désignation de
l'Evêque comme président de la Conférence Nationale
Souveraine.
Craignant la contagion du Congo voisin et du Bénin
surtout, le camp présidentiel a voulu obstruer l'ascension du
prélat par notamment diverses tentatives de blocage dans la salle comme
l'alignement des candidatures d'obédience présidentielle, l'usage
des tracts, de menaces et intimidations sans compter l'achat des consciences
à coup d'espèces sonnantes et trébuchantes. Mais, la
ferveur soulevée par la candidature du prélat tournait en
dérision une telle machine machiavélique. Devant garder sa
neutralité et réconforter tout le monde en restant l'Eglise au
milieu du village, elle a besoin au préalable du consensus de toutes les
parties prenantes avant de voir l'Evêque assumer cette importante charge
politique. Ainsi, fruit des contacts tous azimuts entre la
société civile active et l'Union Sacrée de l'Opposition
Radicale et Alliés (USORAL), la candidature du prélat, contre
celui du camp présidentiel avait été exprimée
largement par une majorité écrasante, mieux un véritable
plébiscite.
En tant que fer de lance dans la défense de
l'intérêt général face au pouvoir défaillant,
l'Eglise se voyait investie pour assumer de hautes responsabilités.
Cette élection était sa contribution à impulser la
recherche de solutions à la crise multiforme du pays. Peu importe les
questions doctrinales concernant la nature profonde de la mission
spécifique, fût-elle exceptionnelle et provisoire, ce
plébiscite exigeait de l'Evêque, un engagement avec courage, voire
d'affronter des risques avec confiance et sérénité.
Déjà, l'Episcopat catholique avait
prévenu que pour être « efficace et fructueux, un
débat public de cette nature doit éviter de s'enliser dans le
quotidien et le ponctuel pour se situer au niveau des principes qui commandent
le système et la machine politique dans notre pays »46(*). Par conséquent,
l'engagement de tous sur la voie irréversible du changement ne devrait
pas ressembler au passé douloureux et pénible, mais plutôt
conduire le peuple réuni en conférence à s'approprier son
destin en commençant par le choix de ses dirigeants.
Mais hélas, ce grand espoir fut de courte durée,
car, très vite le pouvoir s'activera à mettre des peaux de banane
sur le chemin de la CNS dans l'objectif d'une reprise en main de la situation
qui lui échappait davantage.
Section 2. La reprise en main de
la situation par le pouvoir du Maréchal MOBUTU
L'impasse politique intervenue au lendemain de la
clôture précipitée de la CNS fut l'oeuvre de la plupart
d'acteurs politiques imbus d'esprit égoïste, d'un sens
étroit et mesquin de responsabilité. Après un long et vain
processus politique pour amener le Maréchal-président MOBUTU
à adhérer à la volonté populaire de voir la
démocratie s'installer, le pays s'est retrouvé dans un tournant
de tous les dangers.
Pourtant, le peuple avait formé tous les espoirs
légitimes dans la réussite de la CNS, considérée
comme une victoire politique arrachée sous la direction du gouvernement
d'un homme politique devenu le symbole de l'Opposition, M. Etienne TSHISEKEDI
WA MULUMBA. En effet, ne voulant point comprendre, le
régime mobutiste résista à la poussée pluraliste en
réussissant « une parfaite transmutation
politique »47(*)
comme le note le professeur AIVO. De plus, c'était mal connaître
`'l'homme à la canne et à la toque du
léopard''48(*)
qui, en fin stratège politique, réussira à reprendre
l'initiative politique.
Précédemment, nous avons eu à
évoquer le modèle exemplaire de sortie de crise du Bénin
qui avait le mérite d'avoir jeté les bases d'une
démocratisation même si tout le mal béninois n'était
pas résorbé en un clin d'oeil. Mais, connu pour sa ruse
politique, le Maréchal-président avait provoqué la stupeur
et la colère dans la population. Dans son intransigeance, il refusa de
s'en inspirer et ne s'empêcha pas de paralyser les institutions issues de
la CNS (§1) à travers son poids dans le processus de
démocratisation (§2).
Paragraphe 1: La paralysie des Institutions issues de la
Conférence Nationale Souveraine
S'il est vrai que la loi est l'expression concrète de
la volonté politique, il est également vrai que la
référence en est le projet de société dont les
institutions constituent le cadre, et l'instrument de réalisation. Mais,
cette dynamique portant sur la revalorisation des institutions nationales
issues de la CNS n'a pas rencontré l'adhésion du Chef de l'Etat.
Il les neutralisa.
Cela dit, nous tenterons de rechercher les motivations
cachées à travers, respectivement le flou entretenu sur la
convocation de cet important forum(A), et, à l'occasion de la grande
marche pacifique du 16 février 1992(B).
A. Le flou dans la convocation de la Conférence
Nationale Souveraine
Déjà, le 20 mai 1990, au lendemain du discours
historique du 24 Avril 1990 précité, les Evêques
catholiques joignaient leur voix à celle majoritaire du peuple pour
appeler à la tenue de cette Table Ronde qualifiée
de « débat public nécessaire et incontournable
à l'échelon national, afin que toutes les institutions soient
soumises à une évaluation sans complaisance et à un nouvel
examen (...) »49(*). Mais, au lieu de se soumettre au verdict de
l'histoire, seule et unique voie de sortie qui s'imposait
face à l'évidence de la faillite totale, le pouvoir
multiplia des situations de blocage des travaux de la Conférence
Nationale Souveraine.
Un des moments forts, pour essayer de gagner du temps, fut le
flou entretenu sur la prise des ''ordonnances présidentielles''
portant convocation de ladite conférence, en ne mentionnant pas la
vraie nature du forum convoqué, quant à ses compétences et
à son autorité. Ces ordonnances portaient donc tantôt
convocation d'une conférence constitutionnelle (cf. le texte de
l'ordonnance présidentielle n°91-010 du 06 Mars 1991),
tantôt d'une conférence nationale (cf. le texte de
l'ordonnance présidentielle n° 91-097 du 11 Avril 1991). A la suite
de ce premier essai de blocage qui donna lieu à de fortes pressions
internes/externes et réactions hostiles des forces vives, sociales et
politiques dont l'Opposition radicale, le Chef de l'Etat fera amende honorable
en signant une autre ordonnance portant clairement `'convocation d'une
conférence Nationale''50(*).
Sous la conduite de son bureau, Celle-ci-se proclama
souveraine et eût mandat de produire :
- des déclarations de politique générale
pour faire l'état des lieux de la Nation ;
- des dossiers sur le détournement des deniers publics
et les enrichissements illicites ;
- des dossiers sur les assassinats politiques ;
- un projet de Constitution de la Troisième
république ;
- un calendrier électoral.
Par ailleurs, il est important de mentionner le fait
qu'à l'instar de la fronde sociopolitique qui montait
déjà, celle religieuse fut également déterminante
dans la délégitimation morale du pouvoir en place, au travers du
nouvel espace trouvé pour accabler le régime. En effet, dans son
communiqué de presse le 20 septembre 1991, Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA
dénonçait la deuxième tentative de blocage entretenu
à dessein lors de la désignation des membres du Bureau provisoire
et la direction des débats.
L'Eglise catholique condamnera l'usage de ces manoeuvres
dilatoires avant de suspendre sa participation, la justifiant par le fait que
`'l'organisation et la direction des travaux de la Conférence Nationale
ne reflètent ni ne favorisent l'instauration d'une véritable
démocratie''51(*). Cependant, fidèle à sa
tradition de non-violence, l'Eglise, par la voix de Mgr MONSENGWO, exhorta le
peuple et les hommes de bonne volonté à surmonter la crise en
évitant d'imposer «des solutions politiques en dehors des voies
pacifiques et démocratiques»52(*).
Après plusieurs tentatives politiques et
religieuses infructueuses, l'Eglise participa à la pression politique
exercée par la Société civile sur le régime. Et,
dans un élan général bien orchestré par la
Société civile et les politiques qui soutenaient la candidature
du prélat au perchoir de la CNS, l'Eglise, forte de son influence,
réussira à infléchir le pouvoir qui s'obstinait à
tout prix à maintenir le statu quo d'un régime des
privilèges exorbitants en perte de vitesse et luttant
désespérément contre le vent du changement.
Comme dans certains Etats où un Evêque
a joué un rôle prépondérant, la RD Congo, en la
personne de Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA, Archevêque de Kisangani,
après tant d'embuches marcha sur les mêmes pas. Ainsi, au
bout d'un marathon politique, le consensus a finalement triomphé et
permit l'accession du Prélat, un homme connu de la scène
politique nationale et internationale, un témoin et acteur
attitré, à la tête de la Conférence. C'est le lieu
de saluer la valeur de cet homme averti, pasteur et passionné de science
qui a donné le meilleur de lui-même grâce à l'appui
de toutes les forces acquises au changement pour éviter en ce temps
difficile, l'irréparable qui, hélas, arrivera avec les deux
guerres de libération de 1996-1997 et d'agression doublée d'une
autre occupation de 1998-2003.
Dans leur ouvrage en trois tomes
intitulé : « 25 ans d'épiscopat au service de
la Vérité, de la Justice et la Paix. »53(*), le Père Roger GAISE et
le professeur Isidore NDAYWEL ès NZIEM, historien et linguiste
congolais ont consacré des pages entières sur le haut sens de
responsabilité de Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA. Pour
ces auteurs, il ne peut, non seulement ignorer ces problèmes, mais il ne
doit pas non plus réduire son engagement et son message à des
appels génériques : Bien au contraire, il est appelé
à pénétrer dans l'enchevêtrement complexe et si
confus des questions sociopolitiques, en faisant toujours resplendir les
grandes valeurs humaines et évangéliques de la paix, de
la justice, de la solidarité, de la dignité de la personne et de
la liberté.
En dépit de ses capacités notoires,
doublées des talents de fin diplomate, à conduire la CNS, la
crédibilité du prélat fut dans une certaine mesure
entachée aux yeux de l'opinion publique (qui pourtant le soutenait)
suite aux obstacles à haut risque rencontrés. En effet, dans sa
stratégie de résolution des problèmes qui naissaient en
plein parcours, Mgr le président de la CNS a subi très souvent
des tirs croisés, affronté ennuis et blocages venant de la classe
politique en général, dont les plus virulents sortaient du camp
de la mouvance présidentielle et tendaient à saper son image et
son travail.
Devant les enjeux ténébreux de la
démarche politique du pouvoir qu'exerçait Mgr le
président, d'aucuns n'ont pas craint le pire, l'attribuant à sa
lourde charge, d'autres par contre, confiants mais réalistes, ont
préféré mettre au grand jour leurs critiques. C'est le cas
du Professeur KÄ MANA qui a clairement déclaré qu'il
était happé dans « les tourbillons de la
géopolitique régionaliste et tribaliste, envoûté par
les sirènes de la visibilité vaniteuse que confère
l'action publique, enchaîné aux tractations contradictoires
où l'opportunisme des uns se module à l'aune de la mauvaise foi
des autres, le prince de l'Eglise donna l'impression de danser « entre les
eaux »54(*). Et, le
Professeur MUDIMBE VUMBI YOKA d'ajouter de « tanguer entre les forces
mobutistes sans lesquelles rien ne pouvait se faire et l'opposition, dont
l'ambition était de s'emparer pour elle seule les rênes du
pays »55(*).
Telle fut la rude épreuve d'une diplomatie qui avait
caractérisé l'exercice des fonctions de Mgr le président
du Bureau de la CNS.
Ce qui expliquera notamment le fait que cet engagement de
servir la cause nationale au nom de l'Eglise finira par lui faire payer le prix
fort lors de la grande marche pacifique à l'appel des mouvements
associatifs chrétiens catholiques pour exiger la réouverture des
travaux de la CNS.
B. La grande marche pacifique du 16 février
1992
Autant la suspension de la CNS était un affront pour le
peuple congolais qui y plaçait tout son espoir, autant la marche du 16
février 1992 l'était pour le Maréchal-président
MOBUTU. En effet, bon nombre d'observateurs soutiennent qu'au moins pour la
première fois, le Maréchal-président trouvait sur son
chemin un peuple qui ne lui devait rien, un peuple libéré de la
peur et déterminé à sortir de l'esclavage dictatorial.
En outre, le chef de l'Etat, dans son refus de s'impliquer
dans le processus de la remise en question de sa gestion catastrophique, voyant
la tournure que prenait la CNS, et surtout la détermination du peuple
réuni en conférence, instruisit le gouvernement à prendre
l'indélicate décision le 19 janvier 1992 de suspendre les travaux
de la CNS.
Certes, la démocratisation n'était qu'à
un stade embryonnaire, mais le peuple a vite compris qu'il s'agissait purement
et simplement d'un autre coup de force tendant à retarder la bonne
marche dudit processus. Qui plus est, cette suspension, jusqu'à nouvel
ordre, n'avait aucun fondement avec son financement tel qu'officiellement
déclaré. En réalité, des prétextes
avancés à savoir le coût exorbitant des assises, la
question de la géopolitique, la prise en charge des
délégués à la conférence couvaient une
remise en cause de certaines décisions prises par les
délégués du peuple réunis en Conférence.
Dans la lutte du peuple congolais en quête du
changement, cette circonstance demeure l'un des moments historiques et
mémoriaux. C'est pourquoi, comme un seul homme, sur toute
l'étendue du pays, spécialement à Kinshasa, où se
tenaient les travaux, le peuple descendit dans la rue pour exiger la
réouverture de la CNS. Ce 16 Février 1992, à l'appel du
Comité laïc de Coordination de l'Eglise catholique, le peuple de
Dieu par centaines de milliers de fidèles catholiques, protestants,
kimbanguistes, orthodoxes, adeptes des Assemblées de Réveil et
tous les congolais épris de paix, des milliers de manifestants
encadrés par les organisateurs descendirent envahir massivement les
artères avec des chants, cantiques et danses, tenant en mains qui images
religieuses, rameaux, qui croix, chapelets et tous avec des bandelettes noires
autour de la tête comme seules armes.
En optant de descendre dans la rue, le peuple a payé
donc le lourd tribut, car, pour braver la dictature, cette marche des
chrétiens dite grande marche d'espoir fut sauvagement
réprimée dans le sang par le pouvoir qui démontra une fois
encore sa dangerosité. Cependant, cette grande manifestation a eu le
mérite de mettre à nu surtout la désapprobation
générale du système et de ses gouvernants, les
méthodes d'oppression et ses effets néfastes causés par la
brutalité du régime contre les contestataires sans armes. Par
leur grande mobilisation, les congolais ont démontré aux yeux du
monde et du pouvoir la force que revêtent la non-violence
évangélique et le prix qu'ils attachaient à la CNS. Comme
toujours, l'Eglise, par la bouche des Evêques catholiques, a vite
perçu cette « tentative d'annihilation de l'espérance
des fils et filles de la RDC (ex-Zaïre) »56(*).
Elle a dénoncé ces manoeuvres dilatoires tendant
à rompre l'élan vers la démocratie tout en dénotant
l'inutilité des moyens disproportionnés de violence et
l'importance de la réconciliation manquée des filles et fils
congolais réunis en conférence. Par ailleurs, elle
annonçait le chemin de la vérité en réprouvant la
classe politique irresponsable et les diverses institutions corrompues de la
République.
Nonobstant la reprise des travaux le 06 avril 1992
annoncée par une allocution du Chef de l'Etat le 27 Mars
1992 et quelques acquis comme l'élection démocratique du
premier Ministre et chef du gouvernement, Etienne TSHISEKEDI WA MULUMBA, le 15
Août 1992, l'absence de volonté politique réelle d'engager
l'Etat sur le chemin de profondes réformes attendues avait sensiblement
réduit la marge des manoeuvres de la CNS. Ainsi, elle n'a pu
épuiser toutes les matières ni présenter les rapports
d'audition et débats sur certains dossiers très sensibles parmi
lesquels les biens mal acquis, assassinats politiques, détournement de
fonds, enrichissement illicite et frauduleux, et autres
jusqu'à la clôture
précipitée des travaux le 06 décembre 1992 dans une
ambiance électrique augurant des lendemains incertains.
Certes, la CNS, comme toute oeuvre humaine n'a pas
été parfaite; qui plus est; l'usure du temps, la persistance de
la crise ont entrainé la désintégration de la
résistance. Toutefois, il sied de rappeler, tout spécialement, le
thème de la réconciliation nationale par rapport à la
conflictualité ayant marqué en profondeur l'histoire de la RD
Congo depuis l'indépendance. Dans une certaine mesure, le peuple a mis
en profit les messages de la non-violence active des confessions religieuses
relayés grâce à l'émergence de la presse
libéralisée pour parvenir à refuser la division et la
guerre civile.
A la lumière des événements, il
apparaissait que la fin en catastrophe de la CNS révélait les
intentions malsaines et nuisibles du pouvoir qui avait boycotté et avait
saboté la cérémonie de réconciliation prévue
à la clôture du forum national. Aussi, nous restons d'avis que
s'il y a eu échec de la CNS qui a offert au peuple une merveilleuse
occasion de restauration nationale, il est à situer du côté
des leaders véreux et alimentaires qui avaient des comptes à
rendre au peuple pour leur mauvaise gestion de la chose publique.
Emanation directe de la CNS, le Haut Conseil de la
République (HCR) n'a pas pu non plus examiner ces dossiers, alors
qu'il avait pour tâche de poursuivre le travail inachevé de cette
dernière et d'en exécuter les décisions sur la base des
orientations déjà tracées. Par la suite, la même
mission sera dévolue à la nouvelle institution, Haut Conseil de
la République/Parlement de Transition (HCR/PT) qui, à la
différence du HCR, était le fruit d'un consensus politique
général. A l'issue des négociations politiques
intervenues, une consensus permit une fusion des parlementaires issus de la CNS
qui exerçait également les prérogatives
législatives en tant qu'instance extra institutionnelle, avec les
anciens députés de la défunte législature.
Fort malheureusement, au lieu de se préoccuper de
l'avancement du travail amorcé par la défunte CNS pour sortir
l'Etat de la crise multiforme et le peuple de l'angoisse, au niveau du Haut
Conseil de la République, les politiques et parlementaires, toutes
catégories socioprofessionnelles et tendances
représentées, avaient tout simplement choisi de se
battre pour « leurs intérêts
égoïstes »57(*) au point d'appliquer la théorie de
prédation, comme l'a si bien fait remarquer TSHIMBOMBO MUKUNA dans la
livraison du journal le Soft du 3 juin1996.
Quoique des appels incessants des confessions religieuses sur
la justice distributive aient été adressés aux gouvernants
pendant la Transition, ces derniers ont donné l'impression d'être
frappés de surdité et de cécité politiques au
profit de leurs intérêts égoïstes. Ce comportement
colle à la peau de la plupart des dirigeants congolais et guide pour
l'essentiel leurs velléités de rébellion, de trahison, de
corruption, de mauvaise gestion et parfois d'impunité. Ces
déboires qui rongent la gouvernance en RD Congo accentuent davantage la
pauvreté de la population. Ce souci permanent de partager des postes et
par le pouvoir et par l'opposition avait débouché sur une
« 3ème voie »58(*). Pour n'avoir pas
empêché la réalisation de cette "3ème
voie", le prélat sera désavoué par ses pairs du HCR-PT et
destitué de ses fonctions de président de l'instance
législative de la Transition. Ceci créa une septicémie
politique définie par de nouveaux rapports de force qui mirent en branle
l'excellent héritage de la CNS légué au HCR, devenu
à son tour HCR-PT (Haut Conseil de la République- Parlement de
transition).
Comme il fallait s'y attendre, le régime mobutiste a
recouvré à la fin l'essentiel du contrôle de la situation
après avoir paralysé le Parlement et le Gouvernement de
transition. Il importe donc d'évoquer le poids de la personne du
Maréchal-président MOBUTU dans les cartes brouillées de ce
processus de démocratisation.
Paragraphe 2. Le poids « MOBUTU » dans le
processus de démocratisation
Analyser l'influence qu'exerçait le
Maréchal-président MOBUTU, à cette étape du
processus, revient à le situer dans le contexte de l'heure. En effet, au
lendemain du vent de changement issu du démantèlement de l'empire
russe, de l'Europe de l'Est et des autres pays d'Afrique, le peuple congolais
réclamera et obtiendra du Maréchal-président l'ouverture
vers la démocratisation. Pour ce faire, un nouveau procédé
de passage politique africain dit Conférence Nationale apparut
très vite comme l'unique cadre pour démystifier le fait
autoritaire du prince qui régnait dans bon nombre d'Etats en Afrique
noire francophone. Comme un feu de paille se répand, il s'imposa en
instrument de gestion des crises politiques affectant des systèmes
monolithiques, par la reconnaissance officielle des libertés publiques
et la consécration de l'Etat de droit. Aussi, il eut le mérite
d'avoir été pour les peuples concernés une vague, un
phénomène captivant qui marqua, selon le professeur Maurice
KAMTO, « l'irruption de la société civile, et plus
largement du peuple, sur la scène du pouvoir »59(*).
Cependant, en RD Congo, cette formule n'avait vraiment pas
produit le résultat escompté, en raison de plusieurs
mobiles comme les velléités autoritaires du régime
à vouloir garder son contrôle, la longueur exceptionnelle du
processus de transition et les efforts inlassables de sauvegarde de
l'intégrité du territoire national. Du reste, cette
dernière cause légitime a toujours servi de repère
culminant de toute la lutte nationaliste des congolais épris de paix,
selon l'esprit des messages de l'Eglise « Pour
l'amour du Congo, je ne trahirai point » (A), et contre la prise en
otage du processus due à la pesanteur du régime
mobutiste (B).
A. Maintien de
l'intégrité du territoire national
D'aucuns reconnaissent que l'intégrité
territoriale demeure un acquis de la Deuxième République
même si les gouvernements successifs pendant la période de
Transition n'ont pas pu la préserver. Principal acteur et
capitaine du navire en route vers la démocratie, le
Maréchal-président MOBUTU n'est pas un inconnu à
présenter.
Dans son discours le 24 novembre 1965 de prise du pouvoir
d'Etat par coup de force, le jeune officier Joseph-Désiré MOBUTU,
qui venait d'être élevé au grade de Lieutenant-colonel par
le premier président de la République Joseph KASAVUBU,
annonça; au nom du Haut Commandement de l'Armée Nationale
Congolaise (ANC), « le renversement du gouvernement de Moïse
TCHOMBE »60(*),
premier ministre de la République. Au passage, il sied de noter que ce
coup de force, intervenu après une instabilité politique
née à partir de la mise à l'écart puis de
l'élimination physique du 1er premier ministre de la
République, Patrice Emery LUMUMBA, reste le fondement de la crise de
légitimité intervenue en RD Congo.
Vite, après avoir pris l'étoffe et l'emploi de
la fonction, Joseph-Désiré MOBUTU gravit les échelons dans
le giron international et maintint de main de fer l'intégrité
territoriale. Dans le contexte de guerre froide, il devint un pilier
incontournable de la tactique occidentale en Afrique. Son double rôle de
gendarme des intérêts occidentaux et protecteur du pillage des
ressources nationales par les grandes firmes multinationales lui garantissait
en retour la défense à tout prix de la stabilité de son
régime par ses parrains étrangers. Dès lors, ses
dérives dictatoriales prirent confortablement des proportions
exagérées et nuisibles.
A la tête d'un Etat très convoité, le
Maréchal-président a réussi à se faire une forte
personnalité qui suscitait pour son peuple et son Etat des sentiments
fort contrastés, non seulement d'admiration, de fierté nationale
et un profond respect jusqu'au-delà des frontières nationales,
mais aussi de jalousie, de déstabilisation et d'ambitions
nébuleuses. Pour reprendre l'expression du Philosophe béninois
Paulin HOUTONDJI, « les lendemains de fête » en RD
Congo ont révélé la complexité de la situation
ainsi que le lot des difficultés qui ont jalonné et compromis
notamment la Conférence nationale et son aboutissement final.
Paradoxalement, le rêve de la population congolaise
à vivre décemment s'est transformé en une avalanche
d'illusions d'une large majorité des citoyens plongeait dans une
paupérisation généralisée contre une
minorité vivant dans une opulence insolente. En conséquence, la
grande fronde populaire doublée des incessantes pressions de
l'Opposition consolidée par les prêches conscientisantes des
pasteurs de confessions religieuses contre la personne du
«Léopard« poussera ce dernier à se retrancher dans ses
palais de Gbadolité, à l'Equateur, sa région natale
« pour peaufiner ses stratégies : Après moi, c'est
le déluge ». Tel fut le cas avec la fragilisation chaotique du
processus de démocratisation.
B.
