B/ Les implantations humaines
Il s'agit de voir, d'analyser la structure spatiale de
l'agglomération dans ses diverses composantes, notamment l'immobilier,
les voies de communication, les systèmes d'évacuation des
déchets, l'approvisionnement en eau etc.
1. Circulation et habitat
Le village centre de Mboro s'est développé sur
les massifs dunaires qui surplombent d'importantes niayes. Le noyau
urbanisé s'étire sur environ 2,5 km le long de la route
principale qui cristallise les services administratifs ( maison communautaire,
gendarmerie, direction des eaux et forêts, bureau de poste, poste de
santé), le commerce (pharmacies, marchés, stations d'essence,
boulangeries...). Ainsi Mboro est lié à l'extérieur par un
réseau téléphonique automatisé qui compte 223
abonnés (SONATEL, 2000), l'électrification est assurée
à 80% ; en fait il jouit des mêmes privilèges que les
centres urbains mais cela grâce à l'implantation industrielle
surtout.
Il mérite de ce point de vue l'appellation de «
Mboro-ville » en raison de l'importance de sa population ( plus du 1/3 de
celle de la CR), du volume et de la diversité de ses activités
ainsi qu'à son niveau d'infrastructures et d'équipements.
1.1 La circulation
Il s'agit de la circulation des biens et des personnes.
De l'extérieur, Mboro est très accessible par
la Départementale 702 [ Tivaouane - Mboro ] qui fait 22 km et la
Régionale 70 [ Dakar - Mboro ] longue de 86 km. Ces axes routiers jouent
un rôle très important dans les courants d'échange et de
commerce qui font de Mboro un centre commercial assez développé
exerçant une attraction considérable sur l'extérieur.
Actuellement , le croît démographique
entraîne une densification et une extension continue de
l'agglomération vers Mboro/mer et vers Tivaouane. Donc le rayon
s'accroît et avec lui les problèmes de circulation ; cela rend
difficile les interactions entre les habitants. En fait, à part la voie
privée qui mène aux cités des cadres des ICS et le
prolongement de la Départementale 702 vers Mboro/mer, il n'existe aucune
route perpendiculaire à l'artère principale permettant de
desservir les quartiers de l'intérieur. Les véhicules et les
charrettes y accèdent difficilement, se pose alors la question de
l'enclavement.
1.2 L'habitat
A Mboro, les contraintes liées au cadre juridique de
la CR, à l'ancienneté et au site font qu'on distingue du point de
vue de l'habitat un plan irrégulier et un autre régulier, des
constructions de plus en plus modernes à côté d'une
architecture vernaculaire caractéristique des sociétés
rurales. A travers le bâti, nous pouvons lire l'histoire de la prise de
possession du sol.
L'aspect irrégulier de la trame foncière est
observé au centre de la ville qui correspond au fond rural ancien. Ici
l'occupation du sol est spontanée, les rues sont mal définies,
elles sont souvent des impasses donnant sur de grandes concessions. Les
quartiers y apparaissent alors comme un conglomérat de constructions
réparties apparemment au hasard. Il s'agit des quartiers
dénommés « Marché, Khar Yalla, Ngaye-Ngaye, Keur
Habour ».
Avec l'installation de la CSPT en 1960, les plans deviennent
réguliers.
En effet pour loger le personnel généralement
venu d'ailleurs, la compagnie a été obligée d'entreprendre
des opérations de terrassement, de lotissement et de construction de
cités ouvrières. Donc il fallait organiser l'espace,
réglementer les constructions en vue de l'installation des
réseaux techniques de base (voirie, adduction d'eau potable,
électrification, communication et assainissement).
Ces nouveaux quartiers tranchent nettement des anciens par
des rues larges et rectilignes, des aires de jeux et des limites bien
définies. Ils concernent les quartiers « Lassere, Mission,
Diamagène, Escale, Médina Gounass, Keur Pathé Kane, Mbaye
Mbaye, HLM ».
2. L'approvisionnement en eau de boisson ( Tableau 2)
Tableau 2 : Approvisionnement en eau potable des
ménages.
Eaux de puits
|
75%
|
Eaux de robinet
|
25%
|
|
Source : Enquêtes JPY Fall, Août 2000.
