HERBILLOT Hugues.
Mémoire
de deuxième année de maîtrise Année
2008-2009.
Réalisé sous la direction de Didier Francfort.
La Délinquance dans l'Ouest des Vosges durant le
premier XIXème siècle.
Comportements
délictueux, Justice et société dans le canton de
Coussey.
Université de Nancy 2.
U.F.R des
Sciences Humaines et Géographiques, Musicologie.
Figure 1, le canton de Coussey au sein du
département.
Figure 2, Le canton de
Coussey et le village de Grand.
Remerciements à Laurence Guignard, à mes
parents, et à ma grand-mère, pour leur soutien.
SOMMAIRE.
INTRODUCTION.
10
PREMIERE PARTIE :
19
LA JUSTICE ET LA REGULATION DE LA
DELINQUANCE.
19
A. Les tribunaux et les représentants de
l'état.
21
1. Une Justice tripartite, Justice civile, Justice
pénale et infrajustice.
21
2. Les représentants de l'état au
niveau communal, le maire, l'adjoint et l'appariteur.
32
3. Les agents professionnels de l'Etat et de ses
administrations.
42
B. L'accusé face à la justice, les
différentes phases de la procédure.
53
1. Découvrir les infractions.
53
2. Obtenir des éléments
complémentaires, enquêtes sur les lieux du crime.
57
3. Vers le dernier acte de la procédure.
60
4. Justice manipulée, justice
parasitée.
64
C. Les peines, des sanctions de l'infraction.
67
1. Les peines des tribunaux correctionnels.
67
2. Des peines les plus légères aux
plus lourdes.
79
3. Des peines modulées à la
relaxe.
82
Conclusion de la première partie.
89
DEUXIEME PARTIE :
90
LES MULTIPLES VISAGES DE L'ILLEGALITE ;
PROFIL DES DELINQUANTS, CADRE SPATIO-TEMPOREL ET GRADATION DU DELIT.
90
A. Identité du délinquant, âge,
profil social et sexe.
92
1. La délinquance n'a pas d'âge.
92
2. Le profil social du délinquant.
97
3. Les femmes commettent peu de délits.
100
B. Le cadre spatio-temporel de l'infraction.
105
1. Les temps du délit.
105
2. Géographie de la délinquance, des
diversités entre villages.
111
3. La part de la conjoncture dans la
délinquance.
117
C. De la simple infraction au meurtre en passant
par la récidive, une gradation de la délinquance.
125
1. Les contraventions, punitions
légères d'infractions légères.
125
2. Les délits
130
3. le cas particulier de la récidive.
134
4. Au sommet de l'infraction, le crime.
139
Conclusion de la deuxième partie.
144
TROISIEME PARTIE :
145
VIOLENCE ET DELITS DE VILLAGE ; UN RAPPORT
ETROIT A L'ORGANISATION SOCIALE ET GEOGRAPHIQUE DE LA COMMUNE.
145
A. Le village, individus, famille, clans.
147
1. Relations intrafamiliales.
148
2. Relations de proximité, le rapport aux
voisins.
153
3. Les réseaux d'alliance.
158
B. La violence au village, des mots aux poings.
168
1. Violence verbale.
168
2. Rituels de l'affrontement et violences
physiques.
175
C. Aux marges et à l'extérieur de la
commune.
180
1. Les délits commis au village.
180
2. La périphérie du village
184
3. Le village et l'extérieur.
191
Conclusion de la troisième partie.
197
CONCLUSION GENERALE.
199
LEXIQUE.
202
TABLE DES ILLUSTRATIONS.
205
CORPUS.
206
TABLE DES MATIERES.
216
INTRODUCTION.
La délinquance est aujourd'hui un terme très
familier. L'insécurité, les émeutes récentes dans
les banlieues sont des faits divers qui lui ont fait prendre une ampleur
considérable sur la scène médiatique. Il y a deux
siècles déjà, les révoltes frumentaires ou
résultant d'un climat économique déprimé
étaient des formes exceptionnelles de délinquance qui ont
toujours éclipsé les « pratiques
illégalistes1(*) » quotidiennes, les petits larcins, et
autres agressions récurrentes.
Présentation du sujet.
Cette monographie intitulée : la
délinquance dans les Vosges de l'Ouest durant le premier XIXème
siècle, est un sujet s'articulant autour de trois thèmes
principaux que sont ; le délit, la Justice et la
société. Sans oublier les délits les plus graves, cet
objet d'étude s'attache essentiellement à saisir la
délinquance la plus courante, dans un canton, celui de Coussey, dans
l'extrême partie ouest des Vosges.
La thématique de la délinquance est le coeur de
cette étude. Illégalité, pratiques
«illégalistes«, action illicites, délits, infractions,
contraventions. Le champ lexical de la délinquance est très
fourni. Cette profusion est révélatrice de la
variété du phénomène. Le mot délinquance
provient du latin delinquere qui signifie « être en
faute ». Le terme est déjà en usage au XIVème
siècle dans le milieu judiciaire. Parallèlement, apparaît
le terme délinquer à la fin du XVIIIème siècle. Ce
verbe se décline rapidement en un nom, celui de délinqueur. Le
terme de délinquance va finalement l'emporter et se répandre
à la fin du XIXème siècle.
Cette expression est un terme englobant dont la
définition n'est pas aisée. Elle est caractérisée
par l'ensemble des infractions commises considérées sur le plan
social. La délinquance apparaît d'abord au travers du prisme de la
légalité. En effet, tout acte expressément définit
comme illégal fait de son auteur un délinquant. Cependant cette
constatation n'est pas pleinement satisfaisante, parfois les codes locaux se
superposent ou remplacent la législation nationale, un délit
pourra être toléré localement bien qu'il soit d'ordinaire
répréhensible. Le duel encore répandu au XIXème
siècle en est un exemple fameux. Ceux qui y recourent pour régler
leurs comptes sont des délinquants au sens strictement pénal,
cependant cette pratique est tolérée alors qu'elle pourrait
être qualifiée de meurtre. La définition du
phénomène varie donc selon les localités.
Pénalement, et d'un point de vue sociétal, la
délinquance doit de plus être analysée selon le
degré de gravité des infractions. Les contraventions quotidiennes
que sont les infractions s'opposent ainsi aux manquements les plus graves que
sont délits et crimes. L'échelle permet d'effectuer cette
distinction. La petite délinquance correspond généralement
à la sphère privée : celle de la famille, tandis que
la grande correspond à la sphère publique : celle des
contacts de l'individu avec l'extérieur. Les infractions les plus graves
ne sont pas tolérées, tandis que les délits quotidiens
sont par nature plus facilement excusés, car habituels. Pour Benoit
Garnot, la petite délinquance se définit
essentiellement comme une forme d'incivisme ne menaçant pas la
société2(*).
L'appréciation de la gravité, varie selon plusieurs facteurs tels
que : l'époque, le lieu, et la répression du moment. Enfin,
le caractère occasionnel, récidivé ou permanent de
l'infraction, constitue une piste supplémentaire pour son étude.
Cet objet de recherche, ne peut se concevoir sans la Justice,
qui apparaît comme un rempart à la délinquance, en
protégeant les intérêts des individus et ceux de la
société. Les tribunaux ont en effet pour tâche, de punir le
délinquant, de lui infliger une sanction pénale. La peine est
destinée à lui faire prendre conscience de son action, et
à l'empêcher de réitérer son méfait.
Comme la délinquance ne peut s'envisager sans
protagonistes, l'étude de la société rurale, permet, de
saisir l'environnement mental des hors-la-loi. L'organisation villageoise ainsi
que l'autorité du maire sont autant de points à prendre en compte
pour étudier les origines et les manifestations de la violence.
De nos jours, le ministère de l'intérieur
réalise des statistiques annuelles du délit qui permettent d'en
calculer l'évolution en temps réel. Il y a deux siècles
une telle précision n'existait pas encore, du moins jusqu'à la
parution du Compte Général de l'administration criminelle3(*). Cet ouvrage ne recense
malheureusement que les manquements les plus graves. Les plus petits
délits brillent par leur absence. Les infractions sont en effet
oubliées, les auteurs du XIXème siècle leur
préférant le sensationnel de meurtres sanglants. C'est pour
pallier ces omissions, que l'analyse de tous les délits même les
plus légers, permet de donner un visage plus ressemblant à la
délinquance rurale.
Comparer la délictuosité du canton de Coussey
à la délinquance nationale, mettre en rapport les chiffres du
XIXème siècle avec des statistiques actuelles, permettent d'en
finir avec les stéréotypes et les fantasmes d'une
société supposée barbare et violente. Rétablir des
délinquants dans leur environnement mental, s'attarder à retracer
un mode de vie, permet d'envisager leur rapport aux pratiques illicites.
Saisir la réalité du délit à une
époque donnée n'est possible que localement. François
Ploux souligne que la monographie est la seule méthode de recherche pour
un historien de la violence. Le « cadre étroit4(*) » s'applique de
façon identique au concept de délinquance, les
spécificités locales de l'infraction se chargent de donner au
délit une multitude de facettes. Cette diversité est telle,
quelle s'observe même localement.
Choix
du sujet.
Le choix de cette étude répond à la
volonté de poursuivre dans le sillage du mémoire de
première année.
Chronologiquement d'abord, après avoir
étudié la vie de la municipalité de Neufchâteau de
1800 à 1810, il nous semblait important d'opérer une
continuité. Ce sujet débute donc en 1810 et s'achève un
demi-siècle plus tard. L'année 1810 est celle de la parution du
Code Pénal. Ce corpus législatif est constitutif pour un sujet
comme le nôtre. La période étudiée s'achève
en 1860, au cours d'années connaissant de profondes mutations, durant
lesquelles les campagnes commencent à se vider démographiquement.
Les habitudes villageoises évoluent avec notamment l'apparition du
chemin-de-fer et des progrès agricoles. Des mutations aussi brutales
laissent augurer des répercussions dans l'espace
étudié.
Géographiquement ensuite, cette étude traite
essentiellement du canton de Coussey dans l'arrondissement de
Neufchâteau. Etant originaire de l'Ouest des Vosges, le milieu à
étudier pour ce mémoire faisait peu de doute.
Le choix du sujet nous a été
suggéré par Laurence Guignard. Originellement centré sur
les conflits entre villages, il s'est rapidement avéré que
l'Ouest des Vosges ne présentait pas de violences de ce type. Le sujet a
donc évolué vers une étude de la délinquance ;
un thème qui permet de surcroit d'analyser la société
rurale et le fonctionnement local de la Justice.
Ce sujet se situe en outre dans un domaine de recherche en
plein essor. Les nombreux travaux menés autour des thèmes de la
violence, de la Justice et de la délinquance permettent un
renouvellement continu du sujet et de ses interrogations.
Problématique.
Lors de la première phase de ce travail des questions
se sont naturellement posées : qu'est-ce-que la
délinquance ? Que traduit la délinquance ? Est-elle une
forme d'opposition à L'Etat ? Comment ces infractions sont-elles
combattues ?
La délinquance apparaît, en effet comme le pivot
de cette étude, mais sa mise en perspective est moins évidente.
Il eut été possible par exemple, de se tourner vers des
problématiques mettant en valeur la violence et la délinquance,
l'infraction et ses degrés de gravité, ou encore la
délinquance et son évolution au cours de la période. En
dépouillant les archives, d'autres fils conducteurs semblaient se
dessiner, notamment le rapport à la Justice, qui s'est imposé
comme étant primordial. Aborder seulement la Justice et la
répression est un choix possible, mais revient à se priver d'un
élément fondamental de la délinquance : le
délinquant.
La délinquance génère tellement de
déclinaisons que son utilisation au pluriel semble parfois plus
adaptée. Ainsi, on peut se demander quels sont les visages de la
délinquance dans le canton? Quels délits y sont
commis ? Qui sont les délinquants ? Ces questions restant en
rapport avec la Justice comme outil de traitement, de gestion, de lutte contre
les pratiques «illégalistes«. Ces interrogations nous
orientent vers le traitement de la délinquance,de ses sources à
sa punition.
Nous avons finalement retenu comme problématique :
quelles sont les formes d'expression et de régulation de la
délinquance dans le canton de Coussey au XIXème
siècle ?
Historiographie.
Les auteurs du XIXème siècle, sont
marqués par le déterminisme ainsi que par le positivisme et son
observation de la nature. L'anthropologie criminelle se bâtit alors
autour du concept de « criminel né ». Cette
polémique est l'oeuvre du médecin italien Cesare Lombroso durant
la décennie 1870. Ce dernier, après avoir disséqué
des centaines de crânes de criminels avance l'hypothèse que la
criminalité soit innée, et qu'elle dépende de
caractéristiques physiques. Le débat des causes de la
criminalité aboutit à la création d'un antagonisme
franco-italien avec deux écoles distinctes. L'école Italienne
dite «Lombrosienne« défend la thèse de
l'hérédité, tandis que l'école Lyonnaise d' Antoine
Lacassagne défend le point de vue du milieu social notamment dans la
revue Française les Archives de l'anthropologie criminelle.
L'école Française s'articule quant à elle autour d'auteurs
comme Tarde, Corre, Manouvrier ou encore Joly.
A partir des années 1930 apparaît l'école
des annales sous l'impulsion de Lucien Fèbvre et de Marc Bloch. Ce
mouvement rompt avec la tradition méthodique et positiviste des
anthropologues. Après la seconde guerre mondiale, l'histoire
quantitative influence de nombreux historiens à l'image des auteurs des
Annales de Normandie. Durant les années suivantes, l'étude de la
délinquance et de la violence s'articule essentiellement autour des
formes de contestations populaires. Des travaux fondateurs comme la
république au village de Maurice Agulhon mettent en avant un
comportement archaïque des villageois. De nombreux auteurs regrettent
alors l'aspect passéiste des comportements des hors-la-loi ruraux.
L'école des annales s'oriente durant les années 1950, dans une
histoire inscrite dans la durée, sous l'impulsion de Fernand Braudel.
Cette nouvelle manière d'entrevoir la recherche historique est
qualifiée d'histoire immobile.
Les années 1970 marquent un tournant, avec l'apparition
de la « nouvelle histoire » ; un courant mené
par des auteurs comme Duby, le Goff, Le Roy Ladurie. L'histoire totale passe le
flambeau à une histoire sérielle. Cette nouvelle approche,
basée sur les chiffres, souligne une modification des comportements
délictueux liée à une évolution de la
société elle-même. Chez de nombreux auteurs la violence
physique ferait place à la violence contre les biens. Cette
évolution radicale est présentée par les leaders de ce
courant comme la conséquence de signes avant-coureurs du passage
à la société de consommation. Cette théorie est
néanmoins vivement critiquée de nos jours. Parallèlement,
les études sur la délinquance connaissent un renouvellement de
leurs problématiques, en étant marquées par exemple par
des réflexions sur le thème de la prison et de l'enfermement. En
1975, paraît Surveiller et punir de Michel Foucault5(*), dans lequel l'auteur
s'interroge sur l'efficacité du système carcéral pour
punir la délinquance.
Depuis une trentaine d'années, les chercheurs se
tournent d'avantage vers l'histoire des comportements, des mentalités et
des rapports sociaux. Les historiens se montrent de plus en plus critiques face
aux sources judiciaires et élargissent leur champ d'investigation aux
archives notariales et seigneuriales. Parmi les études menées,
l'intérêt pour la petite délinquance et l'infrajudiciaire
ne cesse de croître. En 1986, Marie-Renée Santucci
réalisait ainsi une étude de la délinquance et de la
répression dans l'Hérault au XIXème. Cette recherche
décrit les stades de la procédure judiciaire, le fonctionnement
de la justice ainsi que les multiples délits commis par les
délinquants Héraultais6(*).
L'échelle de l'espace étudié tend
à se réduire. Les guerres paysannes de François Ploux
s'inscrivent dans cette veine, avec comme terrain d'observation le Quercy.
Cette monographie porte sur plusieurs villages, et souligne les
mécanismes de la reproduction des groupes domestiques. Les
règlements de compte entre villages et les relations sociales
dominées par l'honneur rythment la vie des campagnes Quercynoises.
Depuis les années 1970 une nouvelle façon d'envisager la
recherche historique est apparue avec la micro-histoire. Originaire d'Italie,
la réduction d'échelle est développée par des
historiens comme Giovanni Lévi notamment dans son ouvrage le plus
célèbre intitulé, le pouvoir au village7(*). Les investigations les plus
récentes sont toujours marquées par des échelles fines,
devenues incontournables pour étudier la délinquance. Yannick
Thomas a ainsi réalisé en 2004 un mémoire de
maîtrise sur la délinquance dans l'arrondissement de Nancy durant
les dernières décennies du XIXème siècle8(*). Ce travail, à
l'échelle de l'arrondissement de Nancy, porte sur le cadre de la
délinquance, la nature des délits et les délinquants. Les
sources utilisées par cet étudiant sont essentiellement
composées des jugements correctionnels et des archives de la police.
L'étude de la délinquance fait actuellement
débat autour de l'utilisation des sources judiciaires. Les
procédures anciennes suscitent de plus en plus d'appréhension
chez de nombreux auteurs. François Ploux regrette ainsi le
« regard ethnocentrique et déformant du magistrat9(*) ». Il est
évident qu'une prise de recul est obligatoire pour traiter des
données âgées de deux siècles.
Corpus.
Le corpus utilisé est essentiellement judiciaire, la
série « U », renferme les archives de nombreux
tribunaux. Nous nous sommes particulièrement intéressés
à la sous-série « 22u » relative
à la justice de paix et aux jugements correctionnels. Les affaires qui y
sont consignées sont mixtes, elles sont tantôt des jugements des
tribunaux correctionnels, tantôt des jugements de simple police. Les
procédures inabouties y figurent également, ce sont des plaintes,
des lettres des maires au procureur, ou encore des débuts d'instruction
qui sont abandonnés. Nous avons dépouillé
systématiquement cette série du dossier
« 22u41 » à « 22u81 » soit
cinquante années de procédure et 372 jugements.
Nous nous sommes appuyés sur l'activité de la
cour d'Assise d'Epinal pour relever les délits les plus graves. Nous
avons ainsi consulté les registres des jugements et les dossiers de
procédure, bien que ces derniers soient lacunaires.
La série « M », a également
été mise à contribution. Cette série renferme les
archives de la police, et de l'administration des forêts. Les
procès-verbaux et les constats d'infractions y sont nombreux et
très détaillés.
Cette recherche sur la délinquance devait
originellement porter sur l'arrondissement de Neufchâteau, soit un
cinquième des Vosges. La densité des jugements disponibles pour
cette étendue géographique, nous obligea à restreindre
l'aire étudiée à un seul canton. Le canton de Coussey
étant essentiellement composé de villages, nous lui avons
ajouté le bourg de Grand peuplé de 1300 âmes, dans le but
de diversifier notre étude.
Méthode d'approche et outils d'analyse.
Aux archives, nous avons photographié un à un
tous les jugements de 1810 à 1856. Les dossiers correctionnels sont
dépouillés systématiquement, jugement par jugement, afin
de les intégrer à la base de données Access. A l'aide de
ce logiciel nous avons réalisé la table ci-dessous pour
hiérarchiser les informations relevées :
Numéro d'affaire
|
Type de délit
|
Date
|
Heure
|
Village
|
Lieu
|
Nom Auteur
|
Nom Victime
|
Peine principale/ Relaxe
|
Figure 3, table de
classement de données réalisée à l'aide du logiciel
Access.
Cet outil, en « mode requête »
permet d'effectuer de nombreux tris, il est par exemple possible de calculer le
nombre de délits par village ou encore de mesurer l'évolution
d'un type particulier d'infraction. Malheureusement, lorsque que nous avons
réalisé cette table, nous avons omis d'y placer des
catégories supplémentaires, telles que : le sexe des
délinquants, l'âge des prévenus ou encore les outils
utilisés lorsqu'il s'agit de violence. Ces oublis nous ont
été préjudiciables par la suite et nous obligeant à
dépouiller plusieurs fois l'intégralité de nos sources.
Les jugements analysés ont été ensuite
consignés dans des dossiers au nom de leur cote d'archive. Le
résumé de chaque affaire a été classé avec
sa photographie respective, pour s'y référer plus rapidement.
Le corpus des jugements correctionnels du tribunal de Coussey
et de celui de Neufchâteau pour la commune de Grand, nous ont servi de
base pour nos statistiques. Le reste de l'arrondissement, est souvent
évoqué mais uniquement à titre d'exemple.
Plan de l'étude.
Cette étude en trois temps se penche tout d'abord sur
la Justice comme moyen de régulation de la délinquance. Le profil
du délinquant et de la délinquance, permet ensuite de cerner la
personnalité du délinquant. Enfin, le village correspond à
une organisation sociale et spatiale particulière, qui influe
directement sur la délinquance.
PREMIERE PARTIE :
LA JUSTICE ET LA REGULATION DE LA DELINQUANCE.
« Sans Justice, il ne peut y avoir de
démocratie et de paix. La Justice a une mission essentielle dans un Etat
de droit. Elle garantit le respect des libertés individuelles, veille
à l'égalité de tous devant la loi et protège les
citoyens10(*) ».
Une première définition de la Justice pourrait
être son pouvoir de rendre à chacun son dû. La Justice est
le pouvoir de faire droit à chacun et de sévir. Elle
« est le
droit du plus
faible11(*) ».
Les infractions contreviennent au fragile équilibre
entre l'ordre, et les comportements intolérables pour le bon
fonctionnement d'une société. Bien qu'il existe parfois un
décalage entre les normes locales et celles de l'Etat, les
autorités, pour garantir le bon fonctionnement de la
société, sont dans l'obligation de réguler toutes les
formes de délinquance. La Justice pour s'y adapter, est obligée
de se hiérarchiser. Chaque tribunal à son niveau a son domaine de
compétence pour chaque palier d'infraction. Cet organigramme permet
ainsi de couvrir toute l'étendue possible des contraventions dans le but
de régler d'une manière optimale les pratiques
«illégalistes«. L'infraction, une fois relevée, va
suivre un long cheminement, qui conduira son auteur devant le tribunal
adapté. S'il est reconnu coupable, le délinquant encoure une
peine adaptée à la gravité de son acte.
Les soldats de la régulation sociale sont nombreux,
maires, gardes et policiers, apparaissent comme d'infatigables
défenseurs de l'ordre moral et des intérêts des
propriétaires, des communes, et bien sûr de l'Etat. L'action de
ces agents est indispensable, ils assurent la police au sens le plus strict du
terme, en prévenant ou en punissant les pratiques illégales.
L'aide de ce personnel implanté localement permet de mettre à
jour la délinquance et de la conduire vers les entités
destinées à la traiter. Ce cheminement répond à une
progression bien précise, et au mécanisme implacable pour
l'instruction nécessaire de l'affaire.
Comment la Justice parvient-elle à réguler la
délinquance ?
L'organigramme judiciaire est organisé de
manière à juger au mieux tout le spectre des infractions. Une
fois l'infraction détectée, nous pourrons observer la mise en
marche des tribunaux de la constatation des faits, à l'éventuelle
condamnation. Enfin la diversité des peines permettra de mieux percevoir
toute la diversité de la délinquance au XIXème
siècle.
A.
Les tribunaux et les représentants de l'état.
Les sources utilisées pour cette étude sont
essentiellement judiciaires, elles concernent pour la plupart, des affaires
jugées par le tribunal correctionnel de Coussey. Bien comprendre les
attributions et le rôle des tribunaux, ainsi que la carte judiciaire est
indispensable.
1.
Une Justice tripartite, Justice civile, Justice pénale et
infrajustice.
Après les créations issues de la
Révolution, on assiste à partir de l'Empire à une
simplification de l'organisation judiciaire. La Justice civile a pour
prérogative les rapports entre individus, la Justice pénale quant
à elle, juge les infractions, « c'est-à-dire
les comportements dangereux que la loi a expressément
définis12(*)
». L'infrajustice13(*) permet également de réguler les normes
sociales. Les villageois sont confrontés à une organisation
tripartite de la Justice.
a. La Justice civile et la
normalisation des rapports entre individus
Les tribunaux civils répondent à une
hiérarchie, la justice de paix s'applique au canton, tandis que les
tribunaux de première instance jugent les ressortissants de
l'arrondissement. Enfin, le procureur, parallèlement au juge, joue un
rôle clé à tous les niveaux dans cet organigramme.
· La Justice de paix ou justice cantonale.
L'origine du mot suscite le débat. La Justice de paix
tirerait son nom des justices of the peace anglaises ou hollandaises, ce que
réfute Jean-Pierre Royer qui y voit comme origine les
« vieilles habitudes arbitrales de voisinage14(*) » qui étaient
demeurées intactes en milieu rural.
« A la tête de chaque canton est placé
un magistrat, le juge de paix, ayant autorité sur toutes les communes du
canton. Ce fonctionnaire statue sur des affaires urgentes et de peu d'importance 15(*) ».
Le juge de paix tient ses audiences publiquement, au chef
lieu du canton. « Il est assisté d'un greffier chargé
de prendre note des décisions, et d'un huissier qui maintient l'ordre
[...]. Le juge de paix est nommé par le chef de l'Etat ; il est
amovible16(*) ».
Le juge de paix est en outre un juge unique pour un maximum
d'efficacité. Le juge de paix, à la base de la pyramide
judiciaire reste surtout un « conciliateur et un arbitre17(*) ». Les archives
nationales voient les attributions du juge de paix limitées à des
« jugements sommaires, des contestations d'une minime importance ou
des petits procès18(*) ». Il est vrai que les affaires jugées
concernent essentiellement les « litiges quotidiens de faible
importance entre les particuliers, les dommages aux propriétés,
les dettes et litiges locatifs ou encore les poursuites civiles pour
injure19(*) ».
Parfois vulgairement appelé « magistrat des
champs », le juge de paix est ainsi en prise directe avec la
réalité du terrain, il connaît un bon nombre de
justiciables de son canton, surtout les familles habituées des tribunaux
comme les membres de la maison Ferbus de Punerot jugés sept fois en
seize ans20(*).
· Les tribunaux d'arrondissement et les Procureurs.
Ces tribunaux, comme leur nom l'indique, se situent
dans chaque chef-lieu de département et d'arrondissement. Selon
leur importance, ils sont composés d'au moins deux juges et d'un
président. Ce tribunal basé à Neufchâteau est
composé de juges du siège, d'un procureur du roi et d'un
greffier, « ces tribunaux connaissent toutes les affaires civiles et
jugent en appel les décisions des juges de paix21(*) », ainsi que les
délits en matière correctionnelle.
Cet échelon de l'arrondissement ne possède plus
la simplicité ni la rapidité de la justice de paix. Ils jugent
des affaires n'excédant pas mille-cinq-cent francs et les appels contre
les décisions des juges de paix.
A l'échelon supérieur se placent les tribunaux
d'appel (appelés selon le temps Cour Impériale, Royale, ou d'appel), Il en existe
au total vingt-six en France, l'arrondissement de Neufchâteau
dépend de celui de Nancy. Enfin le dernier échelon est celui du
tribunal de cassation.
Le terme de procureur impérial apparaît en 1804.
Ce sont des « agents sûrs ne jouissant pas de
l'inamovibilité ». « La loi du 7 pluviôse an
IX avait rendu au ministère public la recherche et la poursuite des
infractions22(*) », avec cette loi le procureur
impérial devient le supérieur hiérarchique direct des
officiers de gendarmerie et surtout du juge de paix.
Dans le déroulement d'une affaire qui sera ensuite
jugée, le procureur dirige et mène l'enquête, il
réalise un travail de recherche en collectant un maximum d'informations. Le
procureur, est informé d'un délit par les correspondances des
maires. Le 17 janvier 1812, le maire de la ville de Neufchâteau,
écrit au procureur impérial pour le prévenir d'un
délit qui vient de se commettre dans la ville. « Le maire de
la ville de Neufchâteau, à monsieur le procureur impérial
près le tribunal du 1er arrondissement du département
des Vosges, séant la dite ville.
-Monsieur, j'ai l'honneur de vous prévenir
qu'il vient de m'être rendu compte que Buduoso (Francisco) et Briquet
(Bernardo) tous deux prisonniers de guerre espagnols en station en cette ville
sont prévenus de vol en la commune de Frébécourt, le
commandant du dépôt les à fait arrêter23(*) ».
Cette correspondance entre le maire et le procureur est
obligatoire lorsque la situation l'exige, comme nous l'apprend un nouveau
courrier du maire écrit un jour plus tard. Le 18 janvier 1812, le maire
rédige une nouvelle lettre : « Monsieur, lorsque que par
ma lettre du jour d'hier je vous ai dénoncé un vol commis par
deux prisonniers [...] j'ai rempli les obligations que la loi m'impose24(*) ».
Le procureur requiert ensuite que par le juge de paix les
éventuels témoins soient cités à comparaître,
afin d'obtenir des informations supplémentaires. Il peut ordonner au
juge de paix de se déplacer à l'endroit où a eu lieu le
délit afin de le constater et de dresser un procès verbal qui
servira de base à la future procédure.
Lorsque les recherches préliminaires sont suffisamment
avancées, après avoir fait un résumé de l'affaire
le procureur met en perspective les faits imputés à la personne
incriminée et la sanction relative prévue par le code
pénal.
Le procureur se penche également sur la
culpabilité du prévenu, si la prévention n'est pas
suffisamment établie, l'accusé est renvoyé des poursuites,
si le prévenu semble coupable la procédure suit son cours
jusqu'au jugement.
La hiérarchisation des tribunaux civils et le
rôle central du procureur s'observent de la même façon pour
la justice pénale.
b. La justice pénale et
ses tribunaux.
« La justice pénale juge les personnes
soupçonnées d'avoir commis une infraction25(*) ».
« Les faits punissables furent définis, ainsi que les peines
assignées à chacun d'eux. De là résulta la
distinction des infractions en contraventions, délits et crimes26(*) ».
Chaque niveau d'infraction est jugé par un tribunal
particulier : le tribunal de police juge les contraventions (infractions
les moins graves), le tribunal correctionnel juge les délits
(infractions plus graves que les contraventions), enfin la cour d'assise juge
quant à elle les crimes (les infractions les plus graves).
· Le tribunal de
simple police ; des maires juges en leurs villages.
« Ce tribunal est tenu dans chaque canton
par le juge de paix, à l'égard de certaines contraventions, et
concurremment par les maires des communes qui ne sont pas chef-lieu de
canton27(*) ». Les
maires des communes voisines du canton jugent des affaires qui
intéressent le bon fonctionnement de la commune et les atteintes
à la propriété.
Ce tribunal est parfaitement adapté à
la régulation des petites et moyennes infractions. Le maire
connaît mieux que quiconque ses concitoyens, ce qui permet de faire
gagner du temps à cette justice de village. La majeure partie des
incivilités sont des contraventions de faible gravité, leur
statut banal les pousse naturellement vers la justice de simple police. Le
village juge lui-même la majorité des délits qui s'y
commettent, on peut dès lors parler d'autorégulation de la
délinquance.
Parmi les infractions jugées par les maires, la
vaine pâture est largement majoritaire. Les infractions sont toujours
constatées par les gardes champêtres qui portent le procès
verbal au maire, qui donne suite à la procédure. Ainsi le
vingt-et-un août 1814, le garde de Seraumont rédige un
procès verbal. « Sur les six heures du soir mois jean batite
Vaucourt garde champaitre de la commune de Seraumont assermenté de veut
en le juge de paix du Cantont de Coussey faisant nous garde et tournées
accoutumées dans le cantont dit la combe des moulcains jais reconnut
fait dedans en paisse de taire appartenant a Claude Pelgrin cultivateur
à Seraumont lieu dit le canton dit a la fause ce délit consiste
de le Coug de l'heritage du dit pelgrin enplantais en blais de la longeur dans
virons cinquante toise de longueur que jais reconnut baucous de blais
mangé et tripotée et dapprez avoir reconnut des pas de beuf ou
vache et de chevaux28(*)
».
Les infractions jugées par les maires sont
essentiellement des faits découlant de l'activité professionnelle
de leurs auteurs. Le trente-et-un octobre 1816, le maire de Coussey, condamne
Joseph Poirot un cultivateur du village. Ce dernier, en effet,
« s'est permis de labourer en empiétant sur une largueur de 3
décimètres et huit centimètres, sur une longueur de 128
mètres29(*)»
sur le champs de son voisin et d'avoir ramassé le blé ainsi
abimé. Le maire le condamne à trois francs d'amende et à
trois francs de dommages et intérêts.
Le tribunal de simple police juge les atteintes mineures
à la propriété. Parmi ces atteintes, le passage en voiture
dans des champs emplantés ou dans des propriétés
privées est courant. François Colombier de Midrevaux,
malgré l'interdiction des gardes, « est passé en leur
présence avec deux voitures chargées de bois, attelées de
chacune trois chevaux30(*) », le hors la loi explique son geste en
criant aux gardes que « que ses roues ne valloient rien, et que cela
serait plus doux en passant dans les terres31(*) ».
Pour les deux premières décennies la moyenne des
jugements du tribunal de Coussey est de 46,16 affaires par an pour le canton,
un chiffre plus élevé que les tribunaux de police correctionnelle
qui ne connaissent que 6,16 affaires par an.
· Le tribunal de police correctionnelle : juger les
infractions intermédiaires.
Ce tribunal juge les délits correctionnels punis de
l'amende, ou de l'emprisonnement. Le tribunal de police correctionnelle
siège au chef-lieu de Canton. Dans les petites communes comme c'est le
cas à Coussey, cet organe judiciaire est dirigé par le juge de
paix. À partir de 1808 installé au chef-lieu de canton, cet
organe judiciaire est compétent, exclusivement, pour toutes les
contraventions du chef-lieu et pour certaines des autres communes : celle des
personnes non domiciliées, les contraventions forestières, les
injures verbales, les affiches et écrits contre les bonnes
moeurs32(*) »,
mais également « les délits de violence, offenses aux
moeurs, et troubles apportés à l'exercice des cultes, homicides
par imprudence, outrages aux agents, mendicité et vagabondage, les
petites affaires de vol et d'escroquerie33(*) ».
Les affaires jugées par ce tribunal
représentent la base utilisée pour nos statistiques.
Intermédiaires entre les infractions de simple police, et les crimes
jugés en cour d'assise, les dossiers correctionnels constituent un
terrain de recherche privilégié pour étudier les
« pratiques illégalistes34(*) ».
En observant l'histogramme de la figure 4 ci-dessous, on
constate un infléchissement de l'activité de ces tribunaux
dès les années 1830. Cette chute spectaculaire du nombre
d'affaires jugées, trouve son explication dans la nature des infractions
jugées, qui change progressivement au profit de délits plus
importants et donc moins nombreux. Le Compte Général nous indique
que le nombreux de délit diminue, « en cinquante ans (pour les
contraventions forestières), de 1831 à 1876 la réduction
à été de deux tiers35(*)». De 1826 à 1860 les délits contre
les personnes passent de 292 à 136 or ces infractions sont parmi les
plus nombreuses dans les jugements étudiés.