Fragilisation chaotique du processus de démocratisation (1994-1997)
Après de longues concertations et vaines
négociations politiques pour amener le Maréchal-président
MOBUTU à adhérer à la démocratisation, il
s'accrocha contre vents et marées. Pour saisir la portée de la
détermination du peuple qui voulait en découdre avec lui, quelle
que soit la voie, remémorons son refus de consentir au projet de
société incarné par la CNS. Dès lors, il n'est pas
risqué de soutenir que la crise pluridimensionnelle était due en
grande partie à l'absence de volonté politique réelle et
manifeste du régime mobutiste d'accepter et d'appliquer loyalement le
nouveau principe démocratique. Même le contexte
international caractérisé par « l'exigence de
poursuite des efforts de démocratisation avant l'octroi de toute aide
et/ou assistance dans le cadre de la coopération
internationale »61(*) n'avait pas réussi à le
fléchir. Sa réputation de grand homme d'Etat présentait
autant des contrastes troublants : tantôt comme un insensible
cruel; tantôt altruiste, affichant un sens d'humour et une
générosité inouïs. Ces attitudes poignantes ont
particulièrement dérangé ses rapports avec l'Eglise;
à telle enseigne que les séduisantes assemblées
évangéliques de réveil s'étaient livrées
à une interprétation variée des versets bibliques pour
montrer qu'il était devenu l'incarnation du diable. Que d'acteurs et
dirigeants politiques vivants et/morts n'ont pas publiquement mis à nu
son côté obscur. Le cas édifiant de Feu le professeur
Marcel LIHAU EBUA qui, lors d'une conférence de presse publique en 1990,
se demandait « si le diable lui-même était aussi
rusé que MOBUTU»62(*).
Il est corroboré par les différents
témoignages de certains des ses anciens collaborateurs sur ses
accointances occultes. Celles-ci ont concouru à faire converger vers lui
des déductions sur son statut de suppôt des
ténèbres. Dès lors, il n'à point
hésité à faire subir un feu nourri à ses
détracteurs, ennemis et adversaires politiques résolus,
défiant même la nature en affirmant que de « son
vivant il n'avait jamais passé une seule nuit sur un lit
d'hôpital ».
Au lieu de tirer les leçons des
évènements en cours sur le continent et dans le monde, le
Maréchal-président crut bon de résister au vent du
changement, oubliant que « la grandeur d'une pirogue ne
l'empêche pas de chavirer »63(*). C'est pourquoi, bon nombre
d'analystes et observateurs politiques imputent la grande responsabilité
au Maréchal-président en tant que principal facteur d'obstruction
et fragilisation dudit processus qui, du reste, fut la cause première
ayant précipité sa chute.
En clair, sa double responsabilité réside dans
le fait, d'un côté, d'avoir poussé à outrance son
refus d'assumer l'échec de sa gestion de la chose publique, et de
l'autre, de son désir d'exclusion et d'enlisement pour sauvegarder
à tout prix ses privilèges, oubliant la maxime suivante :
« Qui a savouré les délices du règne devait
aussi avoir le courage d'avaler l'amertume de la
décadence ». Par là, sans aucun doute, il se
révélait honteusement une véritable
« perversion du pouvoir »64(*) qui lui fera tout perdre.
Comme à l'intérieur de son pays, l'homme avait aussi
été combattu durement à l'extérieur. Même MAO
TSE-TOUNG, en 1973, a fini par lâcher : « Ah,
Président, si vous saviez l'argent que j'ai dépensé pour
vous faire renverser. Et les sommes que j'ai investies pour vous faire
assassiner »65(*). En revanche, le peuple a, à son actif,
gardé un fort sentiment d'unité nationale, seul acquis du
mobutisme accepté également par l'Eglise, que les
déstabilisations de tout genre n'ont pas réussi à
entamer.
Au pouvoir pendant 32 ans dont 7ans passés pendant la
transition démocratique, le Maréchal-président
était parfois battu, parce que combattu, mais rarement abattu, sauf lors
de sa honteuse fin de règne et sa « fuite de la capitale KINSHASA
le 16 Mai 1997 devant l'avancée irrésistible des troupes rebelles
de l'AFDL de Mzée Laurent Désiré KABILA, son successeur au
pouvoir »66(*).
Quant à l'Eglise, elle a joué un rôle
capital pendant le processus de démocratisation amorcé le 24
avril 1990. Les vastes campagnes d'éducation civique menées ont
permis d'ouvrir les yeux aux congolais, de former des leaders chrétiens,
de sensibiliser les gouvernants /gouvernés à différents
niveaux et de faire le plaidoyer auprès des Eglises soeurs.
En définitive, elle vise comme finalité le
triomphe du principe de citoyenneté responsable concrétisé
dans le respect des droits fondamentaux, individuels et collectifs de la
personne. Ceux-ci découlent de la dignité de tout être
humain créé à l'image et à la ressemblance de Dieu
(Gn 1,26-27). Mais, au niveau de l'Eglise, un certain nombre de lacunes dans
son action pendant la première étape (1990-1997) du processus
n'est pas à occulter. Nous en relèverons quelques unes.
Devant l'ampleur des besoins, la longue période de transition
démocratique (16ans) a montré que beaucoup reste encore à
faire.
C'est pourquoi, l'Eglise a l'obligation non seulement de
poursuite, mais surtout d'intensification des campagnes contre les antivaleurs,
car, comme le déclare Elie WIESEL, Prix Nobel de la Paix 1986,
« la neutralité favorise l'oppresseur, jamais la victime, le
silence encourage le persécuteur, jamais le
persécuté ».
Ainsi, devant des cas de démission des pouvoirs publics
vis à vis de leurs responsabilités régaliennes, l'Eglise
ne doit pas exclusivement dénoncer à travers les
rhétoriques condamnations mais plus se montrer proactive pour devancer
les événements.
Du reste, fort du rayonnement de son leadership reconnu,
le retour de l'Eglise au devant de la scène a été bien
perçu par la population congolaise et les partenaires au
développement en vue de mener à bien la détermination
à aboutir au règlement pacifique des conflits qui minent la RD
Congo. Ce sera l'objet de la deuxième partie de notre travail.
DEUXIEME PARTIE : DU REVEIL
POLITIQUE
DE L'EGLISE, 1997 A 2006
L'analyse de cette période porte sur le retour en
scène de l'Eglise dans l'arène politique. Autant il est vrai que
la période entre 1990-1997 a été celle de la
dénonciation du régime du Maréchal-président,
autant il s'avère vrai aussi qu'à partir de 2002, l'Eglise a
opéré un véritable retour au sein de la sphère
politique bien que son influence permanente en RD Congo au niveau de la classe
politique remonte bien avant 1997.
En effet, devant l'éventuelle menace de la guerre que
courait la capitale KINSHASA, l'Eglise s'était investie lors des
pourparlers politiques pour soutenir une solution négociée et
concertée par rapport au départ du
Maréchal-président et la prise du pouvoir d'Etat par l'AFDL sous
la direction de Mzée Laurent Désiré KABILA.
Ainsi, au lendemain de l'échec des pourparlers qui
laissa le champs libre aux forces rebelles, et l'insuffisance d'initiatives au
niveau de la classe politique après le changement intervenu, l'Eglise
congolaise, avec le soutien des leaders émergents de la
société civile, a pris ses responsabilités de
moralisatrice des populations et de contrepoids pour rappeler au nouveau
pouvoir de travailler dans le sens de la recherche de l'intérêt
commun.
De plus, comme le pouvoir du 17 mai 1997 de l'AFDL consacra la
fin de l'option fondamentale de la CNS marquée par la dynamique
démocratique et la non-violence pour se retourner en faveur de celle de
la guerre, de la force et de la violence, l'Eglise l'invita à prendre
en compte le projet de société tracé par la CNS, fruit
d'un large consensus de tout le peuple, à s'engager dans le processus
avec détermination.
Mais, une année à peine, après cette
espérance du peuple et au moment où l'Eglise s'investissait
à rétablir le pont entre le nouveau régime et le peuple,
une nouvelle guerre se profilait à l'horizon. Consternées et en
colère, les populations lassées, s'interrogeaient sur le
bien-fondé réel de cette guerre : D'où vient-elle
réellement ? Que poursuit-elle ? Est-elle
justifiée ? Pourquoi une nouvelle guerre alors que l'espoir
renaissait à travers les actions du président de la
République Mzée Laurent Désiré KABILA qui a su
mobiliser les énergies et les fonds à partir des ressources
locales ? Valait-elle vraiment la peine quand on connaît les efforts
de reconstruction qui commençaient à porter des fruits dans
certains secteurs prioritaires de la Nation? L'Eglise quant à elle,
s'interrogeait également sur l'obstacle qui empêchait la
résolution pacifique des conflits. Avec le peuple, elle condamna
clairement la guerre et dénonça l'agression du pays par des
puissances étrangères, laquelle agression a freiné
l'élan de la reconstruction nationale. Elle s'opposait aussi à
toute tentative de sa balkanisation, mettant l'accent sur
l'intégrité du territoire, la souveraineté nationale, la
protection du patrimoine économique et sur le refus des dirigeants qui
servaient des intérêts étrangers voire s'imposaient par la
force des armes pour des intérêts égoïstes.
Ce point de vue contre la division de la RD Congo et contre
les leaders politiques à la solde de l'étranger va rester
constant à travers toutes les prises de position et tous les messages au
niveau de l'Eglise congolaise, particulièrement celle portant sur la fin
de la guerre et le retrait définitif de toutes les forces d'agression et
d'occupation du territoire national afin de permettre aux congolais de se
rencontrer librement pour traiter et résoudre les problèmes de
leur destinée.
Devant cette impérieuse nécessité,
l'Eglise leva l'option d'influer directement en intervenant dans le domaine
temporel. Aussi, d'un côté, a-t-elle joué un rôle
sociopolitique très important pour appuyer, soutenir et défendre
les aspirations du peuple à travers un engagement affiché dans
les rencontres politiques (Chapitre 1), et de l'autre, face au processus
électoral, pour dégager sur la base de ses atouts et faiblesses
(Chapitre 2), les nécessités et perspectives d'avenir afin de se
pencher sur les défis tournés vers la recherche, la consolidation
de la paix, de la stabilité, la réconciliation et la
reconstruction nationale.
CHAPITRE 1 : ENGAGEMENT
POLITIQUE DE L'EGLISE
Dans le souci d'apporter sa pierre au vaste chantier en
construction qu'est la démocratie en RD Congo, l'Eglise croit devoir
sans partie pris intervenir dans le champ politique, et ce, fort de l'appui de
la population comme le témoignent les statistiques ci dessous. En effet,
dans son article : « Le Congo, un cas sans espoir ?
Perception démocratique et perspectives électorales en RDC,
Béatrice SCHLEE donne quelques indicateurs qui montrent que les
populations de KINSHASA s'identifient plus avec leurs confessions ou
communautés religieuses, en tant que lieux de refuge.
A la question de savoir : Avec lequel
des groupes suivants les personnes interrogées s'identifient-elles
d'abord? Tableau 1
Mon église ou ma communauté
religieuse
|
47
|
Congolaise
|
19
|
Intellectuels
|
15
|
Classe moyenne
|
6
|
Groupe ethnique
|
5
|
Gens du voisinage
|
5
|
Fermiers
|
1
|
Les pauvres/les petites gens
|
1
|
Aussi, cet engagement politique se présente t-il comme
une réponse à l'exigence du contexte, répondant au fait
qu'on ne saurait défendre la religion sans lutter pour le
bien-être de l'homme qui pratique la religion. Déjà, lors
de la visite ad limina à Rome, le Pape Jean-Paul II s'adressait en ces
termes aux Evêques de la RD Congo: « J'en appelle avec force
à un retour rapide à la paix. Rien ne se résolve par la
violence qui, au contraire, augmente la souffrance et la misère des plus
pauvres. Il est urgent de mettre fin à cette tragédie, à
des chasses à l'homme qui, dans la capitale et ailleurs
déshonorent leurs instigateurs. Que disparaisse du coeur de chacun toute
trace de haine, de rancoeur et de refus de son frère ! Que toutes
les parties en cause dans ce drame aient le courage d'une véritable
réconciliation dans la justice et le respect de la personne
humaine»67(*).
De ce fait, face à la situation de guerre qui
empoisonnait l'atmosphère sociopolitique, l'implication politique de
l'Eglise devenait indispensable, car, elle vise, prône et poursuit un
développement de tout homme et de l'homme, champ de prédilection
de sa mission pastorale.
En dépit des lâches assassinats des «
évêques, prêtres, religieuses, religieux et
laïcs »68(*), qui ont payé de leur vie leur engagement au
service de la Nation, pour avoir dénoncé la guerre, la
profanation des objets de culte, des paroisses et autres infrastructures
ecclésiastiques, elle choisit l'option de poursuivre inlassablement son
oeuvre, car, la paix demeure la première aspiration de toutes les
populations pour un meilleur épanouissement et un développement
harmonieux. Les cas les plus troublants ont eu lieu à l'Eglise
catholique de BUKAVU, chef-lieu de la province du SUD-KIVU au Nord-est du pays
qui a perdu ses deux Evêques, Christophe MUNZIHIRWA,
tué dès le début de l'agression et Emmanuel KATALIKO, ce
qui fait penser que l'Eglise catholique était l'une des principales
cibles.
Dans cette perspective, elle adressa un message aux dirigeants
politiques « d'arrêter la guerre, qui entraîne la
destruction et la régression du pays »69(*), et « aux
Evêques et aux prêtres, aux religieux et religieuses, aux agents
pastoraux à s'atteler à la mission pacificatrice du monde et des
hommes, spécialement quand sévit la haine
fratricide »70(*). Pour ce faire, elle insistait pour une paix durable
dans le dialogue entre congolais et leurs frères des Etats voisins avec
lesquels ils ont vécu ensemble des moments d'embrasement.
Il était donc impérieux que toutes les parties
prenantes, ensemble avec les peuples, développent des attitudes de paix,
de pardon et de réconciliation en respectant les droits des peuples
et des personnes à vivre en paix dans chacun des Etats,
conformément aux dispositions légales et réglementaires
prévues.
Du reste, après avoir condamné ouvertement
l'agression dont le pays était victime, une année après sa
libération par la force, l'Eglise ne pouvait que soutenir sans
réserve aucune, le processus tendant à restaurer la paix et la
concorde nationale, en prenant en compte les engagements de la
communauté internationale.
Par ailleurs, face au dynamisme dont elle a fait montre
pendant les rencontres politiques (section 1), elle sera associée
à la gestion des Institutions politiques de la Transition (section
2).
Section 1 : Dynamisme lors des rencontres politiques
Au terme de la cinquième année du conflit
armé qui couvait sans qu'aucune partie n'ait pu prendre le dessus
militairement, l'Eglise, dans le cadre de la société civile, se
déployait grandement pour le retour de la paix.
Dans un contexte où elle n'avait que peu d'emprise sur
les belligérants, elle privilégia des actions tournées
vers la périphérie des vrais enjeux de la guerre, des actions de
plaidoyer auprès de la Communauté internationale pour qu'elle
exerce toutes les pressions possibles susceptibles de ramener les
belligérants à dialoguer comme l'unique solution devant les
souffrances des populations.
La conjonction des efforts consentis avait finalement
joué dans la dynamique et conduit les parties belligérantes
à engager les pourparlers en Zambie (§1) et à prendre en
compte le poids de l'Eglise dans le Dialogue Inter Congolais en Afrique du Sud
(§2).
Paragraphe 1. Des Pourparlers au Dialogue Inter Congolais
L'acceptation des pourparlers en Zambie reste surtout le
résultat des fortes pressions tant internationales que nationales. A la
suite de ces discussions, les parties belligérantes signèrent en
deux temps un texte dit « Accord de Cessez-le Feu de
Lusaka» le 10 et le 31 juillet 1999 entre le gouvernement et chacun des
principaux mouvements de rébellion.
En effet, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie
(RCD) avait différé sa signature à cause d'une crise de
leadership en son sein. Finalement, l'Accord a été signé
par les 49 membres fondateurs du mouvement politico-militaire, montrant que la
réalité du pouvoir en son sein était sujette à des
interrogations évidentes.
Plus tard, toutes les parties signèrent ce document le
04 mai 2001. Mais, son application a été rendue impossible.
Plusieurs raisons étaient à la base de ce blocage ; parmi
les plus importantes, on peut retenir le fait qu'il avait été
« imposé aux protagonistes » alors que les
conditions militaires et politiques ayant imposé cette signature
étaient en perpétuel changement. Au fond, par des manoeuvres
dilatoires de part et d'autre, les différents acteurs en présence
donnaient l'illusion d'une possible victoire militaire.
En marge, l'Eglise congolaise, chrétienne et non
chrétienne, réunie a initié une rencontre dite
Consultations Nationales pour entrevoir le rapprochement des points de vue des
antagonistes en présence. Mais, le dernier tournant qui portait sur les
vrais protagonistes, à savoir le noyau dur du pouvoir de KINSHASA, les
leaders des différentes rébellions, les parrains des
belligérants et les pourvoyeurs de fonds pour l'entreprise
guerrière, était mal négocié à telle
enseigne que le travail fondamental attendu n'avait pas pu être fait.
Même l'Eglise catholique se retira malheureusement sur
la pointe des pieds, sans cependant proposer une éventuelle alternative.
Toutefois, l'Eglise s'était vue reconnaître un espace dans le
processus politique des négociations en vue de mettre fin à la
guerre et d'instaurer un nouvel ordre politique. Entretemps, une nouvelle donne intervint,
à savoir la disparition brusque et fatale du président
de la République Mzée Laurent-Désiré
KABILA, suivie d'une redistribution des cartes au plan
politico-militaire et géostratégique qui ont
rendu indispensable d'imposer le dialogue sans condition.
A l'instar des fortes pressions de la Communauté
internationale, le plaidoyer mené par l'Eglise auprès de
différentes parties belligérantes, semblait aboutir : ces
dernières acceptèrent alors d'engager le dialogue sans condition,
prétextant mettre fin aux souffrances du peuple.
A-t-on mit fin réellement aux souffrances du
peuple ? Dieu seul le sait ! Voilà ce qui nous pousse à
évoquer successivement l'exigence de dialogue sans condition (A) et
l'appel de l'épiscopat catholique au lendemain de l'assassinat ignoble
du président de la République Mzée
Laurent-Désiré KABILA KA MAKOLO (B).
A. Les
exigences du dialogue inter congolais
Comme signalé précédemment, à
l'instar des fortes pressions de la Communauté internationale, le
plaidoyer mené par l'Eglise, pour exiger le dialogue sans condition,
après la reprise des hostilités dénotait de l'absence de
bonne foi dans le respect et l'application de l'Accord de Cessez-le Feu de
Lusaka de 1999. Cela a montré que l'acceptation de l'autre à
travers le dialogue constitue la force qui permet de résoudre les
différends et les incompréhensions, parce que, dialoguer, c'est
parvenir à être d'accord sur ses désaccords. Dialoguer ici,
revient à rechercher un ensemble des pistes de solutions, ce qui
confirme le principe selon lequel rien ne peut être impossible aux hommes
lorsque ceux-ci font preuve de bonne foi et de bonne volonté.
C'est dans cette optique que l'Eglise a exhorté et
exigé de toutes les parties concernées, de faire preuve
d'engagement par le dialogue sans condition pour la fin de la guerre et la
recherche d'une solution négociée et consensuelle à la
crise de légitimité. Par ailleurs, pendant que le pays
était confronté gravement à la défense de son
intégrité et de sa souveraineté nationale contre
l'agression et l'occupation étrangères, il sera tragiquement
endeuillé par l'assassinat du président de la République,
à son bureau au palais de Marbre.
Cette rupture d'avec le passé a occasionné la
relance du processus par la signature d'un protocole appelé l'Acte
d'engagement de Gaborone le 24 Août 2001 au Botswana par toutes les
parties congolaises sous la facilitation de l'ancien président du
Botswana KETUMILE MASIRE. Signalons également que dans le cadre du
processus menant au rétablissement de la paix, les parties
concernées s'étaient retrouvées à Sun City en
passant par Victoria Falls, Victoria II et III, l'Ile Maurice, Lusaka,
Gaborone, Addis-Abeba, Cotonou, Libreville, Abuja, Genève,
Bruxelles, etc.
B.
Appel de l'Episcopat catholique
Suite à la profonde douleur de
l'événement et aux peurs des lendemains incertains, diverses
réactions de condamnation doublées des appels au calme ont
fusé de partout dont l'Appel de l'Eglise catholique qui
a fait montre de son leadership encore une fois.
Le processus de démocratisation qui, déjà
marchait à reculons, s'est vu douloureusement secoué à
telle enseigne que d'aucuns ont vite pensé à l'échec. En
effet, après l'annonce officielle du décès dans les
conditions troubles du président de la République Mzée
Laurent-Désiré KABILA, le pays; déjà en guerre,
s'était retrouvé dans un contexte particulier, faisant craindre
des lendemains inquiétants, d'où, l'appel au calme des
Evêques catholiques : « la disparition tragique du
président de la République, Laurent-Désiré KABILA,
le 16 janvier 2001, a plongé la Nation congolaise dans la consternation
générale et le deuil. Nous nous associons au peuple congolais
pour présenter nos condoléances à la famille de l'illustre
disparu, aux autorités du pays et à toute la Nation. En
même temps, nous condamnons fermement ce crime ainsi que tout recours
à la violence pour résoudre les problèmes qui se posent au
sein de la communauté nationale »71(*).
Partagé entre la colère, l'émoi et
l'angoisse, le peuple a unanimement fait preuve de calme et d'esprit
élevé de responsabilité face à la situation. Plus
de peur que de mal, dit-on, la tension pourtant perceptible laissera la place
à des lendemains rassurants grâce aux appels moralisants
et répétés de l'Eglise. A cause
de cet assassinat crapuleux et devant la nécessité, le
gouvernement après concertation avec le Haut Commandement militaire
désignera son fils, le Général-Major Joseph KABILA
KABANGE officiellement pour « assumer les rênes du
pays »72(*) non
sans soulever l'irritation de nombreux opposants à ce scénario de
type dynastique. Aussi, cette succession a soulevé beaucoup d'encre et
de salive, car, il heurtait et énervait le droit positif
congolais.
Cette désignation augurait une ère de paix et de
normalisation dans un pays-quasi continent laminé par des années
de dictature et une guerre quasi continentale où dans l'entretemps, les
ravages de la guerre d'agression et son cortège de malheurs frappaient
durement les populations surtout dans l'espace sous occupation rwandaise et
ougandaise.
Aussitôt, le tout nouveau président s'emploiera,
dès son entrée en fonction le 26 janvier 2001, à mettre
fin à la guerre par la relance du processus politique des
négociations avec d'un côté, les différents
mouvements rebelles, et de l'autre, leurs parrains rwandais et ougandais. La relance du processus douloureux et lent des
négociations politiques inter congolaises (DIC) eut lieu en Zambie au
sommet de Lusaka du 02 au 15 février 2001.
C'est dans cette optique que le nouveau Chef de l'Etat Joseph
KABILA KABANGE annonça des « changements profonds dans tous
les secteurs de la vie nationale »73(*) sur fond de la restauration de la paix qui
impérativement passait par la reprise du dialogue bloqué par
l'inapplication de l'Accord de Cessez-le Feu de Lusaka.
Paragraphe 2. Le poids de l'Eglise dans le dialogue inter
congolais
De Pretoria à Sun City, la présence et
l'implication de l'Eglise dans le Dialogue Inter Congolais (DIC) ont
été bénéfiques à plus d'un titre. D'abord,
elles ont constitué une opportunité de continuer à pousser
par des pressions sur les acteurs politiques en présence.
C'est le cas de l'exhortation à l'unité faite
par le Primat de l'Eglise catholique congolaise en la personne de Son Eminence
Fréderic Cardinal ETSOU NZAMBI BAMUNGWABI face à une impasse qui
pouvait faire dérailler le train suffisamment avancé des
négociations pour la conclusion d'un Accord politique satisfaisant.
A.
L'exhortation à l'unité
Devant l'impasse des négociations intervenue à
l'étape décisive de Pretoria, Son Eminence Frédéric
Cardinal ETSOU NZAMBI BAMUNGWABI s'y rendit pour aider à aplanir les
différends nés d'un désaccord serré autour du
partage des responsabilités et la reconnaissance des grades au sein des
Forces Armées de la RD Congo (FARDC) des officiers et sous-officiers
ayant servi dans les rébellions.
Se fondant sur l'Evangile, le primat s'adressa aux
délégués en ces termes : « Si un royaume
est divisé contre lui-même, ce royaume-là ne peut
subsister. Et si une maison est divisée contre elle-même, cette
maison-là ne pourra se maintenir» (Marc 3,24-25).
En outre, vis-à-vis des positions tranchées des
protagonistes, l'Eglise catholique par le Cardinal, appuyée par les
autres membres des forces vives dont les délégués des
mouvements associatifs féminins, avait pesé de tout son poids, sa
personnalité, son prestige, son influence de Pasteur et Père
spirituel pour faciliter une solution consensuelle. Sans cesse, le Cardinal
ETSOU répéta les propos du Pape Jean-Paul II que toutes les
parties en cause dans ce drame aient le courage du dialogue pour la recherche
sincère des voies d'une véritable réconciliation dans la
justice et le respect de la personne humaine. Cette exhortation amena les
délégués à conclure les termes d'un Accord qui
était très attendu comme le dénouement historique.
B. Le
dénouement historique
A l'instar des différentes concessions intervenues
ça et là dans les négociations, l'implication personnelle
du Cardinal ETSOU avec des propos pathétiques a raisonné comme
une voix de sagesse pour tous. Ainsi, le dénouement historique a permis
aux négociations d'accoucher le 17 décembre 2002 de l'Accord
Global et Inclusif (AGI). Ce document eut le mérite d'avoir permis
théoriquement la fin de la guerre, la réunification et la quasi
pacification du pays et prévoyait l'installation d'un nouvel ordre
politique.
