4.2 Interprétation
des résultats du modèle
4.2.1 Validité du
modèle
Des variables explicatives initiales, sept s'avèrent
significatives à un seuil de 5 %, à savoir : le niveau
d'instruction du chef de ménage, la zone de résidence, le niveau
d'instruction de la mère, les classes d'âge, la région de
résidence et la scolarisation (l'enfant a-t-il déjà
été à l'école ou pas) et l'indice de peuplement du
ménage (taille ménage). Seules les variables sexe et ethnie du
chef de ménage ne sont pas significatives.
De plus, ces différentes variables sont très
faiblement corrélées entre elles. Il s'agit donc de dimensions
distinctes non liées. Donc on a de bonnes raisons de croire que
l'influence d'une des dimensions sur la probabilité qu'un enfant soit
pauvre ne dépend aucunement de l'influence des autres.
De l'étape une à l'étape sept, le khi
deux croit et la valeur de la -2log-vraissemblance diminue successivement
(tableau en annexe). Alors, le modèle est amélioré par
l'introduction progressive des variables.
Tableau 11 :
Récapitulatif du modèle logistique
|
Récapitulatif du modèle
|
Etape
|
-2log-vraisemblance
|
R-deux de Cox & Snell
|
R-deux de Nagelkerke
|
1
|
14139,6
|
0,31
|
0,42
|
2
|
11309,2
|
0,43
|
0,59
|
3
|
10641,4
|
0,46
|
0,62
|
4
|
10229,3
|
0,47
|
0,64
|
5
|
10157,5
|
0,47
|
0,64
|
6
|
10098,4
|
0,48
|
0,65
|
7
|
10093,6
|
0,48
|
0,65
|
Source : MICS-III, (2006)
Le R-deux de Cox et Snell du modèle final se situe
à 0,48 et indique que seulement 48 % de la variation dans la
probabilité pour un enfant d'être pauvre pourrait être
expliquée par l'ensemble des variables significatives. Or le R-deux de
Nagelkerke qui est une version ajustée du R-deux de Cox et Snell et donc
plus proche de la réalité se situe à 0,65. Dès
lors, on peut dire que les variables explicatives contribuent à
expliquer 65 % de la variation dans la probabilité pour un enfant
d'être pauvre.
Le modèle final conserve un pouvoir prédictif
de l'ordre de 85,7 %. D'après ce modèle l'état de
pauvreté d'un enfant serait prédit avec succès 90,4 % des
fois contre 78.1 % des fois pour l'état de non pauvreté.
4.2.2 Interprétation
des résultats du modèle
Ce modèle confirme de par les résultats
observables sur le tableau 18 en annexe, les présomptions que nous avons
eu au chapitre trois en analysant l'incidence de pauvreté suivant ces
mêmes variables retenues pour le modèle.
Le niveau d'instruction du chef de ménage et celui de
la mère de l'enfant sont deux éléments qui influencent
significativement la situation des enfants. Le risque qu'un enfant a de tomber
dans la pauvreté diminue lorsque le niveau d'instruction de ses parents
est élevé. Autrement dit, plus le chef de ménage est
instruit, mieux l'enfant se porte et s'épanouit. Les enfants vivant dans
des ménages dont le chef est d'un niveau d'instruction supérieur
ou égal au niveau secondaire sont les plus nombreux à avoir
accès à l'eau de robinet dans leur domicile. Sur dix enfants
ayant de l'eau de robinet à domicile, un peu plus de sept ont un
père d'un niveau supérieur au niveau primaire. Le niveau
d'instruction élevé du chef de ménage et celui de la
mère de l'enfant semblent garantir aux enfants des conditions
meilleures. Les enfants issus de ces ménages sont les plus nombreux
à jouir des toilettes modernes à chasse. Parmi les enfants dont
le ménage ne dispose pas de toilette, 60 % ont un père sans
niveau. Alors, l'illettrisme accentue le risque de pauvreté infantile.
Avec une plus forte incidence lorsque la mère est illettrée.
