3.2.3 - Entretiens semi-dirigés et
conversations informelles.
Une précision d'importance doit être
mentionnée ici sur les questions d'usages autour de l'état civil
des personnes interrogées. En effet, m'inscrivant dans une approche
résolument interactionniste, j'ai défini la vieillesse
précédemment comme un processus et non comme un état, ce
qui m'interdit d'approcher celle-ci de manière figée ; par
ailleurs, l'objet de la recherche s'intéresse aux retraités, ce
qui fait référence à une étape de la vie, bien plus
qu'à un âge. Dans cette perspective, j'ai décidé de
ne pas demander l'âge des personnes avec qui je me suis entretenue, le
choix de la retraite en tant que critère définissant
l'échantillon étant le seul à retenir. J'ai de plus
discuté de ce point avec les principaux intéressés, qui
ont tous manifesté leur approbation, satisfaits de voir que retraite et
vieillesse étaient dissociées.
La grille d'entretien qui a été
élaborée a pris en compte mes observations sur le terrain, au
contact régulier des bénévoles retraités, contact
inscrit dans la durée. C'est au fil des entretiens que la prise de
conscience de l'intérêt d'une attention flottante m'est apparue.
Cette attitude particulière d'écoute attentive, écoute
sensible n'est venue qu'avec l'entraînement et la familiarisation avec ce
type particulier d'échanges propres à libérer la
parole.
Ainsi qu'énoncé ci-dessus, pour des questions de
faisabilité, j'ai procédé à des entretiens de
personnes étrangères à cette association. Ma propre
participation en tant que bénévole sur le terrain, mon
implication, des difficultés relationnelles avec certains membres, et la
charge de travail des uns et des autres a compliqué quelque peu le
déroulement formel des entretiens. Comme je l'ai expliqué,
ceux-ci ont eu lieu préférentiellement au domicile des
intéressés. S'agissant des conversations informelles - riches
d'enseignements - elles se sont déroulées dans le décours
de l'action, pendant les pauses, les repas partagés, les moments
volés ici et là et surtout lorsque l'instant s'y prêtait.
Il m'est apparu que cette façon de procéder permettait d'obtenir
un matériau fécond en termes de réponses inattendues et
moins conformistes de la part des interviewés. Et pour moi-même,
l'absence du canevas à suivre a permis que je me concentre davantage sur
l'échange, sans cette impérieuse nécessité de
formuler chacun des thèmes. Ceci a constitué par ailleurs, un bon
entraînement pour mener ensuite les entretiens semi-directifs. Je
connaissais et maitrisais davantage les différentes questions à
aborder dans un style plus conversationnel.
a) Les conversations informelles :
Il est rapidement apparu que l'appareil d'enregistrement
était de nature à contraindre la parole. Pour certaines
personnes et essentiellement dans le cadre précis de l'Association JA,
la présence du MP3, aussi discret soit-il, a provoqué une
rétention verbale manifeste. Les raisons majeures
présumées sont à attribuer à la crainte de certains
bénévoles à l'idée d'être
évalués bien que j'eus expliqué auparavant les enjeux de
l'entretien et l'utilisation qui allait en être faite (anonymat, ...). Ce
constat était par ailleurs absent au cours des conversations
informelles.
Si l'utilisation d'un magnétophone (ici MP3) est
incontournable à des fins d'analyse du matériau ainsi recueilli,
j'ai jugé bon d'y adjoindre les bribes relevées ici et là
au hasard des échanges qui ont eu lieu dans des moments plus propices
à la parole, lors des repas pris en commun, dans les périodes
actives où nous débattions autour d'une problématique
particulière en lien avec l'action en cours. Ces fragments de
discussions prélevés « sur le vif » ont
ensuite été annotés dans le journal de terrain, en
général et lorsque cela avait été possible, le soir
même du jour où ces échanges avaient eu lieu. Toutefois,
l'enregistrement des entretiens a constitué l'essentiel du
matériel de recherche, et les échanges informels ont surtout
servi à définir les thèmes développés dans
la grille d'entretien.
|