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Elites urbaines et politique locale au Cameroun. Le cas de Bayangam

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par Paul NUEMBISSI KOM
Université Yaoundé II SOA - Master en sciences politiques 2007
  

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SECTION V : LA MÉTHODOLOGIE

Par méthodologie, nous entendons à la fois les techniques de recherche et la grille d'analyse utilisée.

Paragraphe 1 : Les techniques d'enquête : l'option pour l'analyse documentaire et l'entretien

Les techniques, selon Madeleine Grawitz, sont des procédés opératoires rigoureux, bien définis, transmissibles, susceptibles d'être appliqués pour étudier un phénomène quelconque (2001 : 352). En effet, les techniques sont les outils qui nous ont permis de récolter les informations utiles pour la compréhension et l'explication de l'activité politique locale des élites urbaines à Bayangam. Pour ce faire nous avons eu recours aux techniques documentaires et à l'entretien.

Les techniques documentaires nous ont permis, par le biais des ouvrages généraux, des articles spécialisés, des archives de la sous-préfecture, des procès-verbaux de la mairie de Bayangam, des archives privés de certains acteurs politiques, des journaux régionaux spécialisés sur l'Ouest Cameroun (Ouest Échos, Le journal de Douala et Flash Infos) et un journal local (Les Nouvelles de Bayangam), de faire le point sur l'activité politique à Bayangam depuis 1990.

Par ailleurs, l'entretien, entendu comme «  procédé d'investigation scientifique, utilisant un processus de communication verbale, pour recueillir des informations en relation avec le but fixé » (Grawitz, 2001 : 644), nous a permis avec les élites urbaines, les autorités traditionnelles, les autorités administratives, les responsables locaux des partis politiques, les agents communaux, ainsi que les citoyens ordinaires, de prendre acte du sens que les acteurs donnent à leur pratique politique au village.

Pratiquement, nous avons effectué notre enquête en deux temps.

Le travail a commencé par une enquête de terrain qui s'est déroulé du 17 septembre au 2 octobre 2006. Lors de cette phase préliminaire, notre public cible était constitué par le sous-préfet de Bayangam et ses adjoints, les responsables locaux des partis politiques, les autorités traditionnelles, les responsables et les agents communaux, et quelques paysans ayant pris part de près ou de loin au jeu politique au village. Cette pré- enquête nous a permis de noter la prégnance des élites urbaines dans la vie politique locale et d'en identifier les plus influentes.

L'enquête intensive s'est déroulée ensuite entre Yaoundé, Douala, Bafoussam et Bayangam, lieux de résidence des différents protagonistes, entre décembre 2006 et février 2007. L'enjeu était alors d'établir la biographie sociale des principales élites urbaines identifiées lors de la phase préliminaire et de recueillir le sens qu'elles donnent à leur participation à la politique au village. Par ailleurs, nous avons élargi la palette de nos informateurs aux citadins et paysans ordinaires. Au total, près de soixante entretiens semi -directifs intensifs ont été réalisés.

Les informations ainsi recueillies ont été soumises à deux principales grilles d'analyse, ou deux principaux « filtre de la connaissance » pour reprendre la belle formule d'Alfred Grosser (1972 : 8).

Paragraphe 2 : Les méthodes d'analyse : l'option pour l'interaction politique et l'ethnométhodologie

Notre étude reposera principalement sur l'interaction politique.

En effet, l'interaction politique en tant que grille d'analyse permet selon Jacques Lagroye « de comprendre et de vérifier quel type de relation relie diverses unités sociales et structure les rapports que les unités entretiennent » (1991 : 165). C'est ainsi que les métaphores du « jeu » et de « marché » permettent de rendre compte des rapports de pouvoir et les relations entre agents dans une perspective relationnelle et dans des systèmes d'interaction. Cette démarche cherche à expliquer pourquoi telle unité sociale participe à l'interaction, ses intérêts à « entrer dans le jeu », les comportements qu'elles parviennent à imposer et les ressources dont elles disposent dans la compétition. La perspective interactionniste combine ainsi analyse des contraintes et stratégies des acteurs, pesanteurs structurelles, et dynamiques individuelle ou collective (Olivier de Sardan, 1995 : 40).

Cette méthode nous permettra ainsi d'analyser l'ensemble des interactions entre les élites urbaines sur la scène politique rurale de Bayangam autour du pouvoir local qui constitue ici l'enjeu principal. Elle permettra par ailleurs de prendre en compte les rapports de force et les phénomènes d'inégalités, l'accent étant mis ici comme le relève Olivier de Sardan (1995 : 40) « sur les ressources des acteurs sociaux « d'en bas » et leur marge de manoeuvre ». Elle nous permettra également de déterminer et de comprendre les relations de coopération, de domination, de concurrence et d'antagonisme des intérêts qui s'établissent entre les acteurs sociaux dans l'arène politique de Bayangam.

L'ethnométhodologie sera mobilisée comme grille secondaire.

L'ethnométhodologie est un courant de la sociologie américaine conceptualisé dans les années 60 par Harold Garfinkel à la suite de ses travaux sur les délibérations de jurés à l'Ecole de Droit de Chicago. Dans ce concept, « ethno » désigne le savoir quotidien de la société à la disposition de tout membre, tandis que « méthodologie » renvoie à la mise en oeuvre de savoir-faire et des procédures profanes par ces membres (Durand et Weil, 1997 : 253). En effet pour Garfinkel, cette démarche vise :

« La réalité objective des faits sociaux, en tant que toute société est produite localement, est naturellement organisée, est réflexivement descriptible, est un accomplissement continu et pratique, en tant que cette réalité objective est partout, toujours, seulement, exactement et entièrement le travail des membres, elle est le phénomène fondamental de la sociologie » (cité par Coulon, 1987 : 124).

Cette définition permet ainsi de mettre en exergue les postulats de cette grille d'analyse que sont : la pratique quotidienne, l'indexicicabilité, la réflexivité, la descriptibilté (accountability), la localisation et la notion de membre.

En tant que telle, elle complétera avantageusement l'interaction politique dans la mesure où son postulat de base est qu'il faut prendre au sérieux le point de vue des acteurs. Puisqu'en effet selon Coulon « c'est à travers le sens qu'ils donnent aux objets, aux gens qui les entourent, que les acteurs fabriquent le monde social » (1987 : 11). Mieux, il s'agira pour nous d'utiliser le savoir véhiculé par les acteurs eux-mêmes, car « l'acteur social n'est pas un idiot culturel ». Ainsi, accorderons-nous une attention particulière aux sens que les élites urbaines aussi bien que les élites du « terroir » et les populations rurales donnent à leur participation au jeu politique local à Bayangam.

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