L'eau est nécessaire à la vie et
l'approvisionnement des consommateurs doit être assuré avec une
eau de boisson de la meilleure qualité possible. Mboro ne manque pas
d'équipements hydrauliques. On y compte trois (3) forages et
d'innombrables puits. Mais par manque d'entretien, les forages tombent souvent
en panne et finissent par ne plus fonctionner (cas de celui foré par la
coopération japonnaise à « Escale » et ceux construits
par les ICS à « Habour et Ngaye Ngaye ») ; les populations se
rabattent alors sur les puits généralement à ciel
ouvert.
2.1 L'eau de robinet
Elle provient essentiellement du réseau de
distribution des ICS qui profite à une faible partie de la population,
environ 25% des ménages, ( les cités HLM, Mbaye Mbaye et quelques
habitations proches des bornes fontaines ). Elle est gratuitement mise à
la disposition des populations, mais les contraintes liées à
l'enclavement de certains quartiers font que des ménages qui en ont les
moyens l'achètent aux charretiers à 600 francs le fût de
cent (100) litres. Cette eau, pompée à plus de 400 m dans les
grès du maestrichtien, est sensée être salubre (Figure
5).
2.2 L'eau de puits
Elle est la plus accessible, mais aussi la plus douteuse. Cette
eau probablement polluée est directement consommée sans
être au préalable javellisée ou filtrée.
Ménages
40%
60%
20%
80%
70%
50%
30%
10%
0%
Eau de puits Eau de robinet
Sources
Figure 5: Sources d'approvisionnement en eau
de boisson
Les puits on en trouve partout, dans les maisons, les rues,
les niayes, les écoles ... Ils sont accessibles à tous,
même aux petits enfants. Ainsi les difficultés d'accès
à l'eau potable des robinets obligent 75% des ménages à
consommer de l'eau probablement insalubre .
3. Le système d'évacuation des
déchets
Les déchets sont quelque chose que le propriétaire
ne souhaite plus voir en un temps et en un lieu déterminés et qui
n'a pas de valeur vénale actuelle ou apparente. (OMS, 1984).
Actuellement avec la mise en application de la politique de
régionalisation, les élus locaux sont étroitement
impliqués dans la gestion de l'environnement et la prévention des
risques naturels. En effet, la forte croissance démographique et les
activités économiques génèrent
nécessairement des déchets pouvant détériorer
l'environnement et menacer la santé.
A Mboro, il se pose un réel problème de gestion
des déchets ; il n'existe pas de moyens appropriés qui permettent
leur évacuation en conditions de sécurité. Qu'ils soient
industriels ou domestiques, ils sont tout simplement déversés
dans la nature.
3.1 Les déchets industriels
Ils proviennent de la fusion du phosphate pour la production
de phosphore et du traitement de celui-ci à l'acide sulfurique en vue
d'obtenir de l'acide phosphorique. Ce processus produit un fort tonnage de
déchets dangereux.
D'après le bureau régional de l'O.M.S. pour
l'Europe, le Phosphore est fabriqué par la fusion du minerai de
phosphate, de silicate et de coke mélangés dans un four
électrique. Chaque fois que l'on produit une tonne de phosphore, on
obtient jusqu'à 13 tonnes de sous produits : 7,1 à 8,9 tonnes de
scories de silicate de calcium, 0,09 à 0,38 tonne de ferrophosphore,
0,01 tonne à 0,25 tonne de boues de phosphore, 0,06 tonne de
poussières des précipitations et 2,8 à 3,4 tonnes de gaz
de condensation. Le plus grave problème pour l'environnement est
posé par l'eau phosphorée produite par la condensation des gaz
produits par le four. Cette solution contient en dissolution et en suspension
du phosphore élémentaire, des hydroxy-acides de phosphore, de
l'acide hexafluosilicique, de l'amoniac et de la silice.
Le principal dérivé du phosphore est l'acide
phosphorique obtenu par traitement à l'acide sulfurique.
Dans la production d'acide phosphorique, toujours
d'après ce bureau de l'O.M.S., environ 5,5 tonnes de sulfate de calcium
brut (phosphogypse) sont produites pour chaque tonne de pentoxyde de phosphore
et jusqu'à 1,5% de fluorure d'hydrogène.