Adopté en plénière le 01 Avril 2003
à Sun City, promulgué le 04 Avril 2003 par le président de
la République, Joseph KABILA KABANGE, cet Accord, sur la base duquel la
Constitution de transition fut élaborée, prévoyait
curieusement une formule inédite au monde à savoir un
Exécutif composé d'un président de la République,
chef de l'Etat assisté de quatre vice-présidents de la
République au sein du gouvernement de transition. Celui-ci regroupait
toutes « les composantes et entités »74(*) au dialogue, pour conduire le
peuple congolais aux élections libres, démocratiques et
transparentes, pour la mise en place d'un régime constitutionnel
démocratique. Cependant, il convient de déplorer que cet Accord
semblait avoir comme principale faiblesse de donner une prime à ceux qui
avaient opté pour la guerre.
En effet, une des critiques notoires résidait dans
l'absence de condamnation du recours à la force comme moyen
d'accéder au pouvoir, mais laissait ouvertement se tirer à bon
compte les présumés coupables de nombreuses violations des droits
humains, et surtout, il restait muet sur les sanctions à infliger
à ceux des signataires qui s'écarteraient de ses dispositions. En
revanche, le principal mérite de l'Accord était de substituer la
logique de paix et de dialogue à celle de l'affrontement armé.
Plus fondamentalement, l'Accord constituait une cinglante réponse
à tous ceux qui, à travers le monde, s'activaient pour la
balkanisation de la RD Congo.
En somme, sa finalité demeura la préparation des
élections générales et non moins le partage du pouvoir.
Tout le peuple espérait qu'avec une volonté politique
affirmée, et surtout avec la détermination de la population, la
longue transition mise en route avec la Conférence Nationale allait
finalement aboutir par des élections libres, démocratiques et
transparentes.
Dans cette perspective, l'Eglise a, dans le quota qui lui
était réservé en tant que membre de la
Société civile, été associée au sein des
Institutions politiques de transition.
Section 2 : L'Eglise et les Institutions politiques de
transition
La participation de l'Eglise au sein des institutions
politiques de transition est un des résultats significatifs de son
influence dans l'avancement du processus de démocratisation.
Aussi, face au contexte sociopolitique de l'heure
caractérisé par la méfiance, la suspicion et des
appréhensions perceptibles au sein du nouvel exécutif de l'Etat,
était-il indispensable que la société civile, à
laquelle appartient l'Eglise, prenne la mesure de la situation en ne laissant
pas la gouvernance politique entre les mains des seuls acteurs politiques en
présence au risque de voir s'embraser toute la République, car,
comme l'affirmait le Pape Jean-Paul II : c'est « le travail de
l'Eglise de rendre les hommes capables de bien construire l'ordre
temporel... »75(*).
Du reste, l'histoire nous enseigne qu'en cas de crises
majeures, le choix est généralement porté vers les hommes
de Dieu capables de rassembler le peuple autour des idéaux fondés
sur le bien commun et la dignité humaine. C'est pourquoi, dans le souci
de raviver et maintenir la flamme allumée à travers cette
volonté de l'Eglise d'aider le peuple à avoir une connaissance
nette et claire de la situation et de ses responsabilités, participer au
débat touchant aux problèmes politiques de la Nation en vue
d'éclairer le temporel par la lumière divine, sera une
nécessité.
Par conséquent, évoquer à ce stade la
double qualité de prince de l'Eglise et d'homme d'Etat (§1) dont
étaient revêtus les hommes de DIEU avant de tenter de situer le
bilan de leur gestion dans les Institutions politiques de la Transition
(§2) ne serait pas insignifiant.
Paragraphe 1. Double
qualité de prélat et d'homme d'Etat
S'il est vrai que l'Eglise n'a pas à s'occuper
directement de la gestion du temporel, encore moins de politique pour son
propre intérêt parce que sa mission principale est la prise en
charge des âmes pour leur salut éternel, il est admis que, dans le
cas d'espèce, cette participation s'inscrivait, d'un côté,
en tant que religieux et pasteurs à travers le service et le
ministère qui leur sont spécifiques (la prière, le
témoignage, la charge pastorale, la charité chrétienne,)
etc., et de l'autre, en tant que citoyens, aptes à exprimer des justes
et opportunes options politiques et l'obéissance aux lois du pays.
Du reste, l'évidence voudrait que soit effectivement
dans les évangiles où l'Eglise puise les doctrines capables soit
de mettre fin aux tensions, aux conflits, soit de les atténuer,
d'où, le fondement de la mission évangélique (A) qui l'a
conduite en missionnaire politique à assumer la direction des
Institutions politiques de transition (B).
A.
Mission évangélique
De par cet engagement qui rentrait dans sa mission
évangélique, la présence de l'Eglise consistait à
aider les laïcs à s'acquitter fidèlement de leur mission,
celle de renouveler le temporel conformément aux exigences de la parole
de DIEU, qui est orientée vers le bien et la foi. Aussi,
s'était-elle investie en vue d'éclairer par l'esprit de DIEU les
problèmes du peuple, de former les personnes capables de bien orienter
la politique, de faire des choix justes et pratiques selon les valeurs
d'humanisme, de respect et de la dignité de la personne humaine.
De plus, cette présence des princes de l'Eglise fut
perçue par la population comme une force de progrès, gage de
transparence même dans le domaine sociopolitique. En RD Congo, la mission
évangélique vise également à étendre et
à perpétuer une confession. Chaque confession a ses
fidèles qui ont une identité propre. En d'autres termes, les
fidèles ne sont pas des chrétiens tout court, mais,
chrétiens catholiques-romains, chrétiens orthodoxes,
chrétiens protestants méthodistes, chrétiens protestants
baptistes, chrétiens protestants luthériens, chrétiens
protestants anglicans, chrétiens protestants adventistes du
7ème jour, chrétiens protestants disciples du Christ,
chrétiens protestants évangélistes, chrétiens
protestants réformés... Et, toute la pédagogie de la
mission évangélique est orientée par ce clivage
identitaire et culturel, mais ce qui importe, c'est le chemin de
libération et de communion qui s'ouvre pour la cause commune qu'est le
salut de la RD Congo à travers l'évangile de la bonne nouvelle.
La casquette de missionnaire politique apparait clairement dans la
répartition des responsabilités au sein des Institutions d'appui
à la démocratie.
B.
Missionnaire politique
S'agissant de la direction des Institutions politiques d'un
Etat, il convient de noter que normalement, elle ne constitue pas une affaire
des hommes de DIEU, car, la politique est, avant tout, le lieu d'engagement
propre des fidèles laïcs. Toutefois, bien qu'ils aient leur
vocation propre de la charge des âmes, il est des circonstances
exceptionnelles qui peuvent conduire légitimement les Evêques, les
prêtres, les religieux et les religieuses, les pasteurs, les
initiés à ne pas se désintéresser de ce champ
d'activité humaine et fondamentale. C'est ainsi, qu'il est
arrivé, au nom de la charité, dans certains Etats d'Afrique,
qu'un homme de DIEU ait « dû accepter de présider des
instances à caractère politique »76(*).
Tel fut le cas en RD Congo, car, face au processus qui
avançait lentement avec souvent des moments d'épreuves et des
douleurs, exercer le pouvoir temporel par l'Eglise constituait une
réponse à l'appel du peuple pour une mission
d'intérêt collectif. Ceci explique que, depuis la
Conférence Nationale Souveraine, l'Eglise a joué un rôle de
premier plan dans l'animation des Institutions politiques de la Transition. On
se souviendra de Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA qui a dirigé
avec satisfaction aussi bien la Conférence Nationale Souveraine que le
Haut Conseil de la République, puis le Haut Conseil de la
République-Parlement de Transition.
Par ailleurs, il est important de souligner que toutes les
parties présentes aux négociations n'étaient pas
logées à la même enseigne. Certes, elles étaient au
même pied d'égalité lors des débats et à
l'adoption des résolutions, mais, il apparait visiblement que le poids
sociologique a prévalu dans le quota prévu aux confessions
religieuses pendant la transition après Sun-city : L'Eglise
protestante appelée Eglise du Christ au Congo par Mgr Pierre MARINI
BODHO a dirigé le Sénat, Mgr Jean-Luc KUYE NDONDO WA
MULEMERA (Eglise méthodiste) la Commission Vérité et
Réconciliation (CVR) et Mr l'Abbé Apollinaire MUHOLONGU
MALU-MALU la Commission Electorale Indépendante (CEI).
D'ailleurs, évoquant la personnalité du
président de l'Eglise du Christ au Congo, Mgr Pierre MARINI
BODHO en tant que haut personnage de l'Etat à l'époque, le
professeur KÄ MANA ajoute qu'il « (...) bénéficie
d'une oreille attentive et assure une sorte de direction spirituelle sereine et
attentionnée de par sa position éminente au Sénat qui fait
de lui prince de l'Etat et de l'Eglise'' »77(*). Ainsi, on pourrait imaginer
que, de par sa position, sa parole avait un poids politique et était
susceptible d'éclairer les autorités sur ce qu'elles devraient
faire pour sortir la Nation de ses turbulences actuelles. Cependant, bien
qu'ils aient exécuté leur mission dans un contexte
particulier caractérisé notamment par une classe politique
minée par « l'insalubrité
politique »78(*), il est important de s'interroger sur le bilan de
leur travail : `'Quel bilan peut-on faire aujourd'hui de l'implication de
l'Eglise dans la gestion de la Transition en RD Congo'' de 1990 à 2006?
Paragraphe 2. Bilan de la gestion de l'Eglise dans les
Institutions de la Transition
Après la
conclusion de l'Accord Global et Inclusif à Sun-city qui engagea la RD
Congo sur une autre période de transition, la classe politique avait
associé l'Eglise à la direction des Institutions de la
République. Il importe de rappeler, qu'à l'instar du Sénat
et des Institutions d'appui à la démocratie dont le leadership
était réservé à la société civile, le
quota accordé aux confessions religieuses indiquait pour le Parlement de
transition (Assemblée Nationale et Sénat) : 2 catholiques, 2
protestants, 2 orthodoxes, 2 musulmans, 2 Eglises dites de réveil et 2
Eglises indépendantes.
Dans l'ensemble, elles ont assumé leurs charges avec
satisfaction au regard des attentes à gérer et à
satisfaire sans compter des difficultés énormes à vaincre.
Cependant, il n'est pas moins vrai que leur bilan a été partout
positif, d'où, une épreuve assumée (A) selon la perception
de l'opinion publique (B).
A. Une épreuve
assumée
D'entrée de jeu, nous soulignons que malgré
leurs bonnes intentions affichées, les efforts et progrès
notés ça et là, le contexte particulier du pays n'a pas
permis aux confessions religieuses de remplir leur mission sans heurts, car,
des tiraillements et suspicions de toutes sortes ont constitué des
obstacles sérieux.
Pour le cas d'espèce, les hautes charges à la
CNS, au HCR et au HCR-PT assumées par Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA
pendant la première transition, ont révélé
l'absence de réalisation de l'objectif principal et final qu'est la
réconciliation nationale.
En outre, bon nombre de gens, surtout dans l'opposition, ont
soutenu que dans sa quête perpétuelle du consensus, le
prélat ne fit pas suffisamment preuve de fermeté contre les
velléités des camps opposés. Autant, l'opposition l'accusa
de laxisme face aux velléités anti-démocratiques des
partisans du pouvoir, autant ces derniers l'indexèrent de cheval de
Troie de l'opposition. De toute évidence, ses diatribes eurent des
effets contre-productifs notamment sur la réconciliation nationale et
l'instauration d'un nouvel ordre politique.
Il va sans dire que cette léthargie avait laissé
la voie royale à la guerre dite de libération conduite par l'AFDL
à partir d'Octobre 1996. Même ce groupe qui a
« boudé de participer à la CNS »79(*), dira une fois au pouvoir que
le prélat eut tort d'insister sur la réconciliation au lieu de
doter le pays de nouvelles institutions démocratiques.
Par ailleurs, malgré la complexité de la
question, il nous a paru inapproprié que la position officielle de
l'Eglise catholique n'ait été que de principe, sans clairement
définir l'attitude à prendre, alors que les populations
adhéraient massivement à la cause du nouvel ordre. En effet, bon
nombre des prélats surtout se limitaient essentiellement à
condamner et dénoncer la violence, pendant que d'autres ne gardaient
guerre leur langue dans la poche pour souhaiter la chute du pouvoir du
Maréchal-président.
Ce flou que d'aucuns avaient qualifié d'artistique
avait, dans un premier temps, alimenté la méfiance entre le
président de la République Mzée
Laurent-Désiré KABILA et l'Eglise qui exerça les charges
publiques à travers Mgr Laurent MONSENGWO PASINYA.
L'opinion publique a également noté
l'affirmation faite 8 ans après la guerre dite de libération par
Mgr MONSENGWO suite aux tensions intervenues à
l'approche de la fin de la première phase transitoire,
c'est-à-dire, le 30 juin 2005. Il s'agissait du débat sur la fin
ou non de la période de transition au 30 juin 2005. Les opposants au
pouvoir estimaient que ce fut le délai buttoir alors que les
dispositions de l'article 196, alinéa 2 de la Constitution de transition
du 04 Avril 2003 accordaient une prolongation d'une année, d'où,
il y eut quelques manifestations de l'opposition qui ont occasionné des
incidents, dérapages et bavures contre notamment les infrastructures
ecclésiastiques. Certes, la guerre dite de libération avait
gravement porté atteinte aux avancées réelles liées
au processus de démocratisation. Mais, qualifiant de
« gâchis de 1997 »80(*),
l'avis de Mgr MONSENGWO était loin de corroborer l'enlisement de la
situation politique, encore que, le peuple congolais était
fatigué et avait perdu tout espoir, d'où, cette effervescence
populaire palpable à l'avènement de l'AFDL.
Un autre constat des tensions qui ont prévalu entre le
pouvoir et l'Eglise, c'est fut également l'échec dans la mise en
oeuvre des résolutions issues des Consultations Nationales
initiées par l'Eglise dans le cadre la réconciliation nationale.
En effet, en dépit d'un engouement populaire observé à
l'ouverture jusqu'à la clôture des travaux, le chef de l'Etat
Mzée Laurent-Désiré KABILA et son gouvernement ne s'y
associèrent que pour ne pas perdre la face. Qui plus est, le Chef de
l'Etat avait ignoré en pratique son engagement de suivre les
résolutions issues dudit forum au lendemain de ses assises.
Signalons que les journées de Consultations Nationales
sur la marche de l'Etat tenues du 28 février au 11 mars 2000 ont
été organisées sous les auspices des Chefs de confessions
religieuses en prévision du dialogue inter congolais avec l'appui et le
soutien de la Conférence des Eglises de Toute l'Afrique (CETA) et des
partenaires extérieurs de la RD Congo. Elles ont été
couronnées par un grand culte oecuménique
célébré dans la Cathédrale du Centenaire Protestant
de KINSHASA/LINGWALA.
Aussi, pendant la seconde phase transitoire, la conduite
s'était-elle avérée encore plus délicate. Il s'agit
d'abord de l'échec notoire de la Commission Vérité et
Réconciliation sous la conduite de Mgr Jean-Luc KUYE NDONDO WA
MULEMERA (Eglise méthodiste) dont le déficit de
leadership a brillé par un manque d'initiatives et d'actions de haute
visibilité retentissante au point que la CVR,
déjà inefficace, n'a pu donc pas réconcilier même
les politiques ouvertement opposés. D'ailleurs, beaucoup ne
connaissaient la CVR, l'une des Institutions d'appui à la
démocratie, que par le nom.
Ensuite, on a déploré une certaine
léthargie au niveau du leadership au Sénat incarné par Mgr
Pierre MARHINI BODHO (Eglise protestante) notamment dans la conduite des
travaux, la gestion administrative, la production de documents
législatifs, etc.
Enfin, au niveau de la Commission Electorale
Indépendante où le leadership était conduit par Monsieur
l'Abbé président Apollinaire MUHOLONGU MALU-MALU, quelques
dérapages ont été relevés. Bien que plein
d'énergie, dynamique, compétent et remarquablement courageux,
Monsieur l'Abbé président a, par moment, été
« trop direct et a manqué parfois de flair
diplomatique »81(*). Ce manque de tact
a souvent failli jeter de l'anathème sur l'image et la
crédibilité des opérations électorales, ce qui lui
valut et à la CEI plus d'une fois, d'être accusés sans
preuves par les détracteurs et autres politiciens de parti pris en
faveur du pouvoir et de ses partisans.
Toutefois, toutes ces allégations n'ont pas
empêché l'Eglise d'oeuvrer toujours avec courage et
détermination pour défendre les aspirations des populations et
à s'investir pour les élections afin de mettre un terme à
la crise de légitimité.
B. La
Perception de l'opinion publique
Globalement, nonobstant quelques critiques légitimes,
l'opinion publique a salué l'accomplissement de charges des hommes de
DIEU, notant ainsi, une conduite marquée par la connaissance des
dossiers, l'habileté à trouver des compromis pour dépasser
le blocage, la sagesse dans l'action.
Parmi toutes les Institutions de Transition sous la conduite
des princes de l'Eglise, la CNS, le Sénat et la Commission
Vérité et Réconciliation ont retenu la grande attention du
public. En effet, Mgr MONSENGWO, par sa position de président de la
Conférence épiscopale, ses messages retentissants, ses adresses
publiques, a amené le régime du Maréchal-président
à le prendre pour cible, à le neutraliser, non sans avoir parfois
dérangé et terni son image. Mais, le contexte permit à
celui-ci de s'améliorer significativement au point d'être
considéré comme un héros ou un martyr aux yeux du peuple.
A ce jour, son apport positif continue à rayonner notamment à
travers son prestige captivant, sa forte personnalité et sa grande
influence sur l'échiquier politique national et international.
S'agissant du Sénat, la mauvaise gestion administrative
s'est manifestée notamment par l'insuffisance, voire l'insignifiance de
la production de textes législatifs au moment où même le
peuple en avait besoin pour son information. Cette léthargie a
engendré une inflation d'arriérés législatifs et
administratifs auxquels se sont attelés avec brio après les
élections, l'ancien Bureau provisoire et l'actuel leadership du
Sénat incarné par Léon KENGO WA DONDO82(*).
Quant à la Commission Vérité et
Réconciliation, l'opinion publique a fustigé sa léthargie
qui plongea l'institution dans le clair-obscur et l'indifférence
générale. Aucune demande de pardon officielle, ni de
déballage de la vérité n'ayant été
entreprise, par contre, elle a été considérée plus
comme lieu de positionnement des candidats, par ricochet, budgétivore
pour le trésor public. Et pourtant, on aurait pu s'inspirer de
l'expérience sud-africaine sous la houlette d'un grand homme de DIEU,
Mgr Desmond MPILO TUTU. A ce sujet, il n'est pas risqué d'affirmer que
la CVR congolaise a raté le coche Vérité et
Réconciliation, l'un des cinq objectifs institués par la
Constitution de la Transition.
Par ailleurs, dans la période qui
précédait les échéances électorales de 2006,
une enquête réalisée du « 08 mars au 08 Avril
2006 à KINSHASA, dans la commune de MATETE, à la suite de la
campagne d'éducation civique lancée par l'Eglise catholique le 30
mars 2005, renseigne qu'à la question de savoir si le rôle de
l'Eglise catholique a été bon, mauvais ou indécis durant
cette transition, 57,5% des questionnés ont
répondu `'BON pendant la transition''
et 62,5% `'BON depuis la campagne d'éducation
civique `' »83(*). Le journal le Potentiel, dans
une de ses livraisons, a rapporté justement que les populations
congolaises, particulièrement celles de la Capitale KINSHASA, ont
apprécié à juste titre le travail positif de
l'Eglise »84(*)
malgré le fait que les devoirs de charité et de rendre service
n'ont pas suffi pour changer certaines méthodes endurcies. Ainsi, nous
pouvons dire que le bilan semble positif, mais les défis à
relever restent énormes.
C'est le lieu de rappeler la pertinence de la question du
professeur KÄ MANA : « Comment pouvons-nous, nous
communautés de foi, transformer cette situation en un atout dont notre
société pourra nous être reconnaissante, une fois que la
Nation aura été sauvée de son désastre
actuel ? »85(*). Dès lors, il convient de dégager les
nécessités et perspectives d'avenir pour répondre aux
nouveaux défis tournés vers la recherche et la consolidation de
la paix, d'un côté, et de l'autre, la stabilité et la
réconciliation nationale.
CHAPITRE 2 : L'EGLISE ET LES
NOUVEAUX DEFIS
Depuis le lancement du processus de démocratisation le
24 avril 1990, l'accompagnement de l'Eglise dans la conscientisation des
dirigeants et autres acteurs politiques sur la gestion de l'appareil de l'Etat
est présent. Aux yeux du peuple notamment, cet engagement a
constitué un soutien fort dans sa détermination d'aboutir
pacifiquement au changement par le choix de ses dirigeants et le contrôle
de ses nombreuses richesses à travers un régime politique
où la souveraineté est exercée par le peuple.
Face au nouveau contexte qui s'imposait, l'Eglise a eu le
coeur à l'ouvrage pour l'aboutissement du processus électoral
à travers les élections historiques reconnues comme justes,
libres, démocratiques et transparentes. En outre, consciente des dures
conditions de vie et de travail des populations qu'elle partage du reste au
quotidien, l'Eglise a décidé de faire plus qu'hier, davantage
demain, pour répondre, aux nécessités
pré-électorales (Sect1), et aux perspectives d'avenir (Sect2).
Section 1 : Nécessités
pré-électorales
Comme dit un adage populaire, `'il y a de la coupe aux
lèvres''. Depuis des lustres, au sujet de la gestion quotidienne de la
`'res publica'', le peuple congolais a vécu comme dans une
traversée du désert, la satisfaction de ses nombreuses attentes.
Ainsi, sachant que par le passé, ses attentes du peuple ont
été soit déçues, soit réalisées en
payant un lourd tribut, l'Eglise a invité tout le monde à
l'ouvrage, en premier lieu, les institutions, car, les regards du peuple
étaient tournés vers les élections pour mettre fin
à la longue crise de légitimité.
Pour ce faire, elle a initié des actions face au
processus électoral (§1) en dépit des prises de position
opposées ayant suscité à la fois craintes et espoirs
(§2).
Paragraphe 1. Des actions
nécessaires face au processus électoral
Dans le souci d'accompagner le processus électoral,
l'Eglise a décidé d'organiser une série d'actions
mobilisatrices. Dans le but de ne pas se limiter aux dénonciations et
autres interpellations, elle a suggéré des pistes de solutions
à l'endroit d'une frange des forces politiques et sociales qui
s'étaient dressées contre les élections sous
prétexte que les conditions n'étaient pas idéalement
réunies. Il ne pouvait en être autrement dans la mesure où
l'Eglise s'était toujours érigée en gardienne du temple au
milieu du village.
Et, en tant que partie prenante et garante de l'Accord Global
et Inclusif (AGI) également, elle devait veiller à sa mise en
oeuvre effective, d'où, la poursuite de la sensibilisation par des
actions mobilisatrices (A), en prélude du processus électoral
(B).
A. Des actions mobilisatrices
En prévision du lancement officiel de la campagne pour
les élections, l'Eglise a, dans le cadre de ses actions, amorcé
la sensibilisation du peuple à travers ses fidèles afin qu'ils
s'imprègnent des enjeux et contours de l'expression du suffrage.
Il s'agissait essentiellement de :
- La publication et diffusion des supports didactiques tels
que les ouvrages, les dépliants à l'intention des animateurs
civiques et électoraux dans le but notamment d'appuyer leurs
enseignements et prises de position ;
- La vulgarisation des expériences en matière
d'éducation civique à travers tout le pays pour une participation
effective et massive des citoyens au referendum constitutionnel et aux
élections proprement dites;
- L'organisation et la tenue des cycles de conférences,
colloques et autres sessions de formation en rapport avec tout le processus
démocratique.
- La formation des observateurs et médiateurs des
conflits électoraux ;
- La formation des témoins électoraux
- La formation des leaders politiques chrétiens
Les cris d'alarme à travers le message du Comité
Permanent des Evêques du Congo: « j'ai vu la misère de
mon peuple (Ex 3,7) Trop c'est trop »86(*).
Dorénavant, l'Eglise catholique prit l'option
courageuse de passer à la vitesse supérieure par l'inauguration
d'une nouvelle dynamique non seulement dans la prise de position, mais surtout
dans l'action à entreprendre par Elle devant le drame du peuple
congolais, d'où, une série d'actions de sensibilisation à
savoir :
- passer des déclarations,
dénonciations à l'engagement réel ;
- prendre conscience de la mission de l'Eglise et s'organiser
pour accompagner la période de transition, spécialement en
prenant des positions courageuses et prophétiques face à
l'évolution de la situation nationale;
- s'investir dans la formation de base des leaders politiques
et chrétiens, du peuple à la paix, à la démocratie,
aux principes électoraux et mobiliser le peuple à acquérir
le réflexe de sa propre prise en charge sous toutes ses formes.