Figure 4, total du nombre
d'accusés par le tribunal correctionnel de Coussey de 1808 à
1855.
· Les cours d'assises et le
crime.
Les tribunaux criminels sont mis en place par la loi du 7
février 1791. Ils jugent les crimes, les vols avec circonstances
aggravantes, le viol, l'attentat à la pudeur ainsi que les homicides. Ce
qui différencie cet organe du précédent ce sont les peines
encourues qui peuvent être au pire des cas la condamnation à mort,
mais aussi le bagne à perpétuité, les travaux
forcés ou la réclusion à perpétuité
également.
Ces tribunaux apparaissent en 1811 en remplacement du
tribunal criminel. « Ces tribunaux temporaires siègent
chaque trimestre par session au chef lieu de département36(*) ».
En moyenne, les ressortissants du canton commettent 2,75
délits par an susceptibles de les conduire aux assises. Le tableau
ci-dessous nous montre que le vol est la cause principale de comparution devant
les tribunaux criminels dans le canton. Les délits jugés par ces
tribunaux peuvent être parmi les plus graves crimes, le pâtre de
Grand, Nicolas Cordier est condamné à mort en 1817, pour
l'assassinat de Marie Reine Mougin, âgée de dix ans37(*). Les délits commis sont
souvent des infractions avec circonstances aggravantes, Nicolas Cordier est en
effet en train de voler du fromage et du lait, quand il est surpris par la
jeune fille qu'il assomme avec une pièce de bois, blessure qui conduira
à son décès.
cris séditieux
|
3,6%
|
homicides
|
7,2%
|
atteintes à la morale sexuelle
|
5,4%
|
vols
|
61,8%
|
délits de vénalité
|
20%
|
incendies
|
1,8%
|
Figure 5, Tableau
présentant les délits jugés par la cour d'Assise du
département.
Tribunaux civils et pénaux régulent parfaitement
les rapports sociaux, mais ils ne sont pas les seules entités à
dispenser la justice, il ne faut pas oublier l'importance de l'infrajustice
dans la régulation sociale.
c. L'infrajustice ou la
régulation non judiciaire du conflit.
« L'infrajustice, au sens large, peut être
définie comme l'ensemble des modes non judiciaires de résolution
des conflits [...] ses caractéristiques essentielles sont la
valorisation de la négociation (directe ou faisant intervenir un
médiateur) entre les parties et la recherche d'une solution
(« accord », « arrangement »)
consensuelle, acceptable et acceptée, éventuellement
libérée des contraintes du droit38(*) ».
· Qu'est-ce que l'infrajustice ?
Considéré dans un premier temps par les
historiens comme un règlement archaïque et résiduel des
conflits, l'infrajudiciaire peut-être entendu comme « le
règlement des écarts aux normes des rapports interindividuels ou
communautaires par vengeance, arrangements ou toute autre solution ne faisant
pas appel aux tribunaux39(*) ». François Billacois, lui, voit la
compétence de l'infrajustice s'articuler autour de la notion de
l'honneur « les biens symboliques sont plus que d'autres de la
compétence de l'infrajudiciaire, alors que les biens matériels,
et peut-être la vie humaine sont du domaine de la justice40(*) ».
Cette forme de justice trouve ses atouts dans sa
rapidité à être dispensée et dans son faible
coût, les frais de justice des tribunaux sont importants et les
dépens augmentent de plus en plus (cette augmentation est volontaire et
a pour but de dissuader les actions en justice pour des faits
dérisoires). Bien qu'utilisée par toutes les strates sociales,
l'infrajudiciaire permet aux individus les moins favorisés
d'espérer une réparation pour un dommage subi.
· Les figures locales, des médiateurs en
puissances.
Le maire est le principal arbitre de ces arrangements
inter-villageois. A Grand, le 6 mai 1827, à la tombée de la
nuit, deux jeunes hommes rôdent près du domicile
d'Élisabeth Morlet. François Breller et Etienne Dutrône
frappent à la porte de la veuve pour lui demander du feu pour leur pipe.
Celle-ci refuse et finalement, en représailles, ils lui dérobent
une poule qu'ils étranglent. Le maire va alors jouer le rôle de
médiateur, « le maire Grosjean a fait des
reproches à Breller41(*) ». Le lendemain les deux complices se
rencontrent au café, et se résolvent à rembourser la veuve
Morlet avec une pièce de trente sous. Le maire s'immisce de
lui-même dans cette affaire en faisant la morale aux deux jeunes
rôdeurs et en les poussant à payer une compensation à la
veuve.
Le plus souvent ce sont les villageois qui viennent
requérir l'autorité du maire pour régler des conflits
privés. A Autreville le 29 juillet 1829, le sieur Oudot vient se
plaindre de dommages causés par le troupeau communal. Le maire trouve un
arrangement de 2 francs de dédommagement que le pâtre versera
à Oudot42(*)
».
Le juge de paix joue également un rôle
important dans cette justice particulière, « ce fonctionnaire
a pour mission première d'arrêter, par la conciliation, les
plaideurs au seuil d'un procès [...] deux plaideurs peuvent
volontairement et sans frais, se présenter à son prétoire
et requérir une solution à leur différend43(*) ». Le 16 janvier
1814, le juge de paix Lebrun est requis par Pierre Vincent « pour
essayer les voies de la conciliation » après qu'on lui
« ai volé dans les bois de Sauvigny un cheval entier de
l'âge d'environ deux ans et demi, que depuis cette époque il a
fait bien des recherches pour le retrouver, qu'enfin il vient d'apprendre qu'il
se trouve aujourd'hui dans les écuries dudit henry Marchal, et qu'il lui
reste aujourd'hui d'autres ressources que la voie judiciaire44(*) ».
· La progression de l'infrajustice.
L'infrajustice est difficile à quantifier. Non
officielle, elle n'est pas archivée, et nous n'en avons connaissance que
suite à ses échecs et au passage de l'affaire devant les
tribunaux. Les deux exemples ci-dessus se terminent devant le juge de paix. La
veuve qui avait accepté dans un premier temps la compensation
financière s'est finalement ravisée et a porté l'affaire
en justice. Jean Quéniart « pense qu'il ne faut pas trop
séparer judiciaire et infrajudiciaire, dans la mesure ou l'un et l'autre
peuvent se mélanger ou se succéder dans la chronologie d'une
affaire45(*) ».
Benoît Garnot souligne quant à lui, dans les
débats sur l'ampleur de l'infrajudiciaire, que la notion
d'intérêt (la conclusion d'un arrangement) peut débuter ou
suspendre une action en justice si la victime trouve un accommodement
suffisant.
Justice complémentaire, ce mode traditionnel de
règlement des conflits apparaît efficace. La diminution du volume
d'affaires jugées par la justice de paix montre que l'infrajudiciaire
progresse.
Justice parallèle, l'infrajudiciaire est une
alternative intéressante pour les villageois désirant promptitude
du jugement et facilité d'accès sans souffrir de frais de
justice, si le verdict leur est défavorable.
La Justice permet de réguler les comportements
délictueux et violents, les tribunaux se chargent d'instruire les
affaires et de condamner les coupables. Tous les tribunaux, de celui de simple
police à celui d'Assises sont adaptés en fonction de l'importance
du délit et du lieu où il a été commis.
L'infrajustice, permet de réguler une bonne partie des conflits, son
aspect informel, son importance et sa facilité d'accès en font un
outil efficace de gestions des désaccords. Lorsque cette justice de la
communauté villageoise échoue, les habitants peuvent se tourner
vers la Justice d' Etat, les tribunaux pénaux permettent de juger
l'ensemble des infractions. Dans le canton les tribunaux les plus
sollicités au vue des infractions commises, sont ceux de simple police
et de police correctionnelle.
Ces instances judiciaires civiles et pénales ne
seraient rien sans les maires qui se chargent localement de faire respecter la
loi, et de leur fournir des prévenus, ce sont les soldats de la justice
qui n'hésitent pas à user de leur fonction au risque d'être
couramment outragé.
2.
Les représentants de l'état au niveau communal, le maire,
l'adjoint et l'appariteur.
Au sein du village l'autorité est incarnée par
le maire et son adjoint, le maintien de l'ordre est l'une de leurs
prérogatives car les manquements à la tranquillité
publique et les infractions sont nombreux et de natures diverses.
Le maire joue le rôle d'un régulateur, il est
relayé dans son action policière par son adjoint et par
l'appariteur qui transmet oralement aux habitants les décisions
communales et les règlements en vigueur si le besoin s'en fait
sentir.
a. Origine sociale et
métiers des représentants communaux.
Sans être obligatoirement de riches propriétaires
ou des figures locales les élus municipaux, maires en tête et leur
adjoint, sont d'un niveau social légèrement plus
élevé que celui de leurs concitoyens. Le tableau de la figure
646(*) présente
ainsi le pourcentage de maire selon les métiers.
Les maires des classes moyennes et supérieures
représentent souvent l'élite sociale de leur village. Par exemple
à Lamarche, l'adjoint au maire Hyacinthe Nicolas Guyot est
avocat47(*). A Sionne, le maire n'est autre que le sieur
Muel le directeur des forges de Sionne, héritier d'une riche famille de
maîtres de forge vosgiens.
Une bonne partie des maires fait également partie du
monde de l'agriculture, ce sont le plus couramment des propriétaires, ce
titre de propriétaire confère une aura particulière, il
est souvent synonyme d'honorabilité.
Enfin, les maires peuvent être de simples artisans
comme Pierre Gahon qui est cordonnier à Midrevaux48(*).
b. Faire respecter la loi.
Le maire est un homme de terrain constatant
et essayant de prévenir les infractions. La lutte contre les manquements
à la loi se joue également au sein de la maison commune,
là où sont pris les arrêtés municipaux.
Dans l'étude de la municipalité de
Neufchâteau49(*), le
maire de cette ville apparaît comme le personnage central. Il met en
place de nombreux règlements pour mettre fin à des situations
délictueuses, il s'agit ici d'arrêtés pris suite à
des divagations d'animaux. Informé sur « les plaintes qui lui
ont été adressées par nombre de citoyens dignes de
foi50(*) », le maire
dans son conseil énonce le problème « vu que des gens sans
précaution laissaient à l'abandon leurs bestiaux en allant les
faire abreuver51(*)
», puis il élabore un arrêté. Il devient ainsi «
défendu de conduire pâturer brebis, moutons où
chèvres dans l'emplacement de la promenade publique52(*) ». Par empirisme, le
maire adapte la législation de sa commune pour lutter par le
règlement contre les nombreux délits.
Le maire est souvent amené à faire preuve
d'autorité auprès des villageois.
Ainsi à Midrevaux, le vingt-cinq avril 1813 à
l'issue de la messe paroissiale, le maire organise sur le parvis de
l'église une réunion publique. Le chef du village en profite pour
avertir ses concitoyens que des vols se commettent dans les coupes
affouagères53(*) et
pour mettre en garde les voleurs, il invite « tous ceux qui avaient
connaissance du vol54(*)
», à se manifester. Le maire agit ici pour mettre fin à un
état de non droit qu'il n'entend pas tolérer au sein de sa
communauté.
Le maire est, comme son adjoint, un officier de police
judiciaire auxiliaire, « les maires et adjoints participent, au titre
et aux pouvoirs d'Officiers de police auxiliaires du Procureur
Impérial ; ainsi qualifiés parce qu'ils sont chargés
d'aider ce magistrat dans la recherche et la constatation des crimes et
délits55(*) »,
ce qui les amènent notamment à élucider des affaires de
vol en se rendant chez des suspects. Ainsi, à Sionne le vingt mai
1830, suite à une affaire de vol de chemise, le maire se rend chez
Dominique Moreau pour effectuer une perquisition qui s'avère
fructueuse56(*). Le chef
du village est souvent appelé pour des conflits de voisinage, des rixes
et d'autres délits. Le maire de Fruze, le 24 mai 1825,
« s'était rendu sur les lieux de la scène qui se
passait dans la rue pour faire cesser ces voies de fait57(*) », se fait outrager
par le délinquant, qui le prie « de se retirer et d'aller
faire son métier58(*) ». Le maire doit faire preuve d'une
certaine disponibilité et de volontarisme pour faire cesser ces conflits
entre particuliers qui sont bien plus nombreux que ceux que
révèlent les archives de la justice.
Il joue clairement un rôle de médiateur au sein
de la commune en essayant toujours de prévenir querelles et
affrontements. Le 25 décembre 1828 à Avranville,
« sachant qu'il y avait un rassemblement de jeunes gens chez la veuve
Jeannot débitante au dit lieu, qui dansoient et se divertissaient, nous
nous y sommes transportés vers les huit du soir pour voir ce qu'il s'y
passait, il n'y avoit que du divertissement et de la joie, au même moment
Nicolas et François Daumont sont arrivés [...] et tout
aussitôt malgré notre présence et notre défense
s'étant battu avec ceux qui étoient tranquille avant leur
arrivée ». L'action du maire et de son adjoint trouve
rapidement ses limites lorsque qu'il s'agit de violence impliquant plusieurs
protagonistes. Au mieux, les représentants de la commune parviennent
à écourter le combat, au pire, ils sont pris à parti et
molestés. Le plus souvent comme ici ils s'en tirent pour quelques
insultes, menaces et outrages.
Métiers des maires
|
Pourcentage
|
Classes moyennes et supérieures
|
42
|
Monde de l'agriculture
|
40
|
Ouvriers de l'industrie et artisans
|
18
|
Domestiques
|
0
|
Figure 6, métiers
des maires.
c. Une tâche difficile, des
maires couramment outragés.
Les outrages envers les maires sont courants dans les
jugements étudiés. L'outrage en droit se définit comme
suit : parole, geste menace, etc., par lesquels un individu exprime
sciemment son mépris à un dépositaire de l'autorité
ou de la force publique, et qui constituent une infraction59(*). Ces outrages ne concernent
pas que les maires, nous verrons plus avant, que la gendarmerie, les gardes
champêtres, les inspecteurs des droits réunis et même les
huissiers y sont aussi confrontés.
Les maires, premiers maillons de l'autorité, ne sont
pas toujours perçus comme tels par leurs concitoyens qui souvent les
connaissent depuis toujours. Dans ces conditions, exercer une quelconque
autorité sur des personnes qui le considèrent avant tout comme un
citoyen ordinaire devient vite délicat. Les auteurs des délits
que le maire va s'efforcer de réprimer n'hésitent pas à
« l'outrager dans l'exercice de ses fonctions».
D'après les sources judiciaires, neuf maires sont victimes d'injures,
soit 42,1 % des victimes d'outrages. Les adjoints semblent
épargnés puisqu'ils n'en sont victime qu'à deux reprises
soit 10,52 %, ce qui est plutôt logique au vu du degré
d'implication moindre de ces derniers.
Les représentants municipaux sont investis d'une
charge et sont particulièrement protégés par le code
pénal qui précise dans l'article 222
que « lorsqu'un ou plusieurs magistrats de l'ordre administratif
ou judiciaire auront reçu dans l'exercice de leurs fonctions, ou
à l'occasion cet exercice, quelque outrage par paroles tendant à
inculper leur honneur, ou leur délicatesse, celui qui les aura ainsi
outragés sera puni d'un emprisonnement d'un mois à deux
ans60(*) ».
Ces peines lourdes ne dissuadent cependant pas les villageois
à porter leur colère contre les élus locaux. Dans la
pratique les peines sont bien plus légères. En 1822 à
Grand, le maire, dans l'exercice de ses fonctions, se trouve sur la place
publique pour décider avec les habitants de la date de la moisson des
trémois61(*). Il
est interrompu par Nicolas Bonneville qui « s'est mis comme un
furieux sur le compte de deux gardes champêtres en proférant des
jurements en les traitant de voleurs, gueux, scélérats que
faisaient des rapports injustes et milles autres invectives que
c'étaient des lâches et des mauvais sujets et que le maire ne
valait pas mieux qu'eux62(*) ».
Nous avons ici affaire à un outrage
caractérisé à des représentants de l'Etat et de
surcroît en présence de tout le village. Pourtant le juge ne
sanctionne l'excité que de cinq journées de prison.
d. Trois
catégories d'outrages.
· Des outrages
verbaux courants :
Ces injures arrivent en tête avec 51,65%. Il s'agit
ici d'insultes. Les exemples abondent, il peut s'agir d'un citoyen
mécontent venant insulter le maire en le tenant responsable de ses
problèmes. Suite à ces «interventions de police«, le
maire se retrouve souvent au beau milieu de conflits. Les protagonistes sont
alors rarement ravis de le voir s'immiscer dans leur altercation et cherchent
souvent à le faire partir, en l'insultant.
A Grand en 1845 Le maire Étienne Gérard mis au
courant d'un conflit se rend chez Nicolas Henry, afin de faire cesser les
menaces et les injures que faisait Étienne Maugras à ses
beaux-parents. « Étant arrivé, nous avons entendu le
dit sieur Étienne Maugras, cultivateur demeurant à Grand, qui
était à l'entrée de la maison du sieur Louis Henry son
beau-père et qui disait en s'adressant à sa
belle-mère : vieille garce, toutes les fois que tu passeras
dans la grange je te f....rai de mon pied au cul, sur ce, je l'engageais
à se taire, aussitôt il est venu à moi comme un furieux me
disant, qu'est-ce que je venais me mêler de choses qui ne me regardent
pas, et que si j'avais entré dans la grange, il m'aurais foutu de son
pied au cul et que si on ne m'avait fait grâce je me serais pas maire de
la commune de Grand, et beaucoup d'autres injures entre autres qu'il se foutait
de moi etc. etc.63(*) ». Nous avons ici affaire à un
outrage caractérisé à un représentant de l'Etat et
pourtant le juge ne sanctionne le gendre que de cinq journées de
prison.
Dans une grande majorité de cas le maire est
outragé au cours d'un conflit entre particuliers qu'il tente de
résoudre. Ces outrages sont courants et de natures diverses.
· Les
outrages par geste et/ou les menaces menaces de mort :
Les intimidations vont de la menace de violence physique,
aux menaces de mort. Cette catégorie comprend 40,35% des outrages faits
aux maires. Les menaces de mort doivent être perçues avant tout
comme une technique d'intimidation et non pas la préméditation
d'un meurtre, nous n'avons en effet trouvé aucun cas de maire
assassiné. Il est évident que certaines menaces moins graves sont
plus que des avertissements, mais la plupart ne sont que des paroles, les
menaces de mort constituant le degré maximum de violence verbale.
Sociologiquement, ces menaces sont à
interpréter comme des mises en garde. Cette manière violente de
marquer son territoire est une réponse à une intervention du
maire ressentie comme une atteinte du « moi » cher à
Robert Muchembled64(*).
Ce dernier écrit à propos des rites de contact que « lors
d'une rencontre, [...] les êtres humains respectent des rituels
d'interaction. Devant un public qui les juge, ils ne peuvent déclencher
de but en blanc un combat : ils doivent annoncer leur intention, se placer en
position de loyauté vis-à-vis de leurs futurs adversaires, tout
en lui faisant perdre la face. Des signaux verbaux, sous forme de plaisanterie
et de moquerie, ainsi que des défis symboliques, prépare
l'agression physique ultérieure65(*) ».
Erving Goffman estime que le «face to face« (face
à face) est au coeur de l'ordre d'interaction. Ce sociologue estime
qu'un individu « garde la face lorsque la ligne d'action qu'il suit,
manifeste une image de lui-même consistante66(*) ». Toute personne,
et les élus en tête, doivent « s'assurer du maintien
d'un certain ordre expressif, ordre qui régule le flux des
évènements, importants ou mineurs [...]. Dans notre
société lorsqu'un individu montre ce scrupule d'abord par devoir
envers lui-même, on parle de fierté ; quand c'est par devoir
envers les instances sociales plus large dont il reçoit l'appui, on
parle d'honneur 67(*)». Goffman précise enfin, que la
dignité est la faculté de maîtriser son corps et ses
émotions. Le maire, s'il veut conserver son autorité ne peut
laisser de tels comportements impunis, il s'empresse donc de les communiquer au
procureur. Il n'est pas exclu que le maire se fasse lui-même justice
étant donné que son acte aura peu de chance d'aller devant les
tribunaux puisqu'il en est le correspondant local.
Dans la majorité des pièces d'archives
étudiées la menace de mort est à interpréter
justement comme ce besoin de faire perdre la face à un adversaire contre
lequel on sait bien qu'il est difficile de s'attaquer. A Punerot, au mois de
juin 1842, Pierre Vaconnet outrage publiquement par parole et par menace le
maire, ainsi que le garde forestier dans l'exercice de leurs
fonctions en déclarant que « s'il avait un fusil et
qu'il rencontre un maire, il n'irait pas plus loin... Il ne les manquerait pas,
quand même ce serait en 10 ans, et que s'il pouvait les tenir dans un
coin, ainsi que le garde forestier il leur casserait la gueule, et en outre en
traitant le maire de Polignac, de fripon et de canaille68(*) ». Voilà le genre
de menaces auxquelles sont confrontés les représentants
municipaux. On peut donc penser que ces derniers devaient posséder des
qualités physiques et psychologiques supérieures pour assumer de
telles fonctions.
· Les
outrages par paroles et agression :
L'agression physique est la forme d'outrage la plus violente
mais aussi la moins répandue. On ne l'a rencontrée que deux fois.
Les violences physiques contre les élus sont moins répandues que
les violences verbales car elles sont plus graves et plus fortement
sanctionnées. L'article 228 du code pénal prévoit que
« tout individu qui, même sans arme, et sans qu'il en soit
résulté de blessures, aura frappé un magistrat dans
l'exercice de ses fonctions, ou à l'occasion de cet exercice, sera puni
d'un emprisonnement de deux à cinq ans. Si cette voie de fait a eu lieu
à l'audience d'une cour ou d'un tribunal, le coupable sera puni du
carcan69(*) ». Cette
peine est logiquement plus importante que celle des outrages par paroles qui
durent de un mois à deux ans.
Les deux seules agressions physiques laissent à
supposer un certain respect pour l'intégrité physique des
élus. La première de ces deux agressions se produit à
A Avranville, l'adjoint Etienne est victime d'une agression
dans l'exercice de ses fonctions. Le 18 juin 1836, le maire et son adjoint
étaient réunis chez le dit Etienne avec plusieurs hommes, quand
« Marie Rose Jannot est venue en toute hâte nous dire que
devant la maison de Jeannot Nicolas aîné on battait Antoine Luc et
antoine luc son fils ; de suite nous nous sommes transporté au lieu
indiqué nous avons vu les sieurs Labbé qui tenant le dit Antoine
Luc père en lui relevant le menton avec le poing et parraissait avoit
recu des coups nous les avons sommé au nom de la loi de se
tenir, au même instant, le sieur Jean Baptiste Gene dit à
Etienne adjoint que cela ne le regardait pas et qu'il se foutait de la police
qu'il l'en merdait qu'il n'avait pas de droit avant 9 heures du soir en lui
lançant un coup de sa main sur l'estomac ensuite le reculant le jetant
en arrière sur du bois et lui donnant beaucoup de coup sur la
tête une quinzaine de coups de poings70(*) ». L'agresseur n'est
finalement puni que de quinze jours de prisons et de seize francs d'amende.
Un deuxième exemple se produit à
Tignécourt71(*).
Dans la pratique les peines pour outrage sont légères et ne sont
certainement pas dissuasives. Les atteintes physiques aux élus dans le
canton de Coussey n'en restent pas moins anecdotiques, et démontrent un
respect grandissant pour le maire dont l'autorité devient de plus en
plus acceptée. Le rôle de médiateur du chef de village, est
depuis longtemps reconnu, notamment dans les règlements
infrajudiciaires, ce qui accroît le respect porté au maire et aux
adjoints.
e. Les abus de pouvoir des
maires.
Si les représentants du village sont souvent victimes
des résistances de leurs administrés, certains semblent s'en
affranchir avec une grande facilité. Dans certains villages les maires
pourraient même apparaître comme des coqs de village prêt
à tout pour défendre leurs intérêts y compris
à utiliser des moyen illicites. A Ainvelle, Jean-François
Démorgon, membre du conseil municipal et ancien député, se
plaint des excès et violences commises sur sa personne « par
le sieur Nicolas Noël maire de la commune d'Ainvelle et de sa garde
personnelle72(*) ».
A Coussey les mêmes reproches sont adressés au
dénommé Grosyeux. Des propriétaires du village,
excédés par le comportement de leur maire adressent une plainte
aux autorités locales donnant lieu à deux enquêtes, l'une
menée à Neufchâteau, l'autre à Coussey ou environ
quatre-vingt témoins ont été entendus. Les pièces
de cette procédure ont été envoyées au Procureur
Général de la Cour Royale de Nancy pour faire prononcer un
jugement. L'affaire traîne, « le maire continue d'exercer ses
vexations et sa tyrannie envers ceux des habitants de la commune qui ont le
malheur de lui déplaire : au point de les excéder de coups quand
il les rencontre individuellement dans des lieux isolés ; étant
constitué d'une force extraordinaire est d'une brutalité qui y
répond il n'est pas possible de lui résister. Cependant il faut
qu'il y ait un terme non seulement à sa tyrannie de cet homme dangereux
mais encore aux vexations et aux concussions et à l'arbitraire qu'il se
permet dans son administration. Il paraît et l'on pourrait croire, qu'il
a surpris la religion des autorités locales pour éterniser
cette affaire et faire rester les pièces de la procédure au
sac73(*) ».
Ces deux exemples ne reflètent pas une majorité
mais ne doivent pas être gardés sous silence. Les maires, de
façon générale, s'acquittent honorablement de leur
tâche, et seules quelques têtes brûlées semblent
être capables de leur contester leur autorité.
f. Les appariteurs, des relais de
la commune.
Véritables porte-paroles des municipalités, les
appariteurs sont « chargés de rendre compte des contraventions
qu'ils remarqueront74(*)
». Ils complètent l'arsenal policier dans les communes en
remplissant une fonction mandatée par le maire et son conseil municipal,
afin d'informer les habitants par voie orale, des décrets et
arrêtés municipaux. C'est cette personne qui lit les
arrêtés pris par les autorités municipales ; « La
présente proclamation sera lue et publiée à son de caisse
pour que personne n'en ignore75(*) ».
Localement, le délit est réprimé par le
maire et ses assistants. Le premier élu peut s'appuyer sur son adjoint,
son conseil municipal et l'appariteur. Faire respecter la loi est le fardeau du
maire, qui tente inlassablement de réguler la délinquance et
d'assurer l'ordre public. Sa tâche est difficile, il est
régulièrement confronté aux délinquants qui
refusent son autorité en l'outrageant et même parfois en
l'agressant.
Cette régulation locale du délit est
complétée par les gendarmes, gardes et autres employés
chargés de maintenir l'ordre dans les villages du canton.
3.
Les agents professionnels de l'Etat et de ses administrations.
Gendarmes et autres gardes forestiers, gardes champêtres
et même les gardes-pêche sont des professionnels de la
régulation, leur fonction première est de traquer les
délits et de punir immédiatement leurs auteurs par une amende, ou
en rédigeant un procès-verbal en vue de suites judiciaires.
a. La gendarmerie et le maintient
de l'ordre public
·
Origines, et organisation de la gendarmerie.
La gendarmerie est crée en 1791 date à laquelle
elle est intégrée à l'armée. Le fonctionnement de
la police locale est régi par la loi du 3 brumaire an IV (soit le 25
octobre 1795). Cette loi sur les codes des délits et des peines fixe
clairement le rôle de la maréchaussée, « la police est
instituée pour maintenir l'ordre public, la liberté, la
propriété, la sûreté individuelle76(*) ». L'article 18 de la loi
de 1795 divise la police en deux entités ; l'une administrative,
tendant principalement à prévenir les délits et l'autre
judiciaire, rassemblant les preuves, pour livrer les délinquants aux
tribunaux chargés par la loi de les punir.
La loi du 28 germinal an VI (17 avril 1798) apporte des
modifications, « le corps de la gendarmerie nationale est une force
instituée pour assurer dans l'intérieur de la République
le maintien de l'ordre et l'exécution des lois. Une surveillance
continue et répressive constitue l'essence de son service »
L'ordonnance du 29 octobre 1820 réorganise la
gendarmerie, « dont le commandement militaire territorial, auquel la
gendarmerie est désormais subordonnée, et les commandants de
place reçoivent, au début de chaque mois, ses états de
situations numériques77(*) ».
Les gendarmes de l'arrondissement de Neufchâteau
dépendent de la lieutenance de Neufchâteau qui se subdivise en
trois brigades ; celles de Lamarche, Houécourt et de
Neufchâteau. La Maréchaussée néocastrienne est
composée d'une brigade à cheval de quatre gendarmes et d'un
maréchal des logis unique dans l'arrondissement. Le brigadier de
gendarmerie, supérieur des gendarmes dépend directement du
sous-préfet et du préfet.
· Des attributions
variées.
Leur fonction est de veiller à la
sécurité des personnes et des biens (surveillance des
bâtiments communaux et des équipements publics). Ils assurent la
tranquillité en s'efforçant de maintenir l'ordre public. Ils
jouent également un rôle dans le domaine de la salubrité.
Ce vaste domaine comprend le respect de l'environnement, l'hygiène
publique, la police des marchés, la recherche des auteurs de
dégradations de biens publics ou privés, la police des
débits de boissons, ainsi que la surveillance de la pêche et de la
chasse.
La police administrative prévient les délits par
la surveillance générale en luttant contre le vagabondage, par
des missions d'assistance, d'escorte des convois, et de maintien de l'ordre
lors des marchés, foires, fêtes et rassemblement divers78(*). La police judiciaire,
rassemble les preuves, pour livrer les délinquants aux tribunaux en
constatant crimes et délits, en établissant de
procès-verbaux, en recevant les témoignages et en arrêtant
des suspects.
Les gendarmes montés sur leurs chevaux sont très
mobiles et parfaitement adaptés à leur environnement et à
la traque des délinquants. Nous avons vu précédemment
qu'ils pouvaient être envoyés par le procureur pour mener des
enquêtes. Ils sont également amenés à constater des
infractions de flagrant délit, le 28 décembre 1828, à
Saint Elophe, ils surprennent Jean Humblot garde chasse du Comte d'Alsace qui
chasse en plaine sans permis, ce qui lui vaut un procès verbal. La
police de la chasse empiète avec les prérogatives des gardes
champêtres, en effet les gendarmes ont de multiples attributions, ils
sont de véritables agents tous terrains ou plutôt tous
délits.
Lors de leurs tournées ils arrêtent couramment
des vagabonds et des mendiants, 72 % des vagabonds et mendiants traduits devant
la justice locale ont été attrapés par la
maréchaussée comme Isabelle Ménardier qui se
promène dans les rues de Neufchâteau. Le 19 mars 1816, elle est
arrêtée par le sieur Philippe, gendarme royal rue de la place,
puis traduite devant la justice79(*).
Les «pandores« après avoir fait leur
tournée dans la contrée doivent réaliser des compte rendus
qui seront adressés à leur supérieurs. La gendarmerie
consigne systématiquement les rapports des tournées dans les
communes, les rapports de quinzaine adressés à monsieur le
Commissaire Départemental ainsi que les relevés des
événements de police qui ont eu lieu dans le département
des Vosges, et qui ont été signalés au Préfet.
· Des agents peu appréciés par la
population.
Tout comme les élus de la commune, les forces de
l'ordre sont régulièrement prises à partie et
insultées. Seulement 21,39 % des outrages le sont contre des gendarmes
de 1810 à 1857, ce chiffre moindre par rapport aux outrages aux
élus municipaux (52,62 % maires et adjoints cumulés), ne signifie
pas pour autant que la maréchaussée soit plus respectée
que les maires et leurs adjoints. Statistiquement, le nombre d'interventions de
gendarmes dans les villages est moins important que celui des maires et
adjoints ce qui nuance ce plus faible pourcentage.
Les outrages qui leur sont fait sont rarement physiques car
ces derniers sont armés et sont habilités à faire usage de
leur arme en cas de danger.
Les missions menées par les gendarmes
s'avèrent parfois houleuses. Le 28 juin 1810, une vaste opération
contre des déserteurs et des braconniers résidant à
Sionne, Midrevaux, Seraumont et Greux, s'avère périlleuse. Cette
opération est menée conjointement par quatre gendarmes de la
brigade de Neufchâteau et par neuf gardes forestiers contre des
personnes décrites comme des « êtres immoraux suspects
et dangereux80(*) ».
Arrivés à Sionne, premier village de leur opération de
désarmement, ils sont immédiatement confrontés à
l'hostilité des braconniers et de certains habitants du village ainsi
que de l'adjoint au maire. Le premier braconnier, le fils de Jacques Lebrun dit
« Jacquot » refuse de remettre son fusil au gendarme
Grégoire qui est assisté de deux gardes forestiers. Finalement,
le braconnier parvient à les enfermer tous les trois dans une
pièce de sa maison. Alerté, le chef du groupe, le brigadier
Joseph Lefèbvre « se rendit sur le champ au domicile du dit
Jacquot ou il trouva le dit Grégoire qui avait son sabre à la
main et entouré de plusieurs personnes de différents sexe, aussi
tôt que le dit brigadier fut entré dans la chambre il demanda quel
était l'objet de la contestation, pour toute réponse il fut
injurié et traité de la manière la plus vexatoire, [...]
le fils du dit Lebrun pris même une chaise pour l'an vouloir frapper que
le dit Lebrun père, lui porta différentes fois le poing sous le
nez en lui disant tiens B.... et que ce ne fut qu'avec la plus grande
difficulté qu'ils parviennent à enlever le fusil du dit
Jacquot81(*) ».
Le maire étant absent les gendarmes se tournent vers
son adjoint « pour prendre communication des ordres dont le brigadier
était porteur et de l'accompagner à être présent
à ses opérations ainsi qu'a l'audition de son
procès-verbal à quoi le dit sieur adjoint n'a nullement pas voulu
déférer [...] et se mit dans une telle colère qu'il ne
voulait rien voir [...] voyant que l'adjoint ne respectait rien,
commença à m'injurier et en faisant plusieurs menaces avec son
poing et en me disant va bougre de matin, s'il ny en avait quatre comme moy
dans la commune vous n'an sortiriez pas82(*) ».
De telles interventions sont rares de part leur importance au
vu du nombre de gardes et de gendarmes dépêchés et de part
l'intensité du refus de coopérer de certains villageois. Les
braconniers sont bien décidés à conserver leurs fusils et
n'hésitent pas à recourir à la confrontation pour
conserver leurs biens. Plusieurs types d'outrages que nous avions
précédemment divisés en catégories sont ici
présents : l'outrage par parole, les menaces et l'agression
physique. Ces violences sont des violences défensives, la
communauté dans son ensemble se sent menacée ce qui explique la
situation explosive.
La tâche des gendarmes et leurs relations avec la
population s'avèrent difficile. La maréchaussée s'occupe
également de la conscription, ce qui augmente et renforce la
méfiance des villageois. Cet épisode à lieu au
début de la période étudiée, rare il peut
être interprété comme une survivance du refus de
l'autorité et de l'esprit communautaire encore fort. Nathalie Petiteau
voit dans les violences de ce type une forme d'archaïsme politique.
