Mesure et analyse de la pauvreté non monétaire chez les enfants:le cas du Cameroun( Télécharger le fichier original )par Simplice Kitleur LEKEUMO Institut Sous-régional de Statistique et d'Economie Appliquée - Ingénieur d'Application de la Statistique 2007 |
1.3.2 Contexte sociodémographiqueLa structure de la population du Cameroun est similaire à celle de la plupart des pays en développement. Elle se caractérise par une relative jeunesse de la population. Plus d'un Camerounais sur deux (54%) est âgé de moins de 20 ans et 63 % des Camerounais sont âgés de moins de 25 ans. Pour ce qui est de la distribution spatiale, la population du Cameroun est inégalement répartie sur le territoire, d'où la grande variabilité de la densité qui croît sensiblement des zones de forêt (plus faibles densités) aux montagnes de l'Extrême-Nord (plus fortes densités). Ce déséquilibre est plus marqué entre les zones urbaines et les zones rurales. Plus d'un Camerounais sur deux vit dans une ville. Il en découle une accélération du phénomène d'habitat spontané et précaire, on assiste à une prolifération des bidonvilles dans les principales métropoles que sont Yaoundé et Douala. Les populations occupent des zones marécageuses sujettes à des inondations, des zones aux reliefs instables et constamment soumises aux éboulements de terrain. De nombreuses villes ne disposent ni d'équipements, ni d'infrastructures en quantité et en qualité suffisantes pour faire face aux flux de nouveaux citadins - exode rural - en quête de meilleures conditions de vie. Les données de l'EDSC-III (2004) montrent que la fécondité des femmes au Cameroun demeure élevée. Avec les niveaux actuels, chaque femme donnerait naissance en moyenne à cinq enfants à la fin de sa vie féconde. Des différences très nettes de fécondité apparaissent entre milieux de résidence : une femme de Yaoundé/Douala a un niveau de fécondité nettement plus faible (trois enfants par femme) que celui qui prévaut dans les Autres Villes (cinq enfants par femme) et en zone rurale (six enfants par femme). Le Cameroun est caractérisé par des statistiques médicales et éducatives meilleures que celles d'un grand nombre de pays d'Afrique subsaharienne BAD/OCDE (2003). La mortalité infantile est de 79.3 pour mille et l'espérance de vie atteint 50 ans. De manière générale, le Taux Brut de Scolarisation (TBS)6(*) est resté stable dans le préscolaire et le secondaire. En revanche, il a régressé dans le primaire et a connu une réelle progression dans le supérieur. Avec une couverture territoriale limitée, l'enseignement maternel apparaît comme essentiellement urbain et restreint aux populations qui peuvent s'acquitter des frais de scolarité pour chaque enfant. Cet ordre d'enseignement n'est pas concerné par le décret du chef de l'Etat instituant la gratuité de l'enseignement primaire au Cameroun Dans le primaire, après une baisse du TBS entre 1990 et 1995, liée notamment à la conjoncture économique défavorable, on assiste à une lente remontée de la couverture. Le TBS est aujourd'hui supérieur à 100 %, ce qui ne signifie pas que tous les enfants d'âge scolaire seraient effectivement scolarisés à ce niveau d'études. Dans l'enseignement secondaire général, après une stagnation du taux brut de scolarisation, autour de 25 % dans le premier cycle et de 18 % dans le second, on observe une augmentation substantielle à partir de l'année 2000, essentiellement dans le premier cycle. Contrairement à de nombreux pays de la région, le Cameroun dispose d'un enseignement secondaire technique de premier cycle relativement développé. Avec un TBS estimé en moyenne entre 6 % et 7 %, il correspond à environ un quart des effectifs scolarisés dans l'enseignement général. Dans le second cycle, le taux brut de scolarisation est plus faible avec des chiffres qui oscillent entre 3 % et 4 %, sans marquer d'évolution notable sur les treize dernières années. Dans l'enseignement supérieur, on note une évolution positive et soutenue de l'indicateur de couverture, qui passe de 2877(*)étudiants en 1991 à 5048(*) étudiants en 2001, soit presque un doublement sur les dix années. En 2004, le TBS est estimé à près de 5,78 % soit plus de 552 étudiants pour 100 000 habitants. Tableau 2 : Evolution du taux brut de scolarisation (%) par niveau et type d'établissement.
