b. Les gardes.
Il existe plusieurs types de gardes : les gardes
champêtres, les gardes forestiers, les gardes pêches et les gardes
particuliers. Tous sont investis de pouvoirs, « ces gardes sont des
officiers de police judiciaire, spécialement institués pour
constater les contraventions et délits ruraux et forestiers87(*) ».
· Création, dépendances et qualités.
Cette fonction ancienne a été instituée
aux côtés de l'actuelle
gendarmerie
nationale par les lois des 29 septembre et 6 octobre
1791 appelées Code
Rural. Nommé par le maire et assermenté, le garde champêtre
exerce des missions de
police rurale
(police des campagnes) aux côtés des gendarmes.
Ils sont sous de nombreuses autorités et semblent
écrasés par le poids de la hiérarchie. Auxiliaires de la
police judiciaire, ils sont subordonnés aux Procureurs, auxiliaires de
l'administration, ils sont « sous les ordres du maire de la commune
pour exécuter tout ce qu'il prescrit pour l'application et
l'exécution des lois, arrêtés et règlements88(*) ». Ils sont en outre
sous l'autorité de la gendarmerie qui peut les réquisitionner et
qui « s'assurera lors de ses tournées, si les gardes
champêtres remplissent bien les fonctions dont ils sont chargés et
ils rendront compte aux sous-préfets de ce qu'ils auront appris sur la
conduite et le zèle de chacun d'eux89(*) ».
Les qualités d'un garde champêtre doivent
répondre à plusieurs critères : « il faut
trouver dans les habitants de la campagne des qualités dont la
réunion est assez rare. Un garde Champêtre doit avoir une grande
exactitude, une infatigable activité, une vigilance à tromper, un
désintéressement qui le mette au dessus de la corruption, il doit
avoir quelques notions relatives aux lois sur la police des campagnes, des
idées assez nettes pour rédiger un procès-verbal, enfin
assez de droiture pour que dans l'exercice de ses fonctions, il ne se laisse
influencer par ni par des haines ni par des affections
particulières ». Cette liste des qualités souligne
avant tout la nécessaire intégrité des futurs gardes.
· Le garde, un
défenseur des intérêts communaux.
Les fonctions des gardes-champêtres sont
résumées dans l'article 16 du Code d'instruction criminelle comme
suit :
«1° Rechercher, chacun dans le territoire pour
lequel il a été assermenté, les délits et
contraventions qui portent atteintes aux propriétés
rurales ;
2° Suivre les choses enlevées dans les lieux
où elles auront été transportées, et les mettre en
séquestre ; sans pouvoir cependant s'introduire dans les maisons et
cours adjacentes, si ce n'est en présence du juge de paix, ou de son
suppléant, ou du maire du lieu, ou du commissaire de police ;
3° Dresser les procès-verbaux des délits et
contraventions qu'ils auront reconnus ;
4° Arrêter et conduire devant le juge de paix, ou
devant le maire, tout individu surpris en flagrant délit, ou
dénoncé par la clameur publique, lorsque le délit emporte
la peine d'emprisonnement ou une peine plus grave90(*) ».
Le garde est surtout l'employé du maire, il agit dans
l'intérêt de la commune et veille à la défense de
son intégrité forestière, de son cheptel animal, et veille
au respect de ses arrêtés et règlement dans le village et
dans les champs. « Les gardes champêtres surveilleront
l'exécution des décisions de la municipalité sur leur
propre responsabilité91(*) ».
Cet article montre clairement l'importance du garde en
matière de police. Il est le trait d'union entre la population, le
maire, l'Etat et la gendarmerie. Infatigable policier rural, il est
habilité pour traquer un nombre impressionnant de délit.
· Des gardes adaptés
à la traque locale des petites infractions.
Ils résident dans les municipalités dans
lesquelles ils ont été nommés, et sont de ce fait
particulièrement adaptés à leur environnement et à
la traque des délits commis sur le territoire de leur commune.
Les gardes champêtres et forestiers s'occupent
essentiellement des petits délits et des délits de chasse et
forestiers, ainsi à Maxey-sur-Meuse, le 15 mai 1819 les gardes dressent
un procès-verbal contre Nicolas Humblot et Nicolas Fournier qui
avaient illégalement coupés du bois dans une coupe. Ces
infractions ainsi que les délits de chasse constituent leur principale
activité mais ils sont parfois amenés à exercer des
missions de police.
A Punerot le onze mai 1810 Urbain Gallot garde des bois
communaux est requis par le juge de paix de rechercher des roues et bandages
volés. Accompagné de deux autres gardes, ils ont
« trouvé un particulier qui leur était inconnu, qui
avoit une hotte, sur laquelle hotte nous avons aperçu un sac, qui
couvroit quelque-chose qui était dans cette hotte et qui nous a paru
suspect, nous avons demandés ce particulier de mettre bas sa hotte ce
qu'il a fait92(*) ».
Les soupçons des gardes s'avèrent corrects la personne
interpellée est bien celle qu'ils traquent depuis deux semaine mais
cette dernière parvient à s'échapper malgré leurs
cris et quelques coups de feu tirés en l'air « pour lui faire
peur ».
L'intervention des gardes semble moins professionnelle que
celle de leurs collègues gendarmes. On voit clairement qu'ils sont
sous-équipés puisqu'un cheval leur aurait permis de rattraper le
fuyard.
Son autorité, comme celle de n'importe quel agent ayant
des pouvoirs de police est souvent contestée par des délinquants
frustrés de s'être fait verbaliser. Ainsi le garde
n'échappe pas aux menaces coups et insultes puisqu'il subit 21,36 % des
outrages. Ceux-ci sont similaires à ceux subis par les maires et les
gendarmes. Bien connus de leurs concitoyens les gardes sont fréquemment
chahutés, le 30 juillet 1810 à Coussey, Antoine Paulau se fait
subtiliser son fusil, il est difficile de savoir s'il s'agit d'une simple
plaisanterie ou s'il s'agit d'un geste plus symbolique de bravade de
l'autorité en s'emparant d'un insigne du pouvoir, en l'occurrence le
fusil d'un officier de police judiciaire auxiliaire.
Les gardes apparaissent comme une force d'appoint que l'on
appelle en renfort lorsque la situation l'exige. Le garde est avant tout un
gendarme bis au service de la commune qui traque localement les petites
infractions essentiellement commises au quotidien dans les champs ou la
forêt par les habitants. D'autres fonctionnaires et officiers
interviennent pour le contrôle des marchandises ou les saisies.
* 87 Code d'instruction
criminel, op. cit., article 16.
* 88 ORLENT, J-A, Manuel
des gardes-champêtres et gardes forestiers, Bruxelles, 1861, p
20.
* 89 ORLENT, J-A, op.
cit., p 21.
* 90 BERRIAT-SAINT-PRIX, C,
op. cit., p 56.
* 91 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 1811.
* 92 AD Vosges, 22u42, Punerot,
1810.
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