En effet, après une campagne de conscientisation des
masses sur le bien-fondé du suffrage universel et de ses règles
de jeu, l'Eglise a engagé une vaste campagne d'éducation civique
et électorale. L'objectif poursuivi était d'amener les
populations à s'approprier du processus et leur
faire prendre conscience des enjeux des élections à venir en vue
de les rendre responsables et de les impliquer au niveau de l'organisation
à différents échelons.
Pour y parvenir, l'Eglise catholique a mis en place une
cellule d'experts dénommée `Observatoire de la
Conférence Episcopale Nationale du Congo `', et le 17 janvier
2004, `'le collectif chrétien pour les Elections 2005'' qui
comprenait en son sein un groupement de quelques Associations et Mouvements
d'obédience catholique dont l'objectif principal était d'amener
le peuple Congolais à se familiariser avec le processus
électoral.
Dans la foulée, le Collectif a rédigé et
publié entre autres, le manuel intitulé `'Elections en RD
Congo : Enjeux et stratégies
d'organisation'' à l'intention des animateurs et
éducateurs de la culture démocratique et électorale.
Ainsi, dans le cadre de son appui aux Institutions de la transition, la CENCO a
procédé le Mardi 07 Mars 2004 au lancement officiel de la
campagne d'« éducation civique pour la préparation des
populations aux élections prochaines en RD Congo »87(*). Ces actions contribuaient au
développement et à la formation de leadership engagé dans
le processus de démocratisation, à la sensibilisation des
communautés chrétiennes sur leurs droits et devoirs de citoyen
notamment de dénoncer les mauvaises pratiques qui torpillent la paix.
Pour l'Eglise catholique, la déclaration des Evêques
« Pour l'amour du Congo, je ne me tairai
point »88(*) indique suffisamment que l'Eglise avait montré
sa force en dénonçant toute dictature d'où qu'elle vienne
(dictature du Maréchal-président MOBUTU, celle de l'AFDL).
`'Trop c'est trop, nous avions organisé la
résistance aux abus sociaux'', tels sont les propos de Mgr NLANDU,
Vicaire général et Evêque auxiliaire de Kinshasa devant un
parterre d'invités de marque dont le Vice-président de la
République qui avait dans ses attributions la charge de la commission
socio culturelle du gouvernement Arthur Z'AHIDI NGOMA, la Ministre des Droits
Humains Mme Marie Madeleine KALALA, Mr l'Abbé-président de la CEI
Apollinaire MALU-MALU, les membres du corps diplomatique et de nombreux
fidèles catholiques, responsables politiques et associatifs membres de
la société civile, etc. Le temps des discours est révolu,
il faut passer aux actes : disait-il, d'où, le programme actuel qui
s'articule autour de six axes, à savoir : `'passer des
déclarations à l'engagement réel, pendant que la classe
politique se dispute les postes, prendre de positions courageuses chaque fois
que le climat sociopolitique l'exige pour sensibiliser le peuple congolais et
sauvegarder l'intégrité territoriale et s'impliquer dans les
Institutions d'appui à la démocratie pour rapprocher la base''.
De son côté, la Commission
Episcopale `' Justice et Paix'', CEJP, lancera la
campagne « Non-violence active et élections »
89(*) à l'issue de la
clôture de la formation des formateurs nationaux.
Dans le cadre de la préparation immédiate des
populations aux élections, il a été mis sur pied un projet
de formation en marge du grand programme supervisé par la Coordination
des actions pour la réussite de la transition (CARTEC) de l'Eglise
catholique. L'union faisant la force et pour faire d'une pierre deux coups,
toutes les confessions religieuses conclurent le 29 juillet 2004 un protocole
d'accord pour une collaboration franche et étroite à
l'éducation civique et électorale autour d'un programme commun
dit « le projet CARTEC » comme suit :
« Conscients du rôle qui est le nôtre,
nous, Chefs de Confessions religieuses présentes en RDC,
organisés en plate-forme de dialogue interreligieux au niveau tant
national, provincial que local, forts de l'expérience que nous avons des
actions conjuguées ensemble lors des semaines de prière pour
l'unité et le dialogue interreligieux ainsi que lors des grands enjeux
de la Nation congolaise tels que la Conférence Nationale, le Dialogue
inter congolais, nous nous engageons, par cette déclaration
écrite, au nom de la foi, à collaborer pour assurer
l'éducation civique et électorale à la population
congolaise afin de l'aider à s'approprier la Transition pour la
réussite des élections et à instaurer un Etat de droit
pour sauver le pays de la situation chaotique et lui ouvrir le chemin du
développement »90(*). Après cette signature du protocole d'accord,
le projet CARTEC a été adopté comme programme commun de
toutes les confessions religieuses en vue d'assurer l'éducation civique
et électorale aux populations congolaises pendant la transition via les
commissions « Justice et Paix » de chaque confession
religieuse partie prenante dudit protocole.
Cette initiative des confessions religieuses traduisait leur
engagement sociopolitique de soutenir le processus en cours par des
actions communes pour l'établissement d'un Etat de droit
démocratique et respectueux des droits et libertés du citoyen en
RD Congo. Et, pour ce faire, il a fallu de la détermination pour
transformer les longues et pénibles douleurs en un atout pour l'ensemble
de la communauté. Les étapes du déroulement du processus
électoral ci-après en témoignent.
B. Déroulement du processus
électoral
Le pari gagné de la tenue des élections en RD
Congo avec le triple caractère libre, transparent et démocratique
fut salué, quoique précédé des moments
d'effervescence autour du calendrier électoral. En effet, convaincu du
discours officiel et du calendrier établi par la CEI sur la tenue
effective des élections, le peuple n'attendait plus que le rendez-vous
avec l'histoire afin de mettre un terme à la crise de
légitimité.
Par ailleurs, il faut reconnaître que l'existence de
quelques interrogations sur sa tenue effective dans la mesure où le
budget national 2005 ne prévoyait pas son financement. Cette
préoccupation avait conduit l'Eglise catholique avec l'appui des autres
confessions religieuses, à proposer `'la création d'un fonds
national pour les élections'' afin de les financer par la
population, mais l'initiative suscita la peur dans certains milieux politiques.
En effet, cette tentative des confessions religieuses n'a pas
trouvé d'écho au sein de la classe politique qui craignait que la
grande ascendance de l'Eglise ne leur fasse ombrage. Pourtant, face aux
aléas logistiques et financiers présentés par la CEI, le
report des élections pour l'an 2006 était plus que
prévisible. Toutefois, après la mobilisation des fonds, la CEI
parvint à cumuler l'organisation de l'identification et
l'enrôlement des électeurs. Le succès de ces
opérations permit notamment à l'Eglise de renforcer son appui
à la CEI qui réussit son `'pari en
organisant le référendum constitutionnel en date de 18 et 19
décembre 2005''.
Cet appui était constitué, entre autres, de la
mise à la disposition de la CEI du réseau des observateurs
chrétiens (ROC), d'un important quota en ressources humaines de
qualité (agents électoraux et observateurs) ainsi que des
bâtiments d'établissements scolaires conventionnés et
autres édifices leur appartenant pour la réussite de
l'événement.
Malgré le « manque de cohésion dans le
mot d'ordre »91(*) observé du côté de l'Eglise, le
peuple congolais ne s'était pas empêché de se prononcer
à « une écrasante majorité pour le OUI à
la Constitution (84,3%) »92(*), comme lors du tout premier
référendum de 1964 portant sur la Constitution de Luluabourg,
avec un taux de participation estimé à 60% sur l'étendue
du territoire national. Cette étape du processus électoral avec
la promulgation solennelle de la Constitution par le président de la
République Joseph KABILA KABANGE le 18 février 2006 a
été marquée par des prises de position opposées
ayant suscité craintes et espoirs.
Paragraphe 2. Craintes et espoirs
Après le referendum constitutionnel, l'Eglise ne
s'était pas empêchée de se prononcer sur la question des
listes liées à la loi électorale et
l'éventualité d'une rencontre réunissant les forces en
présence avant la tenue des élections. L'enjeu de taille que
revêtait la question étant sensible, elle ne pouvait se garder de
peser de tout son poids politique et sociologique pour faire triompher un choix
susceptible de traduire la volonté du peuple.
A. Le triomphe d'un choix
Plusieurs scenarii de choix s'étaient disputés
la vedette : listes ouvertes, listes fermées et listes
zébrées. Dans le souci de faire triompher la volonté du
peuple, l'Eglise s'était clairement prononcée sur l'option des
« listes ouvertes », alors que le gouvernement
préférait celle des « listes bloquées et
zébrées ». Du côté du Parlement, les
débats houleux et passionnés sur le projet de la loi
électorale tournaient autour des modes de scrutin avec les
différents concepts.
En effet, la liste ouverte avec une voix
préférentielle permet à chaque électeur de choisir
un seul candidat sur une liste. Les candidats seront ensuite rangés
selon l'ordre alphabétique sur la liste d'un parti, d'une plate-forme ou
d'un regroupement politique. Certes, la seule voix de l'électeur profite
à la liste et au candidat choisi. Mais, au partage des voix après
dépouillement, le candidat qui récoltera le nombre de voix
correspondant au quotient électoral sera élu quelle que soit sa
place sur la liste.
Par contre, cette option se démarque de la liste
bloquée que les parlementaires ont, du reste, rejetée car, elle
limite le choix de l'électeur. En plus, lorsque ce dernier vote, sa voix
compte non pas pour le candidat de son choix mais uniquement pour la liste pour
laquelle ce candidat se présente. Une autre démarcation des
listes bloquées est que l'ordre de ces listes n'est plus
alphabétique, mais il est dicté par chaque parti politique
propriétaire ou allié de la liste. Par conséquent, le
partage des voix se fait en fonction de l'ordre préféré
par le parti ou regroupement politique, en respectant la parité
homme-femme, peu importe la préférence de l'électeur.
Enfin, s'agissant de la forme zébrée des listes
bloquées, elle impose de faire suivre une femme après chaque
candidat homme sur ces listes. Après des débats et
interprétations en sens divers, l'Assemblée Nationale leva
finalement l'option des `'listes ouvertes'' lors de sa
plénière du vendredi 20 janvier 2006, laquelle était
proposée par l'Eglise catholique.
A la suite de la position de l'Eglise catholique que nous
avons partagée, car, à notre humble avis, le mode de scrutin
proportionnel des listes ouvertes à seule voix
préférentielle comportait un avantage certain en ce qu'il
respecte l'intention des électeurs et donne aux députés le
sentiment de légitimité et une certaine fierté
d'être mandatés réellement par le souverain primaire, ce
qui ne serait pas le cas si on avait opté pour « le scrutin
à listes bloquées et zébrées, n'exprimant pas
nécessairement la préférence de l'électeur
»93(*).
Rejoignant la tendance majoritaire des Congolais, cette
position apparaîtra dans la mouture finale de la loi électorale
promulguée le 9 mars 2006. Nonobstant la solution trouvée sur le
choix des listes, d'autres divergences apparurent entre les confessions
religieuses autour de l'éventualité d'une rencontre,
qualifiée de piégée, qui devaient réunir autour
d'une table toutes les forces en présence à l'approche du 30 juin
2006, date retenue pour les élections présidentielles et
législatives.
B. Une rencontre
piégée
L'éventualité des concertations politiques avant
la tenue des élections était l'occasion d'un autre bras de fer.
Elle a fait apparaître des contradictions internes entre les confessions
religieuses comme c'était le cas à propos de la consigne de vote
au référendum constitutionnel.
En effet, à l'appui du calendrier électoral
publié par la CEI le samedi 30 avril 2006 qui situait les
élections présidentielles et législatives au 30 juillet
2006, donc après le 30 juin 2006, l'Eglise catholique proposa pour le
1er mai 2006 un dialogue politique de toutes les forces vives de la Nation en
vue de prendre les dispositions nécessaires pour rassurer tout le monde
et éviter que la gestion de l'après 30 juin ne soit la même
que celle de l'avant 30 juin 2005. Fustigeant le calendrier électoral,
la CENCO trouva « qu'étant donné qu'il sera impossible
d'organiser les élections avant le 30 juin 2006 ; ainsi que cela a
été prévu par l'Accord Global et Inclusif et par la
Constitution de la Transition ; il va de soi que tout
réaménagement du calendrier électoral ne puisse se faire
unilatéralement, mais qu'il soit le résultat d'un consensus entre
les forces vives de la Nation »94(*). Mais, cette proposition présentée ne
faisait pas l'unanimité au sein de l'Eglise en général
même pas au sein de l'Eglise catholique.
Dans la même fronde, les Evêques à l'Est du
pays s'opposaient à la position de la CENCO en rejetant les
concertations politiques, avant d'appeler le peuple au respect du calendrier
électoral présenté par la CEI. Partant, ils
affirmèrent indirectement que, la transition ne prenait pas fin au 30
juin 2006. Point par point, cette position rejoignait également celle
prise par les Eglises de réveil pilotées par les Pasteurs Albert
KANKIENZA, Sony KAFUTA ROCKMAN et Jean Oscar KIZIAMINA KIBILA. De son
côté, dans un style subtil et précis, l'Eglise protestante
s'opposait à la position de la CENCO, appelant ainsi au « respect
de la Constitution de la Troisième République,
spécialement les articles 222, 228 et 229 »95(*). Qui plus est, l'Eglise
protestante estimait qu'il fallait mettre le cap sur les élections, sans
transiter par des concertations politiques.
Réunie en sa 38ème session ordinaire à
Mbuji-Mayi du 16 au 19 mai 2006 dans la province du Kasaï-Oriental,
l'Eglise protestante affirmait également dans sa déclaration que
la transition ne s'arrête pas le 30 juin 2006, apprécie la
fixation par la CEI du calendrier électoral révisé
après consultation des bureaux des deux chambres du parlement et
d'autres partenaires engagés dans le processus électoral et
réitère son appréciation du fonctionnement des
institutions de la transition (...), de leur constance à mener le pays
aux élections libres(...).
S'agissant de la fin de la transition,
l'Abbé-président de la CEI rappelait l'article 222 de la
Constitution du 18 février 2006, pour dire qu'il n'y avait qu'une
seule Constitution, et non deux, un peu pour dire qu'il rejetait l'expression
« réaménagement unilatéral », car, la CEI
était légalement la seule structure habilitée à
établir le calendrier électoral.
Au demeurant, elle s'opposait aux concertations politiques,
qui pour lui allaient renvoyer indéfiniment les élections,
probablement aux calendes grecques. Au sein de la CEI, le président ne
s'exprimait pas en sa qualité de prêtre catholique, mais il n'en
restait pas moins membre du clergé chapeauté par la CENCO. Sur
cette question, Mgr MONSENGWO dira que « l'Abbé MALU-MALU est un
prêtre. Nous devons donc le protéger contre tous les dangers
éventuels, physiques et moraux, et contre toute pression(...), il n'est
pas toujours compris, mais nous voulons le protéger ; c'est pour
cela que nous prenons certaines positions, que lui ne peut pas prendre
»96(*).
Pourtant, dans sa déclaration faite le 20 juillet 2006,
dix jours avant les élections du 30 juillet, la CENCO menaçait de
ne pas reconnaître la validité des élections du fait que
toutes les conditions n'étaient pas encore réunies pour la tenue
de scrutins réellement transparents, libres et démocratiques.
Trois jours après, le Comité régional des Abbés de
la ville de Kinshasa va apporter son soutien à la position de la CENCO,
et surtout, va appeler le peuple à boycotter les élections si les
irrégularités constatées ne sont pas corrigées
avant la clôture de la campagne électorale.
En effet, la CENCO constatait un ensemble de données
confirmant les craintes de manipulation, de tricherie sinon de fraude notamment
les déclarations contradictoires sur les listes électorales et le
nombre exact des électeurs, les explications embarrassées sur
celui des bulletins de vote excédentaires, les suspicions sur la
localisation du serveur central et sur les programmes informatiques, l'absence
du calendrier électoral complet.
Aux antipodes de ces deux positions, Mgr
François-Xavier MAROY, Archevêque de BUKAVU appelait les
Congolais à participer au scrutin du 30 juillet 2006 sans évoquer
ni les conditions de transparence, ni les cas
d'irrégularités97(*). S'alignant sur la même position, les chefs des
Eglises d'Inongo dans la province du Bandundu, à l'Ouest du pays, ont
lancé au cours d'un culte oecuménique un appel à leurs
fidèles à voter massivement et sans sentiment le 30 juillet
prochain, car, le vote est un devoir à ne pas manquer.
En clair, nous pouvons dire que la gestion de la
réalité électorale a été délicate
pour tout le monde, encore qu'à ce stade, chaque confession religieuse
s'est mise en exergue.
Même l'Eglise catholique a vu l'éclosion de ses
différends internes remonter à la surface.Quoique
confrontée à une épreuve sans précèdent, la
CENCO n'a pas versé dans la résignation, au contraire, elle a
surmonté ses contradictions internes en peu de temps, pour éviter
de placer les fidèles-électorat catholique devant un dilemme d'un
mot d'ordre autour des élections. Par la voix de son président
Mgr MONSENGWO et sans équivoque, elle déclara ce qui suit :
«Dimanche, allez voter, moi-même je vais me rendre dès demain
à Kisangani pour participer au vote »98(*). Pour expliquer ce revirement
prévisible, à trois jours des élections et sept jours
après la déclaration au vitriol du 20 juillet, le prélat
informa que l'évolution de la position de la CENCO est intervenue
après une enquête systématique sur les faits menée
auprès des acteurs impliqués dans le processus électoral.
Au sujet des irrégularités dénoncées, Mgr le
président de la CENCO dira de façon ironique et
embarrassée : `'Posez la question aux 19 candidats''. Autrement dit,
l'Eglise catholique avait obtenu gain de cause sur les inquiétudes et
doutes intervenus et qu'elle n'avait pas à cautionner le faux-fuyant de
certains acteurs politiques qui s'étaient engagés
manifestement dans la spéculation, la désinformation et
l'intoxication pure et simple.
Ainsi, comme jadis Jean XXIII déclara,
« dans l'application des principes, il peut arriver que des
catholiques, même sincères, soient d'opinions différentes.
En ce cas, ils doivent veiller à se conserver et à se manifester
estime et respect mutuels. »99(*). De son côté,
l'Abbé-président MALU-MALU de la CEI, tout en regrettant
qu'on fasse de chaque difficulté un montage, n'avait pas tort de dire
que son institution avait l'avantage d'organiser les élections
après que beaucoup d'Etats africains aient organisé les leurs,
car, cela lui avait permis de « consulter plusieurs d'entre eux afin
de pouvoir réaliser de bonnes élections en RD
Congo»100(*). De ce
point de vue, nous pensons qu'il faille être de mauvaise foi pour ne pas
comprendre que la motivation réelle de cette agitation politique
était ailleurs.
Cependant, il faut souligner toute l'importance que cela
représentait de recueillir d'autres sons de cloche émis par
d'autres prélats et prêtres du clergé. Par contre, il sied
de noter, en effet, que bon nombre de candidats étaient
désabusés, car, se sachant populaires uniquement dans leurs
familles respectives et auprès de leurs proches immédiats. Ainsi,
ils ont très vite préféré s'aligner dans la
manipulation de la population. Voulant à tout prix justifier leur
défaite prévisible avec un discours populiste, ils ont
pompeusement accusé la CEI d'être à la solde du candidat
locataire du palais de la Nation (Bureau officiel de la Présidence de la
RD Congo). Ces faits ont été aussi relevés par
« bon nombre d'observateurs avertis »101(*).
Par ailleurs, décréter un boycott des
élections par l'Eglise catholique paraissait à la fois trop
risqué et aurait l'air d'un véritable défi, car, la grande
inconnue se situait autour de la réaction de la population et surtout
des fidèles catholiques qui, au-delà de leur adhésion sans
faille à la foi catholique, restaient citoyens à part
entière avec des préférences politiques distinctes par
rapport aux choix des candidats. Au demeurant, étant donné que
les catholiques sont majoritaires en RD Congo, le boycott pouvait susciter des
débordements dangereux.
Pourtant, le principe des concertations entre acteurs
politiques institutionnels et non institutionnels était approuvé
par toutes les forces politiques et sociales. Mais, il n'en fut rien, car,
engager des concertations ouvrirait la voie aux manoeuvres dilatoires, alors
que le problème que posaient certains acteurs politiques, la plupart de
l'opposition, se situait sur la légitimité des mandats politiques
des acteurs institutionnels après le 30 juin 2006 conformément
aux articles 196 de la Constitution de la Transition, 222, 228 et 229 de la
Constitution du 18 février 2006 et dont réponse figurait dans les
dispositions constitutionnelles sus indiquées.
Comme l'a souligné le Père Rigobert
MINANI, « les chrétiens ont le devoir d'être
cohérents avec l'Evangile et l'enseignement de l'Eglise dans leur action
politique; mais il est normal qu'il y ait parmi eux des divergences sur
l'opportunité d'agir ou non... le besoin de prévaloir la
citoyenneté en accomplissant son devoir civique ou la
nécessité de se conformer à la consigne de
l'Eglise »102(*). Par ailleurs, il importe de mentionner que certains
acteurs politiques dont un grand nombre des candidats malheureux à la
présidentielle ont tenté, notamment à travers des
déclarations accusatrices basées sur des rumeurs non
fondées, de reprendre à leur compte tous les desiderata
exprimés par la CENCO à la CEI.
C'est le lieu de saluer et de reconnaître comme tout le
monde, y compris en premier lieu la CEI, qu'en dépit des hauts et des
bas, sans l'implication de la CENCO qui s'est investie considérablement
à expliquer le bien-fondé des élections aux populations,
la tâche de la CEI ne serait pas du tout aisée. Les enseignements
de la CARTEC ont permis à la CEI de communiquer avec les populations et
d'atteindre la base profonde.
Il faut, cependant, déplorer le fait que malgré
son sol et son sous-sol immensément riches en ressources, la RD Congo ne
pouvait pas organiser seule les différents scrutins prévus
à cause de plusieurs années de mauvaise gouvernance,
d'instabilité politique et des conflits armés. Ainsi, la
Communauté internationale a pris en considération la
complexité de la situation au point qu'en réponse aux appels
lancés, ça et là à son attention, elle a
réagi positivement par l'octroi d'un appui matériel et
financier impressionnant au gouvernement de la RD Congo et aux partenaires
locaux au développement pour la réussite des élections.
C'est le cas notamment de l'Eglise catholique qui bénéficia
d'un `'appui financier multilatéral considérable pour la
concrétisation de son programme électoral en faveur des
populations''.
A l'instar de l'Organisation des Nations Unies à
travers sa mission en RD Congo (MONUC), un certain nombre de partenaires au
développement comme l'Agence Canadienne de Développement
International (ACDI), Développement et Paix (Canada) et la Fondation
Konrad ADENAUER a appuyé l'action de l'Eglise. Déjà depuis
2001, Développement et Paix en collaboration avec ses partenaires
congolais a organisé bon nombre d'activités dans le cadre d'un
programme bilatéral avec l'Agence Canadienne de Développement
International.
Avec son programme d'appui à la paix et à la
démocratie (PAPD), l'ACDI a permis d'effectuer un vaste travail
d'éducation civique à travers tout le pays, bien que plusieurs
autres projets d'éducation électorale n'aient été
réalisés, afin de préparer la population à la tenue
des premières élections libres, transparente et
démocratiques depuis 40ans.
Cependant, il convient de noter que de tous les projets
financés grâce au Programme d'Appui à la Paix et à
la Démocratie, celui de la CENCO, nommé CARTEC (Coordination des
actions pour la réussite de la transition de l'Eglise catholique) est
devenu le programme de toutes les confessions religieuses. Cet élan de
solidarité a assuré à la CARTEC un soutien financier pour
la réalisation du « Guide de formation de l'électeur
congolais, dont l'usage a servi à une large couverture des actions de
l'Eglise dans leur soutien au processus électoral notamment le
déploiement de 50.000 animateurs pour sensibiliser la
population »103(*).
Cet appui a permis à l'Eglise de devenir un acteur
incontournable dans le processus électoral. Aussi, face à
l'inertie et la démission de la classe politique, son rôle
s'est-il accru. Bien que son intervention ait été tantôt
saluée, tantôt critiquée, il convient d'en tirer le
meilleur parti, c'est-à-dire, reconnaître les progrès
réalisés, les consolider et relever les failles de cette
intervention pour y remédier.
Section 2: Perspectives
d'avenir
Nous ne cesserons de rappeler que depuis son accession
à l'indépendance le 30 juin 1960, la RD Congo n'a connu qu'une
éphémère période d'apprentissage
démocratique.
En effet, l'histoire nous renseigne que les Pères de
l'indépendance avaient posé les jalons de la démocratie
notamment avec la création des partis politiques, grâce auxquels
ils ont concouru aux élections générales, dont celles de
mai 1960 étaient les plus déterminantes, car, elles ont conduit
notre entité à accéder à la souveraineté
internationale avec Patrice Emery LUMUMBA, 1er premier ministre et
Joseph KASAVUBU premier président de la République. Il eut
également les élections pluralistes intervenues en 1964 mais
l'expérience inaugurée sera vite interrompue par le fameux coup
d'Etat militaire du 24 novembre 1965 orchestrée par le Haut Commandement
Militaire sous la conduite du Lieutenant-colonel Joseph-Désiré
MOBUTU.
Après 32 ans de son règne sans partage, le pays
s'est retrouvé dans un long processus de transition. Avec la tenue de
premières élections générales à partir de
2006, le pays a franchi un tournant décisif, mettant le cap sur les
principes démocratiques universels.
