4.1 Le modèle d'apprentissage pour la moto.
Pour travailler avec mes élèves, il me semble
que l'apprentissage combiné est le plus efficace, très
utilisé en matière d'enseignement de savoir-faire professionnel,
il combine les modalités précédentes. Mes
élèves sont mis en situation, en commençant par les
objectifs les plus simples. Je leur montre les bons gestes, les gestes habiles,
en leur expliquant les principes d'action ou de non-action liée à
la moto et à l'environnement. Je leur laisse le temps ensuite de se
perfectionner par une répétition de moins en moins
supervisée.
Selon GIORDAN (1998) : « Le conflit cognitif permet
à l'élève d'apprendre. » «
L'apprentissage passe par l'action. »
Attention toutefois à l'apprentissage par essais et
erreurs, il ne convient pas pour la moto, c'est dangereux, car le moniteur ne
peut rattraper l'erreur de son élève, comme on peut le faire
très facilement en voiture. Comme je l'ai souligné dans ma
problématique pratique, il est indispensable de faire rappeler
constamment à l'élève Motard des consignes de
sécurité afin d'éviter la chute, exemple de
rétroaction (feed-back) : surtout lâche le frein si jamais la moto
dérape, « répète ». Le fait d'apprendre à
réaliser ses consignes de sécurité, je fais
intégrer mon élève dans les concepts liés à
l'apprentissage que j'ai cité.
4.2 La peur dans l'apprentissage moto.
Au même titre que la joie de réussir un exercice
ou la colère d'avoir à répétition
échoué les exercices, la peur de mes élèves fait
partie des émotions
fondamentales liées à l'apprentissage, d'une
part, en touchant à leur sphère affective intellectuelle et
d'autre part à la biologie, le tout retentissant fortement sur les actes
du sujet motorisé.
À force de travail acharné, d'exercices
répétitifs simples, de désir de vaincre, La confiance en
soi qui s'installe, je remarque que mes élèves progressent enfin.
« La peur réinvente en permanence ses
défis21 ». Quand je décide de monter le
niveau d'apprentissage de mes élèves, je sens que leur confiance
en eux descend au plus bas. « Ainsi commence l'apprentissage de la
peur ». Si un motard ressemble d'apparence à un chevalier
d'antan, celui-ci pour renforcer sa sécurité, il doit
connaître la peur. « Le seigneur de Bayard, gentilhomme
français, s'est fait une réputation de ne pas connaître la
peur22 ».
Mes apprenants doivent connaître la peur, je pense que
c'est indispensable pour plus tard quand ils seront sur les routes. Quand le
motard a appris à avoir peur, il se méfie de tout, de
l'environnement, de sa machine, des autres qui arrivent en face de lui, ou
quand il dépasse. « L'expérience de la peur est
universelle ». « Le jeune individu abandonne l'illusion de toute
puissance ». Du niveau psychologique et dans certaines situations,
comme par exemple : tourner, virer sur la piste ou sur la route, mes
élèves et/ou « l'homme est confronté à des
stimuli, des objets ou des représentations mentales qu'il
éprouve comme des menaces. Or, c'est justement cette reconnaissance d'un
danger (réel ou imaginaire) qui détermine chez lui un sentiment
de peur23 ». Cela représente tout à fait mes
élèves en situation réels de pilotage, ou en situation
statique imaginaire d'attente de procédure d'exercice. J'ai
remarqué que cette perturbation de l'activité s'accompagne
d'ordinaire, chez les apprenants, d'un rétrécissement important
du champ de leurs facultés intellectuelles et de leurs attentions, au
réel de leur exercice plus ou moins difficiles, voire dangereux.
21Pierre Mannoni, 13 mille, la peur, page 5
22 Pierre Mannoni, 13 mille, la peur.
23 Pierre Mannoni, 13 mille, la peur.
De même que le demi-tour serré en moto à
l'allure normale, provoque une montée de peur de chuter. La prise
d'angle à l'allure normale, provoque une peur de glisser et de tomber.
Par contre, dans le freinage d'urgence en 3e, l'élève
n'a pas le temps de provoquer intrinsèquement quoique ce soit. Il tombe,
avec son esprit et sa moto, frein avant serré à fond, roue avant
bloqué. Si le formateur n'a pas répété les
consignes de sécurité de lâcher le frein avant d'abord,
s'il y a problème, il verra avec stupeur son apprenant mordre le bitume
et sa machine en prend un coup malgré les protections. Cette situation
ne m'arrive plus depuis des années. Il y a 10 ans je me posais la
question suivante :
Comment faire pour que mon élève ne fasse plus de
bêtise ?
J'ai su apprendre à gérer seul cette
problématique, à force d'enseigner, car j'ai remarqué que
« plus j'enseigne plus j'apprends ». Mon professeur, M. Dominique
Violet, m'a bien confirmé cette hypothèse lors de mes cours par
alternance intitulés « fonction formation, les paradoxes ».
En outre, j'ai remarqué que beaucoup de moniteurs ne
donnent aucune consigne de sécurité à ce sujet. Ils se
contentent souvent de dire au dernier moment aux élèves, «
tu tends bien tes bras, regarde loin, freine, freine !!! ». C'est
trop tard, la moto et le Motard sont tombés. Et ça fait mal,
après la chute, l'élève a peur de continuer. Il a
tellement la trouille de retomber, qu'il sombre dans le chaos de la
progression. Cela peut durer un certain temps.
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