DEUXIEME PARTIE : LE RECOURS AUX GARANTIES
SPECIFIQUES
En raison des difficultés qu'elles et leurs membres
éprouvent à mettre en oeuvre les sûretés classiques,
les COOPEC développent sans cesse d'autres garanties plus
spécifiques. Les techniques sont nombreuses et variées, et
prouvent, s'il fallait y revenir, que les sûretés
représentent une portion, non moins essentielle, mais
limitative des garanties. Les techniques retenues sont fonction de la situation
ou de la localisation de la COOPEC et du statut du membre. Certaines sont
également tributaires de l'étendue du réseau CamCCUL. Deux
principales techniques sont ainsi retenues : la première consiste en la
mutualisation des risques et a permis le développement d'un programme
d'assurance (chapitre 1); la seconde tient à la mise à
contribution des mécanismes et moyens de paiement (chapitre 2).
CHAPITRE 1: LE DEVELOPPEMENT D'UN PROGRAMME
D'ASSURANCE
Communément appelé programme de gestion des
risques (« risks management scheme »), le programme d'assurance du
réseau CamCCUL, existe depuis 1976. Il apparaît à cet
égard comme un mécanisme très ancien et donc suffisamment
éprouvé. Son maintien pendant plusieurs décennies
suggèrent q'il s'agit d'un succès.
payés à celles-ci au titre de l'indemnité
de gestion de risque sur les crédits pour l'exercice financier
écoulé.
Le programme a été pendant longtemps l'unique
tâche du service de gestion des risques jusqu'au lancement en 2007 d'un
Fonds Mutuel de Protection des Dépôts, un autre produit
d'assurance distinct du programme de gestion des risques. Ceci traduit un
volume d'activités considérable et que le développement du
nouveau produit se traduira inéluctablement par un renforcement de
l'effectif du service. Par ailleurs, la situation de ce service au sein de la
Direction des Opérations du Réseau suggère que le
programme de gestion des risques n'a pas été
spécifiquement conçu pour les besoins de garantie des
crédits. Même si cela était le cas, le service de gestion
des risques mériterait d'être recentré et logé
à la Direction Financière à côté des services
du crédit et de transfert d'argent. Ceci est d'autant plus
nécessaire que la gestion des risques dont il s'agit n'est pas seulement
un mécanisme de garantie des créances des COOPEC qui y ont
souscrit, mais constitue également un produit de la ligue dont la
rentabilité constitue une véritable enjeu.
L'esquive du terme assurance ou microassurance dans toute la
documentation relative au programme de gestion des risques peut surprendre.
Dans le même ordre d'idées, on peut se demander si une telle
assurance est soumise aux dispositions du code CIMA et si CamCCUL pourrait
être considérée dans quelque mesure que ce soit comme une
société d'assurance. La première préoccupation
trouve une réponse simple : l'explication tient à la nature
très spécifique de ce programme. N'étant pas
intrinsèquement une (micro)assurance comme les autres, CamCCUL a
évité de la nommer telle.
La seconde préoccupation mérite un double
niveau de considérations. D'abord il ne faudrait pas penser que CamCCUL
soit assujetti aux obligations du code CIMA en qualité de
société d'assurance parce que l'activité d'assurance
pratiquée ici ne l'est pas à titre de profession habituelle. Elle
n'est non plus pratiquée de façon indépendante.
L'agrément prévu à l'article 20 A du Traité
instituant la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurance
(CIMA) ne s'applique donc pas ici. Il convient de considérer dans un
second mouvement le code des assurances de cette organisation. Ce code fait
expressément référence aux « sociétés
d'assurance »99. Ensuite il exclut pour l'essentiel
l'assurance
99 Voir pour exemple l'article 3 al 3.
crédit100. Sous ces considérations, on
pourrait penser que le code des assurances CIMA ne servirait qu'à
éclairer la relation contractuelle et inspirer les solutions les plus
appropriées.
La présentation du mécanisme de gestion des
risques dans le réseau CamCCUL (section 2) sera
précédée de l'étude des particularités de ce
programme d'assurance (section 1).
Section 1 : Un programme d'assurance atypique
L'assurance est une opération par laquelle une partie
se fait remettre, moyennant une rémunération, pour lui ou pour un
tiers, une prestation en cas de réalisation d'un risque. Le risque est
ainsi déplacé du créancier vers un tiers. Ce dernier
accepte une telle convention pour deux raisons principales. D'abord, sa
prestation est fournie à titre onéreux. Ensuite, il s'agit bien
souvent d'un professionnel ayant pour profession habituelle l'activité
d'assurance. A ce titre, il offre ses services à plusieurs personnes et
tire profit de l'aléa de tous les risques qu'il couvre. En clair, ce ne
sont pas tous ceux qu'il assure qui seront sinistrés et pas au
même moment. Le risque est donc « mutualisé » ou «
socialisé » en tant qu'il est finalement reparti entre plusieurs
personnes, ce qui fait dire que « si la société
entière n'est pas vigilante, la prestation de l'assureur peut
entraîner sa ruine »101.
Le programme de gestion des risques du réseau CamCCUL
opère une socialisation que l'on pourrait qualifier de socialisation au
sommet. Celle-ci ne s'opère qu'entre les COOPEC affiliées et pas
directement entre les membres de ces dernières. Les risques couverts
sont multiples et trouvent une place minime dans les discours traditionnels
relatifs aux assurances, notamment celles pratiquées par les
établissements de microfinance. A tout prendre, le programme de gestion
des risques présente plusieurs particularités, les unes
liées à sa nature (§ 1), les autres liées aux parties
en cause (§ 1).
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