Source : carte scolaire MINEDUC 2001/2002 et 2003/2004. En 2001, le taux de pauvreté au Cameroun était de 40,2 %. Cette incidence est en baisse comparée à 50,3 % d'incidence de pauvreté en 1996. L'INS note cependant que cette diminution de la pauvreté de près de dix points a été générale et qu'elle n'a pas donné lieu à la réduction des inégalités dans le pays. Les plus riches consomment en moyenne toujours 7 fois plus que les plus pauvres. À l'examen de l'indice de Gini et du coefficient de variation, il apparaît qu'il subsiste une grande dispersion des revenus; ce qui traduit une distribution inégalitaire persistante de ces derniers entre les populations. Parlant du degré de pauvreté, ECAM II a permis de noter que 10% des personnes vivent dans la pauvreté absolue au Cameroun, c'est-à-dire qu'elles ne disposent d'aucune commodité, ni d'accès à l'eau potable, pas d'habitat décent et aucun équipement. Par contre, 1% des ménages camerounais ne manque de rien. Il existe une discrimination importante entre le milieu rural et le milieu urbain d'une part et entre les hommes et les femmes d'autre part. Le milieu rural connaît une pauvreté plus élevée que le milieu urbain. En effet, dans les zones rurales, on note plus de quatre personnes pauvres sur dix. Dans les zones de Douala, Yaoundé, les strates urbaines des provinces du Sud-Ouest, du Centre, du Nord-Ouest, de l'Est et du Littoral, en revanche, moins de deux personnes sur dix sont touchés par la pauvreté. Les ménages dirigés par les hommes connaissent une incidence de pauvreté plus élevée que ceux dirigés par les femmes. Cependant, les femmes représentent plus de la moitié des personnes pauvres (51,4 %). L'enquête EESI réalisée en 2005 par l'INS estime le taux d'activité des personnes de dix ans et plus à 71,5 % (EESI) et le taux de chômage - au sens du BIT - est de 4,4 %. Le phénomène de chômage est essentiellement urbain avec un taux de 14,5 % à Yaoundé et de 12,5 % à Douala. Sur dix actifs occupés, neuf exercent dans le secteur informel et la moitié de ceux-ci opèrent dans le secteur agricole informel avec un revenu moyen mensuel de 11 100 F CFA. Les secteurs formels privés et publics emploient quant à eux moins de 10 % des actifs. Aussi, les membres des ménages dont le chef exerce dans les secteurs publics et privés formels réussissent mieux à s'insérer sur le marché du travail et bénéficient d'une rémunération et des conditions d'activité meilleures que ceux des ménages dont le chef exerce dans le secteur informel. Le secteur primaire est le plus grand pourvoyeur d'emploi avec 55,7 % des travailleurs, suivi du tertiaire avec 30,2 % des travailleurs. Notons également que le taux de sous emploi global en 2005 est très élevé, il est estimé à 75,8 % des actifs avec 68,3 % chez les hommes et 83,6 % chez les femmes en activité. En somme, la situation économique au Cameroun n'est pas des plus réjouissantes. Les populations n'ont pas d'emplois, les revenus sont faibles, et les conditions de vie difficiles. Si les adultes sont sans emploi et sans revenu, leur situation de précarité rejaillit forcément sur les enfants dans la mesure où un enfant est repéré au travers de ses parents ou de toute personne dont il est à la charge. Nous allons entamer dans le chapitre qui suit, la définition de la pauvreté infantile, puis nous allons présenter la méthodologie de conception d'un indicateur multidimensionnelle de la pauvreté. * 6 Cet indicateur mesure, pour un niveau d'étude donné, la population d'élèves scolarisés par rapport à la population scolarisable de cette tranche d'âge. Ex dans le primaire, ce taux est égal au nombre d'élèves du primaire, multiplié par 100 et divisé par la population de six à onze ans (dans le système francophone). * 7 Pour 100 000 habitants * 8 Pour 100 000 habitants |
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