Cependant, plus qu'hier, la hâte de revivre dans un Etat
pacifié, unifié, réconcilié, prospère,
débarrassé notamment des conflits armés, et de la
précarité insupportable, s'est vite transformée en
illusion, compte tenu du non-achèvement des objectifs cardinaux
fixés par l' ACCORD GLOBAL INCLUSIF, et la question de la paix, la
réconciliation/cohésion nationale, l'accélération
de la réforme de l'armée nationale intégrée se
restent d'actualité.
De toute évidence, l'heure a donc sonné pour la
RD Congo, avec le nouveau souffle des dirigeants légitimes que s'est
choisis le souverain primaire, ses énormes potentialités
diversifiées (ressources humaines, naturelles),
d'entreprendre des choix judicieux dans tous les secteurs vitaux de la
vie nationale pour rétablir les ressorts (§1) et capitaliser les
dividendes électorales à travers la responsabilité
collective dans la réalisation du projet commun (§2).
Paragraphe 1. Rétablir les ressorts
Rétablir les ressorts brisés suppose
l'application concrète des mesures courageuses, difficiles,
décisives, énergiques et librement prises pour marquer le passage
de l'ancien régime monopartite non- démocratique au nouveau
système pluraliste et démocratique, car, le peuple attend plus
d'actes concrets et moins de discours qui peuvent paraitre démagogiques.
Tout ceci appelle un brisement intérieur des
décideurs, un esprit de sacrifice pareil aux propos suivants de l'ancien
président de la MAURITANIE, le Colonel Ely OULD MOHAMED VALL :
« dès lors que celui qui est au pouvoir se veut un homme
d'Etat au service de ses concitoyens, l'exercice du pouvoir n'est pas une
jouissance, c'est une souffrance quotidienne. Prendre chaque jour des
décisions qui engagent la vie des gens et l'avenir d'une Nation en se
demandant sans cesse si on ne se trompe pas, en se battant contre ses doutes et
ses propres insuffisances, se réveiller la nuit en se demandant si on a
bien mesuré toutes les conséquences de ses actes, croyez-moi,
c'est une torture »104(*).
Sur cet aspect, l'essentiel de la mission spécifique du
Seigneur confiée à son Eglise serait notamment de continuer
à contribuer à la formation des gouvernants et gouvernés
pour qu'ils s'imprègnent des enjeux démocratiques et prennent
consciences des exigences de leurs responsabilités sociopolitiques
chacun là où il se trouve, « car la formation du peuple
apparaît comme l'une des réponses les mieux appropriées
à la crise de la classe politique congolaise,... »105(*).
Alors, annoncer la bonne nouvelle du salut serait
éclairer et animer tous les aspects du cheminement des hommes et des
peuples vers le salut véritable (le Royaume de Dieu) en faisant de leur
bien-être le centre des préoccupations. Pour y parvenir, l'Eglise
doit saisir ce temps favorable pour exercer son leadership communautaire,
c'est-à-dire, apporter à la fois aux institutions publiques, et
aux entreprises privées des idées novatrices /recommandations et
la méthodologie de leur mise en oeuvre aux fins d'accomplir certains
objectifs.
A titre d'exemple, il est du rôle de l'Eglise d'exiger
de:
· Après l'installation des institutions
légitimes et légales, les faire piloter par des animateurs
intègres, compétents, soucieux du bien-commun, ayant un sens aigu
du patriotisme, du leadership communautaire répondant aux
préoccupations de la base;
· Gouverner pour bâtir la refondation du pays
à partir des piliers démocratiques ;
· Faire actionner tous les mécanismes national,
régional, international pour faire du Congo un pays où il fait
beau vivre, favorisant le débat d'idées, pays où
règnent la paix, la concorde nationale, la cohabitation pacifique, la
justice distributive, la vie décente, le respect des droits de la
personne grâce à un développement socio-économique
endogène ;
· Instaurer la culture de la bonne gouvernance avec
zéro tolérance d'impunité, de corruption, de trahison
Ainsi, il ya lieu de comprendre que tout
l'intérêt de notre étude se trouve finalement dans la
capacité d'entrevoir les perspectives qu'offrent les Eglises africaines
confrontées à la lancinante question de l'émergence d'un
Etat de droit, régi par les principes de « la transparence et
de la bonne gouvernance »106(*), préalables notamment à la
réduction de la pauvreté en vue d'un développement
durable.
Certes, la situation préoccupante à l'Est du
pays constitue un frein à l'envol général, mais elle
s'améliore avec la fin des hostilités et cela n'empêche
guère que soit capitalisée la nouvelle donne intervenue
après le choix libre, démocratique et transparent des dirigeants
actuels. Par conséquent, le travail de l'Eglise doit continuer pour
forger un sursaut patriotique et responsable (A) dans les coeurs et les esprits
de chacun, au premier chef, non seulement des dirigeants politiques pour la
consolidation de l'Etat de droit(B), mais aussi de la population qui ,en
dépit de son éveil d'esprit sans conteste, recourt encore, soit
à l'espérance biblique de la fin de la misère sans effort
personnel `'(voir l'expression: NZAMBI A SALA ,TALELA BISO LIKAMBO
OYO)''107(*),
soit se perde dans l'inconscience au point d'accorder son soutien actif
à des politiciens, qui abusent de sa bonne foi jusqu'à
l'entrainer dans des conflits meurtriers.
A. Un sursaut patriotique et
responsable
A l'ouverture de l'Angélus le 11 mars 2007, le Pape
Benoît XVI déclara : « les personnes et les
sociétés qui vivent sans jamais se remettre en question ont comme
unique destin final la ruine; il vaut mieux allumer une allumette
que maudire l'obscurité »108(*).
Ces propos présentent en filigrane l'idée du
changement, de l'effort pour créer et parfaire, car, comment
rélever les défis qui s'imposent sans qu'un sursaut patriotique
et responsable ne soit accompagné de l'action sans laquelle aucune
réflexion rationnelle et adéquate ne peut résister
à l'usure du temps. En effet, c'est d'abord par le travail que
l'individu, non seulement transforme les choses et la société,
mais s'accomplit en développant ses facultés, s'humanise et
s'ennoblit.
Cela implique également que le comportement politique
subisse une métamorphose après la tenue des élections qui
ne constituent point une justification, encore moins un alibi pour qui que ce
soit de s'adonner impunément à la manipulation, à la
désinformation, à l'intoxication, à la démagogie,
etc. Qui plus est, il apparaît encore clairement qu'en RD Congo, le vieil
homme refuse de passer la main à l'homme nouveau, c'est la nature du
message des Evêques du 21 février 1995: « Des dirigeants
nouveaux pour le salut du peuple ».Voilà pourquoi nous
rappelons aux politiques qu'il ne suffit pas de vous déclarer
être du peuple et travailler pour lui, il est indispensable de vous vous
engager dans les voies de la justice et du droit pour le progrès
réel de tous.
Au siècle dernier, dans son enseignement, encore
d'actualité, le Pape Léon XIII affirmait : `'Ce qui
fait une Nation prospère, ce sont des moeurs pures, des familles
fondées sur des bases d'ordre et de moralité, la pratique de la
religion, le respect de la justice, une imposition modérée et une
répartition équitable des charges publiques, le progrès
de l'industrie et du commerce, une agriculture florissante et d'autres
éléments du même genre, s'il en est, que l'on ne peut
développer sans augmenter d'autant la prospérité et le
bonheur des citoyens''»109(*).
N'a-t-on pas entendu dire qu'un Etat bien géré
prospère, tandis que celui qui est mal géré se
dégrade et qu'un Etat qui se veut respectueux des principes et
règles de jeu démocratiques devra conduire sa politique de
gestion conformément aux règles de la bonne gouvernance,
c'est-à-dire, une saine et juste gestion de toutes les ressources
nationales sans laquelle l'on ne saurait, ni répondre aux attentes des
populations, ni entamer le déclic d'un développement durable dans
cette construction de la démocratie.
Voilà pourquoi Ousmane SY du Mali
disait :"L'Afrique n'est pas pauvre, elle est mal gouvernée... ".
En définitive, le sous- développement que connaît la
majeure partie des Etats africains dont la RD Congo, résulte de la
mauvaise gouvernance de l'Etat.
Il faut une réelle remise en cause de nos structures et
comportements qui ne cadrent pas à un sens élevé de
responsabilité et à une gestion saine et orthodoxe des affaires
publiques. En effet, présidant les cérémonies d'inhumation
de Frédéric Cardinal ETSOU de la RD Congo, Christian Cardinal
NTOUMI, légat du Souverain pontife a, dans un langage très franc,
tranché et ferme, décrié la « boulimie d'argent
et du pouvoir pour le pouvoir qui caractérise notre classe politique,
laquelle a conduit certains à mettre leur pays à feu et à
sang sans omettre de relever le manque d'esprit d'amour et de patriotisme
élémentaires qui poussent d'autres à placer dans des
banques occidentales l'argent volé ou arraché à leur
peuple(...). Vous avez devant vous, a-t-il martelé, le ciel et l'enfer,
libre à vous de choisir l'un ou l'autre et Dieu se contentera de prendre
acte »110(*).
Aussi, le peuple est-il sorti massivement pour traduire
la volonté de changement en acte concret par le vote. A présent,
l'impérieuse nécessité de consolider l'Etat de droit
démocratique s'impose.
B. Consolidation de l'Etat de droit
démocratique
C'est à point nommé, que les Evêques
catholiques ont fait remarquer dans leur message à l'occasion des 48 ans
d'indépendance nationale : « nous sommes encore loin de
réaliser ce beau rêve de bâtir un Congo toujours plus beau
qu'avant »111(*),
mais la voie de sortie demeure l'appropriation de notre idéal d'homme
libre et responsable de son destin.
En tant qu'Etat post-conflit, la RD Congo ne sortira pas en
réalité de la tourmente tant qu'une partie du territoire à
l'Est restera encore en proie au désordre et à l'absence de
l'autorité affirmée du pouvoir central. L'élection demeure
un passage obligé, mais ne constitue pas une fin en soi, et de ce fait,
requiert, pour sa performance, un comportement républicain des
dirigeants politiques et une citoyenneté responsable de tous. C'est
là toute la signification de l' «
appel à la
vigilance pour sauvegarder la souveraineté nationale et bâtir
notre destinée" 112(*)du Message de la Conférence
Episcopale du 10 juillet 2008. Il est donc temps de se réveiller, pour
ne pas aliéner la souveraineté nationale et trahir la nation.
Bien que la RD Congo n'ait pas encore atteint l'envergure
nationale et internationale à laquelle sa dimension et ses ressources
l'invitent à aspirer, l'on ne s'empêchera de rappeler que rien ne
saurait être efficace tant que les actions sur le terrain n'auraient pas
répondu aux attentes du peuple, première cible
concernée par les projets et les modes de développement de la RD
Congo. Dès lors, la consolidation de l'Etat de droit
démocratique, dont les bases ont été jetées avec
l'installation des institutions légales et légitimes au sortir
des urnes est un défi à relever et qui exige que les
règles du jeu démocratique soient clairement définies,
connues et appliquées.
Tenant compte des obstacles inhérents à
l'enclenchement du processus de démocratisation, l'Eglise doit
également saisir l'avènement de la décentralisation pour
améliorer ses rapports avec le pouvoir qui dispose et exerce des
attributs de la puissance publique. Il s'agira notamment d'accroître les
opportunités de rencontre, de dialogue et d'échanges avec les
décideurs gouvernants ou non et d'autres partenaires autour de la marche
et du fonctionnement des institutions républicaines en vue de modeler le
sens de la responsabilité.
Mais, cette osmose ne signifie guère absence de
conflits, au contraire, dans un monde qui se laïcise profondément
et où l'emprise de la mondialisation se fait pesante, les perspectives
pour des nouvelles tensions sont non seulement prévisibles, mais
fatales.
Dans cette perspective, il est nécessaire que les
interlocuteurs s'accordent sans équivoque sur les valeurs centrales qui
doivent régenter un Etat de droit démocratique pour plus
d'efficacité d'actions, d'où, l'idée de la
responsabilité collective dans un projet commun.
Paragraphe 2. La responsabilité collective dans un
projet commun
La responsabilité collective dans la réalisation
du projet commun consiste à rendre chacune et chacun conscients et
capables de transformer l'imagination créatrice en acte palpable. Aussi,
il sied de souligner que la démocratie est une réalité
à trois dimensions ; elle est d'abord une valeur,
c'est-à-dire, une certaine vision du monde, elle est un processus et
enfin, elle est une praxis qui régit la gouvernance d'une
société.
En tant que valeur, c'est-à-dire « image
guide », selon L. CHAMBART DE LOUVE, elle n'est pas encore
entièrement ancrée dans la vie collective. En sa qualité
de force de socialisation de mouvement social, l'Eglise-famille de Dieu est
à même de mieux transmettre les valeurs indissociables à la
démocratie, c'est-à-dire, une vision du monde
dégagée de toute idéologie partisane, transcendant les
aprioris idéologiques, dénonçant sans complaisance, les
dérives de la société et disposant des atouts pour mieux
« conscientiser »113(*) les populations.
En s'intégrant de façon dynamique à
l'action et en refusant d'outrepasser ses prérogatives, l'Eglise a
toutes les chances de faire entendre sa voix pour autant que les laïcs
surtout chrétiens prennent de plus en plus l'initiative des
stratégies. L'Eglise devra non seulement saluer, encourager le
débat citoyen mais suscité et appuyé davantage
l'éclosion des débats sur les politiques publiques. De plus, la
défense de la justice sociale exige de l'Eglise de s'adresser autant aux
pouvoirs publics qu'aux partis politiques qui doivent développer les
réponses appropriées et spécifiques aux
préoccupations du peuple. Dès lors, il est nécessaire
d'informer le peuple sur la gestion du pays, car, comme déclare Elie
WIESEL, Prix Nobel de la Paix 1986, « la neutralité favorise
l'oppresseur, jamais la victime ; le silence encourage le
persécuteur, jamais le persécuté, l'Eglise a un rôle
prophétique et doit répandre la vérité quand
personne d'autre n'ose le faire »114(*).
La teneur de ces propos traduit également le sens de
l'histoire de la révélation : Dieu lui-même ; les
juges, les prophètes, le Christ et les apôtres n'ont rien fait
d'autre qu'influer sur les gouvernants et les gouvernés pour le bonheur
du pays et de ses habitants. Tant les Institutions
dépersonnalisées influent sur le comportement de la classe
politique, tant les réformes au sein de la justice, dans
l'Administration sont une panacée visant à renforcer le pouvoir
de l'autorité politique, symbole et garant d'un Etat de droit.
Parmi les acteurs qui participent à cette entreprise,
il y a les forces vives de la Nation dont fait partie l'Eglise qui ne cesse de
soutenir et accompagner, à travers des actions et initiatives locales,
l'édification de la nouvelle Nation congolaise, car, il ya un temps pour
tout : un temps pour la guerre et un temps pour la paix
(Ecclésiaste 3 : 8).
Maintenant que la page d'une histoire écrite, à
certains moments, en lettres de sang a été tournée, le
peuple congolais aspire recouvrer le calme, la paix et la tranquillité.
Indéniablement, cela suppose que les dirigeants étatiques
prennent la mesure de cet intérêt vital en faisant montre de
conscience et de volonté politique élevées.
Comme l'a dit Théodore Cardinal SARR du Sénégal,
« la paix n'est pas celle imposée par les plus forts à
partir des rapports de force et des conflits armés, mais la paix du
dialogue et de réconciliation mutuelle »115(*) à travers le monde.
Ainsi, il ne peut y avoir de développement harmonieux sans ce facteur
indispensable qui conditionne la réalité matérielle du
projet commun. Pour ce faire, l'Eglise doit continuer l'accompagnement de ce
grand chantier de la consolidation de la paix et de la concorde nationale (A)
à travers la poursuite de l'action pendant la période
postélectorale (B).
A. Consolidation de la paix et de
la concorde nationale
Au sujet de sa situation d'Etat post-conflit, la RD Congo est
mieux placée pour développer des attitudes et des
stratégies de grande portée. En effet, `'la paix ne signifie pas
seulement absence de la guerre, mais un processus dynamique de
coopération entre les Etats et les peuples''116(*), ces propos du Professeur
Anicet MUNGALA résume l'intérêt de cette indispensable
donne pour la RD Congo.
L'Etat de droit ici, c'est aussi la consolidation et la
consécration de l'indépendance de la magistrature à
travers le principe sacro-saint et constitutionnel de la séparation des
pouvoirs Exécutif, Législatif et Judiciaire. Or, la jeune
démocratie congolaise est encore fragile, trois décennies de
dictature et une décennie de guerre ont laissé des traces dans
les mentalités et les comportements. Aussi, la tenue des
élections générales n'a nullement imposé la paix,
mais a été suivie d'une période cruciale face à la
consolidation de la paix, à la stabilité et à
l'intégrité du territoire national qui restent des défis
auxquels s'emploie inexorablement la RD Congo à relever notamment dans
sa partie névralgique à l'Est d'où étaient
lancées les guerres de 1996 et 1998.
Cependant, en dépit des progrès louables
déjà notés avec le brassage de quelques groupes
armés, le processus de mise en place d'une armée
républicaine, intégrée, forte et dissuasive a connu
beaucoup trop de ratés pendant la transition. Par conséquent, la
contribution de l'Eglise doit être proposée pour prêter main
forte dans ce secteur de souveraineté, car, tous les peuples, à
commencer par les dirigeants, conviennent que la paix est au centre de toutes
les autres valeurs ; sans elle, l'homme ne peut rien bâtir de solide
et de durable.
En revanche, selon Nestor DIMBWANA et `'la
Pléiade Congolaise'117(*), il faut admettre qu'en tant
qu' « acte qui met fin aux hostilités et aux fracas des
armes » l'absence des combats ne garantit pas
nécessairement l'absence d'un conflit. Telle est la situation
sécuritaire et humanitaire très préoccupante dans les
provinces du Nord Kivu, Sud Kivu et dans la Province Orientale, qui ne traduit
pas cette paix en tant que valeur universelle au coeur de la
cohésion sociale de tous les peuples.
En somme, face aux faiblesses et lacunes apparues depuis la
transition dans la gestion du secteur de la sécurité, à
l'insécurité au Nord et au Sud-Kivu due grandement à
l'activisme aveugle de nombreuses milices, groupes armés locaux et
étrangers ainsi que de certains éléments
indisciplinés et véreux des Forces Armées de la RD Congo
(FARDC), la consolidation de la paix passe nécessairement par la
réforme de ce secteur et celui de la justice.
B. Intérêt postélectoral dans
l'action de l'Eglise
Le processus électoral, point culminant de la
période de transition constitue une opportunité pour les
différentes chapelles à travers l'adhésion et
l'intérêt suscités à la sensibilisation
préélectorale. A l'évaluation, au lendemain des
élections de 2006, l'un des constats probants restera toute la
mobilisation électorale effectuée par la société
civile active dont l'Eglise fait corps. Qui plus est, la réussite
électorale tient également à la qualité et la
détermination de l'Eglise qui a couvert tout le territoire national dans
l'enseignement de la culture électorale.
Les facilitations de ses infrastructures implantées
dans les recoins où l'Etat est faiblement implanté, constituaient
déjà un avantage. Il faut, cependant, rappeler que l'Eglise n'a
pas dans ses charges le rôle de promouvoir des idéologies, de
concevoir des stratégies d'action politique, des programmes de
gouvernement, de parrainer politiquement des individus ou des groupes
d'intérêt pour l'accès ou le maintien au pouvoir.
Mais, dans son action prophétique, l'Eglise sert
à guider, à éclairer le temporel, et ses
dénonciations des injustices constituent une force dans le domaine
de l'encadrement civique des chrétiens et du citoyen tout court. C'est
ainsi que dans bon nombre de messages aux catholiques et aux hommes de bonne
volonté, l'Episcopat soulignait déjà l'importance pour le
laïc catholique de s'engager dans la vie sociopolitique.
Pour l'Eglise, les fidèles laïcs doivent faire la
politique (l'action multi-dimensiomelle, législative, sociale,
économique, administrative, culturelle organisée au sein des
institutions pour promouvoir le bien-être des citoyens) pour sanctifier
l'ordre temporel et y apporter la lumière de l'évangile et toutes
les valeurs y relatives. C'est le cas notamment de la foi catholique qui
encourage en soi « l'engagement des fidèles dans les rouages
politiques »118(*), car, « en faisant de la bonne politique,
on travaille inévitablement à la faveur des pauvres
gens »119(*).
Par ailleurs, s'agissant des défis de la
démocratie (Paix-Elections), l'Eglise doit poursuivre le travail
d'encadrement civique, politique et électoral, en visant
également à faire prendre conscience au peuple des enjeux des
élections locales, à tirer les leçons des
échéances précédentes et le rendre responsable dans
la tenue de celles-ci, tout en l'incitant à s'impliquer au niveau de
l'organisation de la cité à différents échelons.
De plus, pour dissiper certaines fixations assez
répandues dans l'opinion publique qui pense que les enjeux
électoraux sont souvent l'affaire des politiciens et que tout est
joué d'avance, il serait louable, dès à présent,
dans le cadre de « l'appropriation du processus, d'envisager
l'organisation d'une vaste campagne de mobilisation des
fonds »120(*)
en prévision notamment des élections urbaines, communales et
municipales prévues en 2009; pour contourner la dépendance
financière et excessive des bailleurs de fonds extérieurs avec
tout ce que cela comporte d'aliénant.
En constituant une action oecuménique
concrète, elle pourrait comporter l'avantage, d'une part, de faire
réfléchir éventuellement les détenteurs du pouvoir,
d'autre part, de dissuader les partenaires étrangers au
développement de soulever ou de présenter des exigences
contraignantes dans le cadre de l'aide bilatérale et
multilatérale, car, « dans les circonstances actuelles, aucun
gouvernement ne saurait relever le défi de la reconstruction de l'Etat,
s'il ne jouit d'une confiance aussi large que possible de notre
population »121(*).
Quant à l'Eglise catholique qui a, tout au long du
processus électoral, fait l'objet de beaucoup de convoitises surtout du
fait de son leadership moral et intellectuel , de la majorité
numérique de ses fidèles parmi les électeurs et de la
prédominance de ses structures sur l'ensemble du territoire national,
elle doit poursuivre les actions dont le renforcement des capacités dans
le cadre de la formation postélectorale du peuple, tant au sein des
Réseaux d'actions oecuménique comme les Observateurs
Chrétiens (ROC), de la CARTEC .
Dans le même ordre d'idées, il s'avère
indispensable qu'elle fasse accompagner les actions de sensibilisation
amorcées, à l'instar du feuillet LISANGA(UNION), de
l'éducation civique et de la culture politique de la commission
diocésaine des Communautés Ecclésiastiques Vivantes de
Base (CEVB), et d'autres instruments tant d'information que de formation, pour
permettre l'ancrage des citoyens. Ainsi, pour le bon encadrement des
élections, par sa commission Justice et Paix à travers la CARTEC,
l'Eglise doit amener les populations à participer de façon plus
responsable à la gestion des nouveaux espaces de pouvoirs gagnés
à la faveur desdites élections. Lala BEN BARKA n'a-t-il pas
déclaré que « la bonne gouvernance est une affaire trop
importante pour que l'on la laisse dans les seules mains des
politiques »?122(*)
D'ailleurs, selon la Révérende Soeur
Marie-Bernard ALIMA MBALULA, secrétaire de la Commission Episcopale
Justice et Paix, les raisons qui ont milité en faveur de la mise sur
pied de ce programme dit "Réconciliation et gouvernance
participative" sont dues au fait qu'en RD Congo, Etat post conflit," les
fils et filles ont besoin d'être réconciliés après
des années d'atroces guerres et d'être sensibilisés,
encadrés pour suivre sur le terrain les animateurs élus des
nouvelles institutions issues des élections afin que ceux-ci
intègrent dans leurs actions, les préoccupations de la
population"123(*).
A notre humble avis, il importe d'accroître les
enseignements liés à la participation citoyenne dans le cadre de
la gouvernance locale. Comme l'a souligné M. Henri MUHIYA, chargé
de programme au sein de la CARTEC, ce projet travaillera pour la
réconciliation et la gouvernance participative visant un Etat de droit
démocratique, la reprise de l'économie du pays et
l'amélioration des conditions de vie de la population, sans oublier la
mise sur pied des comités locaux, instrument de travail dans le nouveau
programme en vue d'organiser le peuple pour une bonne participation à la
gouvernance locale. Ces comités locaux doivent fonctionner comme des
lieux de réflexion, d'initiatives, d'action et de dialogue entre les
réseaux d'associations et dirigeants locaux.
Dans ce cadre de « la gouvernance de
proximité pour s'auto prendre en charge à la
base »124(*),
des enquêtes ont démontré, que les
communautés se sont organisées en ateliers-palabres au niveau
provincial pour parler de la question des ressources en tant que
problème de société, des séminaires et
conférences par le biais de la Commission Justice et Paix dans le cadre
d'une vaste campagne lancée contre l'exploitation illégale des
ressources naturelles en RD Congo ont été organisés.
