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La condition juridique du salarié dans les procédures collectives

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par Cyrille MONKAM
Université de Douala - DEA 2005
  

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Première partie :

Une tendance à la protection du salarié dans le redressement judiciaire

L'objectif des procédures collectives est de traiter en masse les difficultés de l'entreprise. Mais, s'analysant comme des obligations pour l'entreprise, les droits du salarié sont parfois de nature à compromettre le sauvetage de l'entreprise suivant les proportions qu'ils occupent.

Mais soucieux de l'importance de ces droits, le législateur s'est beaucoup plus appesanti sur le préjudice que pourraient subir les salariés en cas de persistance des difficultés. C'est pourquoi, le dispositif en vigueur dans notre espace a voulu protéger le salarié à un double niveau : Il fait de ce dernier un créancier d'argent d'une part, et d'autre part un créancier d'emploi. Cette double mesure vise à garantir les droits de cette catégorie faible des créanciers sociaux. En effet, les législations contemporaines placent au premier plan de leurs préoccupations la sauvegarde de l'entreprise et de l'emploi.

Aussi, examinerons-nous successivement la protection du salarié dans la procédure de redressement judiciaire (chapitre1), et la protection du salarié à travers la particularité du traitement de sa créance (chapitre2).

Chapitre I : La protection du salarié dans la procédure de

redressement judiciaire

Dans cette procédure, la protection du salarié se manifeste par le souci du législateur de sauvegarder, dans la mesure du possible son emploi.

Il y a belle lurette, le droit à l'emploi était traité avec une particularité inédite. En effet, cette exigence de l'emploi est traitée d'après les textes internationaux23(*)et la constitution camerounaise24(*)comme un droit fondamental reconnu à toute personne. Ce caractère fondamental implique sa garantie et sa stabilité, celles-ci devant être assurées par tous les membres de la société humaine. Mais les nouvelles préoccupations découlant du malaise économique et social, ont contraint les partenaires sociaux à rechercher, malgré la situation difficultueuse de l'entreprise, le maintien des relations contractuelles. Cette recherche poursuit en réalité un double objectif :

Tout d'abord, l'évitement de l'encombrement du marché du travail suite à la suppression de certains emplois.25(*)

Ensuite, elle est une échappatoire au chômage ambiant. Ainsi, le sauvetage des entreprises, qui est l'un des objectifs majeurs des procédures collectives notamment du redressement judiciaire, s'explique par la prise de conscience du législateur de son impact bénéfique multiforme sur les aspects de la vie publique.

En effet, le sous emploi et le chômage freinent le développement en même temps qu ils constituent une menace26(*) pour la stabilité de l'Etat. L'exploitation se fait très souvent avec le concours des dirigeants. Mais les salariés peuvent en subir le contre coup à des degrés divers.

Pour cela, la protection du salarié dans la procédure de redressement judiciaire passe par une adoption des mesures qui s'imposent à l'entreprise (section 1ère), et qui affectent directement les salariés (section 2).

SECTION 1 : LES mesures de sauvegarde visant l'entreprise

Le redressement judiciaire de l'entreprise ne peut être effectif que s'il y a application du concordat définitif.27(*) Cette procédure recherche l'amélioration de la situation de l'entreprise à travers l'application des propositions faites par le débiteur. Celles-ci seront soumises au vote de l'assemblée des créanciers. En effet, le concordat de redressement doit exposer tous les voies et moyens par lesquels le débiteur entend sauvegarder les emplois. Il doit en outre maintenir les contrats en cours. Cependant, il ne faudrait pas penser qu'il s'agit de tous les contrats, seuls les contrats de travail sont concernés.28(*)

L'article 107 AUPCAP dispose à cet effet que « (...) la cessation des paiements déclarée par décision de justice n'est pas une cause de résolution (...) ». Ce texte consacre une sécurité de l'emploi à travers sa garantie et sa stabilité puisqu'il institue le salarié dans une situation confortable par rapport à son emploi.

D'une manière générale, il faut entendre par contrat de travail en cours, ceux conclus avant le prononcé du jugement d'ouverture de la procédure, et dont les principaux effets ne sont pas épuisés au jour du jugement. Ce maintien est de plein droit, car il tend à éviter une dégradation de la capacité de production du débiteur pendant la période d'observation.

Il en ressort que la conservation des emplois est soumise à la poursuite de l'activité de l'entreprise en difficulté (§1). En plus du respect de ce principe, le débiteur doit dans le concordat, préciser les stratégies économiques et financières (§2) qu'il entend utiliser pour permettre la survie de l'entreprise.

§1 la poursuite de l'activité : condition du maintien des contrats en cours

A la différence du droit du travail29(*), le principe du maintien des contrats en cours dans le redressement judiciaire est valable en cas de poursuite de l'activité, peu importe qu'il y ait ou non modification de la situation juridique.

Très souvent, en cas de poursuite de l'activité, la situation de l'entreprise varie selon qu'elle se fait avec (A) ou sans (B) changement du chef d'entreprise.

* 23 DUDH du 10 décembre1948, art 23 al. 1 ; Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples du 27 juin 1981.

* 24 Préambule du texte du 18 janvier 1996.

* 25 Voir à ce propos l'allocution du ministre du travail et de la prévoyance sociale à l'occasion de la 2e conférence des inspecteurs de travail, in le monde du travail n°6, juin 1978 cité par KEM CHEKEM (B.M) in «Entreprises en difficulté et droits des salariés dans la zone OHADA : Le cas du Cameroun», mémoire de DEA, Université de Dschang, 2004 p.23.

* 26 Sur le plan économique, le chômage représente une forme de dépréciation ou de désinvestissement du capital humain ; sur le plan politique, il fragilise la souveraineté de l'Etat parce qu'il oblige les gouvernants à solliciter les aides extérieures qui ont pour conséquence l'importation de la main d'oeuvre étrangère ; sur le plan social, le désoeuvrement est l'un des facteurs du grand banditisme.

* 27 Pour de plus amples explications de cette notion, voir KANE EBANGA (P), Le concordat de redressement judiciaire dans le droit africain des affaires, RADIC, vol 12, 2000,. P.159 à 169.

* 28 A contrario, en France la continuation des contrats en cours concerne tous les contrats sans exception. Voir art 37 de la loi de 1985, cass. Com. 8 déc 1987.

* 29 L'article 42 al.1 mentionne qu'en plus de cette poursuite de l'activité, il faut nécessairement une modification de la situation juridique de l'entreprise.

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