« Dans les villages de l'Empire, en l'absence de pratiques
démocratiques, la violence contre les représentants de l'Etat
semble demeurer la voie privilégiée d'expression des
oppositions83(*)
».
Cyril Carteyrade dans son étude sur la gendarmerie du
canton de Tauves montre que la moitié des gendarmes est originaire du
département ce qui pour lui démontre la volonté
« de favoriser une certaine familiarité avec les
populations84(*) ». Cette « police de
proximité« doit être nuancée par les courts temps
d'affectation des gendarmes, qui s'implantent rarement dans les brigades
où ils traquent le délinquant.
· Relations avec les autres représentants de
l'autorité.
Nous avons vu précédemment que les gendarmes ont
besoin de la présence des élus municipaux pour procéder
à des perquisitions et des opérations de police dans les
villages. Ces représentants municipaux ne sont pas toujours
disposés à collaborer avec eux et peuvent même se montrer
hostile comme l'adjoint de Sionne qui insulte le brigadier Lefèbvre. A
Punerot au mois de juin 1844 c'est à nouveau l'adjoint qui se montre
agressif contre les bicornes. Suite à une enquête sur des
charivaris, ils demandent au maire et à l'adjoint, s'ils ont des
informations sur ces faits. Ces derniers répondent qu'ils ne savent
rien. L'adjoint se montre particulièrement peu coopératif.
Habitant à côté de la cure85(*), il est pertinemment au courant des auteurs de ces
charivaris, cependant il répond « qu'il n'a rien vu et n'a pas
à rendre compte quand même il saurait quelque chose il ne dirait
pas86(*) ».
Entre les refus de coopérer, les interventions
difficiles et les insultes, la maréchaussée effectue une
tâche difficile qui de part sa nature suscite résistance et
violence. Ils sont secondés par les gardes champêtres qui ont des
attributions similaires. Finalement le gendarme du XIXème siècle
apparaît comme la bête noire des populations qui le craignent et
qui le déteste.
Redouté des malfrats, le gendarme est l'oeil et le bras
de l'Etat qu'il tient informé par des rapports réguliers. Il
veille efficacement au respect de la loi, exposé au contact de la
population qui ne le voit pas toujours d'un oeil bienveillant, il subit comme
ses collègues gardes de nombreux outrages au cours de ses
tournées.
b. Les gardes.
Il existe plusieurs types de gardes : les gardes
champêtres, les gardes forestiers, les gardes pêches et les gardes
particuliers. Tous sont investis de pouvoirs, « ces gardes sont des
officiers de police judiciaire, spécialement institués pour
constater les contraventions et délits ruraux et forestiers87(*) ».
· Création, dépendances et qualités.
Cette fonction ancienne a été instituée
aux côtés de l'actuelle
gendarmerie
nationale par les lois des 29 septembre et 6 octobre
1791 appelées Code
Rural. Nommé par le maire et assermenté, le garde champêtre
exerce des missions de
police rurale
(police des campagnes) aux côtés des gendarmes.
Ils sont sous de nombreuses autorités et semblent
écrasés par le poids de la hiérarchie. Auxiliaires de la
police judiciaire, ils sont subordonnés aux Procureurs, auxiliaires de
l'administration, ils sont « sous les ordres du maire de la commune
pour exécuter tout ce qu'il prescrit pour l'application et
l'exécution des lois, arrêtés et règlements88(*) ». Ils sont en outre
sous l'autorité de la gendarmerie qui peut les réquisitionner et
qui « s'assurera lors de ses tournées, si les gardes
champêtres remplissent bien les fonctions dont ils sont chargés et
ils rendront compte aux sous-préfets de ce qu'ils auront appris sur la
conduite et le zèle de chacun d'eux89(*) ».
Les qualités d'un garde champêtre doivent
répondre à plusieurs critères : « il faut
trouver dans les habitants de la campagne des qualités dont la
réunion est assez rare. Un garde Champêtre doit avoir une grande
exactitude, une infatigable activité, une vigilance à tromper, un
désintéressement qui le mette au dessus de la corruption, il doit
avoir quelques notions relatives aux lois sur la police des campagnes, des
idées assez nettes pour rédiger un procès-verbal, enfin
assez de droiture pour que dans l'exercice de ses fonctions, il ne se laisse
influencer par ni par des haines ni par des affections
particulières ». Cette liste des qualités souligne
avant tout la nécessaire intégrité des futurs gardes.
· Le garde, un
défenseur des intérêts communaux.
Les fonctions des gardes-champêtres sont
résumées dans l'article 16 du Code d'instruction criminelle comme
suit :
«1° Rechercher, chacun dans le territoire pour
lequel il a été assermenté, les délits et
contraventions qui portent atteintes aux propriétés
rurales ;
2° Suivre les choses enlevées dans les lieux
où elles auront été transportées, et les mettre en
séquestre ; sans pouvoir cependant s'introduire dans les maisons et
cours adjacentes, si ce n'est en présence du juge de paix, ou de son
suppléant, ou du maire du lieu, ou du commissaire de police ;
3° Dresser les procès-verbaux des délits et
contraventions qu'ils auront reconnus ;
4° Arrêter et conduire devant le juge de paix, ou
devant le maire, tout individu surpris en flagrant délit, ou
dénoncé par la clameur publique, lorsque le délit emporte
la peine d'emprisonnement ou une peine plus grave90(*) ».
Le garde est surtout l'employé du maire, il agit dans
l'intérêt de la commune et veille à la défense de
son intégrité forestière, de son cheptel animal, et veille
au respect de ses arrêtés et règlement dans le village et
dans les champs. « Les gardes champêtres surveilleront
l'exécution des décisions de la municipalité sur leur
propre responsabilité91(*) ».
Cet article montre clairement l'importance du garde en
matière de police. Il est le trait d'union entre la population, le
maire, l'Etat et la gendarmerie. Infatigable policier rural, il est
habilité pour traquer un nombre impressionnant de délit.
· Des gardes adaptés
à la traque locale des petites infractions.
Ils résident dans les municipalités dans
lesquelles ils ont été nommés, et sont de ce fait
particulièrement adaptés à leur environnement et à
la traque des délits commis sur le territoire de leur commune.
Les gardes champêtres et forestiers s'occupent
essentiellement des petits délits et des délits de chasse et
forestiers, ainsi à Maxey-sur-Meuse, le 15 mai 1819 les gardes dressent
un procès-verbal contre Nicolas Humblot et Nicolas Fournier qui
avaient illégalement coupés du bois dans une coupe. Ces
infractions ainsi que les délits de chasse constituent leur principale
activité mais ils sont parfois amenés à exercer des
missions de police.
A Punerot le onze mai 1810 Urbain Gallot garde des bois
communaux est requis par le juge de paix de rechercher des roues et bandages
volés. Accompagné de deux autres gardes, ils ont
« trouvé un particulier qui leur était inconnu, qui
avoit une hotte, sur laquelle hotte nous avons aperçu un sac, qui
couvroit quelque-chose qui était dans cette hotte et qui nous a paru
suspect, nous avons demandés ce particulier de mettre bas sa hotte ce
qu'il a fait92(*) ».
Les soupçons des gardes s'avèrent corrects la personne
interpellée est bien celle qu'ils traquent depuis deux semaine mais
cette dernière parvient à s'échapper malgré leurs
cris et quelques coups de feu tirés en l'air « pour lui faire
peur ».
L'intervention des gardes semble moins professionnelle que
celle de leurs collègues gendarmes. On voit clairement qu'ils sont
sous-équipés puisqu'un cheval leur aurait permis de rattraper le
fuyard.
Son autorité, comme celle de n'importe quel agent ayant
des pouvoirs de police est souvent contestée par des délinquants
frustrés de s'être fait verbaliser. Ainsi le garde
n'échappe pas aux menaces coups et insultes puisqu'il subit 21,36 % des
outrages. Ceux-ci sont similaires à ceux subis par les maires et les
gendarmes. Bien connus de leurs concitoyens les gardes sont fréquemment
chahutés, le 30 juillet 1810 à Coussey, Antoine Paulau se fait
subtiliser son fusil, il est difficile de savoir s'il s'agit d'une simple
plaisanterie ou s'il s'agit d'un geste plus symbolique de bravade de
l'autorité en s'emparant d'un insigne du pouvoir, en l'occurrence le
fusil d'un officier de police judiciaire auxiliaire.
Les gardes apparaissent comme une force d'appoint que l'on
appelle en renfort lorsque la situation l'exige. Le garde est avant tout un
gendarme bis au service de la commune qui traque localement les petites
infractions essentiellement commises au quotidien dans les champs ou la
forêt par les habitants. D'autres fonctionnaires et officiers
interviennent pour le contrôle des marchandises ou les saisies.
c. Les agents de la régie
des droits réunis et les huissiers.
· La
régie des droits réunis, une douane rurale peu
appréciée.
En 1797, les impôts indirects sont rétablis,
neuf ans après la Révolution, sous le terme de "droits
réunis". Cette entité devient la direction générale
des Contributions Indirectes le 1er Germinal an XIII. Cette
administration s'assure d'une perception régulière des
impôts pour éponger la dette publique, gère les octrois
municipaux et de bienfaisance, et taxe de nombreuses marchandises : or et
argent, cartes à jouer, voitures publiques, tabacs, sel, droits sur les
vins et alcools.
Le directeur des droits réunis dans le
département réside à Epinal. Sous ses ordres se trouve
à Neufchâteau, le contrôleur principal qui commande
directement les employés de la régie qu'il envoie pour des
missions de contrôle dans les villages.
Les employés de la régie des droits
réunis se manifestent surtout par le contrôle des boissons. A
Liffol-le-Grand, le 27 novembre 1812, ils interviennent chez François
Florion « instruits que ce particulier vendait des boissons
clandestinement, en fraude des droits93(*) ». Six mois auparavant la même
administration avait découvert des bouteilles suspectes à Ruppes
au domicile du cabaretier Joseph Thouvenin.
Cette administration s'apparente à une douane rurale.
Le directeur général en 1813, Antoine Français fut
d'ailleurs directeur des douanes à Nantes sous Louis XVI94(*). A Grand le 20 janvier 1816
sur un chemin vicinal, la régie arrête Jean Durand qui porte une
hotte suspecte dans son dos. Les deux employés de la régie des
droits réunis procèdent à la fouille de la hotte et
découvrent que « Le sac qui se trouvait dans sa hotte contenait des
chapeaux, nous en étant emparés nous y avons trouvé un
chapeau et dans le fond du tabac filés en semelles et non revêtu
des marques de la régie95(*) ». Les marques de la régie sur les
produits consommables permettent de vérifier instantanément la
légalité du produit et d'arrêter les contrebandiers comme
cet homme de Grand.
Les membres de cette institution ne se font outrager que
trois fois dans nos sources, ce qui peut sembler faible mais est au contraire
énorme car cette administration disparaît avec Napoléon
Ier ; nous n'avons donc pu l'étudier que pour quelques
d'années.
· Les huissiers,
des satellites de la Justice.
Repris en main par le pouvoir central par l'arrêt du 22
thermidor an VIII le statut de l'huissier est renforcé par un
décret impérial, datant du 14 juin 1813. Celui-ci reprenait
d'ailleurs certains textes anciens pour déterminer par exemple le mode
de nomination des huissiers et pour fixer les connaissances requises ainsi que
les attributions exactes de ces officiers96(*). Ils sont très présents en milieu rural
on les rencontre comme satellites de la Justice lorsqu'ils sont chargés
de conduire les condamnés à la maison d'arrêt.
Ils sont souvent amenés à procéder
à des saisies pour le recouvrement de dettes ce qui les expose comme
toutes les personnes investies de pouvoirs, à la méfiance des
habitants. De part leur fonction ils sont particulièrement
exposés aux violences des personnes chez qui ils sont amenés
à procéder à des saisies. A Liffol-le-Grand,
l'huissier Bellot se rend chez Thérèse Joséphine Ladier
qui lui résiste avec violence97(*). Le 2 août 1823, l'huissier Lanfroid
procède à une saisie sur les meubles et effets du domicile de
Nicolas Marchal dit Graillot. Ce dernier outrage l'huissier par parole et le
menace d'une pioche. La tâche de ses officiers est
particulièrement périlleuse car la tension monte rapidement
lorsqu'il s'agit de porter légalement atteinte à la
propriété.
Inspecteurs de la régie et huissiers,
n'échappent pas aux coups de sang des habitants.
La traque des délits et le maintien de l'ordre sont des
tâches quotidiennes. De nombreux fonctionnaires et élus ont pour
tâche de traquer les réfractaires. Maires, adjoints et gardes sont
investis de tâches bien lourdes pour de simples villageois souvent
solitaires dans l'exercice de leur fonction. Les gendarmes mieux
équipés sont souvent plus dissuasifs, bien que leur
présence soit mal perçue. Elus, et fonctionnaires sont victimes
de la colère des habitants lors de leurs interventions, et doivent
composer avec les menaces et les injures qui parfois cèdent le pas
à des violences plus importantes. Gendarmes et gardes suppléent
le maire. Armés et investis d'une mission, leur action est
néanmoins parfois difficile et contestée.
Les auteurs de toutes ces infractions devront ensuite
répondre de leurs actes devant les tribunaux.
B.
L'accusé face à la justice, les différentes phases de la
procédure.
La confrontation face à la justice est la
conséquence de présomptions d'avoir commis un délit.
Une fois l'infraction relevée ou le délit
identifié, les autorités judiciaires locales vont monter un
dossier qu'elles compléteront par des prises de renseignements au
travers d'enquêtes sur le terrain. Le prévenu est alors soumis
à un interrogatoire parallèlement aux auditions de témoins
pour enfin être confronté au tribunal qui statue sur son sort. Le
bon fonctionnement de la justice est cependant fragile en étant parfois
gêné par des comportements répréhensibles ou
inappropriés.
1.
Découvrir les infractions.
La découverte de l'infraction incombe aux agents de
l'Etat et aux élus, ils sont parfois suppléés par les
habitants. Les maires apparaissent incontournables dans cet exercice, ils sont
bien sûr assistés dans cette tâche par la
maréchaussée et les gardes mais également par des
alliés inattendus : la délation, la clameur publique et la
plainte.
a. Les correspondances des maires
aux procureurs, des points d'appuis à de nombreuses
procédures
Lorsque qu'une infraction se commet il existe
différentes manières pour que l'affaire transpire au grand jour.
Le maire est le relais du juge de paix. Leurs correspondances fournissent une
base importante de débuts d'affaires. Ainsi le 31 décembre 1816
le maire de Liffol-le-Grand avertit le juge de paix du canton de
Neufchâteau de problèmes survenus dans la soirée.
« Nous (maire) instruit qu'il y avait dans les champs
derrière les maisons à l'extérieur des jardains proche les
murs, à la nuit tombante vers les cinq heures du soir, une personne qui
criait et qui jettait des cris effrayant autour de la quelle s'était
rassamblé une grande quantité de personne, qui nous ont
déclaré n'avoir put obtenir aucune raison d'elle, La populace qui
l'environnaient à trouvé près de distance de cent pas
d'elle du butin qui était caché à côté d'un
mur dans des brusailles, ils ont remis le butin dans le sac et ont
apporté la personne et le sac en notre domicile98(*) ». Cette lettre se
veut avant tout informative, les détails sont nombreux car
l'évènement a été consigné sur le champ. Ces
documents sont importants car ils servent couramment de base aux
procédures. Pour étayer son propos, le maire peut parfois
procéder à un interrogatoire sommaire afin d'en savoir plus sur
les raison de l'infraction. Ici il s'agit d'un délit de vagabondage et
le maire va surtout essayer d'en savoir plus sur la personne elle même,
« nous lui avons touchées plusieurs questions
particulièrement sur ses noms et prénoms lieu de domicile si elle
avait des papiers nous ayant répondu qu'elle n'avait jamais eu ; et
que toute sa vie elle avait voyagé en mendiant son pain et qu'elle avait
été arrêté plusieurs fois99(*) ».
b. le rôle des
représentants de l'état dans la chasse aux infractions.
Les délits sont souvent constatés par les
représentants locaux de l'état, que ce soient les gardes
champêtres ou les gendarmes. Les différents corps de l'Etat ont
pour attribution de s'occuper de délits particuliers comme les gardes
champêtres traquant les délits forestiers, les gendarmes
s'occupant des vagabonds ou du trouble de l'ordre public, et les maires
s'assurant de l'ordre au sein de leur commune. Détecter et traquer les
infractions font partie de leur attributions dont ils s'acquittent
parfaitement. Ainsi le garde champêtre de la commune de d'Avranville,
Alexandre Labbe certifie que « faisant sa tournée ordinaire
[...] il a trouvé deux poulains le jour d'hier appartenant à
Nicolas Michel Cultivateur en pâture dans un sainfoin [...] appartenant
à Jean L'aîné100(*) ». Les gardes mettent un point d'honneur
à réaliser des procès verbaux minutieusement
détaillés car il arrive que le rapport soit incomplet et permette
au prévenu d'invoquer des vices de procédure.
c. La plainte pour réparer
les injustices.
Les infractions peuvent également éclater suite
à une plainte adressée à la gendarmerie ou aux élus
locaux. Les plaintes regorgent également de nombreux détails le
futur plaignant n'hésitant pas à charger la personne dont il veut
la condamnation. Il ne faut pas sous estimer le rôle du maire qui pourra
user de son autorité pour dissuader ou encourager une plainte selon que
la victime supposée fasse partie de son réseau d'amis ou au
contraire des personnes qu'il n'apprécie pas.
Le plus souvent ces plaintes concernent des atteintes à
la propriété ou à l'intégrité physique ou
morale de la personne qui requiert l'aide de la justice. Plus rarement ces
plaintes désignent des vols ou des accumulations de préjudices
subis qui poussent la victime à révéler ses souffrances au
grand jour pour mettre un terme à une situation qui à
dépassé les limites.
Ainsi à Coussey le 30 juillet 1830 « s'est
présenté le sieur Claude Ferbus, domicilié au dit Punerot,
qui nous a requis de recevoir la plainte qui suit. Hier vers dix heures du
matin, les nommés Jeanne-Marguerite Ferbus, sa fille et Marie-Anne
Daouze, son épouse étant dans la rue devant la maison qu'il
habite le sieur Charles Robert pâtre domicilié au dit Punerot, qui
est son gendre les a empoignées et renversois sur le pavé ensuite
il les a trainées dans l'intérieur de leur maison, ou il les
à assaillies de coups de poings et de coups de bâton, et les a
menacées de les tuer tous101(*) ».
Déposer plainte n'est jamais aisé. Pour
légitimer son action l'auteur de la démarche exagère
souvent la situation pour la rendre inacceptable aux yeux de la justice et
ainsi s'attirer ses faveurs. Il y a peu à craindre que le gendre mette
ses menaces à exécution si toutefois elles ont eu lieu. La suite
est typique du dépôt de plainte et sert une nouvelle fois à
la victime présumée de justifier son recours à la justice
et surtout à la dénonciation. « Il y a trop à
craindre que de pareilles scènes ne se renouvellent, connaissant le
caractère du dit Robert qui habite la maison voisine voyant que c'est
déjà pour la troisième fois qu'il les a assaillies de coup
de poings désire être vengé de l'outrage et des coups que
sa femme et sa fille ont reçus »
d. Clameurs publiques et
dénonciations sont des vecteurs importants de la découverte
d'infractions en tous genres et parfois anciennes.
L'un des derniers moyens de découvrir quelques menues
infractions est d'écouter la clameur publique et les
dénonciations. De nombreuses affaires sont ainsi
révélées par la rumeur. Les habitants d'un même
village vivent dans une communauté où la proximité
favorise les confessions et la surveillance mutuelle, chacun étant
à l'affût des agissements de ses voisins. En effet, le 3
février 1823 le maire de Grand et l'adjoint de la commune
révèlent dans une lettre qu'ils ont été
informés d'un vol « tant par la clameur publique, que par une
dénonciation, faite à l'adjoint par Marie Henri102(*) ». Dès
lors, cacher des agissements à la limite de la légalité,
devient illusoire. Les dénonciations sont le plus souvent
révélées dans la commune aux instances municipales mais
peuvent également être adressées par des particuliers
à des personnages importants aux yeux des habitants et incarnant la
justice comme le procureur qui reçoit en 1813 une lettre de
dénonciation de la part de madame Collin de Frébécourt
à propos d'une charge de sage-femme destinée à
évincer « une autre matrone de la commune103(*) ». Ces
règlements de compte font parfois ressortir des histoires anciennes et
résonnent parfois comme des mises à mort judiciaires.
La chasse aux infractions est la première étape
avant d'engager une action judiciaire. La découverte du délit
n'est jamais aisée, cette tâche est dévolue aux agents de
l'Etat et aux maires, véritables yeux de la Justice. Plaintes et clameur
publique se révèlent fortes utiles pour détecter les
pratiques «illégalistes«.
Cette première étape précède les
multiples enquêtes nécessaires à l'instruction de
l'affaire.
2.
Obtenir des éléments complémentaires, enquêtes sur
les lieux du crime.
Une fois le délit connu et son énoncé plus
ou moins bien formulé, le procureur exige des informations
complémentaires en dépêchant gendarmes et juges de paix et
en envoyant des experts en chirurgie pour constater les blessures dans les cas
de violences physique. Quels sont les informations supplémentaires
nécessaires à l'instruction ?
a. Gendarmes et enquêtes
sur le terrain.
Dépêchés sur place les gendarmes
débutent ce que l'on pourrait qualifier d'enquête
préliminaire. Il s'agit surtout d'obtenir des éléments
concrets pour que le procureur puisse se faire une première idée
car souvent le jugement du maire et ses à priori ne fournissent pas une
vision objective du délit. Disposant du recul et des qualifications
nécessaires les gendarmes vont tenter de collecter les premières
informations. Le onze décembre 1818, Joseph Lefebvre brigadier de
gendarmerie impériale accompagné d'un collègue
« se sont transportés dans la dite commune d'Aouze à
l'effet de prendre des renseignements sur le dit vol [...] nous nous
sommes rendus au domicile du sieur maire de la dite commune pour qu'il nous
donne quelques informations sur la nature du vol ses hauteurs lequel sieur
maire nous à déclarer que le vol commis était du fil qui
à été volé à Nicolas Hocquart tisserand au
dit Aouze, le deux de ce mois pendant la messe mais qu'il n'en connaissait pas
les auteurs104(*)
». Les deux gendarmes se rendent ensuite chez la victime qui leur donne
alors un peu plus de précision sans pouvoir toutefois donner un nom au
voleur. Le commerçant va alors révéler qu'il a
été volé récemment plusieurs fois. Les gendarmes se
mêlent aux habitants et les dénonciations fusent, les noms de
coupables potentiels se multiplient « tantôt l'on accuse
François Drouot tantôt Jean Nicolas Cotote dit Midicinot, tous les
deux tisserands au dit Aouze, que cette diversion n'est excitée que pour
mettre a l'abry le premier auteur que l'on soupçonne être
Lambert Millot ». Les gendarmes semblent submergés de noms
puisqu'un quatrième suspect est bientôt dénoncé, il
s'agit de Vincent Millot le beau frère du commerçant.
Cette intervention de la maréchaussée peut
sembler inutile, « clameur publique » et
« opinion publique » sont déchaînées et
même le maire est mis en cause en étant accusé,
« dans l'opinion publique le maire paraît soutenir le
brigandage ».
Les juges qui sont amenés à épauler la
gendarmerie dans la collecte d'informations semblent plus respectés que
leurs collègues à képi.
b. Visite du juge et
premières impressions.
Tout comme les gendarmes le juge de paix peut être
amené de part ses fonctions à se rendre dans un village où
à été commis une infraction qui nécessite de plus
amples informations. Le juge de paix peut être amené à
perquisitionner au domicile des auteurs supposés d'un délit. En
novembre 1816, suite à un vol commis à Sionne, le juge se
rend chez un suspect de Midrevaux et « saisit en son domicile deux
petites clefs105(*) ».
La visite du juge de paix est identique à la
démarche des gendarmes. Il s'informe et reconstitue l'affaire, le 24
mars 1813 à Outrancourt, le juge Godard enquête sur la
« femme de Charles Nicolas Martin, que le public accusait de
tentative d'assassinat sur la personne de son mari, il est constant qu'elle l'a
frappé [...] mais n'a ni intenté à sa vie ni eu
l'intention de le faire106(*) ». Le juge contrairement aux gendarmes donne
son avis sur les suites à réserver à l'affaire,
« suivant les déclarations de Martin et les témoins,
elle est je pense susceptible d'une punition107(*) ».
c. La visite du chirurgien :
déterminer l'ampleur des blessures, du simple constat d'ecchymoses au
rôle de médecin légiste.
Le chirurgien joue un rôle important pour la
constatation de blessures qui pourront influer sur la future procédure.
Lors de sa visite chez la personne touchée, le chirurgien va s'atteler
à inspecter minutieusement son patient pour l'occasion. Les coups les
plus importants peuvent occasionner des incapacités de travail, le
capital physique de chaque individu est souvent sa principale richesse,
être atteint physiquement est donc dramatique pour ces villageois qui
seront dans l'incapacité de travailler et surtout de nourrir leur
famille. A Frébécourt le 26 juin 1821 le chirurgien doit
déterminer si « les blessures du dit Vuillemin ne l'ont
empêché de vaquer à ses travaux que pendant l'espace de
vingt jours108(*) ». Ces vingt jours font
référence à L'article 309 du code pénal qui «
puni de la peine de réclusion, tout individu qui aura fait des blessures
ou porté des coups, s'il est résulté de ces actes de
violence une maladie ou incapacité de travail personnel pendant plus de
vingt jours »109(*).
Ces chirurgiens se transforment parfois en médecins
légistes. Le 13 janvier 1811 à Lamarche le jeune Joseph Armand
qui jouait dans la neige atteint d'une boule la femme de Jean-Pierre Bourcier,
une femme du village qui se saisit de lui et le frappe d'une pierre. Le jeune
garçon décède quelque jours plus tard, deux chirurgiens de
Lamarche, « Pierre Touvenel et Antoine Jourdain » sont
alors dépêchés sur place pour déterminer si la
victime est morte de ses blessures. « Nous avons trouvé
le corps du défunt gisant dans un cercueil [...] après l'avoir
mis sur une table pour l'examiner ont trouvé une plaie d'environ six
lignes, divisant seulement le cuir chevelu, situé sur la partie du
pariétal droit ; procédant ensuite à l'ouverture du
crâne, ils ont trouvé le cerveau dans un état
sain »110(*). « D'après toutes les
considérations du sieur Jourdain et Touvenel, estiment que le dit Joseph
armand n'est point mort des suites de sa blessure mais bien d'une rougeole
compliquée ». L'intervention des deux chirurgiens est
concluante et permet de disculper la femme de Bourcier de meurtre.
Les enquêtes sur le terrain sont primordiales et
déterminantes quant à la suite de la procédure, que ce
soient les gendarmes, le juge ou le chirurgien tous livrent des informations
capitales pour le jugement qui clôturera l'affaire.
3.
Vers le dernier acte de la procédure.
Cette dernière étape est avant tout celle du juge
qui parfait les derniers détails et collecte les dernières
informations. Comment se conclut une affaire devant la justice ?
a. Juges de paix et
interrogatoires, la chasse aux informations.
Une fois les constatations des délits terminées
et les premières présomptions formulées, le juge de paix
va jouer un rôle important en décernant un mandat de
dépôt contre le prévenu (emprisonnement préventif).
Cet emprisonnement n'est pas systématique « le prévenu
s'il s'agit d'un délit de peu d'importance continue à vaquer
à ses occupations111(*) », en revanche si le délit est plus
grave le prévenu peut passer plusieurs jours en prison dans l'attente du
procès. Le prévenu gardé au «frais« est conduit
au juge de paix par un huissier qui le questionne d'abord sur son état
civil. Ainsi, en 1816, un habitant de Midrevaux, suspecté de vol aux
forges de Sionne « a été amené par l'huissier
Génin père, Joseph Cleret, maréchal Ferrand demeurant
à Midrevaux détenu en la maison d'arrêt de cet
arrondissement en vertu du mandat de dépôt décerné
contre lui le vingt sept novembre dernier [...] auquel interrogatoire nous
avons procédé ainsi qu'il suit112(*) ».
Le juge questionne d'abord le prévenu sur son
état civil qui lui répond : « Je me nomme Joseph
Cleret, je suis maréchal ferrant domicilié à Midrevaux, Je
suis natif de Balmont et je suis âgé de 43 ans113(*) ».
Ces préliminaires achevés, le juge pose une
série de longues questions précises et mûries de tous les
renseignements accumulés depuis le début de la procédure.
Ces questions sont tellement complètes que l'interrogé n'a
qu'à répondre par oui ou non. Par exemple le juge demande
d'abord, « interrogé dans la nuit du trois au quatre Novembre
dernier, vers onze heures du soir ne vous êtes vous pas introduit dans la
maison du sieur Florentin Muel propriétaire en Forges demeurant à
Sionne, en passant sous voûte du canal qui prend son ouverture sous la
roue des marteaux et va aboutir dans le jardin ? » Joseph Cleret
répond tout simplement non. La longueur des questions tranche
radicalement avec la brièveté des réponses. Cet
interrogatoire est ferme et directif laissant peu de liberté au
prévenu.
Par la suite les questions toujours aussi longues n'obtiennent
pas d'aveux mais au contraire des rectifications aux propos du juge, lorsque ce
dernier lui pose une question qui pourrait l'inculper, le prévenu sort
de son mutisme et se défend avec un luxe de détail, «
Interrogé n'avez-vous pas dit ce jour là à une personne
que vous alliez faire un voyage dont vous voudriez bien être
débarrassé ?
- [a répondu], ce n'est pas ce jour là que j'ai
dit cela mais c'était le dimanche trois novembre que j'ai dit (cela) a
un de mes voisins [...] le motif de mon voyage était d'aller chercher de
l'argent ou l'on m'en était du et de rapporter de l'ouvrage114(*) ».
Tant que les questions restent vagues, le prévenu ne se
sent pas menacé par le juge. Mais, lorsque des zones d'ombres
apparaissent et que le juge essaie de les éclaircir avec des
présomptions qui incriminent le prévenu, ce dernier commence
à se défendre, livrant probablement les informations attendues au
magistrat.
Les juges obtiennent rarement des aveux lors de cette
étape qui sert surtout à confronter le prévenu une
première fois à l'autorité de la justice incarnée
par le juge. Le prévenu intimidé peut toujours donner des indices
sur son méfait supposé, le côté officiel de la
démarche est rappelé en fin d'interrogatoire où
l'interrogé doit répéter « mes réponses
contiennent vérité, j'y persiste et veux signer »,
l'interrogatoire est ensuite lu et signé.
b. Audition des témoins,
des déclarations toujours plus contradictoires.
Cette étape précède le jugement, les
témoins recherchés dès le début de la
procédure reçoivent tous une convocation par l'huissier pour
comparaître devant le juge de paix. Les témoins sont
indemnisés et sont obligés d'être présent. Les
absents s'ils ne justifient pas d'une incapacité médicale sont
susceptibles d'être punis par la loi. Il existe deux catégories de
témoins, les témoins à décharge en faveur du
prévenu, et les témoins à charge en faveur du plaignant.
Les témoins à décharge sont rares tandis que les
témoins à charge sont pratiquement toujours les plus nombreux
quand ils ne sont pas les seuls.
Pour rester sur l'affaire du vol d'un pied de roi
(étalon d'unité de mesure) aux forges de Sionne, on constate
curieusement qu'ici les témoins à charge sont seulement deux dont
le plaignant le sieur Muel propriétaire des forges et son
contremaître le sieur Paillotin. Sur les cinq témoins à
décharge quatre habitent à Midrevaux dans le même village
que le prévenu et un seul à Sionne.
Les témoins sont rarement objectifs, ils jurent
toujours devant la justice de n'être parents ou alliés de la
personne inculpée, cependant ils sont souvent au moins des
connaissances. On comprend dès lors que leurs arguments en faveur de
leurs amis, voisins ou concitoyens seront plus ou moins subjectifs, et sont
souvent contradictoires. Ainsi le 6 décembre 1830 à Coussey,
suite à une sombre affaire d'incendie de la maison du maire et de
placards, Maurice Fouillouse devient le suspect n°1 avant d'être
plus tard relaxé. Lors de l'audition, 15 témoins exposent leur
version ; Nicolas Fauconnier témoin à décharge
déclare avoir « entendu dire que c'est la femme du maire qui
avait mis le feu 115(*)» et que le placard qu'on lui présente
à l'audition semble avoir été contrefait. Hyacinthe
Salzard témoin à charge confie que le prévenu lui à
dit « que le maire lui avait fait beaucoup de tort, que
c'était un voleur et qu'il ferait tout ce qu'il dépendait de lui
pour le faire sauter de sa place 116(*)».
Partis pris et ouï dire influent considérablement
sur les dépositions des témoins. Les juges doivent faire preuve
de perspicacité pour distinguer les témoignages farfelus, pour
fausser les pistes, des déclarations dignes de foi.
c. Le jugement, épilogue
de l'affaire.
Après toutes ces démarches
judiciaires vient enfin le moment du jugement qui clos l'affaire si le
condamné ne fait pas appel. La séance du tribunal correctionnel
se déroule comme suit : il est procédé au rappel de
la personne poursuivie et de l'auteur de la procédure. Le procureur ou
son substitut procèdent à l'exposé de l'affaire. Sont
ensuite lus les différents procès verbaux, rédigés
lors du constat de l'infraction.
Les témoins « présent ont
été ensuite successivement appelés ; chacun d'eux a
prêté serment de dire toute la vérité, rien que la
vérité117(*) ». Toutes ces dépositions sont
prises en note par le greffier en chef.
La parole revient ensuite au prévenu ou à son
défenseur qui expose sa vision de l'affaire et requiert la peine qu'il
estime être juste au vu du délit commis. (Le défenseur
requiert évidemment des peines faibles pour son client).
Le procureur requiert ensuite que soit appliquée la
peine prévue dans le code pénal au délit commis dont il a
précédemment résumé l'affaire.
Le tribunal dévoile enfin les suites qu'il
réserve à l'affaire et si il accorde des circonstances
atténuantes si le prévenu est jugé coupable. Le juge de
paix s'appuyant sur la requête du procureur fait l'exposé des
articles du code pénal sur lesquels il se base pour condamner
l'accusé, et donne ensuite la durée de la peine et/ou le montant
de la somme auquel sera soumis le coupable.
Si le prévenu est « renvoyé des
poursuites contre lui dirigées », le juge ordonne qu'il soit
relâché immédiatement. Dans le cas contraire, le
prévenu reconnu coupable est conduit en prison. Quelques jours plus
tard, l'huissier lui apporte le jugement en extrait et invite le
condamné à le suivre immédiatement à la maison
d'arrêt.
Cette dernière étape voit le prévenu
comparaître enfin devant le juge. Ce moment crucial pour l'accusé
détermine son futur, il sera soit condamné ou aura des chances
d'être relaxé surtout s'il abuse la Justice.