S'appuyant sur la plupart des confessions religieuses qui
comportent en leur sein des commissions Justice et Paix, il s'agira non
seulement de renforcer leurs capacités à promouvoir une
gouvernance participative, mais également accroître celles de la
société civile dans le but d'obtenir des pouvoirs publics la
bonne gouvernance, la transparence et la responsabilité. Cette
démarche de l'Eglise consisterait justement à accorder la parole
à la population pour qu'elle partage sa vision sur l'exploitation de ces
ressources sur la base des connaissances du contexte local.
L'intérêt d'une telle démarche serait de
verser ces propositions dans l'argumentaire du plaidoyer (mécanisme pour
relever le défi eu égard à leurs expériences
pastorales) de l'Eglise et des autres partenaires de la Société
civile auprès des décideurs. Comme aux premiers moments de
l'ouverture du processus de démocratisation , la société
civile, en collaboration avec la presse, doit continuer à organiser
régulièrement des rencontres de réflexion,
d'échange et d'orientation stratégique dans le but de permettre
au peuple, à l'élite intellectuelle congolaise et à la
Communauté internationale d'explorer de nouvelles pistes
d'amélioration de la gouvernance, encore que, la RD Congo connaît
« un engouement sans précédent avec les récents
contrats signés dans le cadre de la coopération
sino-congolaise »125(*).
Le but poursuivi est double : il est question d'apporter
l'information au peuple et lui permettre de s'en approprier face au constat peu
satisfaisant sur la gestion des ressources naturelles soit par les politiciens,
soit par les exploitants sans que la population propriétaire
attitré y ait trouvé un bénéfice. C'est ainsi que
nous saluons également « l'engagement de l'Eglise catholique
dans la lutte contre le VIH/SIDA »126(*) à travers sa vaste campagne de
mobilisation des fonds lancée pour la prise en charge des personnes
porteuses de cette maladie. Cela renforce la crédibilité et
encouragera les pouvoirs publics d'accélérer la
décentralisation qui, du reste, est un combat, mieux, une conquête
pour plus d'autonomie à la base.
Par ailleurs, il sied de noter que le destin d'un pays ne se
décide pas seulement en terme politique, car, l'économie joue
également un rôle déterminant pour l'avenir et le devenir
d'une Nation. Dans ce monde menacé par les conflits,
déchiré par la crise pluridimensionnelle, d'une part, et à
l'heure où les énergies se mobilisent de partout, avec ardeur et
enthousiasme notamment dans le cadre de cinq chantiers de la République,
d'autre part, pour sortir le pays de sa léthargie, il est
impérieux que les élites congolaises prêchent par
l'exemple, comme l'a dit un jour dans un discours l'ancien président
français, Jacques CHIRAC, « l'exemple, c'est la meilleure
éducation ».
En RD Congo, l'évocation de ce vaste programme de
reconstruction nationale et de modernisation des infrastructures ravive dans le
peuple la sensibilité de l'espoir, en vue d'un lendemain radieux. Au
même moment, cette attente pourtant légitime, devrait trouver un
répondant qui lui soit logiquement lié, dans le comportement
collectif des « gens du haut », car, on a souvent entendu
dire dans le contexte national que les violons ne s'accordent pas entre les
élites et la base. A ce propos, l'Eglise reste bien placée pour
accompagner les efforts des pouvoirs publics et mouvements associatifs tendant
à la moralisation de la vie publique, y compris les moeurs politiques.
Aussi, la lutte contre la corruption qui gangrène
encore la société doit être soutenue plus fortement, au
delà des stigmatisations qui pleuvent dans les discours
ecclésiastiques.
Dans cet ordre d'idée, nous soutenons largement la
nécessité d'accompagner les actions ministérielles
menées conjointement, pour l'efficacité dans l'application de la
loi, tant l'impunité est ciblée comme maux à combattre par
tous les moyens légaux possibles. Ce soutien de l'Eglise peut consister
à structurer en vue d'une organisation fiable et viable, les forums
d'échanges et des discussions appelés communément
« Parlements débout ».
Dans cette perspective, le Président du Faso Blaise
COMPAORE n'a-t-il pas souligné qu'aujourd'hui, l'Etat africain a «
plus que jamais besoin des acteurs non étatiques pour impulser le
développement » ?127(*) N'est-ce pas là une reconnaissance implicite
du rôle non négligeable que joue aussi la société
civile dans l'encadrement des citoyens? Voilà pourquoi, l'Eglise, acteur
non négligeable au plan sociopolitique, doit continuer à
s'investir pour pousser, exiger et obtenir des dépositaires de
l'autorité de l'Etat une réelle volonté politique
d'instaurer des conditions favorables de transparence, d'équité,
de probité morale, de lutte contre la corruption et l'impunité.
En outre, il est intéressant de souligner que c'est le
peuple qui donne mandat aux élus, lesquels le représentent dans
« le choix d'autres mandataires »128(*). Fort de cette
légitimité, le président de la République Joseph
KABILA KABANGE, aujourd'hui encore plus clairement qu'hier, sait où il
va, mais de grâce, qu'il n'y aille pas seul. Qui plus est, nous plaidons
pour que l'Eglise accentue davantage sa collaboration effective avec l'Etat et
affective également avec le peuple à travers un dialogue
constructif à la paix, à la liberté, au changement et au
bien-être.
Toutefois, comme il est connu de tous que le poisson commence
à pourrir par la tête, c'est-à-dire, que les fléaux
congolais tant décriés ont entre autres origines, les dirigeants
à la haute hiérarchie de l'Etat, les valeurs de probité,
de transparence, d'équité et de sens de bien commun ne peuvent
être attendues des personnes désemparées depuis des
décennies par la crise multiforme. A l'amorce du processus
électoral, plus d'un Congolais attendaient l'annonce de la
candidature d'un des princes de l'Eglise aux élections
présidentielles pour espérer sortir de la misère.
Sans être pour autant iconoclaste, nous pensons que
compte-tenu de la situation exceptionnelle de la RD Congo, aux ressources
immenses avec une population extrêmement pauvre, « la haute
hiérarchie de l'Eglise au Vatican ne pourrait-elle pas accéder
à la demande du peuple Congolais à travers un Concile Vatican III
? »129(*)
Etant donné que ceci ne sera pas une nouveauté
en Afrique subsaharienne, il n'est pas risqué d'espérer que notre
approche fasse école en ce moment où le continent Africain venait
d'accueillir le Souverain pontife Benoit XVI, en mission pastorale avant la
tenue en Octobre prochain au Vatican de la Deuxième Assemblée
spéciale pour l'Afrique du Synode des évêques sur le
thème `'L'Eglise en Afrique au service de la réconciliation, de
la justice et de la paix. Vous êtes le sel de la terre (...) Vous
êtes la lumière du monde''.
Au demeurant, nous saluons l'appel du Pape Benoit XVI, «
Laissez-vous réconcilier ! »130(*), à l'Afrique qui témoignait du grand
engagement politique et un enjeu pour l'Eglise-famille de Dieu dans son
processus d'inculturation.
CONCLUSION GENERALE
Au terme de notre travail, force nous est d'observer que la
problématique posée au début valait son pesant d'or.
Avons-nous répondu de manière satisfaisante? Nous ne pouvons le
dire. Le domaine d'intervention de l'Eglise pendant la Transition est si
complexe que nous l'avons simplement effleuré, encore que, les limites
de la réflexion restent toujours largement ouvertes.
En définitive, nous voudrions néanmoins relever
quelques faits saillants qui ont retenu notre attention. En effet, de tout le
temps, l'Eglise demeure une pierre angulaire dans l'histoire de la RD Congo. Le
rôle de l'Eglise dans le processus de démocratisation en RD Congo
(1990-2006), Nécessité et perspectives, tel est le
réverbère qui a guidé nos pas tout au long de notre
réflexion.
A priori, cet énoncé semble ne pas mettre en
exergue la dynamique de l'action de l'Eglise dans l'émergence des
valeurs démocratiques et citoyennes au sein des Nations africaines.
Toutefois, comme consigné dans notre recherche, l'Eglise joue, a
joué et est appelée à jour des rôles variés,
à plusieurs échelons pendant la Transition africaine et celle de
la RD Congo, dans l'optique d'apporter plus d'éclairage chrétien
aux consciences des peuples et dans sa détermination de contribuer
à la réussite du processus, une nouveauté dans la
mémoire collective des congolais, en utilisant des moyens à sa
disposition.
Elle était et est engagée dans les domaines de
lutte politique, en appuyant les initiatives de dialogue, de concertation , de
négociation et même de coordination historique et légitime
de certaines Institutions de prise de décisions nationales de la
Transition(CNS, SENAT, CEI, CVR), car, « les Institutions ont
nécessairement des repères, des principes d'inspiration, des
orientations à prendre et des valeurs de base sur lesquelles se fondent
leurs politiques de gestion et de fonctionnement »131(*).
Elle s'active dans la défense des droits de la
personne, dans les secteurs socioéconomiques et de réduction de
la pauvreté. Devant l'insuffisance de diffusion /vulgarisation des
lois et réglementation accompagnant le processus en
général, étant donné le taux élevé de
la population analphabète, pour intensifier ses messages de
dénonciation de la mal gouvernance de l'Etat, et des appels à la
démocratisation, afin de mieux cadrer son discours avec les
préoccupations de la population, elle a associé toutes les
confessions religieuses qui, dans un esprit d'oecuménisme, ont
participé résolument à la formation des masses pour les
préparer intensément à comprendre les enjeux du processus
de démocratisation et de la Transition. Autour d'un projet commun
d'Education Civique « Cartec » (initialement programme de
l'Eglise catholique), un vaste programme de conscientisation adapté aux
différentes catégories sociales du pays, l'Eglise a axé
son action essentiellement sur le dénominateur de
référence obligée aux valeurs universelles qui fondent la
démarche.
Les thèmes de respect des droits fondamentaux humains,
bonne gouvernance, transparence devenus une nécessité dans la
gestion des affaires publiques, principes et normes des élections
démocratiques, citoyenneté responsable, culture
démocratique, paix, sécurité, justice sociale et
distributive, réconciliation nationale cadrent mieux le discours avec
les préoccupations de la population. Dans ce sens, il a
été nécessaire que les parties prenantes puissent
s'accorder sans équivoque sur les valeurs centrales qui doivent
régenter un Etat de droit.
Nous avons essayé de retracer le contexte ayant
favorisé l'amorce du processus de démocratisation qui, du reste,
a fait l'objet de tensions énormes au niveau interne, après le
vent de changement soufflé au lendemain de la chute du Mur de Berlin, le
09 novembre 1989, et de la disparition du clivage Est-Ouest. En outre, nous
avons également dans une perspective historico-actionnaliste
soulevé un certain nombre d'interrogations qui ont alimenté notre
hypothèse de départ.
Premièrement, il s'est agi, en effet, de circonscrire
le contexte pour mieux saisir les divers contours de l'action de l'Eglise
consistant à déceler la légitimité qui fonde son
action en se plaçant dans le processus de l'historicité des
nations africaines, ce qui explique notre insistance sur la prise en compte des
préoccupations des peuples, de se réaliser dans un environnement
économique, social et politique découlant de la nature même
de la mission évangélisatrice de l'Eglise ; celle-ci part de
la réalité fondamentale que c'est tout l'Homme et tout homme au
sens plénier, dans toutes ses composantes qui doit être pris en
considération dans la quête de changement .
Cette mission est largement étagée à
travers les textes évangéliques qui définissent la
vocation de l'homme, ses relations avec Dieu et ses semblables.
Prosélytiste, elle s'adresse non seulement aux croyants, mais aussi
à tous « les hommes de bonne volonté », car,
le renouveau chrétien qui perçoit l'Eglise corps du Christ
démontre de plus en plus des signes de tolérance, de
dépassement des barrières liées aux doctrines, au genre,
à la classe sociale, à la
religion... « (1Cor : 12,13 ; Ga : 3,28 ;
Eph : 2, 15-16 ; 3-6) »
Deuxièmement, l'Eglise n'est pas seule
acteur historique. Il était donc question de connaître la
dynamique des relations entre ces divers protagonistes et la dialectique de
leur engagement, du fait que les Etats africains et leurs peuples ont, non
seulement reconnu et compris le poids de l'Eglise, mais peuvent s'appuyer sur
elle pour mieux canaliser les aspirations au changement.
De ces diverses considérations, nous comprendrons
davantage pourquoi bien des conférences nationales ont été
dirigées par des hommes de Dieu, des princes de l'Eglise catholique.
Puisqu'on en parle, dans cette gestion participative à travers les
rencontres, concertations, marches, séminaires/ateliers de formation et
autres activités y liées, partant du principe biblique
à chacun selon sa capacité et fort d'honnêteté
intellectuelle de rigueur scientifique, nous avons eu à faire une
mention spéciale quant au leadership de l'Eglise catholique locale et
universelle. La supériorité numérique de ses
fidèles, de son clergé bien formé et de ses oeuvres
sociales, l'abondance de ses publications/autres productions en la
matière, sa grande capacité mobilisatrice avec ou sans l'apport
des autres confessions religieuses, sa tradition en termes de doctrine sociale
de l'Eglise, sa structuration et son organisation interne assise sur du
solide... justifient à suffisance notre approche.
Bien que respectueuse de ses dogmes, l'Eglise africaine en
général et congolaise en particulier du 21è siècle
commençant se trouve confrontée, au même titre que toute la
société, à l'impérialisme de la mondialisation qui
tend à « relativiser » certaines valeurs
considérées par l'Eglise comme absolues. En conséquence,
il apparait une série de difficultés d'ordre organisationnel
parfois structurel au sein de quelques confessions religieuses gênant
ainsi la planification, et/ou la coordination des actions d'envergure
nationale, provinciale et locale (cas de la marche du 2 mars 1992 lorsque les
Kimbanguistes et certaines assemblées évangéliques de
réveil se sont désolidarisés) devant stimuler davantage la
participation citoyenne pendant cette période cruciale.
D'autres fractures subsistent dans la mesure où
d'autres confessions religieuses viennent comme des paravents, inhibiteurs de
l'éclosion de vrais groupes oecuméniques de base dans les
communautés les plus désemparées. La formule
« Eglise au milieu du village » ne semble pas toujours
marcher du fait des colorations politiques parfois très affichées
des leaders religieux, ce qui engendre des querelles intestines de
positionnement, de débauchage, et de diabolisation. Des dissensions
subviennent également autour d'argent vu que beaucoup de confessions
religieuses ne disposent pas des moyens financiers propres et appropriés
pour répondre aux sollicitations grandissantes. Malgré l'approche
de l'inculturation qui a décrété la prise en charge de
l'Eglise par ses propres fidèles, le résultat final donne que la
majeure partie d'entre elles (y compris les Eglises dites traditionnelles)
sont tributaires des bailleurs de fonds internationaux. Ces derniers font
souvent le diktat, influencent et même décident de l'orientation
à donner auxdits fonds. Cette dépendance infantilise, affaiblit,
réduit toute marge de manoeuvre et crée des dispersions. Voila le
contexte difficile dans lequel a évolué l'Eglise congolaise
pendant la longue transition jonchée de zones de turbulences.
L'orbite de transition sur laquelle est placée
l'implication de l'Eglise exige des ses membres une franche collaboration, un
leadership responsable, constructif et remarquable, afin de conduire à
bon port l'objectif de l'instauration de la culture démocratique
susceptible d'assurer l'avenir politique, économique et social de la RD
Congo. Par ailleurs, elle doit se fixer des priorités pour mener des
actions concrètes sans cesser de s'adresser aux dirigeants et aux hommes
de bonne volonté engagés dans la voie de la refondation de
l'Etat.
Avec les vicissitudes de la Transition, le Congolais a eu
l'opportunité de se faire une opinion sur la gestion de l'Etat,
d'évaluer ses leaders par rapport à des actions à impact
visible en sa faveur, de s'opposer à adhérer aux discours
démagogiques de quel que bord que ce soit, car, il faut bien le
reconnaître, une prééminence trop visible de la
hiérarchie de l'Eglise dans la définition des actions peut
paraître suspecte à certains et créer un
désintérêt dans le chef des leaders laïcs.
Point de doute que la RD Congo a une belle occasion de
redonner plus d'espoir à l'Afrique et surtout à son peuple. Un
peuple cheminant vers sa maturation, conscient de son destin et avec lequel il
faudra désormais composer pour décider sur toutes les questions
d'intérêt national; et à l'Afrique après quatre
décennies de mauvaise gouvernance.
A maintes occasions qui lui sont offertes, l'Eglise ne cesse
de prêcher le pardon, la reconnaissance des fautes, tords et la
réconciliation. Fort de son leadership pesant, l'Eglise catholique
répète son engagement à la réconciliation au sein
de la classe politique.
Autant le Saint-Siège se veut engager en faveur d'une
réconciliation authentique et durable entre les Chrétiens et les
Juifs, autant l'Eglise catholique congolaise s'affirme de façon
irrévocable sur le chemin choisi par le Concile Vatican II.
En somme, quel que soit le régime qui sera mis en
place, le rôle de l'Eglise, doit demeurer un contre-pouvoir, ni
alliée de l'opposition ni celle du pouvoir, car, leur raison d'exister
est de veiller à ce que la société congolaise dans son
ensemble fonctionne correctement. François MITTERRAND, que je cite de
mémoire, disait : « on sauve la démocratie par le respect
des lois. On la perd par la raison d'Etat », c'est tout dire, et ce sera
faire justice à la Nation congolaise.
BIBIOGRAPHIE
1. OUVRAGES
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24. CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Tous appelés
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Evêques du Zaïre, Editions du Secrétariat
Général de la CEZ, Kinshasa, 16 juin 1990, 24 pages.
25. CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE,
Complémentarité des vocations et des missions au sein de l'Eglise
pour le service de la Nation, Kinshasa, Editions du Secrétariat
Général de la CEZ, 14 septembre 1992, n°16, 4 pages.
26. CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Pour une Nation
mieux préparée à ses responsabilités, Message des
Evêques du Zaïre aux fidèles catholiques et aux hommes de
bonne volonté, Editions du Secrétariat Général de
la CEZ, Kinshasa, 21 août 1994, 30 pages.
27. CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Le processus de
démocratisation au Zaïre, obstacles majeurs et voies de solution,
Editions du Secrétariat Général de la CEZ, Kinshasa,
juillet 1996, 189 pages.
28. CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Bien Heureux les
Artisans de la Paix (Mt 5,9), Les événements actuels et l'avenir
du Zaïre, Message des Evêques du Zaïre aux catholiques et aux
hommes de bonne volonté, Editions Secrétariat
Général de la CEZ, Kinshasa, 31 janvier 1997, 15 pages.
29. CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Sauvons la Nation,
Déclarations et Messages de la Conférence Episcopale du
Zaïre à la Conférence Nationale Souveraine et en d'autres
occasions pour soutenir le processus de démocratisation ainsi que la
justice, la paix et l'unité nationale, Editions du Secrétariat
Général de la CEZ, Kinshasa, 1997, 47 pages.
30. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Conduis
nos pas, Seigneur, sur le chemin de la paix (cf. Luc 1,79), Message des
Evêques catholiques de la République Démocratique du Congo
aux fidèles et aux hommes de bonne volonté, Editions du
Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 07 novembre
1998, 6 pages.
31. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Sois sans
crainte, vous êtes tous des frères, Arrêter les
guerres, Message des Evêques CENCO, suivi du Message des
Evêques ACEAC, Editions du Secrétariat Général de la
CENCO, Kinshasa, 15 novembre 1999, 30 pages, www.cenco.cd
32. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
Courage ! Le Seigneur ton Dieu est au milieu de toi (So 3,17), Message des
Evêques de la CENCO aux catholiques et à tous les hommes de bonne
volonté, Editions du Secrétariat Général de la
CENCO, Kinshasa, 15 juillet 2000, 20 pages, www.cenco.cd
33. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Tous, pour
les intérêts supérieurs de la Nation, Message des
Evêques aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne
volonté, Editions du Secrétariat Général de la
CENCO, Kinshasa, 02 mars 2001, 16 pages, www.cenco.cd
34. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Quel
avenir pour le pays, Déclaration de la Conférence Episcopale dans
la situation d'impasse politique actuelle en République
Démocratique du Congo, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, Kinshasa, 06 juillet 2002, 61 pages,
www.cenco.cd
35. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : J'ai vu la
Misère de mon peuple (Ex. 3,7), TROP C'EST TROP, Message des
Evêques de la RD Congo aux fidèles catholiques et aux hommes de
bonne volonté, Editions du Secrétariat Général de
la CENCO, Kinshasa, 15février 2003, 14 pages, www.cenco.cd
36. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Pour
l'amour du Congo, je ne me tairai point (cf. IS 62,1), Message du comité
permanent des Evêques de la RD Congo aux fidèles catholiques et
aux hommes de bonne volonté, suivi du Mémorandum au
Secrétaire Général des Nations Unies, Editions du
Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 14
février 2004, 96 pages, www.cenco.cd
37. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
Frères, que devons-nous faire ? (Actes. 2,7), L'heure des
responsabilités a sonné, Message des Evêques du Congo aux
fidèles catholiques et aux hommes de bonne volonté, Suivi de la
Déclaration de la CENCO sur les relations de l'Eglise Catholique avec le
Kimbanguisme, Editions du Secrétariat Général de la CENCO,
Kinshasa, 03 juillet 2004, 95 pages, www.cenco.cd
38. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Voici le
temps favorable, voici maintenant le jour du Salut (2 Cor 6,2), Le Congo nous
appartient, Déclaration du Comité permanent des Evêques de
la RDC sur la situation politique actuelle, aux fidèles catholiques et
aux hommes de bonne volonté, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, Kinshasa, 2005, 47 pages, www.cenco.cd
39. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
Secrétariat Général CENCO, Coordination des Actions pour
la réussite de la Transition (CARTEC), Présentation du
matériel didactique produit par la CARTEC pour la formation de
l'électeur congolais, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, Kinshasa, avril 2005, 32 pages,
www.cenco.cd
40. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO,
Archidiocèse de Kinshasa, message « ELECTIONS 2006 :
SOMMES-NOUS PRETS ? », Kinshasa, le 21 juillet 2006, www.archikinshasa.org
41. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
Levons-nous et bâtissons ! (Néhémie 2,18). Pour un
Congo nouveau. Déclaration du Comité permanent des Evêques
de la RDC adressée aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne
volonté, Editions du Secrétariat Général de la
CENCO, Kinshasa, mars 2006, 10 pages, www.cenco.cd
42. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Message du
Comité permanent des Evêques de la RD Congo, Changeons nos coeurs
(cf. Jean 2 :13) : Appel à un engagement réel pour la
reconstruction, du 09 février 2008, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, Kinshasa, 4 pages,
www.cenco.cd
43. CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
"Il est temps de
nous réveiller" (Rm 13,11b),
Message de
la CENCO aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne volonté
à l'occasion du 48ème anniversaire de
l'indépendance, Editions du Secrétariat Général de
la CENCO, Editions du Secrétariat Général de la CENCO
Kinshasa, 10 juillet 2008, 9pages,
www.cenco.cd
44. DECLARATION DE LA CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO
sur la reprise des hostilités dans l'Est et le Nord-est de la RD Congo,
Encore le sang des innocents en RD Congo ! (cf. Jr 19, 4), 13 octobre
2008, Editions du Secrétariat Général de la CENCO,
Kinshasa, 2 pages,
www.cenco.cd
45. DECLARATION DE LA CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU
CONGO sur la situation à l'Est du pays, « Arrêtez
cette guerre », Editions du Secrétariat Général
de la CENCO, Kinshasa, 22 décembre 2007, 2 pages,
www.cenco.cd
46. DECLARATION de la CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU
CONGO sur les élections nationales, point de presse de la
présidence de la CENCO, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, Kinshasa, 27 juillet 2006, 2 pages,
www.cenco.cd
47. DECLARATION de la CEZ à la CNS, Editions du
Secrétariat général de la CEZ, Kinshasa, 30 mai 1992, 17
pages.
48. Mémorandum de la CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU
CONGO aux participants à la Conférence sur la paix, la
sécurité et le développement au NORD et au SUD-KIVU,
« Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix.» (Jn 14, 2),
Editions du Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 05
janvier 2008, 6 pages,
www.cenco.cd
49. MESSAGE des Evêques de la CONFERENCE EPISCOPALE
NATIONALE DU CONGO aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne
volonté, « La vérité vous rendra
libres » (Jn 8, 32), Le verdict des urnes dans la transparence,
Editions du Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 05
octobre 2006, 7 pages,
www.cenco.cd
50. MESSAGE des Evêques de la CONFERENCE EPISCOPALE
NATIONALE DU CONGO aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne
volonté à l'occasion du 47e anniversaire de
l'indépendance, Kinshasa, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, 07 juillet 2007, 9 pages,
www.cenco.cd
51. Message des Eglises catholiques, orthodoxes, protestantes
et kimbanguistes, 08 Août 1991, in le discours sociopolitique de l'Eglise
Catholique du Congo (1956 -1998) ; T1 : Textes de la Conférence
Episcopale, Editions des Facultés Catholiques de Kinshasa, Kinshasa,
1998, 495 pages
52. Partenariat Confessions Religieuses de la RD Congo :
Protocole d'accord pour l'Education Civique et Electorale, Editions du
Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 29 Juillet
2004, 3 pages.