C'est justement ce phosphogypse, pouvant contenir des niveaux
de radioactivité, qui est déversé sur la plage de Mboro
où il se dépose et se solidifie. Ces rejets contiennent
suffisamment de propriétés toxiques qui peuvent durablement
affecter l'environnement.
3.2 Les déchets domestiques
Ils concernent les ordures ménagères, les eaux
usées, les matières fécales. L'absence de système
d'assainissement fait que les populations s'en débarrassent mal en les
enfouissant dans le sol ou en les déposant dessus. A Mboro les
populations vivent avec les ordures ; 87% des ménages disent avoir
recours aux dépotoirs, 10% enfouissent leurs déchets et seulement
3% procèdent à leur incinération (Tableau 3 et Figure
6).
Tableau 3 : Formes d'évacuations des
déchets domestiques par les ménages.
Ordures
|
Pourcentage des ménages
|
Dépotoirs
|
87%
|
Enfouissement
|
10%
|
Incinération
|
3%
|
Déchets de WC
|
|
Fosses étanches
|
10%
|
Latrines
|
70%
|
Sur le sol
|
20%
|
|
Source : Enquêtes JPY Fall Août 2000.
Et pourtant la CR, depuis la loi n° 96-07 du 22 mars
1996 est compétente pour la gestion des déchets et la mise en
oeuvre de politique d'actions environnementales. Dans ce milieu, les
contraintes liées au site (topographie de dunes et de
dépressions), au manque d'accès à l'intérieur,
à la non maîtrise des cycles naturels du milieu par les
populations, à l'absence d'initiatives des élus locaux expliquent
la situation environnementale.
M énages
|
90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0%
|
|
|
Dépotoirs Enfouissement Incinération
Elimination des ordures
Figure 6: Systèmes
d'élimination des ordures
L'accroissement de la population entraîne celui de la
consommation et de la production de déchets. Certains responsables de
quartiers, à « Lassere » et à « Ngaye Ngaye »
notamment, ont réussi à mettre sur pied un système de
collecte des ordures moyennant la modique somme de 50 francs par maison trois
fois par semaine. Outre la création d'emplois, ce système
contribue largement à la propreté des quartiers concernés,
mais les charretiers n'ayant pas une décharge aménagée
à cet effet, déversent leur chargement à la limite des
habitations c'est à dire au bord des niayes.
Si dans ces quartiers la question de l'enclavement ,quant
à l'évacuation des ordures, ne se pose pas, ailleurs, elle
demeure une réelle problématique et font office de
dépotoirs des espaces vides, des maisons inhabitées, et
même des puits de quartiers abandonnés. Pour certains
l'alternative consiste à les enfouir, cela peut être dangereux
surtout si les eaux de la nappe sont à une faible profondeur.
Les eaux usées (cuisine et linge) qui renferment
d'importants constituants organiques sont déversées sur le sol,
par contre les matières fécales sont évacuées par
70% des ménages dans des latrines où elles se liquéfient
et s'infiltrent dans le sol. Ces fosses sont dans la plupart
des maisons accouplées à des trous perdus pour
empêcher les eaux de bain, beaucoup plus importantes de se
mélanger aux fécès.
Dans la réalisation de ces ouvrages à fond
libre, on ne tient pas compte du niveau de la nappe, donc aucune norme de
sécurisation des eaux souterraines n'est appliquée. D'ailleurs
les populations trouvent ce système très économique
puisque les services des camions d'assainissement coûtent chers et en
plus ils viennent rarement à Mboro parce que peu
sollicités et confrontés surtout à des
problèmes d'accès au quartiers. C'est seulement 10% des
ménages qui font usage de fosses étanches; ces types d'ouvrages
on en trouve seulement dans les
HLM et cités Mbaye Mbaye qui ont été
construites suivant un plan d'aménagement urbain. Tandis que 20%
rejettent les matières fécales sur le sol (Figure 7).
M énages
40%
70%
60%
50%
30%
20%
10%
0%
Latrines Fosses étanches Sur le sol
Elimination des matières
fécales
Figure 7: Système
d'évacuation des matières fécales.
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