4.
Justice manipulée, justice parasitée.
La Justice à pour mission de distinguer le
délinquant de l'innocent. Des individus coupables ayant peu de chance
d'être reconnu innocent vont tout tenter pour influencer le juge. Cette
instrumentalisation de la Justice représente un danger pour la
qualité et la justesse des jugements.
a. Le faux témoignage pour
fausser le procès.
La justice apparaît clairement comme une arme.
Dès lors, pour gagner un procès, tout devient permis, de
l'orientation de témoignage, à l'intimidation de témoins
en passant par le contre procès.
A Coussey, le 6 décembre 1830, après une
tentative d'incendie dans la maison de Grosyeux maire de la commune de Coussey,
Marie Jean Gérard confie au juge de paix que son mari a reçu des
recommandations. On a conseillé à ce dernier de dire
« que c'est la femme du maire qui a voulu mettre le feu chez elle et
que c'est Thouvenin et François qui l'ont dit, tu diras cela, et
n'oublie pas118(*)
». De tels faux témoignages peuvent faire un basculer des
procès et il est évident qu'un personnage de forte influence
pourra faire pencher de nombreux jugements en sa faveur de cette
façon.
Ces conseils et recommandations peuvent parfois se faire plus
insistants. Exercer des pressions sur des témoins en vue de les faire
témoigner en sa faveur est même monnaie courante, ce qui est
d'autant plus aisé quand il s'agit d'enfants ou de femmes. A Midrevaux,
en 1819 Louis Chevelle est suspecté d'avoir violenté une femme
dans les bois communaux, lors de l'audition des témoins devant le juge
de paix Marguerite Charlicanne âgée de 14 ans fait une
déclaration surprenante. Elle affirme « je n'ai rien vu, et la
femme Michèle m'avait conseillée de dire aux chirurgiens, que je
l'avais vu frapper, seulement elle m'a fait des menaces et ma même
frappée119(*)
».Ces pressions sur les témoins et les entraves à la justice
sont étonnamment peu sanctionnées, Louis Relaing de Punerot
coupable de faux témoignage120(*), n'est condamné qu'à 8 jours de
prison, cette faible peine s'explique aussi par la faible importance des
affaires que certains tentent de manipuler.
b. Procès abusifs et
luttes judiciaires
Le recours à la justice est parfois abusif. Les
procès entre deux particuliers peuvent se succéder à des
rythmes soutenus. Le but originel de recourir à la justice dans le but
d'obtenir réparation disparaît au profit d'enjeux de domination.
Le contre-procès devient dès lors une
manière de prendre l'ascendant psychologique en obtenant une victoire
judiciaire souvent de courte durée puisque la partie condamnée
intentera immédiatement un nouveau procès.
Suite à une procédure lancée par
François Morel contre jean Pucelle Charpentier et François Billet
dans le canton de Neufchâteau, tous deux sont condamnés. Fin
décembre 1811 le plaignant s'est fait soustraire 72 francs sur la route
entre Rebeuville et Certilleux. Tous trois étaient au cabaret Adam de
Rebeuville ou Morel épris de vin montrait des pièces de six
livres aux autres buveurs. Sur la route du retour il est rejoint par les deux
prévenus qui le rançonnent. Les deux prévenus sont alors
condamnés le 18 mai 1812.
A peine un mois plus tard, les deux condamnés Pucelle
et Billet intentent à leur tour un procès contre Morel. Le 11
juin 1812 Morel est donc jugé pour calomnie « pour avoir
répandu dans le public que le 2 décembre dernier, jour de foire
à Neufchâteau il avait été arrêté entre
sept à huit heures du soir que les demandeurs lui avaient porté
la main à la gorge et l'avait forcé à lui donner trois
Louis121(*) ».
Les deux bandits de grands chemins supposés sont
réhabilités et Morel est condamné pour dénonciation
calomnieuse, mais celui-ci fait immédiatement appel.Les appels peuvent
être un moyen de défense, que le prévenu soit coupable ou
non. Ils sèment le doute, et font traîner la procédure en
encombrant inutilement les tribunaux. Le 13 février 1812 sont
jugées deux affaires en audience correctionnelle, ces deux affaires
concernent deux protagonistes dont les rôles de plaignant/prévenu
sont intervertis tour à tour selon l'affaire. Dans l'affaire
numéro un, le plaignant Charles Bourgeois intente une action en justice
pour «violence« graves contre Dominique Colardi, dans le
deuxième procès l'agresseur devient la victime et accuse Charles
Bourgeois de l'avoir frappé « sans aucune provocation de
plusieurs coups de poings et de lui avoir dérobé 20 louis qui
étaient dans sa ceinture122(*) ». Il n'est pas précisé qui
a saisi la justice en premier mais celui qui y a recourt en dernier agit
clairement dans un but défensif. Tous deux sont renvoyés des
poursuites mais doivent payer les dépens, ceci permet d'éviter
les recours intempestifs à la justice.
De nombreux délinquants parviennent à
éviter les sanctions grâce à des procès-verbaux mal
remplis ou en influençant des témoins pour fausser des jugements.
Les autorités essaient en outre de limiter le recours à la
justice systématique. Le déroulement d'une affaire répond
à des étapes déterminantes pour évaluer la
culpabilité d'un délinquant présumé. La
durée de la procédure correctionnelle est relativement courte,
certains délits sont jugés en quelque jours tandis que d'autres
peuvent traîner plusieurs mois. Si le prévenu est jugé
coupable, il encourt les sanctions prévues par la loi.
C.
Les peines, des sanctions de l'infraction.
Peines de prison, amendes, et autres sanctions punissent le
condamné. La peine joue une fonction qui se veut exemplaire, le
désagrément causé par la punition est censée faire
prendre conscience au hors-la-loi de l'illégalité de son geste.
Arme de régulation sociale la peine judiciaire vise surtout à
décourager le condamné pour prévenir la récidive.
Les multiples sources judiciaires fournissent des affaires
allant de la simple rapine au meurtre avec circonstance aggravante ce qui nous
donne un aperçu exhaustif des peines prononcées dans l'Ouest des
Vosges.
Lorsque que les condamnés acceptent leur peine les
jugements clôturent les procès, les peines sont parfois variables
pour des délits similaires, les jugent prenant en compte une multitude
de facteurs. Chaque type de délit contrevient à des lois qui
fixent précisément les sentences encourues même si
celles-ci sont la plupart du temps adaptées.
Les peines de la justice civile puis de la justice
pénales peuvent finalement être adoucies. Les prévenus sont
également parfois acquittés.
1.
Les peines des tribunaux correctionnels.
Les peines, sont généralement en
adéquation avec les infractions commises. Les délits quotidiens
dans le canton sont essentiellement condamnés d'une peine de prison et/
ou d'une amende. Lorsqu'il y a sanction l'accusé est
écroué une fois sur deux et reçoit plus d'une fois sur
trois une amende.
Une fois sur six le condamné devra des dommages et
intérêt à la victime à moins qu'il ne s'agisse d'une
remise en état ou de la confiscation de l'objet qui à servi
à commettre le délit. Les juges peuvent également
prescrire la surveillance, les dommages et intérêts ou encore les
dépens.
Le graphique ci-dessous présente les types de peine
prononcés dans le canton. La prison suivie de l'amende sont les
sanctions le plus couramment infligées.
Figure 7, Peines
prononcées dans le canton de Coussey par son juge de paix.
L'histogramme suivant expose le montant ou la durée
des sanctions infligées par les juges de paix de Coussey. Les montants
intermédiaires d'amendes et les faibles peines de prisons sont les plus
nombreux.
Figure 8, Issue des
jugements rendus dans le canton de Coussey par son juge de paix, avec
détail de la durée ou du montant.
a. La prison, la peine la plus
utilisée.
Dans le premier Code Pénal, celui de 1791, la peine de
prison revêt différentes appellations selon les crimes et le sexe.
Les hommes encourt les fers123(*), la réclusion dans une maison de force pour
les femmes, la simple détention, ou encore la gêne124(*). En 1791 on envisagea de
faire de la prison un instrument de correction et de réinsertion
sociale. De nombreux projet visant à améliorer le système
carcéral échouèrent faute de moyens. Le nouveau Code
Pénal de 1810 et le décret de 1808 sur les centrales
réorganisent les prisons125(*). Les maisons centrales font ainsi leur apparition
dans le nouveau paysage carcéral, ces dernières fonctionnant
comme des manufactures avec des détenus. La condamnation à la
réclusion à la maison d'arrêt de Neufchâteau
sanctionne 49 % des accusés126(*). D'après la figure 9 ci-dessous, il
apparaît clairement que ces peines de prison sont majoritairement
inférieures à deux mois dans plus de 66% des cas et
inférieures à un mois dans 56 % des cas. Nous avons donc affaire
à des peines de réclusion plutôt courtes.
Figure 9, durée des
peines de prison prononcées par le juge de paix du canton de
Coussey.
· Les peines courtes.
Les incarcérations
« éclairs » sont légions, quatorze
délinquants sont condamnés à une peine inférieure
à sept jours et autant à une peine inférieure à un
mois. Ces sanctions, sont valables pour des délits variés tels
que ; violences physiques et verbales, délits administratifs et
vols, pour l'essentiel. Le 1er juin 1820, à Punerot, Claude
Ferbus, commet des actes de violence grave sur Nicolas Martin lors d'une rixe.
La peine de six jours d'emprisonnement peut ici sembler légère
mais tient compte de circonstances atténuantes dues aux provocations de
la victime.
· Peines intermédiaires.
Quarante-cinq peines s'échelonnent entre deux mois et
un an de prison. Ce sont essentiellement les peines des vols, des violences
physiques et verbales ainsi que des délits financiers. Ces infractions
d'une gravité supérieure conduisent de fait, à des peines
plus longues. En comparaison de la rixe précédente et pour rester
dans le même type de délit à savoir la violence physique et
verbale, nous allons nous pencher sur une agression survenue chez un
particulier, à Autreville le 29 juillet 1829. Jean-Claude Merlin, est
invité à prendre un verre chez le sieur Millot, mais l'invitation
est un guet-apens. Aussitôt arrivé, la victime est assaillie de
deux coups de poing qui le renversent par terre. L'agresseur est
condamné à trois mois de prison ainsi qu'à seize francs
d'amende. Ce qui augmente la peine de prison ici, c'est le caractère
d'agression et de règlement de compte qui est largement souligné
au cours de la procédure et qui logiquement, aggrave la peine.
· Peines de longue durée.
Enfin, la catégorie des peines supérieures
à un an est peu importante. Cet ensemble compte 14 % de jugements
sanctionnés de réclusion et rassemble essentiellement les vols
qui pour certains, flirtent avec les tribunaux d'assises. C'est le cas de Reine
Fleuret, demeurant à Seraumont. Cette femme est accusée par
contumace de vol en réunion, elle sera condamnée à cinq
années de réclusion127(*). Les peines les plus lourdes, peuvent s'appliquer
également aux cris séditieux, à quelques autres
délits variés mais également toujours aux violences
physiques. Nous n'en avons trouvé qu'un seul exemple, mais il illustre
parfaitement la gradation du simple coup puni de quelques jours à des
formes plus graves de violences physiques sanctionnées en années
de réclusion. Il s'agit d'un guet-apens prémédité
à Grand en 1829. À neuf heures du soir, devant le cabaret du
village, les deux frères Biez assistés d'Hyacinthe Salzard
agressent Nicolas Dabonville qui s'en tirera avec plusieurs plaies et de forts
saignements. Les auteurs du traquenard sont condamnés à deux ans
de prison. Le caractère prémédité du piège,
les blessures et les effusions de sang ainsi que l'agression en réunion
donnent un caractère exceptionnel à cet acte de violence
extrême128(*).
Cette affaire est la plus lourdement punie de tous les jugements de la justice
de paix étudiés.
La réclusion est la peine la plus utilisée.
Elle est majoritairement de courte durée, les peines de toutes
durées étant néanmoins bien réparties, ce qui
tranche avec les amendes.
b. Les amendes, des punitions
légères en numéraire.
De toutes les sanctions, les punitions en monnaie qui
frappent 33,3 % des coupables, n'arrivent qu'en deuxième position,
derrière les peines de prison. Ces peines sont variables, et leur
spectre est étendu, les amendes les plus légères sont de
l'ordre de deux ou trois francs ce qui équivaut à une ou deux
journées de travail. Les amendes les plus importantes peuvent atteindre
jusqu'à deux cents francs.
Figure 10, Montant des
amendes de la justice de paix de Coussey.
· Les amendes inférieures ou égales
à six francs.
Les amendes les plus légères s'appliquent
à sept types d'infractions. une fois sur cinq elles frappent les vols et
les violences physiques. Dans les deux cas, c'est la forme basique de ces
infractions qui est ici concernée129(*). Le 24 juillet 1817 à Midrevaux, Marie
Fourrier est condamnée à trois francs d'amende pour le vol de
légumes dans le jardin potager de son frère130(*). On retrouve, à
hauteur de 15 % dans cette fourchette d'amende, des délits de
filouterie, des insultes et injures et des infractions de vaine pâture.
Enfin sont également punis d'amendes de moins de six francs un brigand
de grand chemin et un paysan ayant dégradé un chemin public.
Cette peine légère est essentiellement donnée en
début de période.
· Les amendes comprises entre six et seize francs.
La tranche suivante, celle des amendes comprises entre six et
seize francs est la plus importante, on la rencontre quarante-deux fois. Cette
sanction concerne six types d'infraction. On rencontre ainsi dans cette
catégorie : 38,09 % de vols, 23,80 % de violences physiques et
verbales ainsi que 4,76 % de délits de chasse et un pourcentage
égal de charivari. Très stable jusqu'en 1840, le nombre d'amendes
entre six et seize francs chute à partir de 1840. Les amendes peu
élevées, tout comme celles inférieures à six
francs, tendent cependant à disparaître.
· Les amendes comprises entre seize et cinquante
francs.
Ces amendes intermédiaires représentent 30 % du
total d'amende. Dans cette catégorie, on distingue
généralement huit types d'infractions. Les violences verbales
avec cinq cas, se situent en première place, ensuite, viennent les
violences physiques et les délits financiers avec quatre affaires
chacun. Deux vols, recevront également cette sanction, ainsi qu'un cas
de délit sexuel, un délit de chasse, un discours séditieux
et une destruction de bien public.
L'évolution de cette catégorie d'amende est
particulière, bien représentés en début de
période, les amendes intermédiaires font mine de
disparaître de 1820 à 1840 puis réapparaissent de
façon anecdotique en 1840.
· Les amendes supérieures à cinquante
francs.
Les amendes les plus lourdes, celles supérieures
à cinquante francs s'appliquent en général à sept
types de délits. Cette sanction frappe 2 fois des délits
financiers et des vols. On recense ensuite, un cas de violence verbale, un
autre de violence physique, un cas de lettre anonyme et enfin une affaire de
dégradation.
Cette catégorie aux amendes les plus importantes
frappe peu la violence physique ou verbale la plus courante. Les infractions
commises sont logiquement plus graves. A titre d'exemple, à Grand,
l'instituteur du village et un acolyte, sont condamnés à cent
francs d'amende, pour avoir outragé le maire dans l'exercice de ses
fonctions, puis avoir réalisé des placards dans lesquels ils
invitaient la population à témoigner en leur faveur131(*). A Punerot un jeune homme
écope lui aussi de cent francs pour charivari et outrage à des
gendarmes132(*).
Dans 60 % des cas les très fortes amendes sont de 100
francs, sans doute une somme symbolique qui permet de marquer la gravité
du délit puni. Seules deux peines sont supérieures à 100
francs. L'amende «record« s'élève ainsi à
cinq-mille francs et sanctionne un délinquant multirécidiviste
ayant déjà purgé une peine de prison
Les amendes les plus légères sont les plus
nombreuses. Pour la plupart des délinquants, une amende de quelques
francs représente une somme importante. Ces amendes de quelques francs
sont donc suffisantes, elles sont données à des personnes n'ayant
jamais commis de délits bien importants et rarement récidivistes.
La clémence du juge est bien réelle pour toutes les petites
infractions, même si il peut parfois prononcer d'autres peines.
c. Une peine
supplémentaire, la surveillance de la police.
Cette peine est en perte de vitesse au cours de la
période, elle ne peut être prescrite que pour le vol, les menaces,
les violences graves récidivées, et pour le vagabondage avec
circonstance aggravante. « Avant la loi du 23 janvier 1874, la
surveillance frappait, pendant toute leur vie, à l'expiration de leur
peine, tous les coupables condamnés aux travaux forcés, à
la détention et à la réclusion133(*) ». Cette mesure qui
s'appliquera postérieurement à l'issue de la peine « ne
peut être appliquée que si elle est prévue par la
loi134(*) ».
Même lorsque celle-ci est applicable, les juges ont
recours à de multiples subtilités pour ne pas accabler
supplémentairement le prévenu. Les circonstances
atténuantes permettent la plupart du temps d'éluder la
surveillance, mais les tribunaux choisissent parfois au contraire de faire
appliquer cette disposition qui se retrouve sept fois sur les trois cent
soixante douze jugements de justice de paix dépouillés. Sur ces
sept cas, la surveillance agrémente six fois une condamnation
prononcée avant 1821. La surveillance est prononcée six fois sur
sept pour les seules années 1816 et 1817. On ne retrouve ensuite cette
peine qu'une seule fois en 1837 sur le demi centenaire étudié.
Cette «flambée« de surveillance pour
l'année 1816 et 1817 s'explique par le taux important de rumeurs
à propos du retour de l'empereur, ces rumeurs où plutôt les
naïfs qui ont le malheur de les colporter sont sévèrement
punis. La surveillance de la police court de six mois jusqu'à cinq ans.
Dans 60 % des cas cette sanction s'applique à des discours
séditieux. A Harmonville, Catherine Collot dit à Charles
Prévot que le roi était parti et que Bonaparte rentrait en
France, la prévenue est condamnée à six mois
d'emprisonnement, cinquante francs d'amende, et à un an sous la
surveillance de la haute police, c'est la peine la plus légère en
la matière puisque le discours séditieux est habituellement
réprimé d'une période de cinq ans de sûreté
dans 75 % des cas dans le canton. De surcroît, elle sera tenue de fournir
une caution solvable de bonne conduite de trois cents francs.
Pour l'ensemble du territoire l'évolution des peines de
surveillance est différente :
1826-1830 : 3148.
1831-1835 : 3876.
1836-1840 : 3513.
1841-1845 : 2538.
1846-1850 : 2399.
La tendance générale de cette sanction est
à la baisse mais pas à sa disparition ce qui tranche avec le
canton de Coussey. Deux explications sont possibles ; soit les juges font
preuve d'une clémence particulière, soit les délits
habituellement sanctionnés de cette peine disparaissent ce qui semble le
plus vraisemblable.
Cette peine supplémentaire s'applique essentiellement
aux cris séditieux. En effet 1816 et 1817 voient fleurir les rumeurs
d'un retour de Napoléon.
d. Peines les moins
fréquentes.
Ces peines concernent les dommages et intérêts,
les remises en l'état, la confiscation ainsi que les dépens.
· Les dommages et intérêts.
Les dommages et intérêts apparaissent rarement,
ils peuvent être aussi bien une peine unique que supplémentaire.
Sur les huit cas recensés, quatre fois les dédommagements sont
inférieurs à seize francs et autant de fois supérieurs.
Cette peine s'applique essentiellement lorsque le plaignant désire le
remboursement d'un préjudice subi. Ainsi le 6 Février 1821,
à Grand, Catherine Chaudron et Françoise Masson sa mère,
accusent Suzanne Bertrand « d'être sorcière et d'avoir
donné un sort à Catherine chaudron135(*) ». Les deux femmes
sont condamnées à cinq francs d'amende pour ces propos
jugés comme tendant à attaquer l'honneur et de plus
proférés dans un lieu public, ce qui conduit le tribunal à
ajouter six francs de dédommagement au titre de ce qu'on appellerait
aujourd'hui un préjudice moral.
· La remise en l'état.
Les peines incluant en sus une remise en l'état sont
rares. Elles sous-entendent qu'il y ait eu destruction ou aliénation
d'un bien appartenant à autrui. Ce bien peut-être un simple
chemin, comme à Grand le 3 juillet 1821. Jean-Baptiste Biez et Claude
Biez ayant abîmé un chemin vicinal, se voient obligé
« à rétablir les lieux dans leur premier
état136(*) ».
Connaissant l'importance de la terre pour ces populations
rurales, la question de l'empiétement sur le moindre bout de champs ou
pièce d'héritage137(*) est immédiatement suivie d'une
procédure. A Coussey, le 10 octobre 1817, Michel Thouvenin, un
cultivateur à Coussey a ouvert un fossé immédiatement
contre les troncs de la haie d'un jardin. On reproche au prévenu au
cours de cette opération d'avoir abîmé la haie de son
collègue cultivateur. Le tribunal condamne le prévenu à
cent francs de dommages et intérêts, ainsi qu'à replanter
là haie et enfin à combler le fossé.
· La confiscation des armes pour les délits de
chasse.
La confiscation vient compléter l'arsenal des peines.
Cette peine s'applique essentiellement aux délits de chasse, lorsque que
les prévenus traquent le gibier sans permis, sur des terrains ne leur
appartenant pas, ou en dehors des périodes d'ouvertures. L'arme est
alors confisqué comme à Lamarche en 1812, où Nicolas
Beudot, se voit condamné à vingt francs d'amende et à la
confiscation de son fusil. Les confiscations curieusement ne s'appliquent
qu'à des objets matériels et jamais aux chiens qui pourtant sont
au moins aussi importants que le fusil dans l'action de chasse illégale.
· Les dépens, le paiement des frais de
procédure.
Les dépens apparaissent à la fin de chaque
jugement. Variables ils représentent le coût de la
procédure à savoir le coût « des timbres
d'enregistrement, les frais du greffier, la signification et la taxe des
témoins »138(*). Ces frais supplémentaires à la charge
du perdant sont variables dans le temps. Les montants des dépens
diminuent dès le début du XIXème siècle. Selon les
délits ils sont plus ou moins importants, les dépens des
infractions de chasse et de vaine pâture oscillent entre six et neuf
francs, tandis que les dépens de filouteries, abus de confiance, et de
délits financiers sont en moyenne de quatre-vingt francs. Cette peine
supplémentaire est donc conséquente et peut apparaître
comme une double peine dans certains cas.
Les sanctions infligées par les maires et les juges de
paix sont en accord avec la gravité de l'infraction. La réclusion
est la peine la plus utilisée, elle est majoritairement de courte
durée, tout comme les amendes sont le plus souvent
légères. Des peines supplémentaires permettent de faire
prendre conscience au condamné la gravité de son acte, mais dans
la majorité des affaires le juge se montre clément pour les
petites infractions. Les peines de correctionnelles sont de plus en plus
importantes dès lors que les délits se rapprochent de la Cour
d'Assise.
2.
Des peines les plus légères aux plus lourdes.
Les peines des tribunaux de police sanctionnent de simples
infractions. Celles-ci sont punies de quelques francs ce qui paraît plus
que négligeables au vu des peines de mort, des années de
galère et de travaux forcés que risquent les criminels devant les
Cour d'Assise.
a. Amendes légères
et tribunaux de simple police.
Les peines des tribunaux de villages sont faibles, les
délinquants ont commis des délits de vaine pâture, des
légères dégradations, des anticipations139(*) sur les terrains de leurs
voisins. Nous avons à faire à des infractions qui sont même
parfois commises involontairement dans quelques cas. Les peines sont donc en
lien direct avec la légèreté des infractions, les petits
délinquants écopent d'amendes de quelques francs comme Joseph
Poirot qui est condamné à six francs d'amendes et à six
francs de dommages et intérêts pour avoir fait
tournière140(*)
dans les champs avoisinant sa pièce d'héritage141(*).
Les amendes sont en moyenne de 2,82 francs soit le salaire
moyen d'un ouvrier métallurgiste du canton. Ces amendes sont faibles
mais sont souvent alourdies par les dommages et intérêts lorsqu'il
s'agit de dédommager une atteinte aux biens.
b. Les peines de l'administration
des forêts.
Comme son nom l'indique, cette administration traque les
délits de chasse et les contraventions aux règlements sur le port
d'arme. Les peines sont uniquement en numéraire et frappent les
braconniers, mais aussi les chasseurs n'étant pas munis de port d'armes,
ceux chassant sans permis ainsi que toutes les infractions à la
législation. Le décret du 4 mai 1812 punit ainsi
« quiconque trouvé chassant, et ne justifiant point d'un
permis de port d'armes de chasse, est dans le cas d'être condamné,
par le tribunal de police correctionnelle à une amende qui, pour la
première fois, ne peut être moindre de trente francs, ni
excéder soixante francs. Dans tous les cas, il y a lieu à la
confiscation des armes. Si elles n'ont pas été saisies, le
délinquant doit être condamné à les rapporter au
greffe, ou à en payer la valeur142(*) ». Les peines dans la
réalité sont adoucies leur moyenne est de vingt-cinq francs,
soixante-huit. Les amendes s'échelonnent de seize à cent francs.
La confiscation des fusils n'étant pas précisée ont peut
en déduire d'après la législation qu'elle se fait
automatiquement lors de la constatation de l'infraction. Les peines les plus
sévères, sont réservées aux poseurs de collets
traquant les lièvres. La chasse sans « port d'arme »
est très répandue, ce délit est le plus souvent puni d'une
peine de vingt à trente francs tandis que la chasse sans permis est
punie d'une amende de seize francs pour la majorité des infractions.
c. Les lourdes peines d'assises.
Les cours d'assises ont pour prérogatives de juger des
affaires plus graves, la sévérité des peines s'en ressent
logiquement. Aucun prévenu n'est ici condamné à une
amende.
Les peines de prison par exemple sont dans 89 % des cas
supérieures à un an143(*), elles sanctionnent à 73 % des vols avec
circonstances aggravantes tels que les vols de nuits, les vols avec escalade ou
encore les vols dans des maisons habitées144(*). En 1818, Hubert Rollin est
sanctionné de cinq années de prison pour avoir volé dans
une demeure à l'aide de fausses clés145(*).
Seuls quatre autres cas seront condamnés à une
peine supérieure à un an. Deux attentats à la pudeur
subissent le même sort. Alexandre Gérardin devra ainsi purger deux
ans de prison, pour avoir agressé une jeune fille en 1846146(*). Nicolas Papigny un
faussaire de Neufchâteau est le seul condamné à mort de la
période bien que sa peine soit commuée par la suite en huit ans
de prison147(*).
La réclusion à perpétuité n'est
quand à elle décidée qu'une seule fois contre Jean Foissey
de Pargny-sous-Mureau pour assassinat148(*).
Les travaux forcés sont prescrit cinq fois dont trois
pour sanctionner des banqueroutes frauduleuses, statistiquement punies de
treize ans de travaux forcés. Cette peine très dure n'est
donnée qu'au compte goutte. Elle puni Nicolas Masson en 1824149(*), pour un vol avec effraction
à Clerey-la-Côte. La perpétuité n'est quant à
elle qu'une seule fois appliquée pour un assassinat commis par Antoine
Brabant à Harmonville en 1842150(*).
Figure 11, peines
prononcées par la cour d'assise du département pour les
ressortissants du canton de Coussey.
En France, d'après les données du Compte
Général, on peut calculer une moyenne d'un meurtre par an pour
68600 habitants, soit un tous les sept ans et cinq mois pour 9278 habitants.
Sur les vingt années d'arrêts de Cour d'Assise
dépouillées, on dénombre quatre homicides soit une moyenne
d'un homicide tous les cinq ans. Le canton semble donc plus criminogène
que la moyenne nationale.
La sévérité des peines est fonction des
délits et du type de tribunal. Du simple délit de chasse sans
permis punis de quelques dizaines de francs aux travaux forcés à
perpétuité, les habitants du canton de Coussey nous montrent
à travers les délits commis toutes les peines qu'ils
encourent.
Ces peines peuvent être parfois adoucies dans des cas
particuliers, ou même disparaître lorsque le prévenu est
jugé innocent.
3. Des peines modulées à la relaxe.
a. Des circonstances
atténuantes toujours aussi courantes.
Les circonstances atténuantes sont peu
répandues au début de la période, ces adoucissements des
sanctions n'est utilisé en moyenne en France qu'une fois sur trois dans
les années 1820-30. Avec la nouvelle législation du 28 avril
1832151(*) les
circonstances atténuantes sont étendues à tous les
délits, la progression est dès lors régulière et
passe en France de 42 % en 1835 à 58 % en 1856.
Pour le canton de Coussey les chiffres sont comparables 37 %
des délits jugés avant 1832 bénéficient de
circonstances atténuantes. Cet adoucissement est donc courant, on le
retrouve par exemple appliqué au bénéfice de Louis
Barthélémy. Ce manoeuvre domicilié à
Mont-les-Neufchâteau est convaincu d'avoir volé le 23 mai 1819 un
ka152(*). «(Le
tribunal) considérant que le préjudice causé
n'excède pas vingt -cinq francs et que les circonstances sont
atténuantes, appliquant les articles 401 et 463 du code pénal qui
sont ainsi conçu, dans tous les cas où la peine d'emprisonnement
portée par le présent code n'excède pas vingt cinq francs
et si les circonstances apparaissent atténuantes » les
tribunaux sont autorisés à réduire l'emprisonnement
même au dessous de six jours, et l'amende même au dessous de seize
francs153(*) ». Au
final le voleur écope d'un peine d'un mois de prison et de vingt-cinq
francs cinquante de dépens ce qui peut paraître
sévère mais finalement indulgent au vu des peines dont il
était passible. Les circonstances atténuantes peuvent renvoyer
à la condition sociale du prévenu, si celui-ci est pauvre, le
juge sera plus souvent indulgent.
Chaque catégorie de délit correspond à
un article du code pénal, qui prévoit la fourchette des peines
applicable. Les juges n'ont donc pas de liberté lorsqu'ils appliquent
les sentences.
La généralisation des circonstances
atténuantes pour tous les délits, constitue une
possibilité de modulation de la peine bienvenue chez les juges qui
peuvent ainsi adapter leur jugement en fonction de la personnalité de
l'inculpé.
b. Des taux de relaxe variables
selon les délits.
Le renvoi des poursuites est assez fréquent, dans 18,8
% des cas le prévenu n'est pas condamné154(*). Sur l'ensemble de la
période le nombre de prévention à l'échelle
nationale chute fortement.
En se référant au pourcentage de relaxe par type de
délit155(*), on
constate que les prévenus de vagabondage, de vol, d'attentat à
la pudeur et de tentative d'incendie sont nombreux à être
renvoyés des poursuites. Les auteurs d'attentat à la pudeur ne
sont condamnés qu'une fois sur cinq, tout comme les pyromanes, et les
vagabonds relaxés deux fois sur trois.
On observe une différence importante selon que le
plaignant soit une partie civile156(*) où un ministère public157(*). Les parties civiles qui
représentent la majorité des plaignants, « obéissants
à des sentiments de vengeance, intentent des poursuites
irréfléchies et sans fondement158(*) », ce qui explique le nombre de relaxe
important des jugements dus à des parties civiles. Le Compte
Général place à 36,6% le nombre de relaxes suite à
des procès intentés par des parties civiles, et à 2,4%
ceux des administrations publiques. Les pourcentages suivants illustrent le
nombre de renvoi des poursuites :
Canton de Coussey : Moyenne
nationale :
1810-20 : 16,1 % pas de données
1820-30 : 21,2 % 1826-30 :
18,04 %
1830-40 : 17,3 % 1830-40 :
15,35 %
1840-50 : 17,6 % 1840-50 :
13,00 %
Ces résultats pour le canton traduisent une
augmentation ou au minimum un maintien du nombre de renvoi des poursuites ce
qui ne coïncide pas du tout avec la moyenne nationale qui tend à
une baisse significative. Sur la période la moyenne des renvois de
poursuite est de 15,5 % soit presque 3 points de moins que dans la zone
étudiée. Cette différence n'est pas si importante mais
traduit une réelle particularité de la Justice de ce canton. Les
causes de ce chiffre élevé peuvent être nombreuses.
Certains délits bénéficient de taux de relaxe plus
important que d'autres. C'est donc la persistance de types de délits
où le renvoi est important qui explique le «score«
élevé des préventions dans l'Ouest des Vosges. On note
ainsi un nombre important de viols dont les auteurs sont
systématiquement relaxés, la relaxe pour vagabondage reste quand
à elle importante tout au long de la période.
Figure 12, nombre de
délits classés par catégories ayant
bénéficiés de la relaxe.
4. Evolution des deux peines
principales.
La durée d'emprisonnement et le montant des amendes
connaissent des fluctuations importantes. Ces deux peines subissent
curieusement des évolutions différentes.
a. Evolution des peines de
prison.
Les quatre histogrammes suivants présentent
l'évolution de la durée des peines de prison de 1810 à
1850. Les unités de l'axe des ordonnées correspondent au nombre
de peines relevées.
Figure 13, Répartition des peines de prison par
catégorie pour les 4 décennies, à partir du nombre de
peine de prison relevé.
En se référant aux 4 tableaux ci-dessus on
constate 3 grandes tendances générales :
Les peines les plus courtes (de «Prison <=7
jours« à «Prison <= 1 mois«) augmentent aux cours des
quatre décennies leur progression est régulière
hormis une récession pour la période 1830-1840159(*).
Les peines intermédiaires («Prison <= 2
mois« et «Prison <= 3mois) peu présentes au cours des
années 1820 à 1840 avec respectivement 11,7% et 24,1% sont
absentes pour les deux dernières périodes.
Au total les peines de moins de un an de prison sont la
majorité. En se référant au Compte
Général160(*), on constate que la moyenne nationale des peines de
prison courtes (moins de un an) augmente au cours de la période.
Peines de prison de moins de un an :
France : 77, 4 % (1825) Canton de Coussey :
79 % (1825)
86,7 % (1845)
92,6 % (1845)
89,5 % (1865)
La proportion des peines courtes est supérieure
à la moyenne nationale, peut-être est-ce la preuve d'une
normalisation locale des comportements. Marie-Renée Santucci dans son
étude sur l'Hérault trouve des chiffres également proches
de la moyenne nationale mais contrairement à nous, à chaque fois
inférieurs. Il est ainsi permis d'avancer que « les
circonstances atténuantes accordées [...] démontrent la
volonté d'abaisser les plus longues peines161(*) ».
Dans l'hypothèse ou cette diminution des peines les
plus sévères soit une volonté politique on constate que le
canton de Coussey et ses magistrats sont plutôt bons
élèves.
Par décennie on obtient les taux suivants ;
1810-1820 ; 65 % 1840-1850 ; 100%
1820-1830 ; 94 % 1850-1860 ; 100
%
1830-1840 ; 78 %
Cette progression est quasi-similaire à celle de la
France, hormis l'accident des années 1820 où l'on observe une
très forte clémence de la part des juges du canton. (Les deux
taux de 100 % peuvent paraître excessifs mais reflètent surtout un
abaissement du nombre d'affaires traitées et donc une probabilité
moindre de rencontrer une affaire sanctionnée d'une plus longue
période d'enfermement).
b. Evolution des amendes.