7. WEBOGRAPHIE
1.
www.afrique-asie.com
2.
www.cenco.cd (Conférence
épiscopale nationale du Congo)
3. www.cean.u-bordeaux.fr
4. www.dia-afrique.org
5.
www.diastode.org (diaspora
togolaise de l'étranger)
6.
www.digitalcongo.net
7.
www.figaro.fr
8.
www.groupelavenir.com
9.
www.lemonde.fr
10.
www.lepays.bf
11.
www.lepotentiel.com
12.
www.lesoftonline.net
13.
www.jeuneafrique.com
14. www.lalibre.be
15. www.lesoir.be
16. www.wcc-coe.org/wcc/africa (Conseil oecuménique
des Eglises)
17.
www.zenith.org
Tables des matières
AVERTISSEMENT
i
DEDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
PRINCIPAUX SIGLES ET ABBREVIATIONS
v
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIÈRE PARTIE : LA PROBLEMATIQUE
DE L'INTERVENTION DE L'EGLISE DANS LE TEMPOREL EN RD CONGO DE 1990 À
1997
9
CHAPITRE 1: LA PARTICIPATION DE L'EGLISE
À L'ACCOMPAGNEMENT DU PROCESSUS DE DÉMOCRATISATION
12
Section 1. Les actions et enseignements
pastoraux
12
Paragraphe 1. Un rôle
d'avant-garde
12
A. La Transition démocratique, un contexte
favorable
13
B. Le Mémorandum historique du clergé
catholique
15
Paragraphe 2. Les vicissitudes au processus
de changement
18
A. Obstacles et Obstructions du pouvoir
18
B. Discours de vérité et de
conscientisation
21
Section 2. Une présence rayonnante
et émergente de l'Eglise
22
Paragraphe 1. L'Eglise, partenaire social
privilégié de l'Etat
23
A. Leadership permanent de l'épiscopat
catholique
24
B. l'Emergence des Eglises de Réveil
26
Paragraphe 2. L'impact de
l'oecuménisme dans le processus de démocratisation
27
A. La Chaîne de Solidarité
Agissante
27
B. Les actions en collaboration
28
CHAPITRE II : LA PARTICIPATION DE
L'EGLISE AU SEIN DES INSTITUTIONS DE TRANSITION
31
Section1. L'exercice par l'Eglise du
pouvoir temporel
31
Paragraphe 1. La direction de la
conférence nationale, un engagement politique salutaire
32
A. L'unité dans la diversité
33
B. La prise en charge directe du temporel
33
Paragraphe 2 : Les obstacles à
l'ascension du clergé catholique à la direction de la
conférence nationale
36
A. Les réticences du Vatican
36
B. L'opposition ouverte du pouvoir en place
39
Section 2. La reprise en main de la
situation par le pouvoir du Maréchal MOBUTU
40
Paragraphe 1: La paralysie des Institutions
issues de la Conférence Nationale Souveraine
41
A. Le flou dans la convocation de la
Conférence Nationale Souveraine
41
B. La grande marche pacifique du 16 février
1992
44
Paragraphe 2. Le poids
« MOBUTU » dans le processus de démocratisation
47
A. Maintien de l'intégrité du
territoire national
48
B. Fragilisation chaotique du processus de
démocratisation (1994-1997)
49
DEUXIEME PARTIE : DU REVEIL POLITIQUE DE
L'EGLISE, 1997 A 2006
53
CHAPITRE 1 : ENGAGEMENT POLITIQUE DE
L'EGLISE
55
Section 1 : Dynamisme lors des rencontres
politiques
57
Paragraphe 1. Des Pourparlers au Dialogue
Inter Congolais
57
A. Les exigences du dialogue inter congolais
58
B. Appel de l'Episcopat catholique
59
Paragraphe 2. Le poids de l'Eglise dans le
dialogue inter congolais
60
A. L'exhortation à l'unité
61
B. Le dénouement historique
61
Section 2 : L'Eglise et les Institutions
politiques de transition
62
Paragraphe 1. Double qualité de
prélat et d'homme d'Etat
63
A. Mission évangélique
63
B. Missionnaire politique
64
Paragraphe 2. Bilan de la gestion de
l'Eglise dans les Institutions de la Transition
65
A. Une épreuve assumée
66
B. La Perception de l'opinion publique
68
CHAPITRE 2 : L'EGLISE ET LES NOUVEAUX
DEFIS
71
Section 1 : Nécessités
pré-électorales
71
Paragraphe 1. Des actions
nécessaires face au processus électoral
71
A. Des actions mobilisatrices
72
B. Déroulement du processus
électoral
75
Paragraphe 2. Craintes et espoirs
76
A. Le triomphe d'un choix
76
B. Une rencontre piégée
77
Section 2: Perspectives d'avenir
83
Paragraphe 1. Rétablir les
ressorts
84
A. Un sursaut patriotique et responsable
85
B. Consolidation de l'Etat de droit
démocratique
87
Paragraphe 2. La responsabilité
collective dans un projet commun
88
A. Consolidation de la paix et de la concorde
nationale
90
B. Intérêt postélectoral dans
l'action de l'Eglise
91
CONCLUSION GENERALE
98
BIBIOGRAPHIE
103
ANNEXES
* 1Dictionnaire
Petit Larousse Illustré, Paris, les Editions Françaises Inc.,
2004, p.365
* 2 Au cours de
l'histoire, les rapports entre l'Église et l'État ont toujours
été complexes. Ce débat qui s'inscrit dans la dynamique
historique tendant à définir les rapports entre l'Etat et
l'Eglise, accompagne toute l'évolution historique de la
société depuis la reconnaissance officielle de l'Eglise par
L'Empire romain jusqu'à ce jour. Tout au long de sa longue et
tumultueuse évolution émaillée de crises de
légitimité, l'Eglise a façonné les structures
sociales, culturelles, politiques et économiques du vieux continent.
Elle lui a même imposé le rythme de son temps jusqu'au moment
où, au XVIIe siècle, elle a dû lâcher la prise au
profit des philosophies laïques, qui au nom de la raison, lui contestait
sa mission sur la société, encore faut-il admettre, que les
nouvelles valeurs laïques ne sont que des valeurs chrétiennes
progressivement laïcisées
* 3 S'agissant
de la France, le principe de la laïcité est une construction
juridique à valeur constitutionnelle et non idéologique
c'est-à-dire répond plus du droit public que de l'intimité
des consciences, en vertu de la loi du 09 décembre 1905 sur la
laïcité. Lire Charles ARAMBOUROU, Et la laïcité en
Europe?, 1905-2005 Après un siècle de séparation de
l'Eglise et l'Etat, 25déc2005, p.1 in
www.démocratie-socialisme/article
* 4 Les
relations entre l'Eglise (le spirituel) et la société civile,
notamment l'Etat (temporel) repose sur deux paradigmes aux
interprétations contradictoires à savoir: rendre, laisser
à César ce qui est à César, à Dieu ce qui
est à Dieu
* 5En tant
qu'institution, son intervention s'explique et se justifie par le fait que la
nouvelle évangélisation des peuples s'inscrit également
dans l'optique de la reconnaissance et du respect des droits fondamentaux de
l'homme.Cf. Charte des Nations Unies, §2 du Préambule,
Nations-Unies, New-York, 1945, p.3
* 6 Il existe
plusieurs méthodes mais on peut les regrouper autour de deux : les
méthodes synchroniques et les méthodes diachroniques. Les
méthodes synchroniques voient les choses avec un oeil statique ;
tandis que les méthodes diachroniques considèrent les faits dans
leur dynamisme. Le changement y est la donne la plus importante ; les
faits sont vus avec un oeil dynamique.
* 7 GESLIN
(J-D), Quand l'Eglise prêche le consensus, in Jeune Afrique n°2365
du 07-13 mai 2006, Paris, p.14
* 8 Propos tenus
dans le cadre de la prévention des conflits en Afrique : le
rôle de la société civile, exposé aux consultations
du MEACI sur la consolidation de la paix et la sécurité humaine,
25 avril 2002, Développement et paix, Agence canadienne
développement international, www.diastode.org
* 9 AIVO (F.J),
Le président de la République en Afrique noire francophone,
Paris, l'harmattan, 2007, p.354
* 10
D'ailleurs, en remontant à l'antiquité, il est attesté que
cet engagement pour le triomphe de la liberté se fonde sur des
théories religieuses antérieures ainsi que sur de nombreux
travaux scientifiques. Sans équivoque sur la vocation
démocratique de l'Eglise catholique, Léo MARTIN soutient que la
démocratisation de l'Europe, inscrite dans la première vague de
Samuel HUNTINGTON, a été au moins indirectement influencée
par le legs démocratique de l'Eglise
* 11 Le Concile
Vatican II fut un tournant majeur dans l'engagement de l'Eglise contre les
dictatures de tout poil. Officiellement, la haute hiérarchie de l'Eglise
catholique s'était engagée à soutenir la
détermination de l'ensemble des clergés africains dans les pays
sous le joug des dictatures ostentatoires. En légitimant cette lutte des
Eglises locales, ce fut une nouvelle orientation de la doctrine
catholique.
* 12Propos
tenus lors de l'échange des voeux de Nouvel an avec les corps
diplomatique, Lire Anicet MUNGALA A.S : Le Consensus politique et la
renaissance de la RDC, Kinshasa, Editions du Cerdaf, 2002, p.35
* 13 MWAYILA
TSHIYEMBE, le Zaïre et la Troisième République,
réflexions sur le projet constitutionnel adopté par la
Conférence Nationale Souveraine, Directeur de
l'Institut Panafricain de Géopolitique de Nancy,
http://www.congonline.com/ConstEtudes.html
* 14Vincent
KAMBERE KAGHANIRYO, Le memorandum des évêques zairois au Chef de
l'Etat, plaidoirie en faveur du peuple sacrifié, Séminaire de
theologie dogmatique sous la direction du professeur Abbé SANTEDI,
Facultés Catholiques de Kinshasa, 2003-2004, p.11
* 15 Ce texte fut
publié cinq jours plus tard in Jeune Afrique, édition n°1527
du 09 avril 1990, p.20-25, et il fut établi que la fuite avait eu lieu
au niveau des services de l'Etat et non pas au niveau de la Nonciature
apostolique ou au siège de la Conférence épiscopale (cf.
Léon De Saint Moulin, OEuvres complètes du Cardinal MALULA,
Kinshasa, 1997, No 6, p.330 cité par De SAINT MOULIN (L) & GAISE
N'GANZI(R). : le discours sociopolitique de l'Eglise Catholique du Congo (1956
- 1998) ; T1 : Textes de la conférence épiscopale, Editions
des Facultés catholiques de Kinshasa, Kinshasa, 1998, p.335
* 16 Le MPR,
Mouvement Populaire de la Révolution a été
créé le 2O mai 1967 par son Fondateur Joseph Désiré
MOBUTU SESE SEKO KUKU NGWENDU WA ZA BANGA. Cinq ans après sa prise de
pouvoir par un coup de force le 24 novembre 1965 c'est-à-dire, en
Octobre 1970 à l'issue de son congrès tenu à Kinshasa, les
participants ont décidé de sa sublimation dans les institutions
de la République. Une loi constitutionnelle datée du 29 octobre
1970 l'instituait comme la seule institution au pays (cf. Loi n° 74 / 020
du 15 août 1974 portant révision de la constitution du 24 juin
1967 ou la Constitution de Luluabourg). Après cette révision,
toutes les autres institutions furent supprimées pour ne devenir que des
organes du MPR : Congrès, le Conseil législatif (Parlement),
l'Exécutif (le gouvernement). En référence au
congrès ordinaire du MPR tenu Kinshasa du 06-11 décembre 1982,
l'expression Parti-Etat fut introduit : la mobutisation du pays selon le
professeur KAYEMBE NTAMBA [lire Fonctionnement et financement des partis
politiques en RD Congo par TSHILOMBO MUNYENGAYI, Editions du Potentiel
n°3985 du Vendredi 30 Mars 2007, Kinshasa, in www.lepotentiel.com
* 17L'emploi du
terme vide juridique ici renvoie à un article de la Constitution du
Zaïre de l'époque qui disposait que le président fondateur
du MPR était de droit président de la République. Et donc,
annoncer solennellement son départ du parti-Etat MPR qui cessait de
l'être, ipso facto, il cessait également d'être
président de la République
* 18Anicet
MUNGALA A S, op. cit. , p.37
* 19 Maitre
Robert DOSSOU, actuel président de la Cour Constitutionnel du
Bénin, est une référence, un modèle et
fierté notoire pour son pays et pour l'Afrique. Homme de droit et acteur
politique, il fut Bâtonnier de l'ordre des avocats du Bénin, Doyen
de la Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Politiques,
plusieurs fois Ministre dont celui des affaires étrangères. Vers
les années 1980, il fut un des artisans les plus actifs du processus de
passage du Marxisme-léninisme à la démocratie.
Président du comité préparatoire de la Conférence
des Forces Vives de la Nation Béninoise, Maitre Robert DOSSOU a
été sous la présidence de Nicéphore
Dieudonné SOGLO, (1991-1996), un des animateurs de la vie politique et
institutionnelle du Bénin. Il a fait partie également du cercle
immédiat du Candidat Thomas BONI YAYI, actuel président de la
République du Bénin et reste une des figures marquantes du
régime installé en Avril 2006. Il a été
désigné par Maitre Abdoulaye WADE, actuel président de la
République du Sénégal, président de la commission
ad hoc mise en place à la demande de l'Union Africaine sur le dossier
judiciaire de l'ancien président du TCHAD, Hussein HABRE, exilé
au Sénégal depuis son renversement par coup d'état
militaire en 1990.
* 20Anicet
MUNGALA A S : Le Consensus politique et la Renaissance de la RDC,
Kinshasa, Editions du Cerdaf, 2002, p.35
* 21 Voir
Secrétariat Général de la Conférence
épiscopale du Zaïre, le processus de démocratisation au
Zaïre, Ed. Secrétariat Général CEZ, Kinshasa, 1996,
p.5
* 22 Message des Eglises
catholiques, orthodoxes, protestantes et kimbanguistes, 08 Août 1991, in
le discours sociopolitique de l'Eglise Catholique du Congo (1956 - 1998) ;
T1 op. cit, pp. 362-364
* 23 Déjà
à partir de 1960, ce concept avait traduit le principe de
l'appropriation de l'Eglise par les fidèles chrétiens, en premier
lieu les catholiques. Ayant fait école, cela avait beaucoup joué
dans l'enracinement ou le renforcement de la connaissance et la pratique, afin
d'offrir à l'Eglise en général des perspectives sur la
meilleure façon de relever les défis auxquels elles sont
confrontées. Ce processus a abouti au sein de l'Eglise catholique
surtout à ce qu'on appelle l'inculturation (le fait d'introduire les
cultures locales dans la vie de l'Eglise : rite congolais approuvé
par le Saint-Siège et dont l'illustration de taille reste la
béatification de Bienheureux Isidore BAKANDJA par le Pape Jean-Paul
II)
* 24 Martin
EKWA bis ISAL, s.j, l'Ecole trahie, Editions Cadicec, Kinshasa, 2004,
p.18
* 25
Faustin-Jovite MAPWAR BASHUTH et Cie, histoire au service de l'Eglise, de la
jeunesse et de la société, Facultés Catholiques de
Kinshasa, Editions Facultés Catholiques de Kinshasa, 2007,400 p.
* 26Pape Jean
Paul II, Redemptoris missio sur la valeur permanente du précepte
missionnaire, 12.07.1990, in http://
www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/encyclicals/documents/hf_jpii_enc_0712199_redemptoris-missio_fr.html.
*
27Idem,http://
www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/encyclicals/documents/hf_jpii_enc_0712199_redemptoris-missio_fr.html.
Une encyclique est une lettre solennelle (ou bulle) concernant la foi et la
morale, que le Pape adresse en qualité de Successeur de pierre à
tous les chrétiens, clercs ou laïcs. La promulgation d'une
encyclique constitue toujours un évènement d'Eglise important. LA
MISSION DU CHRIST REDEMPTEUR que JEAN-PAUL II publia, pour le 25e
anniversaire du Décret "Ad Gentes" (Envoyée par Dieu aux
païens) du Concile Vatican II, est véritablement un
évènement prophétique traitant de "la mission
auprès de tous ceux qui ne connaissent pas le Christ".
* 28 DIANZUNGU
DIA BINIAKUNU, J. et Cie, Education Civique et Morale en sixième
secondaire,
Éditions Centre Protestant d'Edition et de
Diffusion, 2004, Kinshasa, 120p.
* 29Wamu
OYATUMBWE, Eglise catholique et pouvoir politique au Congo-Zaïre : la
quête démocratique, Editions l'Harmattan, Paris, 1997, p.1,
www.éditions-harmattan.fr
*
30Gérard CONAC :Quelques réflexions
sur les transitions démocratiques en Afrique, in bilan des
conférences nationales et autres processus de transition
démocratique en Afrique, Colloque de Cotonou du 19-23 Février
2000, Paris, Pedone, 2001, p.346
* 31 MUKUNA
MUTANDA P., Préface du livre de GAISE N'GANZI, L'Eglise catholique et le
processus de démocratisation au Zaïre (24 avril 1990-24 avril
1995), Essais et Témoignages, Kinshasa, FCK, 1996, p.7
* 32 Voir CEZ, Sauvons
la Nation, Déclaration et messages de la CEZ à la CNS et en
d'autres occasions pour soutenir le processus de démocratisation ainsi
que la justice, la paix et l'unité nationale, Editions du
Secrétariat Général de la CEZ, Kinshasa, 1997,
p.3.
* 33 LUDIONGO
NDOMBASI, Normes canoniques pour l'engagement politique des chrétiens et
des ministres sacrés, dans Eglises et démocratisation en Afrique,
Actes de la XIXe semaine théologique de Kinshasa du 21 au 17 novembre
1993, Kinshasa, Editions Facultés catholique de Kinshasa, 1994, p.
308.
* 34 LUDIONGO
NDOMBASI, ibidem, p.323
* 35 CEZ, Pour
une nation mieux préparée à ses responsabilités,
Kinshasa, Edition du Secrétariat Général de la CEZ, 1994,
n0 34-35, p.8
* 36 Stéphane
Dupont, envoyé spécial JAE, Le Souverain pontife prêche la
démocratisation, JAE n° 165, Mars 1993, p.88
* 37 Stéphane
Dupont, ibidem, p.86
*
38Stéphane Dupont, ibidem, p.86
* 39
Idem ; p.89
* 40 AIVO (FJ),
op. cit, p.356
* 41 Voir F.
BOILLOT, l'Eglise catholique face aux processus de changement politique du
début des années 1990, l'Année Africaine, 1992-1993, pp.
115-114, cité par AIVO (FJ), op Cit.
* 42
Secrétariat Général de la Conférence
épiscopale du Zaïre, le processus de démocratisation au
Zaïre, Ed. Secrétariat Général CEZ, Kinshasa, 1996,
p.40
* 43Voir
Pontficia Commisio ad codicis canones authentice interpretandos, (Commission
pontificale sur l'interprétation authentique du droit canon)
cité par LUNDIONGO NDOMBASI, ibidem, p.308 Par décision papale du
2 juin 1984,
Jean-Paul
II renomma la commission sous le titre de « commission
pontificale pour l'interprétation authentique du droit
canon », avec la charge de veiller à l'application du nouveau
code
de droit canonique publié en 1983. Il prend son nom actuel
en 1988 par la
constitution
apostolique
Pastor
Bonus. En 1990, la « commission Pontificale pour la
réforme du droit canon des Églises orientales » est
dissoute, suite à la publication du
code
des canons des Églises orientales. Une partie de ses
compétences est alors confiée au « conseil pontifical
pour les textes législatifs ».
* 44 CEZ,
Complémentarité des vocations et des missions au sein de l'Eglise
pour le service de la Nation, Kinshasa, Editions du Secrétariat
Général de la CEZ, 1994, n°16, p.4
* 45 Voir
Secrétariat Général de la Conférence
épiscopale du Zaïre, le processus de démocratisation au
Zaïre, Editions du Secrétariat Général CEZ, Kinshasa,
1996, pp.46-51
* 46COMITE
PERMANENT DE LA CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Mémorandum au chef
de l'Etat, le mal est à la racine et non en surface, in DC n°2006
du 20 mai 1990, p.511-515
* 47 AIVO (FJ),
op cit. p.365
* 48 Cette
expression signifie que l'homme aimait se promener muni d'une canne et
coiffé d'un chapeau à la toque du Léopard, attributs du
pouvoir mobutien.
* 49COMITE
PERMANENT DE LA CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Mémorandum au chef
de l'Etat, le mal est à la racine et non en surface, in DC n°2006
du 20 mai 1990, p.511-515
* 50Cf.
L'ordonnance n°61-205 du 15 juillet 1991 portant convocation de la CNS,
modifiant et complétant celle n° 91-097 du 11
avril 199, version électronique, Journal officiel de la RDC, Cabinet du
Président de la République, www.presidentrdc.cd
* 51Mgr Laurent
MONSENGWO PASINYA, Communiqué de presse, 20 Septembre 1991, in
Secrétariat Général de la Conférence
épiscopale du Zaïre, le processus de démocratisation au
Zaïre, Editions du Secrétariat Général CEZ, Kinshasa,
1996, p.9
*
52Déclaration radiodiffusée de Mgr
MONSENGWO, in Documentation et Informations Africaines (23octobre1991), 2pages
spéciales, p. 721, repris dans Zaïre-Afrique (1991) n° 259, p.
469-470, Kinshasa, 22 oct. 1991
* 53 Isidore
NDAYWELL ès NZIEM & Roger GAISE NGANZIEM: 25 ANS D'EPISCOPAT AU
SERVICE DE LA VERITE, LA JUSTICE ET DE LA PAIX (1980-2005), Tome I : Mgr
Laurent MONSENGWO Pasteur Infatigable 604 pages, Tome II : Mgr Laurent
MONSENGWO Artisan de Justice et de Paix 408 pages et Tome III : Mgr
Laurent MONSENGWO Passionné de la Science 628 pages, les Editions
Karthala/Paris et Mediaspaul/Kinshasa, 2008
* 54Godefroid
KÄ MANA, Hommes de Dieu et gestion des élections: les Eglises
appelées à sauver le Congo, in le Potentiel n° Edition 3725
du Vendredi 12 Mai 2006,
www.lepotentiel.com/archives
* 55KÄ
MANA, ibidem
* 56 in
Secrétariat Général de la Conférence
épiscopale du Zaïre, op.cit n° 7, p.3
* 57 La classe
politique fut en ébullition étant donné que le partage
équitable et équilibré'' des postes de
responsabilité était imminent. Ce terme qui venait enrichir le
vocabulaire politique congolais concerne essentiellement les entreprises
publiques, les portefeuilles ministériels, la territoriale et la
diplomatie. Prélude de la base de l'Accord de Sun City et Pretoria en
2003, cette pratique caractérielle de la clase politique congolaise
engendrera pendant la nouvelle période de transition une autre formule
toute aussi originale, celle de 1+4 au sommet de l'Etat.
* 58La mise en
place d'un gouvernement constitué de toutes les tendances politiques,
dirigé par Léon KENGO WA DONDO, en remplacement de celui issu de
la CNS.
* 59 KAMTO
(M.), « Les Conférences nationales africaines ou la
création révolutionnaire des Constitutions »,
cité par AIVO (FJ), op cit. p. 382
* 60 l'histoire
de notre pays nous rappelle que les Pères de l'indépendances
avaient posé les jalons de la démocratie avec la création
des partis politiques, grâce auxquels ils vont concourir aux
élections générales, dont celles de mai 1960
étaient les plus déterminantes, avec Patrice EMERY LUMUMBA,
premier ministre et Joseph KASA VUBU premier président de la
République. Ainsi donc, lors de l'accession de notre pays à la
souveraineté internationale, l'Assemblée Nationale jouait le
rôle de catalyseur de la démocratie par la qualité des
débats et, surtout, par le biais du contrôle de l'action
gouvernementale. Plusieurs courants politiques, notamment les Nationalistes,
les Confédéralistes et les Fédéralistes,
s'exprimaient librement sans être inquiétés le moins du
monde. Ce climat de convivialité, qui a caractérisé les
premiers mois de l'indépendance, va connaître des hauts et des bas
à cause de l'instabilité politique et de multiples
rébellions qui ont endeuillé le pays. L'espoir reviendra avec les
élections législatives de 1965, à l'issue desquelles un
nouveau Parlement fut installé, avec une majorité de la
Convention Nationale Congolaise du Premier Ministre Moïse TCHOMBE.
Hélas, cette deuxième expérience ne fut que de courte
durée, car le non-respect du choix clairement exprimé par le
peuple replongea le pays dans la crise, laquelle servit de prétexte au
haut commandement militaire avec le lieutenant général
Joseph-désiré MOBUTU pour s'emparer du pouvoir
* 61Cf.