Il existe un risque plus élevé pour les enfants
de la tranche d'âge 15 - 17 ans à être pauvre. Dans cette
tranche d'âge, l'enfant est dit adolescent. C'est une période
transitoire entre l'enfance et l'âge adulte. Cette période est
généralement vécue très difficilement surtout chez
les filles. L'âge médian au premier rapport sexuel est de 16 ans
chez les filles et 7 % des enfants de cette catégorie sont ou
mariés ou en union libre. En outre, ils sont près de 25 %
à ne pas vivre avec leurs parents, ils vivent soit seul, soit avec un
conjoint ou encore avec frères et soeurs. Ils sont de ce fait
vulnérables. Ceux d'entre eux qui sont sortis du système
éducatif sont soit inactifs soit exercent un commerce ou un petit
métier dans le secteur informel
Le milieu de résidence est un déterminant
important des conditions de vie des enfants. Le risque de pauvreté
augmente sensiblement lorsqu'on passe du milieu urbain au milieu rural. Les
enfants en milieu rural sont victimes de privations de toute sorte. Les maisons
sont pour la plupart en matériaux précaires, huit maisons sur dix
en milieu rural ont un sol en terre battue, les murs sont
généralement en terre battue et en brique de terre. Seulement 1 %
des ménages en milieu rural profitent de toilettes modernes. En milieu
rural, le système d'adduction d'eau potable est inexistant et le
réseau électrique n'intègre pas les campagnes. Les
commodités telles que : le téléviseur, le poste radio
et le téléphone continuent d'être considérées
comme des biens de luxe en milieu rural.
En retenant la ville de Douala comme zone de
référence dans notre modèle, on constate tout comme au
chapitre trois que, alors que le passage de Douala à Yaoundé
diminue le risque qu'aurait un enfant d'être pauvre, le passage de Douala
aux autres zones accroît ce risque. Avec un risque relatif plus
élevé pour les provinces de l'Extrême-Nord et du Nord-Ouest
et un risque relatif moindre pour les provinces de l'Est et du Sud-Ouest.
On observe une tendance plus élevée à
être pauvre chez les enfants n'ayant jamais été à
l'école. En d'autres termes, les enfants n'ayant jamais
été à l'école sont plus exposés à la
pauvreté que ceux qui ont été à l'école au
moins une fois dans leur vie. Cette constatation, paraît plausible car un
enfant vivant dans un ménage pauvre est exposé à la
pauvreté. En effet, parmi les enfants n'ayant jamais été
à l'école, 60 % vivent dans un ménage dont le chef n'a
jamais été à l'école et 80 % vivent en milieu
rural. On peut alors penser que la pauvreté du chef de ménage est
un frein à la scolarisation des enfants. Les parents non
scolarisés semblent ignorer l'avantage qu'il y a à envoyer leurs
enfants à l'école et préfère les maintenir à
la maison où ils servent de main d'oeuvre pour les travaux domestiques.
Ceci pose le problème de coût d'opportunité ; les
parents doivent par exemple choisir entre envoyer l'enfant à
l'école et lui confier la surveillance des animaux. Les filles sont
aussi les plus nombreuses à n'être jamais allé à
l'école. Elles sont souvent délaissées au profit des
garçons lorsque le parent fait face à un manque de moyen
financier. Chez les enfants dits très pauvres, 54,6 % des garçons
n'ont jamais été à l'école contre 68,5 % de filles.
Et chez les enfants dits riches, tous les garçons sont scolarisés
contre 0,3 % de non scolarisés chez les filles.
Le milieu de résidence, le niveau d'instruction du chef
de ménage, le niveau d'instruction de la mère de l'enfant et la
taille du ménage influent sur le risque de pauvreté infantile. En
effet, le risque pour un enfant résident en milieu rural d'être en
situation de pauvreté est 8,79 fois plus élevé que si cet
enfant vivait en milieu urbain. Lorsque le chef de ménage est d'un
niveau d'instruction égal au niveau secondaire et plus, le risque que
cet enfant soit pauvre est cinq fois inférieur au risque qu'a un enfant
qui vit dans un ménage dont le chef est sans niveau.
Une fois les déterminants de la pauvreté
infantile identifiés, l'on peut définir les stratégies de
lutte contre la pauvreté. En agissant efficacement sur les
déterminants de la pauvreté infantile, il est possible de
réduire le degré de pauvreté chez les enfants. Pour ce
faire, il est souhaitable de définir les stratégies les plus
adéquates.
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