Le montant des amendes est le plus souvent modeste, 55,96 %
sont inférieures à seize francs et 83,2 % sont inférieures
à cinquante francs. A partir des quatre histogrammes de la page suivante
on constate que jusque dans les années 1840 le montant des amendes reste
faible. Les amendes de moins de six francs disparaissent dès 1830,
tandis que les amendes comprises entre six et seize francs connaissent une
grande stabilité sur les trois premières décennies. Les
amendes inférieures à cinquante francs, subissent une diminution
en passant de 20 % de 1810 à 1830 à moins de 10 % en 1840. La
sévérité des peines est fonction du délit et du
type de tribunal. Du simple délit de chasse sans permis puni de quelques
dizaines de francs à la condamnation à mort pour assassinat, les
habitants du canton de Coussey nous montrent à travers leurs
délits commis toutes les peines qu'ils encourent.
On observe parmi les amendes une baisse des petits montants
qui profitent aux sommes plus importantes supérieures Les amendes
supérieures à cinquante francs explosent sur là
période 1830-1850. Cet alourdissement des amendes ne se retrouve pas
parmi les peines de prison qui au contraire tendent à se
réduire.
Figure 14,
Répartition des amendes par catégorie pour les 4 décennies
en %.
Conclusion de la première partie.
La Justice fait preuve d'efficacité dans le canton de
Coussey au XIXème siècle. Les délinquants, selon les
infractions commises, comparaîtront devant le tribunal de simple
police de leur commune pour les infractions, devant le tribunal correctionnel
de Coussey pour les délits, et enfin devant la cour d'Assise d'Epinal
pour les crimes. L'Infrajustice joue également un rôle important
dans l'arrangement des conflits entre individus en offrant des solutions
rapides et peu onéreuses. On peut également retenir le
côté paternaliste du Juge de paix pour les infractions et les
délits les moins graves. Cette vision doit cependant être
nuancée par quelques fautes sanctionnées plus durement.
Le maire apparaît comme l'interlocuteur
privilégié de la Justice. Localement, il est un relais de
l'autorité reconnu par ses concitoyens. Il est fréquemment
sollicité pour dénoncer une injustice, ou pour négocier un
arrangement financier. Officier de police judiciaire, sa tâche est
fastidieuse. Son activité, fait de lui une cible
privilégiée du mécontentement villageois. En effet les
Vosgiens ne sont pas toujours disposés à se laisser dicter leur
conduite et à voir intervenir des représentants de
l'autorité publique dans leurs affaires privées.
La confrontation du prévenu face à la Justice,
est le fruit d'un méticuleux travail, de la détection de
l'infraction au verdict du juge. Les enquêtes sur le terrain, l'action du
procureur, les auditions de témoins et les interrogatoires rythment les
procédures. Celles-ci se clôturent en majorité par des
condamnations. Parmi les sanctions, les peines de prison sont les plus
nombreuses suivies de près par les amendes. Les peines variées
connaissent une gradation logique selon les tribunaux en charge de l'affaire.
Les sanctions infligées ne sont pas figées dans le temps, on
observe même un durcissement des amendes, et un assouplissement des
peines de prison au cour de la période.
Finalement, la Justice peut se reposer sur l'activité
efficace des maires. Les juges prennent ensuite le relais en cherchant surtout
à responsabiliser le délinquant.
DEUXIEME PARTIE :
LES MULTIPLES VISAGES DE L'ILLEGALITE ; PROFIL
DES DELINQUANTS, CADRE SPATIO-TEMPOREL ET GRADATION DU DELIT.
La délinquance dans le canton est d'une grande
diversité. Délinquance ou délinquances sont des notions
vagues proches du néologisme, par conséquent une observation
approfondie des acteurs des pratiques «illégalistes« et des
infractions elles-mêmes permettra d'en clarifier la taxinomie.
Infractions, délits, crimes, ont pour seule similarité
d'être illicites, un délit de vaine pâture commis par un
jeune garçon est en effet diamétralement opposé à
un vol commis à la ville
Tous les individus, mis à part les plus jeunes et les
plus âgés, sont susceptibles de basculer dans
l'illégalité. Chaque âge possède ses
particularités délictueuses, de même que le métier
conditionne les villageois à commettre des infractions
particulières. Le sexe intervient également, hommes et femmes ne
sont pas tous aussi impliqués dans la contravention.
Les marqueurs espace et temps, sont des aides
précieuses à la compréhension de l'infraction. La
délinquance apparaît au cours d'une année, d'une
décennie, ou d'un demi-siècle, comme un phénomène
cyclique. Même après des épisodes de calme relatif, le
phénomène, endémique peut surgir à la moindre
crise. Sur le plan géographique on s'aperçoit que des villages au
sein d'un même canton présentent des diversités
étonnantes. Les ressortissants d'un village pourront apparaître
comme de véritables brigands alors que les habitants du clocher voisin
seront d'une discrétion absolue devant les juges.
Les infractions, nous l'avons vu au travers des peines
judiciaires, répondent à une gradation. L'échelle de la
délinquance possède un nombre important de degrés. En
classant ces délits, nous pourrons saisir le caractère et surtout
l'échelon d'implication des habitants du canton dans le monde de
l'illégalité.
Nous pourrions fixer comme cadre pour cette deuxième
partie ; les délinquants, et les niveaux de délinquance.
Nous nous attarderons sur l'état civil des
délinquants en examinant âge, sexe, et métier des
accusés, pour ensuite aborder la géographie de la
délinquance au sein même du village, puis du canton. Enfin nous
établirons une progression des pratiques
«illégalistes«, de la simple infraction à
l'assassinat.
A.
Identité du délinquant, âge, profil social et sexe.
1. La
délinquance n'a pas d'âge.
L'étude du délit dans les
sociétés rurales du XIXème siècle permet de
distinguer quatre classes d'âge distinctes. Dans les jugements, ne sont
précisés que le nom et le métier du prévenu. Il
faut chercher dans les interrogatoires pour découvrir un état
civil plus complet des délinquants potentiels. La première
catégorie d'âge mise en évidence, est celle des enfants de
moins de 15 ans. Viennent ensuite, les adolescents et jeunes adultes
âgés de 15 à 25 ans, puis, les adultes âgés de
25 à 50 ans. Enfin les personnes de plus de 50 ans ferment la marche.
a. Les mineurs, des délits
limités et bien ciblés.
Cette catégorie est logiquement celle qui se
distingue le moins en termes de criminalité, car c'est aussi la plus
surveillée. Les enfants dont la majorité pénale survient
à seize ans sont cependant émancipés précocement et
se voient confier des troupeaux à garder dès le plus jeune
âge. On rencontre les enfants essentiellement au travers des
délits de vaine pâture ou de chamailleries qui tournent mal. Des
auteurs du XIXème siècle comme Henry Joli, attribuent aux enfants
une «prédominance du vol dans l'adolescence162(*) ». Ainsi à
Brancourt le 27 février 1828, Thomas Alexandre Mahalin et Joseph Thiant,
tous deux mineurs sont accusés163(*), pour le vol de 14 poules appartenant à
divers particuliers. Les enfants mineurs ne peuvent cependant pas
comparaître seuls en justice, ils sont accompagnés de leur
père « civilement responsable ». Dans les
procès verbaux ou les jugements, les plus jeunes sont
systématiquement qualifiés de leur nom suivi de celui de leur
père et de sa profession. Cette délinquance juvénile reste
marginale avec seulement 3,74 % de tous les délits commis et ne
s'applique qu'à quelques individus pour quelques délits. En se
référant au Compte Général, on obtient des chiffres
légèrement supérieurs, la moyenne nationale des mineurs
délinquants est en effet de 4,86 %.
b. Les jeunes de 18
à 25 ans et le phénomène de groupe.
Le caractère, la force, l'expérience
évoluent. On peut schématiser grossièrement le groupe des
jeunes âgés de 16 à 25 ans par leur comportement
impétueux et leur besoin incessant de se mesurer aux autres pour
établir leur identité au sein du groupe villageois. Tous ces
éléments vont les pousser à commettre des formes
particulières de délits.
Le groupe des jeunes adultes non mariés est
responsable de 25,85 % des délits, ce groupe est souvent organisé
en communauté que l'on appelle abbayes de jeunesse pour les
siècles précédant. Des communautés aussi bien
organisées n'existent pas dans le canton, bien que des formes de
sociabilité de jeunes gens existent. Tous les ans à
Neufchâteau, les jeunes adultes se réunissent « le dimanche
appelé les Brandons pour fêter les Valentins164(*) ». Ce rassemblement de
jeunes, gêne la tranquillité publique par « un usage abusif
et scandaleux des cris portant atteinte à la morale et à la
tranquillité des ménages165(*) ». La préparation de cette fête
est organisée sous la conduite d'une société de jeunes gen
s. Le maire interdit le déroulement d'une telle fête, et prend des
dispositions importantes en mettant en état d'alerte les gendarmes et
les gardes champêtres.
Cette classe d'âge, est virulente, son organisation
est basée sur l'usage de la violence au quotidien. Les disputes sont les
plus spectaculaires à cette période de la vie. Une
majorité d'affrontements physiques incluant un nombre important de
protagonistes, sont le fait de jeunes gens de moins de 25 ans. Les beuveries la
veille des conscriptions, ou les bals, donnent lieux à des rixes entre
petites bandes. Ce phénomène se produit à
Domrémy-la-Pucelle le 13 octobre 1811 lors d'un bal166(*). Un des danseurs, Louis
Fleurey, donne un coup de poing à un enfant de quinze ans au cours d'une
danse. Six autres jeunes âgés de 15 à 20 ans provoquent
alors l'agresseur puis attendent qu'il quitte le cabaret pour le battre.
Henry Joly montre que les adultes âgés de 21
à 25 ans se manifestent surtout par les infanticides, les vols
domestiques ainsi que les vols sur chemins publics.
Jusqu'à 25 ans inclusivement, les crimes contre les
propriétés sont plus nombreux que les crimes contre les
personnes.
c. Des atteintes à la
personne majoritaires chez les moins de cinquante ans.
Les individus âgés de 25 à 50 ans
constituent la force vive productive. Ils sont le groupe des parents et
incarnent l'autorité. Ces chefs de familles défendent leurs
intérêts, leurs terres lorsqu'ils en ont et combattent les
atteintes à l'honneur de leur famille. Cette attitude les amène
à commettre 56,80 % des actions illicites.
La courbe des délits n'est cependant pas constante de
l'âge de 25 ans à 50 ans, les individus âgés de 25
à 40 ans commettent nettement plus de délits que ceux
âgés de 40 à 50 ans. Le summum se situe de 20 à 30
ans avec 30,95 % des délits et de 25 à 30 ans avec un pic de 48
délits commis.
Les individus proches de l'âge de 25 ans violentent
le plus leurs semblables, « c'est de 21 à 30 ans que dans
notre siècle, l'homme commet, en France, le plus grand nombre de crimes.
Depuis 1826 jusqu'en 1880, cette loi n'a souffert aucune exception. De 25
à 30 ans surviennent en plus grand nombre les actes de violence
(meurtres, assassinats) et les vols qualifiés167(*) ». Claude
Christophe Corroy et Hilaire son frère sont ainsi âgés de
26 et 28 ans, lorsqu'ils exercent des actes de violence grave sur la personne
de Joseph Kasmann168(*).
d. Des aînés plus
calmes.
Les plus de cinquante ans se distinguent peu dans le domaine
de l'infraction, ils n'en commettent en effet que 13,62 %. Les
aînés souffrent d'une fragilité accrue, la lutte pour
leur survie est dès lors quotidienne. Comme le montre François
Ploux, les plus âgés s'étant dépouillés de
leurs biens au profit de leurs enfants, sont isolés et se retrouvent
dans des situations critiques169(*). Ceci est d'autant plus vrai pour les veuves,
seules, et davantage fragilisées, elles en sont parfois réduites
à la rapine pour leur survie. A Coussey, en 1831, Claire Michele une
veuve de 67 ans, vole ainsi deux javelles de blé pour assurer sa
subsistance.
Henry Joli note une « prédominance des
attentats à la pudeur sur enfants dans la vieillesse170(*) ». Ce constat
s'observe à Grand en 1823. Louis Thiébaut Robert âgé
de 65 ans, commet un attentat à la pudeur avec violence sur un enfant
âgé de moins de onze ans, mais il sera finalement relaxé,
car « il était en démence au moment de
l'action171(*) ».
e. L'âge des
délinquants.
A partir de l'histogramme suivant, on
observe que la courbe de la délinquance augmente rapidement au cours de
l'adolescence, de nos jours la délinquance connaît sont
apogée de dix-huit à vingt-quatre ans. Au XIXème
siècle ce pic est plus tardif, il apparaît chez les individus
âgés de vingt-cinq à trente-cinq ans. Marie-Renée
Santucci voit dans ce phénomène une
« sociabilisation172(*) » plus tardive. Par la suite la courbe se
maintient élevée jusque l'âge de cinquante ans, puis
diminue régulièrement pour devenir résiduelle après
soixante-cinq ans.
Figure 15, Graphique
présentant l'âge des délinquants, hommes et femmes
confondus.
Hervé Piant, dans son étude sur la Justice
civile et criminelle dans la prévôté royale de Vaucouleurs
durant l'Ancien Régime, trouve des chiffres identiques avec toutefois
une faible proportion de jeunes de moins de 15 ans173(*). Le nombre d'accusés
dans le canton de Coussey semble se situer dans la continuité du
siècle précédant et dans la moyenne régionale.
De façon générale, plus le
délinquant est jeune, plus les probabilités que le délit
soit un crime contre les propriétés est élevé,
à l'inverse, en vieillissant, les individus commettent d'avantage de
délits contre les personnes.
En plus de son âge, l'origine du délinquant
influe directement sur son comportement.
2. Le
profil social du délinquant.
Le délinquant du XIXème siècle donne
l'image d'un vagabond miséreux, rodant de villages en villages à
l'affût de la moindre rapine. La réalité est beaucoup plus
complexe, comme le montre le graphique suivant, toutes les couches sociales
commettent des délits, et ont toutes une infraction de
référence.
Figure 16, Répartition socioprofessionnelle des
accusés dans le canton de Coussey de 1810 à 1860.
a. Répartition
socioprofessionnelle des accusés.
Les accusés du canton occupent des métiers
variés, pour les classer nous nous sommes inspirés du classement
réalisé par Alain Pauquet qui retient pour son analyse sociale de
la violence les cinq divisions suivantes174(*) :
1. Exploitants agricoles et journaliers, manoeuvres,
vignerons, etc.
2. Domestiques,
3. Ouvriers d'industrie et ouvriers artisans (boulangers,
bouchers, meuniers, tailleurs, voituriers),
4. Classe moyenne et supérieures (commerçants,
professions libérales et les aubergistes),
5. Gens sans aveu, marginaux.
Le milieu agricole se place en tête de la
hiérarchie des accusés avec 43,67 % des délinquants, les
ouvriers et les artisans arrivent en seconde position. Les classes moyennes et
supérieures se placent troisièmes, puis viennent les gens sans
aveux et les domestiques qui sont peu représentés dans ce
classement et qui ne fournissent chacun que 4% des accusés.
On constate une homogénéité de
l'appartenance sociale du plaignant et du prévenu, celle-ci va
jusqu'à opposer de nombreuses fois des individus exerçant le
même métier. Ainsi, à Mont les Neufchâteau en 1817,
deux cultivateurs règlent leur différent à l'aide de la
Justice pour un arrachage de pommes de terre, de tels exemples sont nombreux.
Les classes moyennes et supérieures recourent souvent
à la justice pour des violations de leur propriété. A
Sionne, la famille Muel possédant les forges de Sionne saisit ainsi huit
8 fois la justice.
A l'opposé un individu d'un milieu social
inférieur, saisit rarement la Justice contre un riche
propriétaire, sans doute le poids des structures sociales d'Ancien
Régime est-il encore présent dans les esprits.
b. Les catégories
socioprofessionnelles et le délit.
Si la délinquance touche toutes les strates sociales,
tous les accusés ne commettent pas les mêmes délits selon
leur niveau et leur origine sociale175(*).
Les classes moyennes et supérieures se distinguent
surtout par le délit de chasse qui reste dans l'imaginaire comme
l'apanage de la noblesse, cette catégorie n'hésite pas à
braver les dates d'ouverture et les réglementations locales en vigueur.
A l'opposé, les classes privilégiées volent et mendient
très peu.
Le monde de l'agriculture est très présent
parmi les délits de chasse et les violences physiques. Les cultivateurs
et autres travailleurs des champs sont en permanence en contact avec la nature
et sa faune. En effet, tendre des collets ou emporter son fusil aux champs est
courant pour les paysans.
Les ouvriers ont quant à eux souvent recours souvent
à la violence physique et au vol. Le vol, est un délit souvent
commis par ceux qui ne peuvent se procurer l'objet de leur désir par les
voies traditionnelles du commerce. Avec les paysans, les ouvriers sont le
groupe qui recourt le plus aux violences physiques. Contrairement aux
domestiques et aux classes moyennes et supérieures, ils n'ont aucune
retenue, et n'hésitent pas à régler leurs
différents à coup de pied ou de poing.
Un quart des délits commis par les domestiques est un
vol. Les domestiques vivent au service de personnes évoluant dans des
conditions plus confortables, la convoitise semble avoir raison de
l'honnêteté de certains. De manière générale
plus le niveau économique de l'individu est bas, plus la chance que le
délit commis soit un vol augmente. Les servants sont en revanche les
moins violents, leur statut marqué par la dépendance restreint
leur liberté d'action.
Nous n'avons pas pris en compte les vagabonds et les
mendiants qui sont principalement accusés de vagabondage, parfois
accompagné de vol. Alain JACQUET, montre que déjà au
XVIIIème siècle dans les Vosges de L'Ouest, « les
errants, sont le cauchemar des autorités : le pouvoir multiplie les
édits contre eux176(*) ». « Les vagabonds, sont des
délinquants actifs. Ils commettent de nombreux vols, notamment sur les
foires et marchés177(*) ». Le vagabond du XIXème
siècle, est un solitaire qui commet essentiellement des vols de
subsistance.
Les agriculteurs majoritaires dans le canton arrivent
logiquement en tête du classement de la délinquance. Les ouvriers
sont les plus violents, avec les domestiques ils sont les personnes qui
commettent le plus de vols. Des divergences encore plus marquées que
l'origine sociale, s'observent selon le sexe.
3.
Les femmes commettent peu de délits.
Les femmes se font moins remarquer que leurs maris dans le
domaine de l'infraction. Elles commettent ainsi moins d'actes délictueux
et sont surtout moins poursuivies, ce qui pourrait fausser nos chiffres.
Figure 17, proportion de
femmes accusées.
a. Recul de la délinquance
féminine.
Si le sexe masculin est celui qui se manifeste le plus dans
la délinquance, les femmes ne sont pas en reste. Henri Joly
démontre la mauvaise influence masculine sur leurs épouses.
L'auteur distingue plusieurs régions françaises, où la
part de la criminalité féminine est importante, « pour
le reste de la France la religion établit une différence encore
plus accentuée au profit des femmes, en les préservant plus que
leurs frères et leurs maris178(*) ». D'autres auteurs du XIXème
siècle, voient dans la mauvaise origine et l'éducation des
filles, les causes de la délinquance féminine. Monsieur
d'Haussonville, fait ainsi remarquer dans son rapport sur les
établissements pénitentiaires, que « la naissance
illégitime et l'absence d'éducation portent encore plus de tort
à la moralité des filles que des garçons179(*) ».
Au début de la période les femmes
représentent un accusé sur quatre180(*), en 1820, elles ne sont plus
que 20 %, pour atteindre 10 % dix ans plus tard. En 20 ans leur nombre est
divisé par plus de deux. Cette diminution s'explique soit par une
brutale baisse des comportements délictueux féminins, ou au
contraire un fort accroissement des délits commis par les hommes, ou
encore du fait de poursuites moins systématiques à l'encontre des
femmes. La courbe du nombre d'accusés connaissant une baisse
significative en cinquante ans, cette chute du nombre de femmes accusées
reflète tout de même une baisse de la délinquance
féminine. Celle-ci est même bien supérieure à ce que
ne le laisse supposer les pourcentages. Le nombre d'accusées
chute de la façon suivante :
Evolution en % du nombre de femmes accusées :
1810-20 ; 22
1821-30 ; 16
1831-40 ; 5
1841-50 ; 3
1851-56 ; 2
D'après le Compte Général on observe
une baisse légère des femmes jugées en correctionnelle.
Moyenne Française : Moyenne du Canton :
1821-30 : 22,48 %. 21,69 %.
1831-40 : 21,33 %. 11,45 %.
1841-50 : 19,60 %. 12,03 %.
1851-60 : 17,80 %. 9,54 %.
Le pourcentage des délinquantes jugées
connaît une chute vertigineuse dans le canton. D'après
l'histogramme intitulé proportion de femmes accusées181(*), on observe qu'en 1820, le
taux de femmes jugées par rapport au nombre d'homme est sensiblement
équivalent dans le canton et en France avec respectivement 21,69 et
22,48 %. Quarante années plus tard, la moyenne du canton n'est plus que
de 9,54% alors que la moyenne nationale s'est maintenue à 17,8 %.
De nombreux facteurs peuvent expliquer cette chute, d'abord
la diminution du nombre d'affaires rend les statistiques moins précises
dès les années 1830. Les infractions commises après cette
date sont de plus essentiellement commises par des hommes, à l'image de
l'attentat à la pudeur qui apparaît à cette date. Enfin les
délits prennent le pas sur les infractions dès les années
1830, or les femmes commettent 51,12 % de ces derniers, contre 41,65 % pour les
hommes.
b. La délinquance
féminine, entre violence et délits contre les biens.
La gent féminine se démarque par un
comportement plus violent que les hommes. En effet, 43,39 % de ses
délits concerne la violence verbale ou physique. Les violences physiques
féminines sont majoritairement commises sur d'autres femmes à 63
%, voir sur des enfants ou plus rarement sur des hommes. Ainsi, à
Houécourt une femme agresse un jeune enfant qui jouait dans la neige,
pensant que celui-ci lui avait lancé une « pelote de
neige182(*) »,
« elle le frappa à la tête d'une pierre qu'elle tenait
à la main en lui disant d'aller chez lui et de ne pas jeter de la
neige ».
La violence physique féminine est rarement
exercée contre un homme dont la force physique est souvent
supérieure. Cependant, le 1er mars 1846, dans le
département, « une jeune fille a tiré un coup de
pistolet sur le nommé Jacquet qui, dit-on lui faisait la cour. Jacquet
n'a heureusement que l'oreille meurtrie. On ignore la véritable cause de
ce crime étrange183(*) ». Lorsqu'elles s'attaquent à des
hommes les femmes ont souvent recours à des armes.
La violence verbale l'emporte cependant sur la violence
physique, les femmes ont plus souvent recours aux insultes pour blesser un
adversaire. Les délits féminins sont à 16 % des
délits ruraux et à 13,75 % des vols. Les larcins, peuvent
être importants, mais concernent le plus souvent de la nourriture ou des
vêtements.
D'une manière générale, les femmes
commettent plus de délit contre les biens que contre les personnes. Leur
rôle n'est cependant pas toujours très clair dans certaines
affaires.
c. Rôle actif et rôle
passif des femmes dans l'infraction.
Les femmes sont rarement les seules accusées pour un
délit. Elles sont couramment accompagnées d'un ou plusieurs
parents ou amis. Faisant souvent office de second rôle lors des
infractions, elles prêtent main forte à leur mari lors des
« mauvais coups » où elles servent de guetteuses.
Les confidences de Jean Gris au garde champêtre de La
Vacheresse-et-la-Rouillie, nous apprennent ainsi qu'il a vu l'hiver
précédant, Jean et Nicolas Flammérion couper et enlever
des landres dans un jardin. Ce forfait se déroule « sous la
surveillance de la femme Flammérion qui claqua dans ses mains pour que
son fils et son mari s'enfuient quand elle vit arriver du monde184(*) ».
Les compagnes constituent également une force de
frappe supplémentaire non négligeable lors des règlements
de compte. A Chermisey le 11 juin 1811, Marie-Louise Jacquemin viole
« une entrée séparative de l'héritage de la
famille Etienne185(*) ». Michel Etienne, accompagné de sa
femme, de leur fille et de leur domestique assaillent l'intruse.
« Michel Etienne saute avec ses genoux sur la femme Jacquemin pendant
que Catherine Étienne la maintient au sol. Il lui a donné
plusieurs coups d'un bâton d'épines que madame Étienne est
allée chercher près d'une haie morte. Puis Catherine
Étienne lui a arraché son collier ». Le rôle
d'auxiliaire de ces trois femmes est ici flagrant puisqu'elles contribuent
largement au passage à tabac, en trouvant les accessoires et en
dérobant finalement les bijoux de la plaignante.
Ces deux exemples ne doivent cependant pas faire oublier que
les femmes n'ont pas toujours besoin de tierces personnes pour commettre des
infractions puisque dans 41,26 % des affaires elles sont les seules à
apparaître dans les jugements. On peut néanmoins se demander
lorsqu'elles agissent en groupe si elles ont toujours le choix d'aider leur
mari, il est évident que dans certains cas celles-ci sont plus ou moins
obligée d'enfreindre la loi sous leur pression.
En cinquante années les chiffres de la
délinquance féminine connaissent une chute vertigineuse dans le
canton. Ces dernières commettent essentiellement des délits
contre les biens et agissent rarement seules.
De même que l'âge, le milieu social ou encore le
sexe sont déterminants ; les infractions répondent à
des schémas conditionnées par la géographie et le
temps.
B. Le
cadre spatio-temporel de l'infraction.
De nombreux facteurs influent sur la nature et
l'intensité du délit. Le temps apparaît ainsi essentiel,
tout comme le milieu physique et sa géographie. Certains
évènements climatiques, économiques ou même
politiques affolent périodiquement les statistiques de la
délinquance.
1.
Les temps du délit.
La temporalité dans le délit permet d'en
dégager des constantes, le nombre de délits variant
considérablement en fonction des mois, des jours et des heures.
a. Evolution annuelle de la
délinquance.
La délinquance suit des cycles saisonniers, ce qui
est depuis longtemps admis par les historiens et les criminologues comme, le
docteur Lacassagne qui montre l'importance des facteurs climatiques et
thermiques sur les courbes saisonnières de la violence du XIX
siècle186(*).
L'Hiver est la basse saison de la
délinquance187(*). Les températures couramment négatives
peuvent atteindre les -20°c188(*). Durant l'hiver 1830, la température atteint
-20,5°c, la terre
reste gelée pendant 86 jours consécutifs, et la neige met 59
jours à fondre. L'hiver 1826 voit quand à lui, près de 100
jours de gel consécutifs. Dans ces conditions les communications au sein
du village sont réduites, les villageois continuent à se voir
à la messe, au lavoir ou lors des veillées, mais le temps
passé avec les autres membres du village est réduit ce qui
explique le peu de délinquance observé en hiver189(*).
Figure 18, Evolution
mensuelle du délit au cours de l'année.
Pour des raisons évidentes, plus la journée
sera longue en terme d'ensoleillement plus le risque que des délits
soient commis augmente. Cette observation devrait faire du mois de juin, mois
du solstice d'été, le mois le plus chargé de la
délinquance, cependant curieusement c'est le seul mois qui ne
s'insère pas dans la parfaite progression linéaire de la
délinquance depuis février jusqu'au mois de juillet.
La durée de jour joue néanmoins un rôle
crucial, de nombreux délits ne peuvent être commis que de jours,
à l'image de la vaine pâture, des délits de chasse ou
encore des délits forestiers. Certains délits qui pourraient
s'affranchir de la lumière comme le vol, les violences physiques ou les
insultes, ne profitent pas de la nuit pour se commettre davantage. Dès
lors la durée d'ensoleillement joue un rôle capital et multiplie
le nombre de délit lorsqu'elle s'accroît.
Aurore Véron dans son étude sur le bailliage
de Bruyères190(*), explique les fortes proportions de délits
commis l'été, par les travaux agricoles communautaires propres
aux régions d'openfield. Les regroupements de paysans lors des moissons
augmentent considérablement le risque d'altercation. L'auteur ajoute
à cet argument l'alcool et la chaleur comme facteurs
supplémentaires de risque de dérapage estival.
Si de nombreux délits ne se commettent qu'en
été, à contrario les délits de chasse et les
infractions forestières sont plus nombreux en hiver mais ne sont pas
assez conséquents pour infléchir nos statistiques
saisonnières.
Le printemps et l'automne, apparaissent comme deux saisons
de transition. Ces deux saisons connaissent une augmentation puis une
diminution avec une régularité presque parfaite de février
à Juillet et de Juillet à Décembre.
L'été est la saison privilégiée
de la délinquance, la durée du jour accrue et les travaux
agricoles en commun en sont les principales explications. De même que
l'année la semaine est sujette à des variations importantes.
b. Evolution hebdomadaire du
délit.
De même que les mois de l'année, certains jours
de la semaine connaissent une forte intensité de délits191(*). On observe à nouveau
un crescendo qui s'opère du lundi au dimanche avec toutefois une
légère accalmie le samedi.
Le dimanche constitue le pic d'intensité avec
près de 60 délits, ce qui n'est pas une surprise puisque le
dimanche est le seul jour chômé de la semaine. Ce jour permet aux
habitants de fréquenter l'église le matin, le cabaret à
midi, et les jeux de quille l'après-midi. Ces jours de
sociabilité sont donc logiquement les plus violents, toute la gent
masculine du village est réunie, dès lors les plus agressifs en
profiteront pour marquer leur supériorité devant tout le groupe
en provoquant leurs ennemis. On observe cette agressivité à
Midrevaux le 25 avril 1813. A l'issue de la messe paroissiale le maire
réunit les villageois pour leur faire part de vols de bois. Jean Aubry
se sentant certainement visé, outrage le maire une première fois,
puis une seconde, « à quatre de l'après-midi en jouant aux
quilles devant le domicile de Jean-Baptiste Hierle192(*) ».
Le dimanche est le seul jour de détente durant lequel
on règle les conflits. Aidés par l'alcool ingurgité au
cabaret, les habitants en viennent plus facilement aux mains.
Le début de semaine est bien plus calme, les lundis,
mardis et mercredis étant chacun proches des 30 délits
journaliers, après le repos du dimanche ces trois jours sont
dédiés au travail et ne connaissent qu'un faible taux de
délictuosité.
Le jeudi et le vendredi connaissent une hausse
d'intensité avec 40 délits chacun ce qui s'explique certainement
par la proximité du dimanche.
Le samedi constitue clairement une anomalie à cette
courbe hebdomadaire, à l'approche du dimanche chômé les
villageois cherchent sans doute d'avantage à terminer leurs divers
travaux que de chercher noise à leurs voisins.
Figure 19, La
délinquance selon les jours de la semaine.
Le dimanche est le jour par excellence des rixes et des
insultes, seul jour chômé, il est un moment clé de la
sociabilité villageoise.
c. Evolution des délits
selon les heures de la journée.
Selon les tranches horaires de la journée, le
délit est plus ou moins intense193(*). La fin de matinée de dix heures à
midi est ainsi une période très agité, avec 20% des
délits commis, et une moyenne de 4 délits à l'heure.
De treize heures à quatorze heures se commettent
10% de tous les délits. Cette tranche horaire se distingue surtout par
une absence totale de délit commis durant l'heure la
précédant et lui succédant.
L'après-midi et la fin de journée, de quinze
heures à vingt-et-une heures, sont propices aux manquements à la
loi. Durant ces six heures se commettent 42,5 % des délits, soit une
moyenne de 7,08 délit à l'heure ce qui en fait la tranche horaire
privilégiée du délit. En soirée, la fatigue
commence sans doute à se faire sentir, ce qui entraine une
irritabilité accrue en multipliant les risques d'altercation ou de
comportements délictueux.
La fin de soirée de vingt-et-une heure à
minuit, est relativement peu agitée en comparaison de
l'après-midi. Il s'agit d'une période de transition, où
les habitants se couchent progressivement. Cette période dure trois
heures, elle est principalement animée de vingt-et-une heure à
vingt-deux heures. Les cabarets ont pour obligation de fermer avant vingt-deux
ou vingt-trois heures selon l'époque, ce qui clôt
généralement les délits pour la nuit à moins
que les clients ne fassent « le tour du village avec leur violon
après la fermeture du cabaret194(*) ».
La tranche horaire de minuit à cinq heures du
matin, est la période la plus calme car le rythme de vie des
paysans est étroitement lié à celui de la durée
d'insolation. Vivant à l'heure solaire, la plupart des habitants du
canton se couchent très tôt et se lèvent à l'aube.
La nuit est donc dévolue au sommeil, et seulement 5% des délits
sont nocturnes, pour une moyenne de 0,4 délit par heures.
Figure 20, les heures de
la délinquance.
L'été, les dimanches, et les fins
d'après-midi sont particulièrement criminogènes. L'hiver
est la morte saison de l'infraction alors que Juillet est le mois par
excellence de la délinquance. Si le délit varie dans le temps, il
est envisageable que les différentes localités du canton
présentent des divergences semblables, d'un point de vue
géographique.
2. Géographie de la
délinquance, des diversités entre villages.
Les villages étudiés ne présentent par
tous le même rapport aux pratiques «illégalistes«, on
observe que certains villages sont tournés vers des types particuliers
de délits et que d'autres peuvent être regroupés en
communes plus ou moins violentes.
a. Villages et
criminalité, des taux de délinquance variables.
La carte ci-dessous représente l'intensité de la
délinquance selon les localités au sein du canton. Cette carte a
été réalisée à partir du nombre de
délits commis par village en fonction du nombre d'habitant.
Figure 19, Importance de
la délinquance selon les villages dans le canton.
· Trio des villages présentant le taux
d'accusé le plus important par rapport au nombre d'habitant.
Certains villages apparaissent comme des bêtes noires
de la Justice locale, tandis que d'autres semblent ne pas connaître la
moindre infraction195(*).
Parmi les villages les plus en proie à la
délinquance, Greux présente un taux record d'accusés par
rapport au nombre d'habitants, avec 7,86 % des délinquants de tout le
canton, soit trois fois plus que la moyenne de 2,61 %. Cette localité se
distingue surtout par sa violence verbale, 14,28% des insultes et autres
outrages oraux s'y commettent. Le vol y est également répandu
avec 8 % des cas recensés. Avec seulement 280 habitants, Greux
apparaît comme un acteur majeur de la délinquance au sein du
canton.
Seraumont et Chermisey se classent 2ème
et 3ème parmi les villages présentant les taux
d'accusés les plus importants196(*). Seraumont connaît des délits
variés et plusieurs cas de vols, tandis que Chermisey se manifeste
essentiellement par la violence mais aussi par le vol.
· Villages présentant le nombre le plus important
d'accusés.