Déclaration du Président François Mitterrand de la
République Française lors du Sommet France Afrique de la Baule
(19-21 juin 1990) et la doctrine du premier ministre Edouard Balladur qui
conditionnait l'octroi de l'aide française aux Etats Africains par les
réformes démocratiques, à l'instar de conclusion des
programmes avec les bailleurs des fonds
* 62Lire
TSHILOMBO MUNYENGAYI, la transition démocratique à la
lumière du paramètre MOBUTU, le Potentiel n°3821 du 08
Septembre 2006,www.lepotentiel.com/archives
* 63Proverbe
Bambara / Sénégal
* 64Cette
perversion du pouvoir se fait sentir durement lors des travaux de la CNS. Comme
un avion frappé par une panne technique en plein vol, la CNS a connu une
cérémonie de clôture brusque et humiliante le 05
Décembre 1992, un atterrissage forcé pour sauver les meubles.
Cette navigation à vue par le régime répressif du
Maréchal Président MOBUTU aggravera continuellement la crise
politique, et débouchera sur le déclenchement de la lutte
armée sous la houlette de quelques fils et filles du pays
déterminés à le chasser et conquérir par la force,
le pouvoir d'Etat.
* 65MAO,
L'histoire inconnue, Gallimard 2006, cité par CHRISTOPHE BOISBOUVIER
pour JA, De KASAVUBU à KABILA, in JA n° 2377 du 30 Juillet-05
Août 2006, p.50
* 66Devant
l'avancée vertigineuse des troupes rebelles de l'AFDL, le
Maréchal -président MOBUTU et sa famille sonneront le glas de son
régime par leur fuite le 16 mai 1997 de Kinshasa, laissant le pouvoir
d'Etat aux mains de Laurent Désiré KABILA, appelé
Mzée affectueusement par la population et qui s'autoproclama
président de la RD Congo. C'était la fin d'une guerre, fut-elle
d'agression en droit international, mais acceptée et cautionnée
par l'ensemble du peuple meurtri par un régime répressif qui
refusa complètement de répondre aux appels incessants de l'Eglise
pour un changement sans violence ni recours aux armes.
* 67Voir
CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Conduis nos pas, Seigneur, sur
le chemin de la paix (cf. Luc 1,79), Message des Evêques catholiques de
la République Démocratique du Congo aux fidèles et aux
hommes de bonne volonté, Editions du Secrétariat
Général de la CENCO, Kinshasa, 1999, § 4, p.6
* 68 Cf. Bien
Heureux les Artisans de la Paix (Mt 5,9), Les événements actuels
et l'avenir du Zaïre, rôle de l'Eglise, Message des Evêques du
Zaïre aux catholiques et aux hommes de bonne volonté, Editions du
Secrétariat Général de la CEZ, Kinshasa, 1997, p.8
* 69 Voir
CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Sois sans crainte, vous
êtes tous des frères, Arrêter les guerres, Aux dirigeants
politiques § 8, Message des Evêques CENCO, Suivi du Message des
Evêques ACEAC, Editions du Secrétariat Général de la
CENCO, Kinshasa, 1999, p. 23
* 70 Bien
Heureux les Artisans de la Paix (Mt 5,9), Les événements actuels
et l'avenir du Zaïre, rôle de l'Eglise, Message des Evêques du
Zaïre aux catholiques et aux hommes de bonne volonté, Editions
Secrétariat Général de la CEZ, Kinshasa, 1997, p.8
* 71 CONFERENCE
EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Tous, pour les intérêts
supérieurs de la Nation, Message des Evêques aux fidèles
catholiques et aux hommes de bonne volonté, Editions du
Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 2001,
pp.3-4
* 72 Militaire
chevronné, il fut élevé par son père en 1998 au
grade de Général-major des Forces Armées Congolaises (FAC)
et plus tard aux fonctions de Chef d'Etat-major de la force terrestre.
Aussitôt investi à la tête du pays, le fils de Mzée
(« le sage » en swahili) Joseph KABILA KABANGE s'est
attelé à créer un climat propice à la paix,
à la pacification et à la réconciliation en prenant des
mesures accordant l'amnistie, pour faits de guerre, infractions politiques et
d'opinions aux membres des anciens mouvements rebelles, permettant ainsi le
retour des compatriotes exilés au lendemain de la prise du pouvoir par
l'AFDL. Bien qu'il fût projeté sans y être dans ce sens
politiquement préparé, cette désignation
représentait aux yeux de beaucoup le compromis le plus acceptable pour
éviter que le pays ne sombre dans le chaos. Telle fut la solution
avancée par le Conseil des ministres élargi au Haut Commandement
militaire qui ont recherché une solution crédible à
l'absence de disposition constitutionnelle établie
* 73 Discours
d'investiture de Joseph KABILA KABANGE, 26 janvier 2001, Journal officiel,
Cabinet du président de la République, version
électronique,
www.presidentrdc.cd ou
sur le web et Voir Frédéric LEJEAL, Joseph KABILA succède
à son père à la tête de la RD Congo, version
électronique, J.A. du 20 janvier 2008, www.jeuneafrique.com
* 74 Les
composantes et entités désignent les parties prenantes au
dialogue inter congolais à savoir le Gouvernement, l'Opposition
armée RCD&MLC, l'opposition politique ou opposition non armée
et la société civile dont font partie les confessions
religieuses.
* 75 Robert
MINANI (s.j), Existe-t-il une doctrine sociopolitique de l'Eglise, Editions
CEPAS, Kinshasa, 2000, p.17
* 76 Voir la
position du Saint-Siège exprimée par le Pape Jean-Paul II,
cité par Stéphane Dupont, envoyé spécial JAE, Le
Souverain pontife prêche la démocratisation, in JAE n° 165,
Mars 1993, p.88
* 77Voir
KÄ MANA, Hommes de Dieu et gestion des élections: les Eglises
appelées à sauver le Congo, in le Potentiel n° Edition
n°3725 du Vendredi 12 Mai 2006,www.lepotentiel.com/archives
* 78 La classe
politique congolaise est considérée comme un marigot contenant
énormément de caïmans
* 79 Au
lendemain de sa prise de pouvoir d'Etat, le nouveau régime AFDL mit fin
à la cacophonie notamment par le refus et le rejet de toutes les
Institutions de transition issues de la CNS, les considérant comme
à la solde de l'ancien pouvoir.
* 80 Cette expression
fait allusion à la prise du pouvoir par la force de l'AFDL conduite par
Mzée Laurent-Désiré KABILA et la remise en cause des
Institutions de transition qui, selon le prélat, avaient permis
l'avancée du processus de démocratisation au RD Congo
(Zaïre).
* 81 Comme
lors de son interview à la RFI avec Christophe BOISBOUVIER, il a
annoncé officiellement le report de l'organisation des élections
en 2006. Cela provoqua un tollé des déclarations hostiles, la
destruction des infrastructures ecclésiastiques à KINSHASA
surtout en guise de représailles par les partisans hostiles au processus
électoral comme l'UDPS, les tentatives de lynchage dont il a
été l'objet à KANANGA, chef-lieu de la province du
KASAÏ-OCCIDENTAL et fief de l'UDPS lors de la campagne de
sensibilisation des fidèles aux opérations électorales.
Rappelons ici que cette campagne était organisée par les
communautés ecclésiastiques, chacune l'organisait dans la ville
de son choix, et ce, de manière rotative. Et à chaque rotation,
l'ouverture et la clôture des travaux étaient sous la
présidence de Mr L'Abbé Apollinaire MALUMALU, président de
la CEI. Le choix de l'Eglise Orthodoxe était la ville de KANANGA
où cette dernière a une grande mission, mais laquelle se trouve
être un des bastions du parti d'opposition UDPS qui était
farouchement opposé au processus électoral. Ce qui a
justifié largement le courroux de ses partisans à l'encontre de
Mr l'Abbé Président de la CEI, pris comme bouc
émissaire.
* 82Léon
KENGO WA DONDO, actuel président du SENAT, l'homme d'Etat est Docteur en
droit et n'est pas à présenter en RD Congo pour avoir gravi
plusieurs échelons. Il est de façon ironique notoirement
appelé l'homme de la rigueur pour tout le mal que sa politique de la
rigueur drastique et orthodoxe appliquée a fait au peuple pendant tous
ses passages à la Primature dont il a gardé le record des
Premiers Ministres au temps du Maréchal-président MOBUTU. Il est
également présenté comme très proche des milieux
occidentaux notamment les Institutions de BRETTON WOODS (Fonds Monétaire
International&Banque Mondiale)
* 83 Voir Vie
pastorale, Archidiocèse de Kinshasa, numéro spécial RDC
Elections 2006, Edition Epiphanie, Kinshasa, n°52-Octobre 2006,
p.49
* 84Vie
pastorale, Archidiocèse de Kinshasa, numéro spécial RDC
Elections 2006, op cit. p.49
* 85Godefroid KÄ
MANA, Hommes de Dieu et gestion des élections: les Eglises
appelées à sauver le Congo, in le Potentiel Edition n°3725
du Vendredi 12 Mai 2006,www.lepotentiel.com/archives
* 86CONFERENCE
EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : J'ai vu la Misère de mon peuple
(Ex. 3,7), TROP C'EST TROP, Message des Evêques de la RDC aux
fidèles catholiques et aux hommes de bonne volonté, Editions
Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa, 2003,
www.cenco.cd, 14 pages.
* 87 Octave M.
LUAMELE, Appui aux Institutions de la transition, l'Eglise catholique lance la
campagne d'éducation civique pour les élections, Kinshasa,
Quotidien indépendant L'Avenir du 10 Mars 2004,
www.groupelavenir.cd
* 88 CONFERENCE
EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO : Pour l'amour du Congo, je ne me tairai
point (. IS 62,1), Message du comité permanent des Evêques de la
RDC aux fidèles catholiques et aux hommes de bonne volonté, suivi
du Mémorandum au Secrétaire Général des Nations
Unies, Editions Secrétariat Général de la CENCO, Kinshasa,
2004, www.cenco.cd, 96 pages.
* 89 Godefroid
MABOKOI, CENCO lancement de la campagne, Le Potentiel n°3773 du lundi 10
juillet 2006,
* 90Voir le
Partenariat des Confessions religieuses de la RDC : Protocole d'accord
signé le 29 Juillet 2004 par : Messeigneurs Laurent MONSENGWO
PASINYA (Eglise Catholique), Pierre MARINI BODHO (Eglise Protestante), Simon
NZINGA MALUKA (Eglises Indépendantes), Prof. Théodore FUMUNZANZA
GIMUANGA (Eglise Orthodoxe), Imam Abdallah MANGALA (Communauté
Islamique) Bishop Albert KANKIENZA MWANA MBO (Eglises de Réveil),
www.cenco.cd
* 91 Voir la
Déclaration de la Présidence de la CENCO : Conférence
de presse, lundi 12 décembre 2005, centre interdiocésain,
Kinshasa, www.cenco.cd, et TSHILOMBO MUNYENGAYI: l'Eglise catholique face au
processus électoral : fermeté et contradictions, version
électronique le Potentiel, Edition n°3887 du vendredi 24 novembre
2006, www.lepotentiel.com/archives
* 92 Voir tous
les résultats après la proclamation par la Cour Suprême de
Justice des résultats définitifs, http://www.cei-rdc.cd
* 93 Voir la
déclaration de la CENCO du Mercredi 11 janvier 2006,
www.cenco.cd
* 94 Article
222 : Les institutions politiques de la transition restent en fonction
jusqu'à l'installation effective des institutions correspondantes
prévues par la présente Constitution et exercent leurs
attributions conformément à la Constitution de la Transition,
Constitution de la République Démocratique du Congo du 18
février 2006, TITRE VIII : DES DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES,
p.27
* 95 Article
222 : Les institutions politiques de la transition restent en fonction
jusqu'à l'installation effective des institutions correspondantes
prévues par la présente Constitution et exercent leurs
attributions conformément à la Constitution de la
Transition.
Article 228 : Sans préjudice des
dispositions de l'article 222 alinéa 1, la Constitution de la Transition
du 04 avril 2003 est abrogée.
Article 229 : La présente Constitution,
adoptée par référendum, entre en vigueur dès sa
promulgation par le Président de la République, Constitution de
la République Démocratique du Congo du 18 février 2006-
TITRE VIII : DES DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES, p.27, version
électronique, www.presidentrdc.cd
*
96Marie-France CROS : RD CONGO-ELECTIONS :
Interview du président de la CENCO Mgr MONSENGWO, in la Libre Belgique
du 22 Mai 2006,
http://congomania.afrikblog.com/archives/2006/05/24/1942995.html
* 97 Appel de
Mgr L'Archevêque François Xavier au Congolais le 25 juillet 2006,
www.radiookapi.net
* 98 Point de
presse de la Présidence de la CENCO, Kinshasa, 27 juillet 2007,
www.cenco.cd
*
99Révérend Père Rigobert MINANI
BIHUZO BIN KKURU (s.j): Existe-t-il une doctrine sociopolitique de
l'Eglise ? Editions CEPAS, Kinshasa, 2000, p.188
* 100 J.P.M et
P. BIOTO : MALU-MALU « je vais lever les zones
d'ombre », la Référence Plus du 25 juillet 2006,
Kinshasa, www.digitalcongo.net/recherche
* 101
Marie-France CROS, in la libre Belgique, Edition datée 17 juillet 2006,
cité par T. KIN-KIEY MULUMBA : Sur la communication, très
mitterrandien, AZN triomphe, JPBG passe, P3 fort mal à l'aise, mise en
ligne le 25 juillet 2006, Kinshasa, Édition «LE SOFT
INTERNATIONAL2» N°868 datée du 21 juillet 2006,
www.lesoftonline.net
* 102
Révérend Père Rigobert MINANI BIHUZO BIN KKURU (s.j),
op.cit, p.188
* 103 Voir CENCO :
Secrétariat Général CENCO, Coordination des Actions pour
la réussite de la Transition (CARTEC), Guide de formation de
l'électeur congolais, Editions du Secrétariat
Général CENCO avec le soutien financier de Développement
et Paix (Canada), CRS (USA), CORDAID (Hollande), Broederlijk Delen ( Belgique)
et la Coopération technique belge (CTB), Avril 2006, in
www.cenco.cd
* 104Ely OULD
MOHAMED VALL : Tout a changé...sauf moi, Interview de
François SOUDAN avec le Chef de l'Etat de la MAURITANIE, JA n°
2376 des 23-29 juillets 2006, p.38
* 105
Comité permanent des Evêques, Pour une Nation mieux
préparée à ses responsabilités...message des
Evêques, 21/08/1994, www.cenco.cd
* 106 La bonne
gouvernance exige, selon Le Professeur HOLO, « la gestion efficiente
des affaires publiques impliquant la notion de transparence et de
responsabilité », Propos tenus lors du Séminaire sur
les Transitions Démocratiques, DEA-DHD, 2005-2006, Chaire Unesco,
FADESP, UAC. Inédit
* 107 NZAMBI A
SALA, TALELA BISO LIKAMBO OYO veut simplement dire Que Dieu agisse ou fasse
selon sa volonté et Qu'Il nous vienne en aide face à ce
problème
*
108Benoît XVI, propos tenus à l'ouverture
de la messe avant l'Angélus, dimanche 11 mars 2007, Rome, in
www.zenith.org
* 109Pape
Léon XII, Rerum novarum, cité par De SAINT MOULIN (L) & GAISE
N'GANZI(R). : Eglise Catholique du Congo (1956 - 1998) ; T1 : Eglise et
Société, Textes de la conférence épiscopale,
Editions des Facultés catholiques de Kinshasa, Kinshasa, 1998, p.
407
* 110Pour Son
Eminence Christian Cardinal NTOUMI, cette situation a fait que la bêtise
atteigne son paroxysme dans la mesure où ces dirigeants ne font rien
d'autre que déposséder les plus pauvres pour enrichir les plus
riches. Vanité des vanités, tout est vanité, dira en
résumé le Cardinal, car, tôt ou tard, mais certainement, le
Juge Suprême finit par remettre les pendules à l'heure. Lire
Xavier MIRINDI KIRIZA : Deux hôtes, un discours, L'Observateur,
jeudi 01 février 2007, www.lobservateur.cd
*
111CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
"Il est temps
de nous réveiller" (Rm 13,11b),
:
Message de la Conférence Episcopale Nationale du Congo aux
fidèles catholiques et aux hommes de bonne volonté à
l'occasion du 48ème anniversaire de l'indépendance,
Kinshasa, 10 juillet 2008, in www.cenco.cd
*
112CONFERENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO :
"Il est temps
de nous réveiller" (Rm 13,11b),
:
ibidem.
* 113 Dans son homélie le 19 mars 2009 au
Stade Ahmadou Ahidjo à Yaoundé à l'occasion de sa
première visite en terre africaine (Cameroun), le pape a
déploré "le bouleversement de la vie traditionnelle" africaine et
"la tyrannie du matérialisme" sous l'effet de la mondialisation. Tout en
avertissant qu'à ce rythme, "L'Afrique en général et le
Cameroun en particulier encourent le risque de ne pas reconnaître" Dieu,
"le véritable auteur de la vie", il a évoqué le
"déracinement" tragique de nombreux Africains, particulièrement
les jeunes privés de ressources et attirés "par les paradis
éphémères". (Lire Le pape déplore l'effet de la
globalisation en Afrique devant la foule à Yaoundé, AFP/JA du
19mars 2009, version électronique sur le web)
* 114 Propos
de Mgr Pius NCUBE, Archevêque de BULAWAYO au ZIMBABWE tenus dans un
entretien avec le quotidien britannique Daily Telegraph (cf. Attaque de Mugabe
contre les évêques qui `'font la politique'', AFP/JA - 4 mai 2007,
version électronique sur le web)
* 115Propos
tenus dans son homélie lors de la célébration de la
première messe de son Cardinalat, lire Sénégal: stade
comble pour la 1ère messe de cardinal de Mgr Théodore
SARR, 02 décembre 2007/, version électronique,
AFP,
www.jeuneafrique.com.
* 116 Extraits
de l'intervention du Pr A. MUNGALA ASSINDIE SANZONG portant sur les fondements
de la culture de la paix, Atelier sur la paix, la démocratie et la bonne
gouvernance organisé par l'Observatoire des médias congolais
(OMEC), 03-05 avril 2007, Kinshasa, 2007, www.lepharerdc.com
* 117La
Pléiade congolaise est un mouvement de libres penseurs et intellectuels
créé à la suite de la Transition démocratique pour
l'avènement d'un ordre politique nouveau en RD Congo. A travers leurs
actions, elle véhicule les bonnes idées au service de la paix, la
réconciliation et la reconstruction nationales
* 118 Quelques
articles de son Code de droit canonique en vigueur sont explicites à ce
sujet :
· canon 222, &2 donne obligation aux
fidèles laïcs de faire la promotion de la justice sociale.
· canon225, &2 demande aux fidèles,
chacun selon sa condition de vie de s'employer à parfaire le
temporel ; c'est un devoir moral.
· Canon227 L'Eglise reconnait l'usage de la
liberté religieuse et celle politique des chrétiens. Elle les
exhorte à en user avec harmonie sans engager L'Eglise dans leurs
convictions politiques.
* 119 NGUNDU
Mick, o.m.i, « L'engagement des fidèles laïcs dans le
code de 1983 », dans l'engagement politique des fidèles du
Christ selon le Code de droit canonique de1983, Kinshasa, Editions
Baobab.1999.p.31
* 120 L'Eglise
en RD Congo a développé l'esprit et le sens d'inculturation
à travers des actions constructives à grand impact ça et
là. A titre d'illustration, il est intéressant de voir combien
c'est croustillant la prise en charge de l'Eglise par ses propres
fidèles au sein des Eglises kimbanguistes, catholique et de
réveil. Cette approche est également utilisée chez les
protestants salutistes et méthodistes d'origine
étrangère.
*
121Rémy MASAMBA, Secrétaire
Général de l'UDPS: l'UDPS veut promouvoir l'idée de la
concertation, discours tenu lors d'une matinée-réflexion repas
organisé par le PNUD au Cercle ELAÏS, cité par KIN- KIEY
MULUMBA ( T), lundi 18 décembre 2006, in
www.lesoftonline.net,Editions
n°887 datée du 21décembre 2006, mise en ligne le 22
décembre 2006, Kinshasa (UDPS, c'est le parti politique historique de
l'Opposition sous la direction du Sphinx et leader maximo Etienne THISEKEDI WA
MULUMBA, figure emblématique de l'Opposition en RD Congo)
* 122 Lala BEN
BARKA, mot de circonstance à l'ouverture des travaux du 7e
forum sur la gouvernance en Afrique, le 24 octobre 2007, Ouagadougou/ Burkina
Faso, cité par Abdoulaye TAO, A la recherche d'un Etat capable, in
Quotidien le Pays n° 3982 du 25 octobre 2007, version électronique,
www.lepays.bf
* 123Voir RDC
: Lancement officiel du programme "Réconciliation et gouvernance
participative", DIA, Politique et Société, Centre culturel du
Collège BOBOTO, lundi 19 février 2007, (Agence catholique
D.I.A.),
http://www.dia-afrique.org.
* 124 Régine KIALA, SOCIETE- La
décentralisation : un combat et une conquête pour plus d'autonomie
à la base, du 3 au 5 novembre 2008 et les Enjeux et les défis de
la décentralisation en RDC, 5 octobre 2008, CEPAS, Kinshasa, in
www.potentiel.com; Journées Sociales organisées par le
CEPAS, 5 au 8 juin à Manrensa à Kimwenza, Kinshasa, in
www.le potentiel.com, Bukavu : l'Eglise catholique
relance le barza communautaire, 13 Août 2008, in
www.radiookapi.net, etc.
* 125 C'est le
cas récemment d'un forum au centre d'études pour les actions
sociales (CEPAS) le jeudi 3 juillet 2008 à KINSHASA où une
vingtaine d'experts miniers (nationaux et étrangers) ont
réfléchi sur les contrats chinois en RD Congo. Ce forum
répondait également à la nécessité
d'élargir un peu plus leur expérience à d'autres
réalités en se basant sur la valorisation des ressources
minières dans la convention minière, l'analyse juridique de cette
convention ainsi qu'un regard critique sur la dite convention. Après
l'aval de l'Assemblée Nationale à la mise en oeuvre des contrats
chinois, il ne restait plus qu'aux experts du secteur minier de se prononcer
sur le bien fondé de ce type nouveau de coopération Sud-Sud.
C'est désormais chose faite, avec l'appui favorable que viennent
d'apporter les experts congolais des mines lors de ce forum. Ces contrats
chinois ont fait l'objet d'un autre débat dans la salle des
conférences au centre de la paroisse Notre Dame de Fatima dans la
commune de la Gombe le 26 juin 2008 à KINSHASA. C'est le groupe de
presse Le Potentiel, avec la collaboration de l'Institut Panafricain des
Relations Internationales et Stratégiques, IPRIS en sigle, qui a
organisé cette rencontre dans le but de permettre à
l'élite intellectuelle congolaise de réfléchir une fois de
plus sur le contrat de la récente coopération
sino-congolaise.
* 126
Lancement par la Conférence Episcopale Nationale du Congo de la campagne
de mobilisation de 140 millions des dollars pour la prise en charge des
personnes porteuses du VIH/SIDA, le 22 mai 2009, Kinshasa, www.cenco.cd
* 127Blaise
CAMPAORE, discours d'ouverture des travaux du 7e forum sur la gouvernance en
Afrique, le 24 octobre 2007, Ouagadougou/ Burkina Faso, cité par
Abdoulaye TAO, A la recherche d'un Etat capable, in Quotidien le Pays n°
3982 du 25 octobre 2007
* 128 A
l'instar de la croisade que mène l'Eglise catholique, l'Eglise
protestante (Eglise du Christ au Congo), à l'occasion de la
clôture de la 14ème session de son synode national le
18 août 2008, à Kinshasa, a exigé toute la lumière
sur le détournement de 1,3 milliards USD annoncé par la
commission interministérielle sur la lutte contre la corruption. (Par
qui, où?)
* 129 A
l'issue de la messe célébrée le 19 mars 2009 au Stade
Ahmadou Ahidjo à Yaoundé, le pape a remis aux
évêques le document préparatoire du prochain synode
catholique sur l'Afrique qui dénonce "un processus organisé de
destruction de l'identité africaine (. . .) sous prétexte de
modernité". Le texte accuse les "puissances militaires et
économiques" d'imposer leur loi, fomentant trafics d'armes
générateurs de guerres et exploitant les richesses
minières du continent. Les institutions financières
internationales sont aussi mises en cause pour les effets "funestes" des
programmes imposés de restructuration. En outre, la "globalisation"
menace "les valeurs africaines authentiques" comme le "respect des Anciens",
"le respect de la vie" ou la culture de l'entraide, accuse le document.
D'où, la pertinence de notre appel à la réflexion sur
Concile Vatican III, pourquoi pas, à l'occasion du prochain Synode des
Evêques d'Afrique à Rome en Octobre prochain.
* 130Cette
invitation du Souverain pontife a été lancée lors de sa
rencontre avec les membres du Benoît XVI invite l'Afrique à la
réconciliation Conseil spécial pour l'Afrique du Synode des
évêques, à la nonciature apostolique de Yaoundé
à l'issue de son séjour au Cameroun, Voir Benoît XVI invite
l'Afrique à la réconciliation, vendredi 20mars 2009,in
www.zenith.org
* 131Lire
COMITE PERMANENT DE LA CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE : Mémorandum
au chef de l'Etat, le mal est à la racine et non en surface, in DC
n°2006 du 20 mai 1990, op.cit, p.44-51
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