Grand avec 45 accusés est le village qui garnit le
plus les tribunaux ce qui est logique car c'est aussi le plus peuplé.
Cette localité se distingue par une violence supérieure à
la moyenne avec respectivement 12,06 et 20,40 % des violences physiques et
verbales. Ce pourcentage s'accroît encore si l'on ne se base que sur la
partie occidentale du canton, la violence physique passe alors à 31,08 %
et la violence verbale à 31,05 %. La vaine pâture y est
surreprésentée et se commet près d'une fois sur deux
à Grand pour la partie Ouest du canton.
Coussey vient ensuite en seconde position avec 31
accusés alors que la moyenne est de 10,56 par village. Ce bourg,
chef-lieu du canton, est le plus peuplé avec 750 âmes. Avec 31
délits commis, cette localité concentre 13,3 % des vols du canton
et 31,25 % des vols commis dans les villages de l'Ouest. 8,62 % des cas de
violences physique du canton y sont recensés. Enfin, la vaine
pâture est fortement représentée dans ce bourg, puisqu'elle
s'y commet plus d'une fois sur quatre.
Coussey et Grand se manifestent surtout par la violence, et
la vaine pâture qui y sont les plus représentés de tous le
canton. Ces deux bourgs sont avant tout ruraux et leur importante
activité agricole multiplie les risques de pâturages illicite.
b. La délinquance
concentrée dans la partie ouest du canton.
La photographie ci-dessous représente le village de
Midrevaux, dans la partie Ouest du Canton. Partie Ouest et Est possèdent
des caractéristiques distinctes à l'image des massifs forestiers
plus dense dans la partie occidentale du canton.
Figure 20, Un village de la partie ouest du canton.
Importance du massif boisé, et encaissement du village dans la
vallée du Vau. Photographie aérienne, Herbillot Bernard,
1989.
On observe une césure au sein du canton entre à
l'Ouest des villages fournissant nettement plus de délinquants et
à l'est des villages moins actifs dans le domaine du
délit197(*).
On peut opposer les villages compris dans le triangle
formé par Greux, Coussey et Grand, à ceux compris dans le losange
formé par les villages de Frébécourt, Maxey sur Meuse,
Autreville et Tranqueville.
Le premier groupe atteint une moyenne de 3,61 pour le ratio
délits/nombre d'habitants. Cent soixante treize délits sont
commis par ces neufs villages soit 55,83 % des infractions du canton pour
seulement 42,94 % de la population.
En observant les délits commis dans les deux groupes
de villages, on observe dans le groupe le plus occidental, d'avantage de
violences verbales, mais peu de violences physiques. Les mots semblent donc
suffire à régler ses comptes ou à blesser un adversaire
puisque 61,05 % de la violence verbale s'y observe. Les exemples de cette
oralité illégale sont nombreux, ainsi le 7 janvier 1822, à
Coussey, Joseph Grosyeux, le maire du village se fait outrager par Duplessy. Ce
dernier l'insulte « de voleur qui avait volé la commune dans
toutes ses actions, il aurait mieux valu que sa maison fut incendiée
qu'il lui avait volé 78 F qu'il était le fils d'un
pendu198(*) ».
Les entorses à la loi sont dans ces villages sont
essentiellement des délits financiers tels que l'usure, l'escroquerie et
la filouterie qui sont commis à 55,55% dans l'Ouest du
département. De nombreux usuriers sont ainsi implantés dans ces
villages à l'image du plus fameux d'entre eux, Louis Vanniot de
Midrevaux. 4% des destructions de clôtures, de murs ou de
barrières ont lieux dans ces villages. Tous les cas de
dégradation de biens publics y sont commis. On peut s'interroger sur ce
penchant prononcé pour la destruction, peut-être les
propriétaires y sont plus nombreux et que l'absence d'une classe
intermédiaire engendre une haine des villageois les plus riches et
de leurs propriétés?
Dans la mesure où ces destructions touchent
également des biens appartenant à la commune elle-même
cette théorie des classes semble s'effondrer. Voyons un exemple de ces
destructions pour ce faire une idée plus précise. A Grand le 3
juillet 1821, Jean-Baptiste Biez détruit un chemin communal
« qui conduit de Grand à la forêt communale des
bâtis sur une longueur d'environ cent soixante mètres en labourant
un terrain communal qui est traversé par ce chemin dans sa
longueur199(*) ». Ici, la dégradation
résulte d'avantage d'une absence de précautions lors d'une
corvée que d'une volonté délibérée d'abimer
le chemin. La destruction semble surtout liée à des comportements
négligents et peut-être à une part plus
élevée de cultivateurs, principaux auteurs de ces
dégradations.
Enfin, le pâturage est une forme de délit
très répandue, 64,4% de la vaine pâture se commet dans
l'ouest du canton.
Violences verbales et destructions sont les
caractéristiques de l'ouest du canton. Les neufs villages de l'Ouest
pour des raisons obscures entretiennent un rapport particulier à la
propriété, tout en étant moins portés sur la
violence physique très répandue dans les villages de l'Est.
c. Les villages de l'Est, moins
délictueux mais plus violents.
Le deuxième groupe de village, celui de l'Est compte
treize localités et 57,06 % de la population du canton, mais ne totalise
que 44,07 % des délits. La moyenne du ratio délits/nombre
d'habitant est nettement inférieure à la partie Ouest et ne
s'élève qu'à 2,08200(*).
65,3 % des affrontements physiques ont lieu dans l'Est du
canton. Dans cette zone géographique les insultes sont à prendre
comme des avertissements avant d'en venir aux mains. Par exemple, à
Punerot, le 1er juin 1820, suite à une violente dispute au
cours de laquelle fusent les insultes, Nicolas Martin provoque Claude Ferbus
qui le roue de coups jusqu'au sang201(*).
Les délits moins nombreux sont néanmoins d'une
plus grande intensité en ce qui concerne la violence. Le vol quant
à lui se commet 56,34 % dans les villages de l'Est sans que des
explications probantes puissent être avancées.
Les délits de chasse atteignent les 71 %, ce chiffre
élevé, peut paraître erroné puisque c'est dans les
villages de l'Ouest que l'on rencontre les plus gros massifs forestiers
où l'on devrait trouver le maximum de chasseurs dans
l'illégalité. Midrevaux compte par exemple 823 hectares de bois
sur les 1429 de sa surface territoriale. Il s'avère que la chasse en
plaine est majoritaire d'après nos sources car elle est la plus
facilement répréhensible. Les braconniers de l'Est ne
bénéficient pas d'un épais couvert feuillu, comme à
l'Ouest, pour exercer leur activité en toute quiétude.
Le vagabondage y est fortement représenté avec
61,43 %. Il est cependant difficile d'apprécier si cette situation est
le fruit du hasard ou d'un contexte plus attractif pour les miséreux.
L'Ouest du canton est statistiquement plus
délictueux, les violences y sont essentiellement verbales, la violence
physique intervenant rarement. Les délits financiers et la vaine
pâture y sont importants. Les nombreuses destructions seraient
liées à la paysannerie et à la petite
propriété, qui entraînent des destructions incessantes pour
accroître sa surface cultivable. La partie Est, se démarque quand
à elle, par sa violence franche et physique, le vol y est plus
répandu tout comme le vagabondage, peut-être est-ce une marque
d'un niveau économique plus modeste, hypothèse qui serait
confortée par des délits de chasse nombreux, comme preuve d'une
recherche importante de ressources.
3.
La part de la conjoncture dans la délinquance.
Les délits peuvent être la conséquence
d'un contexte particulier, de mauvaises récoltes poussent certains
cultivateurs à enfreindre la loi pour leur survie. Le contexte de crise
devient un facteur important, pour expliquer la délinquance202(*).
a. La disette engendre la
délinquance.
L'histogramme suivant répertorie tous les délits
liés directement au manque de nourriture. On observe ainsi un pic pour
l'année 1817.
Figure 21, Délits liés à la
disette.
· Les périodes les plus maigres.
Le manque de nourriture est depuis toujours un
problème important pour les populations, puisqu'il menace leur survie.
Le canton de Coussey n'est malheureusement pas à l'abri de ces
aléas frumentaires, à partir des principaux délits
trahissant une situation alimentaire critique, nous avons réalisé
le diagramme suivant qui met en évidence quelques années
difficiles au cours de la période.
· Trois périodes se distinguent
nettement.
La première débute en 1810 et s'achève
en 1814. D'une durée de cinq années, elle ne transparaît
qu'au travers des vols de nourritures jugés devant le juge de paix, avec
une moyenne de deux vols par an et de quelques délits de chasse.
La seconde période est d'une durée similaire,
avec un pic pour l'année 1817. Avec treize vols de nourriture
constatés, la fin de cette seconde période semble cependant moins
grave alimentairement, puisqu'on y trouve plus que quelque rares délits
de chasse, de vaine pâture ou de mendicité.
La troisième période difficile dure de 1823
à 1831, soit une dizaine d'année au cours desquels on
relève 87,5 % des délits de vaine pâture, 41,66 % des cas
de vagabondage et 58,82 % des délits de chasse.
· De mauvaises conditions climatiques causent de mauvaises
récoltes.
Il convient de s'interroger sur les origines de cette
insuffisance de nourriture. Les mauvaises récoltes dues à une
météo capricieuse expliquent l'explosion des délits de
subsistance pour la décennie 1820. Se conjuguent des « hivers
remarquables par la rigueur et la durée du froid203(*) », et des
étés alternant « intensité et continuité
de la chaleur et humidité ».
La seule décennie 1820, concentre trois des six plus
froids hivers de la première partie du XIXème siècle. En
1827 et en 1830 les températures atteignent -20°C dans le
canton, pendant des périodes de quatre-vingt-dix jours sans dégel
et de plus de cinquante jours de neige.
Les étés 1828, 1829, 1830 et 1831 sont dans les
Vosges, les quatre étés les plus humides, de la première
moitié de XIXème siècle. Avec plus d'un jour de pluie sur
deux en été, pour des températures fraîche. Les
précipitations sont exceptionnelles, la pluie tombe ainsi sans
discontinuer pendant vingt-cinq jours en juillet 1828.
Le pic de délinquance de 1817 avec un nombre
exceptionnel d'affaires de vol de nourriture204(*) trouve comme principale explication 99 jours de
pluie en cinq mois, et un mois de juin totalisant trente jours de pluie.
Christian Pfister voit dans l'origine des crises agricoles,
la conjonction de plusieurs facteurs météorologiques.
« Les ensembles des modèles climatiques qui
caractérisent les crises de subsistances ont été
élaborées à partir de la combinaison des sept facteurs
suivants :
-pluviosité excessive en automne ;
-précocité de l'hiver ;
-précipitations excessives en hiver ;
-pluviosité excessive du printemps ;
-basses températures au printemps ;
-basses températures en été ;
-pluviosité excessive pendant la
récolte 205(*)». Plus le nombre de ces facteurs est important,
plus la crise de subsistance sera grave.
La sécheresse n'est pas en reste pour expliquer de
mauvaises récoltes, 1825,1826 et 1827 se font remarquer par
« la disette de la pluie », avec jusqu'à 26 jours
sans pluie en août 1825 et 1826.
Une conjonction exceptionnelle de plusieurs années
très sèches puis pluvieuses, déstabilise toute une
économie agricole avec comme conséquence une multiplication des
délits.
· Entre psychose et souffrance réelle, la
multiplication des «délits vitaux« en temps de disette.
Un rapport de tournée générale du
commissariat de police de novembre 1813 nous démontre que les
épisodes de crise frumentaire peuvent être amplifiés par
l'intervention de l'homme. On y apprend que « les cultivateurs
cherchent à favoriser la hausse des céréales en retardant
le battage des grains et en refusant de les vendre206(*) ». « On
a remarqué en effet après un certain bruit répandu dans
les alentours, qu'il entrait en France des blés
étrangers207(*)».
Toutes ces inquiétudes sur le prix des grains
entraînent certains commerçants à frauder. Ainsi, en 1811,
à Rouceux, en pleine crise frumentaire, un commerçant est
accusé d'être un « vendeur de grains de fausse
mesure208(*) ». On
assiste au cours des crises de subsistances à des hausses du prix des
blés, « les prix du pain blanc ont triplés de juillet 1816
à juin 1817, ceux du froment ont quadruplé ; ceux de l'orge
ont plus que quadruplé, [...] quand à la pomme de terre, son prix
sextupla209(*) ».
Le manque de nourriture, les rumeurs d'accapareurs de
blé, et le climat de tension extrême conduisent au piratage de
cargaisons de grains. Des habitants du village de Houécourt210(*) pillent de dette
façon une charrette remplie de grain qui était destinée
à un commerçant du village. Tout commence par une charrette
s'approchant du village, les villageois questionnent le conducteur sur la
nature de la cargaison, celui-ci restant évasif, se crée un
attroupement au coeur du village. Certains habitants montent sur la charrette
et transpercent les sacs pour voler les pois et le blé qui était
caché au milieu de la cargaison, d'autres s'emparent de sacs entiers. Le
commerçant à qui était destiné la cargaison
intervient mais se fait insulter de « gros cochon de vendeur de
blé211(*) » et « d'accapareur212(*) ». Le rapport de
police précise que les plus acharnés ont déclaré
vouloir tout simplement « du blé pour une cuite pour nourrir
leurs enfants213(*) ».
La disette est la principale cause du délit, elle
conduit les populations à commettre d'avantage d'infractions par
nécessité comme le vol ou le délit de chasse. Il ne faut
cependant pas oublier tous les délits connexes commis en temps de crise
frumentaire comme les escroqueries, ou les agressions qui sont directement
liées au climat de carence alimentaire. Les chiffres de la
délinquance peuvent également être renforcés par
d'autres facteurs tels que la conjoncture politique ou économique.
b. Impact des
évènements militaires, politiques, sur la délinquance.
· Le contexte militaire influe sur le nombre d'infractions.
Les années 1810 coïncident avec la fin du
Premier Empire. L'impact des guerres Napoléoniennes est très
visible sur notre courbe de la délinquance. Napoléon imposait de
sévères ponctions alimentaires pour son armée,
« les réquisitions reprennent de façon
régulière à partir du 2 avril 1809, date du début
de la campagne d'Allemagne et d'Autriche d'avril 1809 au 14 octobre 1809.
L'armée impériale connaît des difficultés en Espagne
alors qu'en France «l'opinion publique« commence à
éprouver une certaine lassitude de l'état de guerre permanent
dans lequel se trouve l'Empire et des nombreuses réquisitions qui en
découlent214(*)
». De 1809 à 1814, la France se trouve impliquée dans des
guerres longues et difficiles contre la cinquième coalition en 1809,
puis contre la sixième coalition en 1813 qui nécessite la
levée de 350000 hommes dans toute la France.
Ces années voient une montée importante des
délits qui correspond à ce climat militaire difficile. Les
années 1811, 1812, 1813 connaissent ainsi une moyenne de 16
accusés par an, seules les années 1816 et 1823 sont plus
marquées par la criminalité. Cette hypothèse, de la guerre
favorisant la délinquance, est d'autant plus crédible que les
actes délictueux s'amenuisent après la chute de l'Empereur.
Après Napoléon 1er, la France se
retrouve peu impliquée militairement si ce n'est en 1823 lors de
l'expédition d'Espagne. Cette escarmouche destinée à
remettre le monarque Espagnol sur le trône se solde par une victoire
Française. Le contexte militaire peut être qualifié de
propice, cependant l'année 1823 est l'une des années les plus
délictueuses.
Seules les guerres longues nécessitant des sacrifices
alimentaires conséquent ont un impact sur les délits.
· Le contexte politique et son incidence.
La période étudiée correspond à
sept régimes différents. L'impact de ces changements de
gouvernants sur la délinquance n'est pas visible, au-contraire ils
correspondent aux périodes les plus calmes de toute la première
partie du XIXème siècle.
L'abdication de Napoléon suivie du retour de la
monarchie, puis des cent jours avec le retour de l'Empereur sont les deux
années les moins agitées en termes de délinquance de la
période 1808-1830.
L'impact des changements de régime se ressent
essentiellement au travers du crime séditieux qui qualifie les
réfractaires aux nouveaux dirigeants. Six habitants du canton sont ainsi
condamnés pour avoir répandu ou répété des
rumeurs. Après les Cent Jours de Napoléon, le phantasme d'un
retour de Napoléon apparaît dans les rumeurs. Cette agitation est
durement combattue dans les années 1816-1817. En 1816, deux habitants de
Longchamp et de Rouvres-la-Chétive, prédisent le retour prochain
de Napoléon. L'un des prévenus s'explique et déclare avoir
« lu à Châtenois, sur une gazette, que Bonaparte
était débarqué sur le Rhin avec une avant-garde de
400 000 hommes ; qu'il parcourait les villages avec la Sainte vierge,
escortée de quatre anges, et guérissait les malades avec de
l'arsenic215(*) ». Les deux hommes sont condamnés
à des peines exemplaires de 100 francs d'amende et de six mois de
prison, ainsi qu'à une année sous la surveillance de la police.
Pour dissuader d'autres cris séditieux, le juge ordonne en outre que le
jugement soit imprimé à cinq-cents exemplaires et soit qu'il soit
placardé dans toutes les communes des Vosges.
Les grands évènements nationaux trouvent
souvent un écho dans l'arrondissement de Neufchâteau. Peu
après l'assassinat du duc de Berry en février 1820, Jeanne
Andrée de Mirecourt compose « une chanson séditieuse et
outrageante à la mémoire de Monseigneur le Duc de Berry216(*) ». Dans cette
chanson l'auteur prend clairement parti pour l'assassin d'un membre de la
famille royale. Cette prise de position est inacceptable pour les
autorités.
Seuls quelques rares délits de sédition
permettent d'observer localement, l'impact limité des changements de
régimes. L'augmentation des délits est en revanche plus sensible
aux privations liées à l'effort de guerre Napoléonien. Un
dernier facteur, économique est lui aussi capable d'augmenter le nombre
de délit.
c. Entre crise économique
et perte de repères.
L'état de l'économie revêt une
importance particulière, la dépression des marchés
engendre des baisses de salaire et des fluctuations importantes des produits de
première nécessité.
Les deux crises qui secouent la première
moitié du XIXème siècle se ressentent localement. La
première dure de 1825 à 1832 et se manifeste dans le canton par
une moyenne de dix accusés par an. Durant cette période les
violences sont sensiblement inférieures à la moyenne. Cette crise
étant également agricole ce sont au contraire les délits
de chasse et de vaines pâtures qui sont les plus importants217(*).
La seconde crise se manifeste durant la deuxième
partie de la décennie 1840. Après une quinzaine d'années
faiblement délictueuses de 1830 à 1844, on observe soudain une
poussée du nombre d'infractions de 1844 à 1849. Cette crise est
due au mauvais temps et la maladie Irlandaise de la pomme de terre qui
s'étend à la France. Cette crise agricole devient
économique, elle est qualifiée de crise
« mixte » mêlant « sous-consommation
agricole et surproduction de type capitaliste218(*) ». « La crise, et la
dépression de l'économie française au milieu du
siècle (1846-1851) ont combiné aspects et modalités
agricoles, industriels et aussi financiers219(*) ». Le Chômage atteint des taux
record, l'industrie est également touchée, tout comme le
crédit et la finance. Les paysans ayant eu recours à des emprunts
de type usuraires frôlant parfois les 20% connaissent les plus grandes
difficultés pour rembourser.
Délits commis en tant de crise économique.
|
Moyenne des délits
Type de délit
|
Crise économique n°1.
(1825-32)
|
Crise économique n°2.
(1845-1850)
|
Moyenne de référence. (1808 à
1857).
|
Violences physiques
|
20,28
|
25
|
18,47
|
Violences verbales
|
11,59
|
43,75
|
15,36
|
Vols
|
21,7
|
3,21
|
23,51
|
Délits de chasse
|
13
|
0
|
3,28
|
Vaine pâture
|
7,24
|
0
|
5,41
|
Figure 22, Moyenne des grands types de délit
par crise.
Les délits qui se manifestent le plus durant ces
années moroses sont ceux liées à la violence. On
dénombre huit cas de violences physiques et quatorze de violences
verbales. Les atteintes à la personne atteignent le pourcentage
impressionnant de 78,12% de tous les délits. La crise semble
déstructurer les relations sociales. Ces années coïncident
également avec des transformations de l'agriculture et des campagnes
encore démographiquement pleines avant l'exode rural. Toutes les
poussées de délinquances ont pour toile de fond des productions
de grain insuffisantes, la crise agricole selon sa gravité se
répercute sur l'économie, les milieux financiers, voir sur les
régimes politiques, en amplifiant ses effets. La rupture des
équilibres traditionnels est flagrante au « XIXème
siècle qui apparaît comme le temps par excellence des
mutations220(*) ».
Conditionnés par tous ces facteurs, le délit
se décline en une vaste palette d'infractions plus ou poins graves.
C.
De la simple infraction au meurtre en passant par la récidive, une
gradation de la délinquance.
On observe une progression de la simple infraction au meurtre
le plus violent, cette diversité confère de nombreuses facettes
à la délinquance. Le code pénal détermine la
gravité de toute infraction. Classées en trois catégories,
les moins importantes d'entre elles sont les contraventions, viennent ensuite
les délits et enfin les crimes. A ces trois degrés il est
possible d'insérer la récidive qui est l'aggravation d'une
infraction221(*).
1.
Les contraventions, punitions légères d'infractions
légères.
Le Code Pénal comporte seulement 20 articles sur les
contraventions de police, soit à peine plus de 4 % de son contenu. Les
infractions les moins importantes sont pourtant les plus nombreuses, 62,71 %
des affaires jugées par le juge de paix de Coussey sont de simples
infractions. Le Code n'attache que peu d'importance à ces simples
contraventions qui sont supplées localement par des arrêtés
pris directement par les communes.
Les contraventions sont divisées par le code
pénal en trois classes, la première comprend les contraventions
punies jusqu'à cinq francs inclusivement. La deuxième regroupe
les amendes comprises entre six francs et dix francs inclusivement, enfin la
dernière classe regroupe le reste des infractions punies jusqu'à
quinze francs.
Une majorité d'affaires sont de simples infractions
qui de surcroît ne donnent pas forcément lieu à un
jugement.
a. Les contraventions de
première classe punies jusqu'à cinq francs.
L'article 471222(*) du Code Pénal regroupe la catégorie
des infractions les plus «futiles«, seulement 4,23 % de ces
infractions sont jugées par les tribunaux de police correctionnelle. Ces
petits délits passent par les tribunaux de simple police qui leur sont
le mieux adaptés. La plupart du temps ces contraventions ne donnent pas
lieu à un jugement mais à un simple procès verbal.
Pour illustrer les articles 3°, 4° et 5° sur
l'entretien de la voie publique et la propreté, les
délibérations du maire de Neufchâteau de cette ville nous
révèlent que les rues du XIX° siècle sont couramment
encombrées « de bois, pierres, fumiers, cendres, immondices, ou
autres choses223(*)
», et sont même quelque fois « remplies de matières
combustibles224(*)
». Les habitants dans une grande majorité enfreignent les
règlements sur la salubrité au point que les autorités
municipales ne prennent pas moins de 5 arrêtés de 1800 à
1810 afin d'améliorer l'hygiène des rues et de la ville. Le
premier adjoint constate que « plusieurs de ses citoyens négligent
devant leurs maisons et dans les rues la propreté225(*) », ce qui
représente autant de délinquants potentiels mais qui dans les
faits sont rarement sanctionnés.
Les règlements en cours sont vite oubliés ou
contournés. Ainsi ceux-ci doivent être souvent renouvelés.
En 1807 le maire de Neufchâteau s'aperçoit « que les
règlements de police faits jusqu'alors par ses
prédécesseurs pour maintenir la sûreté, la
propreté et la salubrité dans la ville sont tombés en
désuétude226(*) ».
En se penchant entre autre sur le domaine de la
propreté, on constate que bien que la plupart des habitants soient dans
l'illégalité dans ce domaine, très peu sont punis. Dans
cette optique on est en droit de se demander si le citoyen qui omet de balayer
devant sa porte peut être qualifié de délinquant bien que
son oubli soit un délit.
b. Les contraventions de
deuxième classe punies de six à dix francs.
Les contraventions de deuxième classe sont
détaillées par l'article 475227(*) et constituent le deuxième degré de la
contravention. Les délits y étant énoncés,
apparaissent clairement comme d'un degré supérieur, notamment le
brigandage et le pillage du dernier point. Les points 9°, 10° et
12° relatifs aux atteintes à la propriété et au
brigandage sont les plus familiers des archives judiciaires du canton, nous
avons recensé onze cas de contrevenants à l'article neuf sur la
circulation, là où elle est interdite. Nicolas Mage, cultivateur
demeurant à Villouxel, fait partie de ces délinquants de la
circulation. Il se retrouve ainsi devant le juge de paix et écope de
trois francs pour avoir traversé un bois ou il a brisé des rejets
de bois nouvellement plantés228(*) ».
Le point 10 fait référence au délit de
vaine pâture, tandis que le point 1° traite de la rupture de ban, un
délit répandu surtout en période de disette et
consistant à ne pas respecter les dates de récoltes pour
échapper à l'impôt ou pour les voler.
Ces infractions de deuxième classe avec 26,27 % des
jugements se rencontrent plus d'une fois sur quatre dans le canton. On observe
au sein même de cette classe d'infraction, une certaine gradation entre
le premier et le dernier point, comme une progression dans la gravité de
ces délits.
c. Les contraventions de troisième classe
punies de onze à quinze francs.
Ces transgressions détaillées dans l'article
479229(*) sont les plus
graves, elles représentent plus d'une infraction sur deux. De nombreuses
infractions sont classées dans cette catégorie, comme la vaine
pâture, les délits de chasse, les outrages à la morale
religieuse ou encore les dégradations de biens de particuliers.
Les dommages aux propriétés et les auteurs de
blessures par projectiles sont moins punis que le tapage nocturne et les
utilisateurs de fausse mesure, ce qui peut paraître surprenant. Le tapage
nocturne semble en effet moins grave que les blessures de projectiles. A
Rouceux, le sieur Poirson reçoit ainsi un procès verbal
« après saisie d'un pistolet de poche après que des
coups de feux à l'intérieur de la commune aient atteint de
plusieurs grains de plombs au bras et à la tête Charles
Laviron230(*) ». Les accidents de ce genre sont nombreux
on en dénombre cinq dans le canton. En 1801, le maire de
Neufchâteau déplore ce problème car, les « citoyens se
permettent journellement de tirer des coups de fusils dans les rues et aux
environs de la ville231(*) ». Cette attitude contrevenant aux
règles les plus élémentaires de sécurité est
effectivement présentée comme dangereuse car « il peut
arriver les plus grands malheurs soit en estropiant les citoyens soit en
mettant le feu aux matières combustibles232(*) ». L'usage des armes
à feu et surtout des fusils devient donc réglementé et
sera interdit dans la ville de Neufchâteau.
Les infractions n° 2, 5 et 8 relatives aux atteintes
aux animaux, aux falsifications et au trouble de l'ordre public sont les plus
graves et peuvent être renforcées « selon les
circonstances, d'une peine d'emprisonnement de cinq jours au plus233(*) ». L'article 2
punit ainsi durement tous ceux qui blesseraient ou tuerait des animaux. Les
bêtes sont particulièrement utiles au XIXème siècle,
les animaux d'élevage fournissent lait et protéines, tandis que
les animaux domestiques comme le chien sont indispensables pour la chasse ou la
garde. Les animaux sont souvent pris pour cible pour atteindre indirectement
leur propriétaire. A Lamarche depuis 1800 « les chiens de
chasse sont empoisonnés par de la pâte cuite dans laquelle il est
insinué de l'arsenic ou du verre pilé, et du crin
coupé234(*) ». L'auteur de ces méfaits se fait
finalement démasquer après que sa femme ait menacé
« de tuer ces chiens si ils vont chez elle ou de leur mettre des
coups de couteaux ». Les chiens sont considérés comme
de véritables auxiliaires de l'homme comme le montre Robert Muchembled
qui les décrit comme des « sentinelles du moi235(*), ». Ils
apparaissent comme des défenseurs des intérêts de leur
maître, l'auteur de la violence au village donne l'exemple de troupeaux
reconduits férocement hors de pâtures par les chiens de leurs
propriétaires.
Les infractions de troisième classe sont les plus
nombreuses, elles constituent ainsi les pratiques
«illégalistes« de base, loin devant les délits.
2.
Les délits
Le délit est une infraction, plus grave que la
contravention, mais plus légère que le crime. Infraction
intermédiaire, le délit dans le canton est varié et
gradué selon sa gravité par des peines de plus en plus lourdes.
« Le délit est une infraction punie de
peines correctionnelles236(*) ».
Les peines en matière correctionnelle sont ;
« -1° L'emprisonnement à temps dans un
lieu de correction ;
-2° L'interdiction à temps de certains
droits civiques, civils ou de famille ;
-3° L'amende237(*) ».
37,28 % des infractions commises dans l'Ouest des Vosges
sont des délits, soit un pourcentage plus faible de 25 points par
rapport aux simples infractions. Si les villageois s'affranchissent
régulièrement d'actions illégales classées parmi
les infractions, les comportements délictueux plus graves et plus
durement réprimandés s'observent moins fréquemment. Entre
moralité et crainte des conséquences, les individus susceptibles
de commettre des délits sont plus rares. Le délit pourrait
être ainsi le premier palier vers la grande délinquance.
a. les violences non
aggravées restent des délits
· La
violence physique légère.
Les violences physiques sous certaines conditions entrent
dans la catégorie des délits. « Lorsque les blessures
ou les coups n'auront occasionné aucune maladie ni incapacité de
travail personnelle, le coupable sera puni d'un emprisonnement d'un mois
à deux ans, et d'une amende de seize francs à deux cents
francs238(*) ». La préméditation et le
guet-apens aggravent la sanction, l'emprisonnement sera alors de deux à
cinq ans, et l'amende de cinquante à cinq cents francs.
· Des violences verbales courantes.
Les injures proférées dans un lieu
privé et sans témoins, n'encourent qu'une amende de moins de cinq
francs, ce qui en fait une contravention de première classe.
« Les injures ou expressions outrageantes qui ne renfermeraient
l'imputation d'aucun fait précis, mais celle d'un vice
déterminé, si elles ont été
proférées, dans des lieux ou réunions publics, ou
insérées dans des écrits imprimés ou non, qui
auraient été répandus et distribués, la peine sera
d'une amende de seize francs à cinq cents francs239(*) ». Des infractions
paraissant similaires passent d'une catégorie de méfait à
une autre selon des critères de gravité de l'acte défini
par le Code Pénal.
Les violences verbales et physiques contre des
représentants de l'autorité et de la force publique restent des
délits mais sont punis plus sévèrement d'un mois à
deux ans d'emprisonnement. Comme nous l'avons vu dans le chapitre
précédent,
ces agressions verbales aggravées sont courantes dans le
canton.
b. Les délits contre
l'ordre social.
· Les viols et les attentats à la pudeur, des
délits flous peu condamnés.
« Toute personne qui aura commis un outrage
public à la pudeur, sera punie d'un emprisonnement de trois mois
à un an, et d'une amende de seize francs à deux cents
francs240(*) ». Ce délit est très rare,
seul le maire de Midrevaux est jugé pour avoir eu les mains baladeuses
lors d'une veillée241(*). A noter que de nombreuses tentatives de viols ayant
échouées sont reclassées en attentat à la pudeur,
ce qui au final ne change rien pour les prévenus qui sont
systématiquement renvoyés des poursuites.
· Le vagabondage et la mendicité, de graves
délits.
« Les vagabonds ou gens sans aveu qui auront
été légalement déclarés tels, seront, pour
ce seul fait, punis de trois à six mois d'emprisonnement, et
demeureront, après avoir subi leur peine, à la disposition du
gouvernement pendant le temps qu'il déterminera, eu égard
à leur conduite242(*) ».
La mendicité sous certaines conditions devient un
crime, elle n'est pas interdite en elle-même, mais elle doit être
accompagnée de circonstances aggravantes. Mendiants et vagabonds sont
particulièrement surveillés, et sont sous la menace de peines
supplémentaires si ils « ont été saisi
travesti d'une manière quelconque, porteur d'armes, bien qu'il n'en ait
usé ni menacé, muni de limes, crochets ou autres instruments
propres soit à commettre des vols ou d'autres délits, soit
à lui procurer les moyens de pénétrer dans les maisons. A
Brancourt, en 1837, un « mendiant d'habitude sans
profession243(*) »
s'introduit dans une maison. Cette infraction est un crime, elle devrait donc
être jugée à Epinal. Le juge de paix de Coussey conserve
cependant l'affaire et condamne le malheureux à un mois de prison et
à cinq ans de surveillance.
Dans la pratique, les prévenus de crimes contre la
société sont peu condamnés. Les nombreux mendiants
jugés sont ainsi massivement renvoyés de leurs poursuites, et
ceux ayant commis des actions aggravantes qui devraient être
classées parmi les crimes restent dans le giron des tribunaux
correctionnels.
c. Les délits de
cupidité et de malice
· L'usure sévèrement
réprimandée par des amendes importantes.
L'usure et le prêt sur gage se classent dans la
catégorie des délits, bien que le plafond de l'amende
prévu soit spectaculaire en atteignant les 2000 francs. En
matière de fraude et d'escroquerie, la banqueroute simple est un
délit mais la banqueroute frauduleuse se range parmi les crimes. On
recense 3 cas de chaque dans le canton.
· L'Incendie durement puni.
« La menace d'incendier une habitation ou toute
autre propriété, sera punie de la peine portée contre la
menace d'assassinat244(*) ». La menace d'incendie est courante dans
le canton, son effet est toujours important, les villageois ne craignant rien
de plus que de voir leur maison incendiée. Les matériaux
utilisés sont propices à l'incendie, « la demeure
villageoise comporte de nombreuses parties en bois, elles brûlent
facilement et ne sont guère solides. Le duc Léopold à
conscience de ce problème et décide de réglementer les
nouvelles constructions245(*) ». Les menaces d'incendie sont couramment
mises à exécution, pour la seule année 1846 on
dénombre 9 incendies criminels dans les Vosges246(*).
Les délits financiers et les infractions
dirigées contre les biens sont toujours considérés comme
de graves manquements. Le délit se rencontre moins que les infractions,
ce type d'infraction plus grave marque véritablement un palier au sein
des délinquants. Au stade supérieur de
l'illégalité, la récidive fait prendre une nouvelle
dimension criminelle à ses auteurs.
3.
le cas particulier de la récidive.
La récidive s'applique « lorsqu'il a
été rendu contre le contrevenant, dans les douze mois
précédents, un premier jugement pour contravention de police
commise dans le ressort du même tribunal247(*) ». La
récidive ne s'intercale pas entre le délit et le crime, il s'agit
de l'aggravation de délits et d'infractions mais rarement de crimes de
part leur faible proportion. De simples infractions et des menus délits
récidivés voir répétés au cours d'une vie
font de leurs auteurs des délinquants parfois professionnels, c'est pour
cette raison que nous plaçons la récidive juste avant le crime en
terme de gravité248(*).
a. La rechute et la
récidive.
« Parmi tous les artisans du désordre, il
en est qui pèchent par accident et qui se relèvent, puis marchent
à peu près droit dans le reste de la route ; il en est qui
commettent si vite des actes si graves que la société les
arrêtent de bonne heure au passage et les marque pour les travaux
forcés ou l'échafaud. Mais il en est aussi qui prennent
l'habitude de mal faire, reviennent toutefois de temps à autre dans les
rangs de la société régulière, puis retombent
d'infractions en infractions. Les appeler des incurables serait cruel. La
langue juridique constate simplement leur état et les qualifie de
récidivistes249(*) ». Voici la définition d'Henry Joli
à propos de la récidive.
Le Compte Général retient comme
récidiviste toute personne, qui, ayant déjà commis une
infraction au cours de sa vie, se retrouve une nouvelle fois dans
l'illégalité et ce, même un an après sa
première condamnation. « Il s'agit ici de la récidive
générale, c'est-à-dire de la rechute250(*) ». Les
délinquants répondant alors à cette définition sont
nombreux, à Grand, trois individus sont ainsi condamnés plus
d'une fois au cours de leur vie.
Le casier judiciaire est créé le 6 novembre
1850. Les délits commis avant par les délinquants ne sont pas
forcements connus des juges.
b. La récidive dans le
canton.
D'après les procès verbaux de l'administration
des eaux et forêt on observe qu'en sept ans pour le canton, on
dénombre trois braconniers multirécidivistes. Bien que la
série dépouillée soit fortement lacunaire, et laisse
penser que leur nombre est bien supérieur. Les délits de simple
police seront naturellement plus récidivés de part leur
caractère bénin que des meurtres ou des tentatives d'assassinat
qui plus graves sont aussi plus rares.
Le tableau des récidives en matière de
chasse251(*) montre les
rechutes de délinquants de Grand. Claude Ferbus de Punerot,
possède le record. Il sera condamné six fois au cours de sa vie
essentiellement pour actes de violence et de destruction.
Le Compte Général de l'administration
criminelle met en évidence l'augmentation des récidivistes au
cours de la période. En 1828, en France, ils représentent 7,3 %
des accusés, et 18,18 % en 1850. Etant donné que le nombre de
jugements diminue fortement dès 1830 il nous est difficile de mesurer
localement cet état de fait.
En 1856 soit l'extrême fin de notre période, le
classement des crimes les plus récidivés est le suivant :
France :
Vols qualifiés
49%
Coups envers les ascendants 41%
Vols et abus de confiance domestique 28%
Faux
30%
Canton de Coussey de 1810 à 1857 :
Violences graves 35%
Destructions 32%
Vols
23%
Viols et tentatives 22%
Les violences graves sont souvent l'oeuvre des mêmes
personnes, leurs auteurs sont véritablement dangereux. Le maire
d'Autreville qualifie ainsi le sieur Oudot « d'homme à
craindre dans la société, il résulte de la clameur
publique qu'on n'a pu le quitter sans dispute ou bataille252(*) ».
Les autres récidives du canton sont difficilement
comparables, les catégories de délits que nous avons retenus
étant différentes de celles du Compte Général. Il
apparaît néanmoins dans le canton, que la rechute en
matière de violence contre les personnes est identique à la
moyenne nationale.
c. Une figure de la
délinquance à répétition, Jean Baptiste Biez de
Grand.
Ce cultivateur turbulent de Grand est
condamné trois fois au cours de sa vie.
La première fois, il comparaît devant la Justice
pour des violences diverses et récurrentes. Au mois de décembre
1809, il commet notamment une « tentative d'assassinat avec
préméditation sur la personne de François Biez (son
frère), laquelle consiste en ce que ledit Jean-Baptiste Biez a voulu
jeter le dit François Biez dans le grand puit de la commune de Grand
pendant que ce dernier était occupé à y puiser de
l'eau ; ce qu'il a exécuté sans la présence de Pierre
Réguier couvreur au même lieu qu'il l'a retenu et
empêché, et qui pour s'être opposé à cette
entreprise a été frappé et maltraité par le dit
Jean-Baptiste Biez253(*) ».
Quelque mois plus tard, le 9 mai 1811, vers les neuf heures
du soir, « il a été commis par Jean-Baptiste Biez
cultivateur demeurant à Grand sur la personne de François Biez,
boucher au même lieu une tentative d'assassinat avec
préméditation et guet-apens, laquelle consiste en ce que ce
dernier revenant à cheval de la commune de Pargny-sous-Mureau
étant sur le grand chemin est près d'entrer à Grand a
été mis en joue avec un fusil à deux coups par ledit
Jean-Baptiste Biez qui était allé à sa rencontre et
s'était embusqué sur le chemin où il pensait que
François Biez allait passer, et lui aurait infailliblement tiré
un coup de fusil sans la présence de plusieurs personnes. Jean-Baptiste
Pelletier Marchand au dit lieu de Grand qui pour avoir voulu défendre le
dit François Biez contre cette tentative, et l'escorter jusqu'au
village, a été lui-même couché et mis en joue par
ledit Jean-Baptiste avec menace de le tuer également s'il osait
dépasser une certaine limite qu'il lui a fixée en lui jetant son
bonnet ». Ce guet-à-pant représente le délit le
plus grave commis par ce cultivateur qui sans l'intervention d'autres habitants
aurait pu tuer son frère.
Le lendemain, Jean-Baptiste Biez « a
manifesté hautement ses intentions hostiles et criminelles envers
François Biez par menaces et en déclarant qu'il avait regret de
ne l'avoir pas tué ; qu'il l'aurait fait sans l'arrivée de
son fils et de Jean-Baptiste Pelletier, mais que cela n'était que
différé et que dans huit jours ils ne seraient plus en
vie ».
Non content de tyranniser son frère et son village le
forcené, comparaît de plus pour avoir exercé des actes de
violence grave, sur des habitants des villages voisins. Ce délinquant
présente les traits de la parfaite terreur de village ; l'homme que
toute la communauté craint par son caractère impulsif, et son
comportement dangereux.
Dix ans après les faits, on le retrouve une nouvelle
fois devant la justice pour avoir abimé un chemin communal. En 1828, ce
paysan est à nouveau condamné « pour avoir coupé
des arbres dans la forêt communale et les avoir enlevé avec
voiture254(*) ». Au
total cet individu a commis au moins six délits, cette figure locale du
méfait est sans doute passée à deux doigts du Tribunal
criminel d'Epinal.
Les récidivistes sont des délinquants en
puissance. Circonstance aggravante, la récidive alourdit souvent les
peines des condamnés. Il apparait que toutes les récidives ne
sont pas comparables. Les récidives les plus nombreuses concernent les
délits de violences contre les personnes, et font de leurs auteurs des
individus dangereux proches du sommet sur l'échelle de la gravité
des délits. La majeure partie des récidivistes se cantonnent
cependant aux infractions et aux délits et s'aventurent rarement dans le
crime.
4.
Au sommet de l'infraction, le crime.
« L'infraction que les lois punissent d'une peine
afflictive ou infamante est un crime255(*) ». Le crime constitue l'infraction la plus
grave, il peut être le résultat de plusieurs délits
conjugués, de circonstances aggravantes, ou de délits si graves
qu'ils sont qualifiés de crime. La justice cantonale n'a normalement
aucune compétence pour juger les crimes, ceux-ci sont donc le plus
souvent traités par la Cour d'Assise d'Epinal.
Les infractions de ce type encourent ;
«1° La mort ;
2° Les travaux forcés à
perpétuité ;
3° La déportation ;
4° Les travaux forcés à temps ;
5° La réclusion256(*) ».
a. Les crimes contre les
personnes.
Les crimes contre les personnes peuvent être de
diverses natures, à l'image du brigandage de grand chemin, commis en
bandes organisées, avec armes, et sous la contrainte. Forme
aggravée de vol, ses auteurs encourent la peine des travaux
forcés à perpétuité. Dans le canton les juges sont
plus cléments et trouvent souvent des circonstances atténuantes.
La violence physique aggravée, qui provoque
« effusion de sang, blessures ou maladie257(*) » encoure la
réclusion. Si l'agression a « été portée
avec préméditation ou guet-apens » ce sont alors les
travaux forcés qui attendent le délinquant.
Le viol et ses tentatives sont passibles d'être punis
de la réclusion, « quiconque aura commis le crime de viol, ou
sera coupable de tout autre attentat à la pudeur, consommé ou
tenté avec violence contre des individus de l'un ou de l'autre sexe,
sera puni de la réclusion258(*) ». Nicolas Mahalin de Coussey est ainsi
condamné à cinq ans de réclusion pour attentat à la
pudeur en 1836, cet individu a exercé sa malveillance sur sept jeunes
filles de la commune en six ans.
b. Le vol, une infraction
à la gravité évolutive.
Le vol est l'une des infractions qui connaît le plus
de nuances. Le vol simple est un délit, « les larcins et
filouteries, ainsi que les tentatives de ces mêmes délits, seront
punis d'un emprisonnement d'un an au moins et de cinq ans au plus, et pourront
même l'être d'une amende qui sera de seize francs au moins et de
cinq cents francs au plus259(*) ».
De nombreux facteurs changent le délit en crime, si
le vol est commis par effraction, par escalade, ou à l'aide de fausse
clés260(*). Le
vol en tant que délit est le plus répandu puisque seuls 12,31 %
des vols étudiés rentrent dans la catégorie des crimes.
Même lorsqu'il devient un crime, le vol revêt des
nuances dans la gravité. En effet, les peines les plus
«légères« sont la réclusion pour ceux qui volent
« dans les champs, des chevaux, ou bêtes de charge, des voiture
ou des monture, gros et menus bestiaux, des instruments d'agriculture, des
récoltes ou meules de grains faisant partie de récoltes261(*) ». Le vol est
rarement puni de plus de dix de réclusion, sur les onze prévenus
reconnus coupables dix sont condamnés à une peine de prison
comprise entre un et dix ans.
Les différents degrés de gravité du vol
dépendent de la conjonction de plusieurs circonstances.
Les travaux forcés marquent un nouveau palier dans
les peines encourues. Ils punissent les vols réunissant les trois
circonstances suivantes :
« 1° Si le vol a été commis la
nuit ;
2° S'il a été commis par deux ou
plusieurs personnes ;
3° Si le coupable, ou l'un des coupables,
était porteur d'armes apparentes ou cachées262(*) ».
Seul Nicolas Masson est condamné en 1824 aux travaux
forcés pour un vol commis avec effraction263(*). Le vol dans le canton n'est
donc pas l'oeuvre de professionnels.
c. L'homicide, le crime le plus
grave.
L'homicide est un crime ayant pour conséquence la
mort d'un homme. L'homicide comporte lui aussi des nuances, d'abord, il
peut-être involontaire et résulter de mauvais coups reçus
lors d'une rixe. Ensuite, l'homicide devient un meurtre quand la mort aura est
causée volontairement. Enfin, « tout meurtre commis avec
préméditation ou de guet-apens, est qualifié
assassinat264(*) ».
L'homicide est dans tous les cas la forme de
délinquance la plus aigüe. D'après les chiffres du Compte
Général, on compte en France, un homicide volontaire pour 67326
habitants par an. Le Canton comptant 9278 habitants, on devrait y recenser
environ un homicide, tous les 7 ans et 3 mois, or on en dénombre quatre
en vingt ans. Ce calcul, nous donne un meurtre tous les 5 ans ce qui fait du
canton un espace plus criminogène que la moyenne nationale. La
préméditation, l'âge ou le sexe de la victime,
hiérarchisent la gravité des meurtres. Lorsque la mort fait suite
de quelques jours à des blessures causées par des violences, les
condamnations sont les plus légères. Ainsi, Joseph Petitjean
à Happoncourt, blesse mortellement son voisin Hubert Ory, lors d'une
dispute ce qui lui vaut une année de réclusion. Joseph Petitjean
se rendant dans son jardin pour ramener une salade s'aperçoit
« qu'une des poules de hubert ory, et la couvée de poulets que
cette poule conduisait, avaient pénétré dans son jardin
à travers la palissade qui en fait la séparation ; il se mit
en colère et annonça l'intention de les tuer ; il se disposait
à le faire, lorsque hubert ory s'approcha (pour lui faire des
représentations à cet égard), de l'endroit de la palissade
où la haie de groseille qui la longe était moins
élevée et lui permettait d'être vu. Il parait que ces
représentations aigrirent l'accusé qui passe
Généralement pour avoir un caractère très
emporté, il s'approcha d'ory et dans les violences de sa colère,
il saisit une petite perche qui servait de rame à des haricots, lui en
porta, au dessus de l'oeil gauche, un coup qui le jeta à la renverse,
baigné dans son sang265(*) ». Hubert Ory va immédiatement se
plaindre au maire qui fait venir un chirurgien. Les douleurs s'estompant Hubert
Ory se croit guérit mais neuf jours après l'agression, les
douleurs reprennent et Hubert meurt. Le jardinier impulsif n'est
condamné qu'à une année de réclusion car sa victime
n'est pas morte sur le coup et qu'il n'a certainement pas voulu tuer son
voisin.
Les meurtres les plus graves sont punis de la peine de mort.
« Le meurtre emportera la peine de mort, lorsqu'il aura
précédé, accompagné ou suivi un autre crime ou
délit266(*) ». « Tout coupable d'assassinat,
de parricide, d'infanticide et d'empoisonnement, sera puni de mort267(*) ». Nicolas Cordier
de Grand est ainsi condamné à la peine de mort en 1817, pour un
meurtre sur une fillette. Le jeune homme s'introduit dans une maison pour y
voler de la nourriture, occupé à fouiller dans l'armoire de la
famille, il est surpris par Marie-Reine Mougin âgée de six ans.
Dans la panique, le meurtrier s'éclipse avant de revenir avec une
rouche268(*) avec
laquelle il lui porte un coup mortel sur la tête. Ensanglanté, le
malheureux prend la fuite dans la rue avant d'être arrêté.
Chanceux, sa peine est par la suite commuée aux travaux forcés
à perpétuité.
Même si tous les meurtres conduisent à la mort
de la victime, on aperçoit clairement que certain homicides sont plus
sévèrement punis que d'autres. Certains homicides apparaissent
insoutenables comme ce double infanticide commis à Liffol-le-Grand et
relaté dans la presse locale. Une mère de famille décapite
ses deux enfants « avant de se donner deux coups de couteau, l'un au
cou, l'autre au côté269(*) ».
Conclusion de la deuxième partie.
La délinquance présente de grandes constantes.
Ainsi elle est essentiellement l'oeuvre d'individus âgés de vingt
à trente-cinq ans. Les jeunes accusés qui ne sont pas encore
établis, privilégient les délits contre les
propriétés. Leurs aînés se manifestent au contraire
par la violence contre les personnes, ces chefs de famille doivent être
en mesure de protéger leurs biens et leur maisonnée ce qui
explique leur agressivité. La délinquance varie selon les milieux
professionnels, les agriculteurs et les ouvriers sont ainsi plus violents alors
que les plus modestes, ouvriers ou domestiques commettent essentiellement des
vols. Entre hommes et femmes on observe des divergences. Celles-ci moins
poursuivies, fréquentent peu les tribunaux, déjà
discrètes au début du XIXème siècle, elles sont
quasiment absentes parmi les accusés en 1850.
Le cadre spatio-temporel des pratiques illégales
démontre qu'il y a bel et bien des temps et des lieux propices aux
infractions. La belle saison et les fins de journée sont
particulièrement favorables aux forfaits. La géographie du
délit permet quand à elle d'opérer une franche
délimitation de la criminalité au sein du canton. L'Ouest
présente ainsi une forte proportion de vaine pâture et de
destructions. L'activité agricole explique ces divergences, la forte
proportion de petits propriétaires et une surface cultivable
réduite font exploser les délits liés à
l'agriculture. Enfin, la conjoncture agricole influe nettement sur le nombre de
transgressions. Mauvaises récoltes et disettes peuvent à elles
seules expliquer toute flambée de délits.
En définitive, les Vosgiens étudiés
sont surtout coupables de fautes légères. La délinquance
est un terme englobant qui doit être minutieusement
détaillé. Il est évident que toutes les infractions ne se
ressemblent pas et qu'une hiérarchisation du délit doit
être opérée. Les contraventions sont finalement
majoritaires, et le délit limité en nombre. Les crimes sont les
plus spectaculaires, mais sont peu représentés, même si la
moyenne criminelle du canton est supérieure aux chiffres nationaux.
TROISIEME PARTIE :
VIOLENCE ET DELITS DE VILLAGE ; UN RAPPORT ETROIT A
L'ORGANISATION SOCIALE ET GEOGRAPHIQUE DE LA COMMUNE.
Tous les villages du canton présentent la même
organisation sociale, dont les villageois sont les unités de base.
L'individu au sein de la communauté n'est jamais isolé, il
évolue dans des cercles concentriques correspondant à la famille,
aux voisins, ou encore aux coteries270(*) pour certains. A chaque cercle, solidarité ou
adversité sont présentes.
Les affrontements entre habitants répondent à
des schémas stricts. D'abord verbale, la violence est utilisée
pour déstabiliser un ennemi, insultes et mises en gardes sont un
prélude annonçant la violence physique. Lors des rixes, tous les
coups sont permis, mains nues, bâtons ou pierres, pour frapper des
parties bien précises du corps.
Le village est un lieu d'extrême surveillance, que ce
soit par les voisins ou les agents municipaux, tous tentent de limiter les
comportements délictueux, ce qui n'empêche pas certaines
infractions. En s'éloignant du village se ressent une sensation de
liberté. Face aux grandes étendues, le garde champêtre est
déjà moins à l'aise. Dans l'épaisse forêt son
action devient anecdotique, les délinquants en profitent pour tirer
illicitement des ressources de la forêt.
Comment les habitants d'un village interagissent-ils, et quel
rapport entretiennent-ils avec le village et ses marges ?
La sociabilité villageoise s'organise d'elle-même
à tous les niveaux, elle oscille entre solidarité et conflit.
La brutalité dans les rapports sociaux est une
réalité récurrente, qui présente des constances et
une progression, de l'insulte à la blessure.
L'expression de la délinquance évolue et
s'adapte, depuis le village policé par l'équipe municipale,
à la forêt bastion impénétrable du braconnier.
L'autorité villageoise s'estompe progressivement au fur et à
mesure de l'éloignement du clocher. En périphérie de la
commune et même à l'extérieur, les villageois profitent de
leur anonymat pour commettre des infractions.
A.
Le village, individus, famille, clans.
Le village et ses habitants forment une communauté
élargie composée avant tout d'individus puis de familles. La
violence, présente à tous les niveaux, s'observe
déjà au sein de la maisonnée ou les rapports entre
époux sont parfois mouvementés. La famille élargie
transpire une certaine hostilité entre ses membres, bien que la bonne
entente domine majoritairement. Au delà de ce premier cercle, les
membres de la famille se confrontent aux habitants des maisons mitoyennes. Les
relations de voisinages sont essentielles dans une agriculture de grand espace
ou l'entraide communautaire est indispensable. Enfin l'individu et sa famille
interagissent avec le reste de la communauté disséminée
sur l'ensemble du village. On observe au sein de l'agglomération des
rancoeurs mais aussi des amitiés complexes entres familles et individus,
ces amitiés peuvent même pour certaines être
qualifiées de coterie.
La photographie suivante représente le village de
Midrevaux, le village installé dans une petite vallée est
organisé autour de l'église.
Figure 21, Midrevaux, vue
générale, au premier plan ; les champs, au second ; les
vergers, au troisième ; le village, en arrière-plan vignes
et friches. Photographie, 1900.
1.
Relations intrafamiliales.
Au sein de la famille, cohabitation entre époux et
famille élargie ne sont pas toujours aisée. Héritages et
problèmes relationnels peuvent ruiner la bonne entente au sein de la
famille.
a. L'Habitat de l'Ouest
Vosgien.
Figure 24, Plan d'une maison
d'agriculteur.
L'auteur du plan de maison ci-dessus nous indique que
« c'est dans l'Est de la France (Lorraine, Barrois, Vosges) qu'on
trouve la variété la plus originale de ce type d'habitation,
où le paysan cherche à tout réunir dans le plus petit
espace possible. Le plan et le but apparaissent évidents dans cet
édifice solide et massif ; toute l'habitation a la même
façade et le même toit ; ce toit commun abrite les hommes,
les bêtes et les récoltes. Dans ce pays à grains, il s'agit
pour le paysan d'engranger toutes ses récoltes ; il n'aime pas les
laisser aux champs. D'autre part le climat est trop rude pour qu'on laisse le
bétail dehors la nuit ; il faut de grandes étables pour les
loger en tout temps. Aussi, à l'impression d'ampleur et d'espace ;
le toit, peu incliné, couvre un large espace de grenier ; il
dépasse même le mur extérieur, de sorte que, formant abri,
il permet de rassembler, à portée du maître, tout contre
son mur ce qu'il est obligé de laisser dehors271(*) ».
Alain Jacquet décrit l'habitat des maisons de la plaine
thermale toute proche du canton. L'habitat est groupé, « les
conflits ont détruits les habitations, la paix revenue les survivants se
sont trouvés devant le terres en friches et des demeures
délabrées, peu nombreux ils ont tendances à se regrouper.
Les églises ayant souvent mieux résisté, elles deviennent
le point central d'une reconstruction qui s'ordonne souvent par rapport
à elles. [...] On trouve entre elles (les maisons) des jardins. Quelque
unes sont isolées à l'écart de
l'agglomération272(*) ».
Entre la rue et la façade des imposantes
bâtisses, est entreposé le fumier, à l'arrière de la
maison se trouvent les potagers et les vergers. La maison est adaptée
à son environnement et à l'activité de son
propriétaire.
Ces maisons, cellules de bases géographiques du village
constituent le bastion des familles qui y vivent. Avec la consécration
de la propriété privée depuis la parution du Code
Pénal, la maison apparaît comme une extension de la famille
l'occupant. Les atteintes à son inviolabilité constituent de
graves crimes, ce qui explique par exemple la gravité du vol avec
effraction, ou à l'aide de fausses clés.
b. Des violences conjugales
difficiles à quantifier.
La maison apparaît comme l'unité de base, autour
de laquelle s'articulent les relations sociales. C'est le lieu de vie des
parents et de leurs enfants, parfois d'un autre membre de la famille ou de
domestiques. La famille restreinte possède déjà en son
sein des germes de violence.
Les violences conjugales sont exercées quatre fois par
des hommes et deux fois par des femmes d'après nos sources. L'union de
la maisonnée se rompt parfois, le père, chef de famille peut se
muer en un véritable tyran, sa force joue pour lui, il lui est alors
aisé de martyriser sa femme jours après jours. Christophe
Bonneville un repris de justice de Grand, est ainsi coutumier des faits. De
retour d'une foire dans la Marne où il a escroqué de nombreux
marchands en décembre 1833, il frappe « sa femme dans toutes
les parties du corps à coups de pieds en la laissant pour
morte273(*) ».
A Punerot un mari aliéné est
« prévenu d'avoir exercé des violences graves et
habituelles274(*) » sur la personne de sa femme Jeanne
Gérardin. En 1810, après « être rentré
d'avoir couru les champs275(*) », il lui plonge la tête dans une cuvette
pleine d'eau. « La femme se réfugie chez les voisins qui
appellent le maire mais le prévenu refuse d'ouvrir la porte276(*) ».
Les violences conjugales peuvent être aussi
exercées par des femmes sur leur mari, nous en avons ainsi deux
exemples. A Outrancourt, Marie Anne Mignet est accusée de tentative
d'assassinat sur son mari Charles Nicolas Martin. Le maire du village
déclare qu' « il est constant qu'elle l'a frappé
et qu'elle est dans l'habitude de le maltraiter277(*) ». La nuit de
l'agression, le maire « entend des bruits et des cris
considérables et se rend à la maison Martin. Arrivé dans
le poêle il a trouvé le dit Martin tout effrayé, d'une
couleur changée lequel a déclaré qu'il venait faillir
à être étranglé de sa femme, laquelle était
présente, qu'il venait de recevoir des coups mortels de sa part et avait
été trainé sur le planché et que cela s'est
déjà produit précédemment. Les violences de son
épouse sont constantes et il ne peut se résoudre à passer
la nuit sans escorte, que sa vie est exposée à la fureur de sa
moitié, que bientôt il en deviendra la victime, étant d'un
âge très avancé il ne peut se défendre de ses
mauvaise intentions, il demande deux personnes pour rester à sa
garde278(*) ».
Les violences conjugales sont ici liées à des
individus atypiques, à l'image du repris de justice et de la femme
alcoolique. Ce sont les cas les plus visibles qui choquent leurs contemporains
et qui justifient l'intervention du maire ou des voisins dans les affaires
très fermées de la famille. Le père de famille jouit d'une
telle autorité au sein de la maisonnée que la violence conjugale
passe parfois pour être la norme. Selon une enquête de 2003
émanant du Service du Droit des femmes, « 24% subissent des
pressions psychologiques, 2 à 3 % des agressions physiques et 1% des
viols ou des rapports sexuels forcés279(*) ». Ces chiffres sont similaires pour les
agressions physiques à ceux du XIXème siècle, cependant
celles-ci sont assurément plus nombreuses que ne laissent supposer les
archives judiciaires ou les enquêtes.
c. Relations au sein de la
famille.
Le graphique suivant représente les relations
conflictuelles au sein de la famille. A partir des cas recensés à
partir des archives, on observe que ce sont les fils les plus violents au sein
des familles.
Figure 25, les relations conflictuelles au sein de la
famille.
Si la violence peut s'exercer au sein de la famille entre
époux, les dissensions au sein de la famille sont encore plus
nombreuses. François Ploux démontre que ces conflits sont
essentiellement liés à l'héritage dans le Quercy,
où la reproduction sociale préciputaire et inégalitaire
prévaut. Le préciput est l'avantage conféré
à l'ainé qui lui permet d'hériter de la majeure partie des
biens lors d'une succession. Dans les Vosges on peut observer « des
pratiques inégalitaires plus ou moins nettes280(*) », cette
particularité tranche avec « une moitié nord de la
France très largement égalitariste281(*) ».
Le père de famille dans les régions
successorales inégalitaires est le maître incontesté de la
maisonnée, c'est lui qui désigne son héritier ce qui n'est
pas sans causer des jalousies et des querelles ultérieures. La question
sensible de la succession apparaît comme un sujet de discorde
récurrent, Antoine Régnier de Mont-près-Isches propose
à sa mère veuve de lui céder ses héritages, sa
mère refusant l'arrangement, le fils la frappe en lui portant
« des coups de pieds en la tenant par le bras pour la faire sortir de
la maison282(*) ».
En 1839 à Avranville, Charles Desmoissons appelle les
gendarmes pour porter plainte contre son fils, à propos « des
mauvaises raisons au sujet du partage qu'il a fait à ses
enfants283(*) ». Les enfants se brouillent suite
à cet héritage, le fils Nicolas hérite de la maison du
père. Sa soeur « allait ordinairement cuire du pain dans le
four de la maison de son père où elle était
autorisée par ce dernier, mais son frère s'y étant
opposé lui a dit que si elle pilonnait encore il la jetterait dans le
four284(*) ».
La transmission du patrimoine, inégalitaire ou non, est souvent une
source de tension entre membres d'une même famille.
Les affrontements intrafamiliaux s'observent entre tous ses
membres. Sur le graphique ci-dessus, nous n'avons pas représenté
les violences exercées sur des neveux ou des nièces, de part leur
faible importance. Le fils héritier apparaît comme le membre de la
famille le plus violent, il est en effet l'auteur de dix cas de violences. Tous
les affrontements interfamiliaux ne sont pas liés à des questions
d'héritages, les jalousies, ou tous simplement la proximité
lorsque la maison est divisée en deux sont autant d'explications
à ces déchirements familiaux.
Si les relations au sein de la famille sont parfois
chaotiques, ces accrochages sont une minorité. Les frères font
preuve d'une solidarité franche les uns avec les autres. Joseph Hubert
et Dominique Poinsot témoignent ainsi tous les deux contre
Sébastien Fournier en 1823 suite à des troubles survenus lors
d'une adjudication de vente de bois285(*). La même complicité s'observe entre
père et fils, à Coussey en 1825 au procès d'Anne Sivret,
Nicolas Leclerc, âgé de cinquante et un ans et son fils
François Leclerc, âgé de trente et un ans,
témoignent tous deux contre la prévenue286(*). Ces témoignages
concordants en famille s'observent à tous les niveaux, entre
mères et filles, ou encore entre belles-soeurs.
Les conflits familiaux sont minoritaires, on en
dénombre vingt au total, soit 18,18 % de toutes les violences. La
majorité des familles cherche à cacher ses querelles internes.
Cette façade permet de faire bonne figure et d'être ainsi
être dans de parfaites conditions pour apparaître unis face aux
périls extérieurs.
2.
Relations de proximité, le rapport aux voisins.
a. Relations entre voisins.
« Les règles du système à
maison codifient et organisent les relations entre les maisons et leurs
résidents au sein du tissu social villageois. Ainsi les voisins
situés géographiquement de façon contiguë à
une maison de référence sont en position de relations d'entraides
et d'échanges privilégiés et obligatoires avec cette
maison287(*) ». Les voisins sont les membres des
familles habitants les maisons à proximité immédiate,
l'habitat Lorrain étant ramassé, les maisons pour la plupart sont
mitoyennes, ce qui rend les familles géographiquement proches les unes
des autres. Rolande Bonnain voit dans les relations de voisinage, trois
principes fondamentaux qui sont ; l'entraide, la proximité
physique, et la sociabilité288(*). La relation au voisin est cependant ambivalente, il
est tantôt un aide précieux sur lequel les familles s'appuient,
tantôt un individu détesté. Deux maisons en froid l'une
avec l'autre sont capables de se quereller pendant des années289(*).
b. Relations cordiales.
« Le voisin c'est celui qui intervient dans
l'urgence, lorsqu'il faut éteindre un incendie, rattraper un voleur ou
interrompre une querelle domestique. C'est aussi celui avec lequel on se rend
au chef-lieu ou à la foire, et qui vous raccompagne à la nuit
venue, quand il devient dangereux de cheminer seul290(*) ». Le voisin
apparaît dans l'idéal comme un individu avec lequel un habitant et
sa famille sont liés, l'hiver ils se réunissent à tour de
rôle l'un chez l'autre pour économiser le combustible et se
retrouver avec d'autres villageois.
Lors des conflits, les voisins sont toujours d'une aide
précieuse en portant secours aux violentés. On se souvient ainsi
de Marie Anne Mignet une femme alcoolique battant son mari. Celle-ci est
interrompue durant le passage à tabac par un riverain, « un
voisin le sieur Joigny s'était déjà approché et
s'était introduit de force dans la maison ayant entendu des cris
lugubres291(*) ». De même, à
Liffol-le-Grand292(*),
Quivin Léger est assailli durant la nuit par une bande de jeunes
éméchés. Les délinquants lancent des pierres sur la
façade du domicile de la personne âgée. Quivin tente de
protéger sa maison en sortant sur le pas de la porte et en
menaçant de les dénoncer à la police, en vain, le
vieillard est même atteint par les projectiles. Après avoir
crié à l'aide, les voisins accourent et ont finalement
réussi à faire déguerpir les rôdeurs.
Avoir de « bons voisins » est une aide
utile qui permet de se prêter mutuellement des ustensiles agricoles et
des objets courants. Marguerite Lambert à Neufchâteau se fait
ainsi prêter « une corde avec laquelle elle avait tiré
son eau et qu'elle avait emprunté au nommé Jean Cuny son voisin
qui lui avait recommandé expressément de ne la prêter
à personne293(*) ».
Le prêt n'est pas un geste anodin, prêteur et
requérant entrent dans une relation déséquilibrée
qui nécessite en retour une contre-prestation ou une aide physique lors
des travaux agricoles, voir un faux témoignage294(*). Lorsque que les conditions
de l'échange sont respectées les deux voisins liés par le
prêt en retirent tous deux autant d'avantages, mais il peut arriver que
cet échange soit source de conflits si l'un des deux individus tarde
à rendre son bien au prêteur.
c. Mauvaises entente entre
riverains.
Dans quelques situations extrêmes, les relations entres
familiers dégénèrent suite à ces prêts,
à Neufchâteau en 1812, deux mères de famille habitant une
maison en commun en viennent aux mains. L'une des deux femmes réclame
à l'autre « une boîte en sapin et une pelle qu'elle lui
avait prêté, et lui a donné un soufflet295(*) », en l'insultant de
voleuse. Pour François Ploux, les relations de voisinages reposent sur
un aspect social et sur un aspect économique incarnés par les
multiples prêts et contre-prestations. « La persistance d'une
relation de ce type traduit une bonne entente entre les maisons
concernées ; son interruption prélude en
général un conflit296(*) ».
La promiscuité est également la source de
nombreuses altercations, les deux néocastriennes habitent l'une au
dessus de l'autre. Marie Françoise Géliot vit à
l'étage et semble assez bruyante ce qui exaspère sa voisine du
rez-de-chaussée, « lassée d'entendre chanter la dite
Géliot qui habite une chambre au-dessus de son poêle297(*) ». La voisine de
plain-pied « s'introduit chez Marie Françoise »
où les deux femmes se battent, Marie Géliot reçoit alors
un coup de pelle à feu.
La proximité contrevient au besoin
d'indépendance de certains individus, bon nombre de conflits ont ainsi
pour origine la mitoyenneté des jardins. Les « conflits de
potagers » sont nombreux, toutes les familles ont un jardin à
l'arrière de leur maison. La culture de légumes est
répandue et permet de palier les carences alimentaires et les disettes.
Ces cultures sont vitales et sont précieusement gardées, surtout
contre les animaux du voisin qui ne ratent jamais une occasion de venir picorer
dans les plates-bandes d'à côté. Le jeune Pierre Husson de
Martigny-les-Lamarche dans son jardin « gardait du blé contre
l'accès des poules298(*) », celles-ci se montrant
particulièrement attirées par les grains, le jeune garçon
vise les poules avec des pierres qui tombent dans le jardin des voisins.
Thérèse Pierrot ayant remarqué les cailloux de son
jardinet « se jette sur lui et lui donne des coups, puis va chercher
des ciseaux et lui coupe le derrière des oreilles jusqu'à
effusion de sang299(*) ».
La défense de sa propriété s'accompagne
couramment de ces violences extrêmes, on se souvient de Joseph Petitjean
d'Happoncourt qui avait mortellement blessé son voisin Hubert Ory lors
d'une dispute à propos de la divagation de poules son jardin.
Sur le graphique représentant les plaignants et les
accusés selon leur position géographique au sein du village, on
observe que les violences entre voisins sont peu nombreuses300(*). Seuls deux problèmes
de voisinages transparaissent en cinquante années. Le 8 mars 1817 par
exemple, Libaire Maugras, fille marchande de clous vole une miche de pain dans
le four de Jean Gahon, son voisin301(*).
Les relations entre riverains sont majoritairement saines,
hormis les deux vols en période de disette, qui illustrent surtout la
désorganisation des rapports sociaux en période de crise
aigüe. Les rapports de voisinage sont essentiels, aucun individu ne
prendrait le risque de briser ce lien privilégié pour des raisons
futiles. Le voisinage est le deuxième niveau de sociabilité de la
commune, ensuite les familles peuvent se trouver de nombreux
intérêts communs jusqu'à former des coteries voir des clans
pour les familles les plus influentes.
3.
Les réseaux d'alliance.
Au-delà de la famille, et des voisins avec lesquels
peuvent se nouer de solides amitiés, les maisonnées entretiennent
des liens complexes avec les autres ressortissants du village. Certaines
familles sont liées à d'autres, se défendant mutuellement,
on voit alors se dessiner des réseaux de solidarité au sein du
village.
Pour étudier ces formes de solidarité supra
familiales, nous nous sommes tournés vers le village présentant
le plus d'accusés. Grand est ainsi le village le plus
représenté devant les tribunaux, 179 habitants de cette
localité rencontreront le juge de Paix. Ces données nous
fournissent un corpus adéquat pour une étude de cas sur les
rapports entre ses habitants.
Figure 26, relations entre les villageois à
Grand.
Le schéma ci-dessus est le résultat de nos
recherches, on y distingue trois réseaux de solidarités. Les cinq
individus soulignés sont des habitués du juge de Paix, le plus
souvent en tant que témoins comme Pierre Georges Formet, maire du
village qui témoigne en tout six fois. Jean-Baptiste Bertrand, est quand
à lui simultanément accusé et témoins dans
plusieurs affaires, tandis que les membres de la famille Biez (François
Biez exclu) sont particulièrement actifs comme prévenus dans de
multiples accusations.
a. Les limites de
l'exercice.
Il est possible de retrouver des traces des relations
entretenues au sein du village, à partir des témoignages des
affaires jugées en correctionnelle. Le juge mène son
enquête et recherche des témoins, ces derniers ne sont, nous
l'avons vu, pas toujours motivés par le simple désir de justice
mais au contraire par le besoin de défendre l'un des leurs.
Se baser sur les témoignages peut cependant se
révéler comme une interprétation erronée en
sous-estimant la sincérité des témoins. En effet, si
beaucoup enjolivent ou adaptent leur témoignage, de nombreux individus
n'expriment que la réalité des faits en tant que témoins
oculaires. Pour tenter d'écarter les villageois
« honnêtes » de ceux animés par les liens
d'amitiés, nous partons du postulat que les habitués de la
justice témoignant systématiquement contre, ou en faveur d'autres
individus, ne peuvent trahir que de l'animosité ou de l'amitié.
En observant tous les jugements des ressortissants de Grand et
leurs témoignages, il est possible de discerner des amitiés
solides et de nombreux antagonismes entres individus.
b. Les réseaux de
solidarités.
La sociabilité villageoise s'élabore selon une
gradation. L'individu interagit d'abord avec les membres de sa
maisonnée, puis avec les voisins, et enfin avec les autres villageois.
Au sein d'un village s'observent des relations particulièrement
complexes autour des inimitiés et des amitiés. Des regroupements
de famille et d'individus forment des entités au sein du village. Sur le
graphique ci-dessous présentant les relations entre familles et
individus, se dessinent nettement deux coteries et une troisième
temporaire.
Le réseau de solidarité numéro un est
composé de Jean Baptiste Bertrand l'appariteur du village, du maire
Grojean, de Jean Baptiste Pelletier, et des familles, Gérard, et Guerre.
Les membres de cette entité passent pour être liés entre
eux. Par exemple, Nicolas et François Guerre, Jean-Baptiste Pelletier et
Jean Baptiste Bertrand témoignent ensemble contre Antoine Prévot
en 1822302(*). En 1822
ce sont Jean Gérard, Jean Baptiste Pelletier, Jean Baptiste Bertrand et
Charles Girardin qui témoignent contre Nicolas Bonneville303(*). Enfin en 1825, Jean
Gérard, Jean Gérard l'ainé et Nicolas Guerre
témoignent contre Sébastien Fournier. On retrouve
régulièrement quelques membres de ce groupe témoignant
ensemble. Le premier groupe, emmené par le maire Grojean, réunit
environ une dizaine de soutiens réguliers. Les groupes d'individus amis
ne se réduisent pas aux seuls individus ici exposés, une kyrielle
de sympathisants ou de témoins favorables gravitent autour d'eux, Les
amis témoignant favorablement pour le maire Grojean possèdent
eux-mêmes leur propre réseau d'ami, ainsi, lorsque Jean Baptiste
Rollet témoigne en faveur de Jean Gahon contre Libaire Maugras, il est
assisté de Louis Gaillot, de Claude Collot et de Jean Perrin304(*).
Le clan numéro deux est composé de quatre
familles, les Gaudez, les Gérard, les Girardin et les Poinsot auxquels
se juxtaposent, Durand Alexandre et Cottenot François.
Le groupe numéro trois ne s'observe qu'après
les luttes entre le maire Grojean et l'instituteur Chevillot, il est
composé des familles Cottenot, Tabouret et Durand et de
l'instituteur.
Ces trois groupes, interagissent entre eux, ils ne sont pas en
conflit les uns avec les autres. Seuls les membres d'une coterie ont parfois
des différents avec des individus d'autres réseaux. Certains
membres de groupes différents entretiennent même des relations de
solidarité entre eux, Alexandre Durand témoigne ainsi deux fois
avec Jean Baptiste Pelletier et la famille Gérard305(*), de telles
« amitiés transversales » sont nombreuses. Ces
groupes d'amis n'apparaissent pas comme des clans au sens strict dans la mesure
ou le type de relation n'est jamais figé.
c. Composition, origine et
rôle des solidarités.
Les membres de ces clans sont majoritairement des individus au
sommet de l'échelle sociale du village. Lors d'une séance
d'adjudication publique on apprend que François Cottenot, Jean
Gérard Lainé, Nicolas Régnier Lainé, Joseph Hubert
Poinsot, Dominique Poinsot, Alexandre Durand, sont tous propriétaires.
Le groupe numéro deux est donc uniquement composé de
propriétaires, tandis que le numéro un est composé du
maire, de l'appariteur et également de propriétaires.
Ces solidarités seraient donc établies sur une
origine sociale similaire, c'est-à-dire la petite et la moyenne
propriété. Dans un pays de parcellisation extrême
même les petits propriétaires peuvent apparaître comme
nantis. Les propriétaires témoignent spontanément pour
défendre l'un des leurs. Etre propriétaire sous-entend devoir
protéger ses terres contre les menaces extérieures,
incarnées par les bestiaux en vaine pâture, les grappilleurs de
récoltes, et les petits laboureurs.
Cette homogénéité sociale n'est
cependant pas la règle, puisque le groupe numéro trois est
composé essentiellement de petits artisans. François Cottenot est
propriétaire terrien, les frères Tabouret sont cloutiers, tout
comme Vincent Durand. Etienne Durand est sans doute lui aussi cloutier à
moins qu'il ne soit colporteur comme sont quatrième frère. Enfin,
Etienne Chevillot l'homme pour qui tout ce groupe se mobilise est l'instituteur
du village. Cette entente temporaire est principalement composée
d'artisans, on peut sans doute y voir une trace de corporatisme, en effet
« la clouterie exerce un grand nombre de bras dans le
département ; nulle part ailleurs elles ne fabriquent sur une plus
vaste échelle que dans le village de Grand. Elle y occupe constamment
170 hommes et 80 enfants, en tous 350 ouvriers306(*) ». Le soutien que
portent ces artisans à Chevillot paraît donc étonnant.
Une autre explication à ces réseaux de
solidarité pourrait être politique, le maire apparaissant comme un
monarque local. Adjoints, membres du conseil, gardes champêtres et
appariteurs forment sa cour. Le maire Grojean en 1840, en conflit contre
Chevilllot, peut ainsi compter sur trois de ses conseillers pour
témoigner en sa faveur. En 1826, le garde du village se fait ravager son
jardin par le futur appariteur Jean-Baptiste Bertrand, ce dernier qui n'est par
encore établi se révèle turbulent, le garde Collot lui
confisque son arme et pour se venger Jean Baptiste Bertrand lui arrache
« cent têtes de choux307(*) ». Lors du jugement du jeune homme, le
maire témoigne en faveur de son garde champêtre. Les adjoints
agissent de la même manière en défendant
systématiquement le maire. En 1837, Jean Baptiste Rollet témoigne
ainsi en faveur de son maire plaignant dans une affaire d'outrage contre
Etienne Chevillot.
Les réseaux de solidarité les plus solides dans
les villages du canton sont constitués des élites
économiques et politiques. Les coteries du canton sont capables de
placer des candidats à la mairie. La famille du maire de Grand est
visiblement puissante, Etienne Chevillot y fait allusion en disant au maire
« que sans sa famille il n'aurait pas la place qu'il occupe308(*) ». Le
clientélisme s'il existe, se limite à l'influence du maire sur
son réseau de solidarité, et des membres de la coterie sur leurs
ouvriers agricoles, voir sur des paysans pauvres du village dépendants
économiquement.
d. Variables et
évolutions au sein des coteries.
Les amitiés ne sont jamais figées, pour se
perpétuer, elles doivent s'entretenir, nous avons vu avec quelle
facilité la bonne entente entre voisin peut se muer en de vives
querelles, il en va de même avec les amitiés au sein du
village.
En 1826, à l'atelier de Charles Desprez, Etienne et
son frère Charles se disputent violemment avec le maire François
Grojean qui travaille avec eux. La querelle éclate à propos du
travail réalisé, Alexandre se saisit d'un maillet et s'en sert
pour agresser François qui porte immédiatement plainte309(*). Seize ans plus tard un
scandale éclate au village, l'instituteur Chevillot battrait ses
élèves, l'affaires est révélée par le maire.
Parmi les témoins à charge, on retrouve Etienne Desprez310(*), celui qui avait
frappé le maire seize ans plus tôt témoigne en sa faveur
pour faire tomber Chevillot l'ennemi intime du maire. Ces retournement de
situations sont assez rares, la tendance est plutôt à la
permanence dans les relations villageoise à Grand.
Les amitiés au sein du village, nous l'avons vu,
reposent sur quelques personnages influents et des familles de
propriétaires. Cependant si certains membres d'une famille sont
alliés à d'autres il n'en va pas de même pour la
totalité de la famille, lorsque les enfants s'établissent en
fondent de nouveaux foyers, ils peuvent s'éloigner de leur famille voir
même devenir ennemis, à l'image des frères Biez311(*).
Les frères ne se choisissent pas toujours les
même amis, Alexandre Durand fait partie de la coterie numéro deux.
Il est un allié indéfectible du maire, mais ses frères
Vincent et Etienne sont amis avec l'instituteur du village. Vincent Durand en
1840 témoigne en faveur de Chevillot, l'ennemi du maire. Etienne, le
troisième frère témoigne lui aussi en faveur de
l'instituteur contre le maire Grojean en 1842. Il existe quelques exemples de
ce type, mais en général les ressortissants d'une même
famille s'allient aux mêmes personnes ou au moins n'en sont pas ennemies.
e. Grojean et l'affaire de
1840.
· Grojean contre Chevillot.
Suite à l'étude approfondie des relations au
sein du village de Grand, on observe nettement deux coteries et peut-être
un troisième clan soutenant l'instituteur du village. Les divers clans
interagissent entre eux à diverses reprises, ces relations
conflictuelles se limitent pour la plupart à un seul individu du clan,
on n'observe pas d'affrontements directs entre factions comme François
Ploux les décrit dans le Quercy312(*). Cependant un conflit durable entre deux habitants
du village permet d'observer le fonctionnement des diverses alliances.
L'antagonisme du maire Grojean et de l'instituteur Chevillot est
particulièrement intéressant313(*).
Le maire Grojean est en conflit depuis plusieurs
années avec l'instituteur du village Etienne Chevillot qui lui conteste
son autorité et l'outrage régulièrement. En juillet 1837,
l'instituteur se dispute avec le maire en lui rétorquant,
«- je ne vous reconnais aucune qualité314(*) ». Lors du
procès le maire alors plaignant ne trouve que deux témoins,
Joseph Marchand et sa femme ainsi que Jean-Baptiste Rollet. Le prévenu
de son côté peut compter sur le soutient de sa femme, mais
celui-ci se révèlera insuffisant puisque l'instituteur sera
condamné.
· L'affaire des placards.
Trois ans plus tard en 1840, un nouveau conflit éclate
entre les deux hommes, puis dégénère en entrainant une
partie du village à témoigner en faveur du maire ou de
l'instituteur. Le jugement produit ainsi quinze témoins à charges
et onze à décharge. Ce conflit a pour origine un conflit de
personnes, l'instituteur est visiblement jaloux du maire.
En 1840, Etienne Chevillot est prévenu d'avoir
affiché des placards, monsieur Jeanson, le maire de Liffol-le-Grand est
alors délégué par le comité d'arrondissement pour
enquêter sur l'instituteur. Parallèlement le maire de Grand est
dénoncé de « faire le métier de marchand
d'avoine, de bois et de chasseur315(*) ». Cette dénonciation est la
bienvenue pour Etienne Gérard, un opposant au maire et ami de Chevillot
qui affiche un placard signé, où il se plaint du maire qui aurait
ourdi un complot contre Chevillot. Sur son affiche il décrit
l'instituteur comme ayant plus d'amis que le maire et que de nouvelles
malveillances contre Chevillot sont imminentes. La « course au
amis » est déterminante il s'agit ici de réunir le plus
de témoins possibles en sa faveur pour gagner le procès.
Quelques jours plus tard, le 19 avril 1840 le maire publie la
date de l'arrivée de Jeanson pour son enquête. Chevillot se sent
menacé, et « un instant après a été
cloué au-dessus de cette affiche deux autres qui ont été
apposé de la part de l'instituteur, invitant les petits et les grands de
se présenter le jour de l'enquête pour déposer en faveur de
Chevillot316(*) ».
Le 21 avril, Jeanson arrive à Grand et se rend
à la mairie pour les besoins de son enquête. Le liffolois dans son
rapport décrit le climat ; «- une grande exaspération
s'était manifestée dans cette commune le 21 du présent
mois pendant une partie du temps qu'a duré mon enquête au sujet de
l'instituteur, deux membres du conseil municipal avaient été
insultés et avaient été obligés à se sauver
et M. le maire lui-même avait été l'objet de la
grossièreté de plusieurs personnes qui lui avaient manqué
au point que si des individus ne s'étaient employés à le
secourir dans le moment ( Jacques François, Alexandre Desprez et Nicolas
Marchal), il y avait eu aurait sans doute quelques actes de violence contre
lui317(*) ».
Pendant l'enquête Étienne Gérard, Charles
Bertrand et Étienne Chevillot réunissent leurs partisans pour
réunir le maximum de signatures sur la place publique du village, quand
soudain deux conseillers municipaux passant par hasard « furent
assaillis par la foule de telles sorte qu'ils furent obligés de se
sauver et de se réfugier dans l'église318(*) ».
Les trois agitateurs forcent ensuite la porte de la mairie, le
conseil municipal et le maire de Liffol se réfugient eux aussi dans
l'église. « Le tumulte passé François Grojan
tente une sortie mais il est aussitôt assailli par les trois individus
dénommés ci-dessus (Chevillot, Bertrand, Gérard), une
personne dans la foule s'élance sur le maire mais elle est
aussitôt ramené chez elle319(*) ».
Cet épisode révèle les jeux d'alliances,
Chevillot dispose de deux « lieutenants » qui sont ;
Etienne Gérard et Charles Bertrand. L'affiche qu'Etienne placarde pour
récolter des signatures a été réalisée par
François Cottenot, son beau-frère. Lors de son procès
l'instituteur compte dix soutiens320(*).
Le maire quand à lui, semble disposer d'un plus gros
réseau de soutien321(*), trois membres de son groupe témoignent en sa
faveur, ainsi qu'une bonne part de son conseil municipal, et neuf
sympathisants. Sa suprématie de témoins lui permet de faire
condamner l'instituteur et ses amis à 100 francs d'amende et à un
mois de prison.
· L'affaire de 1842.
Deux ans après les
« émeutes », le maire et l'instituteur s'affrontent
à nouveaux en Justice. Le maire accuse l'instituteur de maltraiter ses
élèves. Cette affaire produit à nouveau de nombreux
témoins ; huit contre Chevillot et treize en sa faveur. Parmi les
membres habituels du réseau Chevillot, on peut citer François
Tabouret et Etienne Durand, Elophe Melcion un témoin favorable à
Grojean dans l'affaire des placards semble avoir changé de camps
puisqu'il apparaît dans les soutiens de Chevillot dans cette affaire. Le
maire est lui épaulé par son lieutenant habituel François
Guerre et par Marchal Nicolas un autre habitué.
Les témoins sont moins nombreux dans ce procès
car seuls les élèves et leurs parents témoignent ce qui
écrème les réseaux traditionnels des deux camps. Cette
fois c'est l'instituteur qui gagne et qui est finalement relaxé.
Cet affrontement incessant entre les deux individus permet
d'observer le jeu des alliances et les stratégies mise en place pour
gagner un procès en se basant sur son réseau de solidarité
pour gagner un procès.
Les réseaux de solidarité sont finalement plus
actifs dans l'entraide que dans l'affrontement avec d'autres familles. Les
conflits d'individus soutenus, montrent que les coteries défendent les
leurs au moment des procès en témoignant en leur faveur. Le
maire, premier représentant de l'Etat au village, dispose de moyens
d'actions importants, il apparaît comme un chef de clan. Charismatique,
il n'est cependant pas à l'abri de ses opposants qu'il tente de museler
par ses réseaux d'amitiés.
B.
La violence au village, des mots aux poings.
Les heurts entre villageois rythment la vie du village, ces
accrochages présentent certaines similitudes. Le premier degré de
l'affrontement est verbal, lettres anonymes, insultes et menaces sont
destinées à atteindre l'autre. Ce premier niveau peut-être
le seul, par exemple chez les femmes pour qui l'insulte est souvent une
finalité, chez les hommes brocards et autres gausseries ne sont qu'une
étape vers la violence physique. Une fois les susceptibilités
touchées et l'honneur atteint, la rixe entre deux villageois devient
inévitable. Ce second degrés de l'affrontement suit une
progression commençant par l'empoignade et se conclue par les coups. Les
chirurgiens viennent finalement faire les comptes en examinant les blessures.
1.
Violence verbale.
a. Les lettres anonymes et leurs
menaces.
· Auteurs et destinataires.
Les placards et autres libellés sont courants dans le
canton, il s'agit d'écrits de mise en garde publiés souvent de
nuit pour plus de discrétion dans des endroits publics et bien en vue de
tous. Le but d'une lettre anonyme est de faire pression sur un autre
villageois. Cet écrit peut faire partie d'un plan ou être une
finalité en elle-même en dénonçant simplement avec
haine, envie, ou dépit, un état de fait. Les auteurs anonymes
dénoncent crûment ce qu'ils reprochent à leur
«victime«. Le plus souvent ces libellés sont adressés
à des personnes d'influence locale, à savoir maire et notables
locaux. D'après les archives judiciaires du canton, cinq libellés
sur neuf ont pour cibles des maires ou des adjoints, trois visent des
religieuses, et un dernier touche un particulier.
Les auteurs de ces lettres sont toujours des habitants du
village et des connaissances de la victime, et sont majoritairement des hommes.
Les auteurs qualifiés « de personnes de mauvaise foi, indignes
de la société322(*) » par le maire de Liffol-le-Grand, restent
parfois introuvables. Les instructions sont alors menées contre des
inconnus et si l'enquête n'aboutit pas, l'affaire est rapidement
abandonnée.
Le placard est adressé à un destinataire mais
tend également à toucher un maximum de personne de la commune,
pour rendre l'offense publique et lui donner une dose de scandale. Le choix de
l'endroit ou sera affiché le placard est très important,
« un libellé qui a été attaché
après un poteaux au bout du village323(*) », à Liffol-le-Grand met toute la
commune en émoi. De même, à Lamarche, durant la nuit du 22
au 23 août 1811, des inconnus placardent une affiche injurieuse sur la
place publique le jour du marché, jour de fréquentation maximale,
contre le sieur Guyot adjoint au maire324(*).
· Contenu.
Le contenu est presque toujours clairement formulé,
même si ces lettres laissent transparaître des niveaux
d'instructions différents qui en affectent le style. Certains placards
expriment implicitement des références qui parlent aux
destinataires mais qui nous demeurent mystérieuses à posteriori.
Le contenu est une critique ou un reproche, voir la dénonciation sur la
place publique d'un secret important.
A Coussey, un libellé met tout le village au courant
des agissements supposés du maire du village. « Amis,
connaissez-vous le mouchard de feu Charlot X. oui, c'est Jozon (le maire), qui
a la masse communale derrière le dos et mensonge à la
gueule325(*) ». La menace vient toujours en fin de
lettre même si celle-ci est rarement mise à exécution. Le
propos est toujours d'une violence extrême, le filtre de l'anonymat
libérant toutes les retenues.
· Le cas du placard de Sionne contre le sieur Muel.
Le sieur Muel est le maire de Sionne, c'est aussi une figure
locale puisqu'il est le propriétaire des Forges de Sionne, fabriquant de
la fonte. En 1831 il reçoit une lettre anonyme326(*). Suite à de trop
nombreux délits commis dans la commune le maire avait adressé une
lettre au procureur, l'avertissant notamment que « des brigandages et
des vols nocturnes se commettent journellement dans la commune et qu'il est
impossible à les faire réprimer327(*) ». Des individus inconnus ont volé des
récoltes sur le finage, et ont « été
rencontrés, vus et reconnus par deux braconniers qui eux même
poursuivaient un lièvre328(*) ».
Des vols ont lieu tous les jours dans la commune et seraient
le fait d'un certain Jean Baptiste Diné et de sa femme « qui
ont eu des rapports champêtres et ont menacés les bons gardes au
point que le dit Diné a couru après lui avec un rasoir pendant
que sa femme lui jetaient des pierres329(*) ».
Le maire établit des tendues à oiseaux dans les
bois mais celle-ci sont constamment détruites. Muel reçoit la
lettre anonyme peu de temps après ces faits ce qui le laisse supposer
que l'auteur de ces faits n'est autre que Diné. Le but du placard est
d'intimider le maire. Les menaces sont graves puisque l'auteur du
libellé prévoit même d'incendier la Forge de Sionne. Il
s'agit ici surtout de jalousie face au pouvoir important qu'exerce le
propriétaire des forges du village.
b. Les insultes.
Les différents entre particuliers suivent un
cheminement dont « brocards et gausseries constituent fréquemment
le premier degré de cette bravade330(*) ». Celui qui prononce de tels mots
(insultes) cherche à évaluer les capacités de
résistance de l'interlocuteur et à montrer dès le
départ sa supériorité. « L'offensé n'a en
effet qu'une alternative : céder en donnant l'image d'un individu
déconfit ou renchérir et accepter l'escalade vers un
affrontement331(*)
».
Le caractère
théâtral de cet exercice est souligné par de nombreux
historiens. Xavier Debilly par exemple avance que « ces insultes sont
toujours prononcées en public parce qu'elles témoignent d'une
véritable volonté de ternir la réputation de leur cible,
et se distinguent selon le sexe : les hommes sont indifféremment
traités de voleurs, d'escroc ou de gueux qui fait perdre ses
créanciers. Pour les femmes, les insultes tournent autour du
thème de la prostitution332(*) ».
· Les femmes.
Le recours à la violence verbale est courant chez les
femmes, l'insulte est souvent la finalité à un différent,
alors que chez les hommes elle n'est qu'un préliminaire à un
affrontement. L'imaginaire collectif et les références
idéologiques nous offrent un réservoir d'injures bien fourni.
Les insultes faites aux femmes touchent pour une bonne part
à leur vertu, les femmes se doivent d'avoir une moralité
irréprochable. Cette honorabilité féminine est
aisée à ternir par de simples insultes. A Neufchâteau, le
six février 1810, Elisabeth Mulot injurie en pleine rue
« Marguerite Loquier en la traitant de genre de coquine, de
putain333(*) ». Les injures de type «fille
à service« sont très plus répandues. A
Liffol-le-Grand Anne Chailly se fait ainsi insulter de « vieille
pute334(*)».
Les moeurs supposées des femmes sont
régulièrement mis à mal. Anne Reynauld de Rollainville, a
ainsi dit en 1814, « en parlant de chez Marguerite Maillard que les
putains y logent, lui a dit que son mari venait la caresser et qu'elle
était la cause des mauvais traitements que son mari lui faisait subir.
Marguerite sort, et Anne lui dit qu'elle va voir son homme dans les coupes en
exploitation335(*)
».
Les insultes sur les moeurs d'autrui sont les plus
importantes, de « garce » à
« coquine » en passant par
« traînée » ou par « salope336(*) ». Garce désigne une femme de mauvaise
vie, une compagne hors mariage. De même, coquine fait
référence à une absence de sens moral qui dans les esprits
laisse suspecter les pires déviances. Les qualificatifs sont parfois
originaux, à Neufchâteau deux femmes se disputent et l'une d'elle
traite l'autre « de femme d'Espagnol337(*) ».
Enfin, de nombreuses attaques verbales ont pour sujet
l'alcoolisme, ce fléau qui se répand plus tard dans le
siècle fait déjà des ravages localement. Les femmes
n'hésitent pas à s'insulter « d'ivrognesse338(*) », ou de
« saoularde339(*) ».
· Les hommes.
Les insultes masculines ne revêtent pas le même
caractère. Celles-ci traduisent une volonté de leurs auteurs de se mettre en
valeur et de démontrer leur supériorité physique.
Une bonne part des insultes tourne autour du vol car la
propriété est la finalité de tout Français au
XIXème siècle340(*). La défense de la propriété
d'ailleurs largement rappelée par le Code Pénal. Le vol, est
dès lors révélateur d'une incapacité à
accéder à cette propriété de quelque nature qu'elle
soit, être insulté de voleur n'est donc pas anodin et constitue un
véritable affront. A Harmonville Brice Houdot cherche à vexer un
adversaire qu'il injurie de « coquin, voleur, preneur de javelle,
preneur de gerbes de foin 341(*)». Le travail de la terre est une valeur
fondamentale des sociétés rurales, et ce genre d'insulte met en
cause la capacité productive de la personne injuriée. Les
commerçants sont couramment insultés de « vendeur de
grains de fausse mesure » ou encore de « cochon »
en référence aux réserves de graisse de l'animal
métaphoriquement comparées ici à des réserves
d'argent supposées.
Les élus ne sont pas épargnés par les
offenses, le maire de Pargny-sous-Mureau est régulièrement
qualifié de « corrompu342(*) », Joseph Gérard dit Gaspard le
qualifie même de « gueux à qui il avait été
obligé de donner une somme de 200 francs343(*) ». A Punerot en
1803, Nicolas Bigotte insulte le maire et l'adjoint de la commune de «
coquins et de voleurs dans les rues publiques à différentes
reprises344(*) ».
Ces assertions sont évidemment le fruit de la colère car il est
peu probable que les élus de la commune volent leurs administrés.
Que ces insultes soient justifiées ou non, elles
apparaissent parfois complètement hors de propos et le fait de
circonstances particulières. A Grand en 1826, un certain Bonneville,
personnage bien connu des divers agents de l'état, insulte les gardes
champêtres qui viennent de le verbaliser. Il les injurie « de
voleurs, gueux, scélérats que faisaient des rapports injustes et
milles autres invectives que c'étaient des lâches et des mauvais
sujets et que le maire ne valait pas mieux qu'eux345(*) ».
Les allusions scatologiques font également partie du
registre langagier de l'injure. A Neufchâteau, Jean Baptiste de Coligny
chargé de la conscription, est appelé dans la rue où
l'attendent trois individus qui disent avoir quelque chose d'important à
lui communiquer. Les trois réfractaires à la
conscription « se précipitent sur lui, en
disant que s'il était officier de recrutement ils s'en foutaient, qu'ils
chieraient sur ses épaulettes346(*)». Toujours dans le même registre,
à Grand, le maire se fait insulter par Nicolas Henry qui lui crie
« vous êtes un maire de merde, de charité et je vous
emmerde347(*)».
c. Mises en gardes et
menaces.
L'insulte représente souvent une étape vers la
violence physique, elle constitue alors une forme de provocation qui va en
suite plus loin à force de menaces et autres affronts. Aurore
Véron distingue deux types de menace, les plus anciennes sont
d'avantages tournées vers la propriété, tandis que les
menaces les moins inscrites dans le temps sont essentiellement tournées
vers les personnes348(*).
Parmi ces mises-en garde anciennes les menaces d'incendie sont
importantes. A Mont-près-Ische, le 9 mai 1811 Antoine Régnier
Lejeune est condamné « pour avoir répandu l'alarme dans
cette commune en menaçant de l'incendier349(*) ».
Les menaces qu'Aurore Véron qualifie de récente
sont les plus nombreuses.
Celles-ci sont parfois le fruit de la colère. Ainsi,
Dominique Colardé de Sérécourt fait pâturer ses
bestiaux en 1810, « quand (Claude) Bourgeois étant venu l'y
trouver la frappé sans aucune provocation de plusieurs coups de poings
si violents qui l'ont renversés à terre350(*) ». Dominique
Colardé se relève tant bien que mal et invective son agresseur
qui prend la fuite, « en le menaçant qu'il payerait que
quand il le trouverait il lui casserait les os351(*) ». La mise en
garde révèle surtout une frustration, vexée de
s'être fait rosser, la victime cherche surtout à sauver ce qui
peut l'être.
Les menaces sont souvent plus directes, à Grand, le
fameux Jean Baptiste Biez dont nous avions précédemment
étudié le comportement violent est en froid avec son frère
depuis de nombreuses années. Un jour Jean Baptiste Biez menace son
frère qui rentre des champs, et l' « a mis en joue avec
menace lui disant que s'il osait dépasser une certaine limite qu'il lui
a fixée en lui jetant son bonnet il lui aurait infailliblement
tiré un coup de fusil352(*) ».
Le règlement d'un différent par la violence
répond à des codes tacites. Les violences verbales multiformes
sont destinées à ridiculiser l'adversaire. Lorsque l'opposant ne
réplique pas, l'agresseur tient sa victoire. Dans le cas contraire, les
insultes font place à une opposition physique.
2.
Rituels de l'affrontement et violences physiques.
a. L'empoignade.
Ce premier contact marque le début de l'affrontement
physique. Passé ce premier contact, le combat est difficilement
évitable. A Maxey, le 16 octobre 1811, Claude François Thomas se
fait insulter par le cordonnier du village qui « l'a empoigné
au collet et lui a donné un coup de Bâton qu'il avait à la
main353(*)».
Les accrochages sont parfois précédés par
des coups de coudes ou des bousculades diverses comme autant de provocations,
Claire Apolline Bardot de Rouceux se fait ainsi « coudoyer en sortant
de l'église ce qui causa du scandale354(*) ».
L'empoignade, est une étape cruciale, qui permet
à deux adversaires de se jauger une première fois. Il s'agit ici
de se saisir de son rival, le plus aisé pour y parvenir consiste
à attraper les cheveux. Ainsi, Augustin Colère, de
Domrémy-la-Pucelle, saisit la femme Fleury « par les cheveux
et lui fit baisser la tête jusqu'à terre355(*) ». Les cheveux
représentent une prise aisée, surtout quand il s'agit de longues
boucles féminines. Certains rivaux n'hésitent pas à se
servir des cheveux pour trainer leurs ennemis, « Bouchou aurait
même tenu la femme thomas par les cheveux en la faisant tourner autour de
lui356(*) ».
A défaut de cheveux, les villageois se saisissent
volontiers de la gorge de leurs ennemis. L'empoignade montre une volonté
de s'approprier le corps de son adversaire. La façon dont les
combattants s'agrippent à leur victime traduit un sentiment de
domination manifeste dans cet exercice. Il s'agit de réduire à
néant la capacité de réaction de l'autre, en annihilant sa
force, par des positions voir des prises qui assoient la domination de
l'agresseur sur sa victime.
b. Les accessoires de la
violence.
La violence physique est rarement
préméditée. Les accessoires, lorsqu'ils sont
utilisés, sont des objets usuels que l'on trouve à
proximité. Comme nous l'indique l'histogramme ci-dessous, le combat
à mains nues reste le moyen d'agression le plus courant à 39,14
%. Le bâton est ensuite l'instrument préféré des
rixes suivies de prêt par les pierres utilisées essentiellement
comme projectiles.
Figure 27, accessoires utilisés lors des violences
physiques.
On observe que les armes au sens strict du terme, sont
rarement utilisées. En ne comptant que les agressions par couteau,
fusil, pistolet et ciseaux, on obtient seulement 13,94 % des affrontements. La
faible utilisation d'armes potentiellement dangereuses, traduit une
volonté de faire simplement mal à son adversaire mais pas de le
blesser gravement ou de le tuer.
Les accessoires potentiellement dangereux comme les faux, les
rasoirs ou les fourches, sont rarement utilisés. Il s'agit d'outils de
travail qui mal utilisés peuvent devenir dangereux voir mortels, mais
leur utilisation est anecdotique.
Les accessoires peu dangereux tels que bâtons et mottes
de terre, sont utilisés dans 37,20 % des rixes. Leur emploi reste
anodin, il s'agit pour les belligérants de se donner des chances
supplémentaires de victoire surtout si le combat est
déséquilibré, ou pour marquer d'avantage le corps de
l'ennemi. On se souvient ainsi de Marie-Louise Jacquemin qui se fait rosser
à coup de bâton d'épines357(*).
Les objets utilisés sont parfois étonnants, A
Grand, Nicolas Mégroz prête un décrottoir de
charrue358(*) à
François Vidor, qui tarde à le lui rendre. Le premier
réclame son bien ce qui déclenche une rixe entre les deux hommes.
Le second renverse Mégroz et lui porte des coups de son propre
décrottoir359(*)
».
c. Des blessures le plus souvent
légères.
Ces joutes physiques laissent de nombreuses traces. Si les
blessures graves restent rares, les combattants s'en tirent souvent avec des
yeux pochés, des mains tuméfiées, et des plaies diverses.
Les victimes insistent sur leurs blessures. Lors des procédures, nous
avons précédemment vus que toutes les blessures des demandeurs
sont soigneusement examinées par des chirurgiens pour déterminer
leur gravité.
Ces affrontements laissent parfois des marques
considérables. A Neufchâteau, un certain Dumont se fait frapper
par vingt-cinq à trente coups de barre par Voignier, un cabaretier qui
ne s'arrête que lorsqu'un passant s'approche. Dumont s'en tire avec
« une contusion considérable, accompagnée d'ecchymoses
rouges et bleuâtres de la largeur et grandeur d'un
décimètre, trois centimètres environ situé sur
toute l'étendue de l'os omoplate du côté droit, lequel
cependant n'a point paru lésé360(*) ».
Toujours à Neufchâteau, après un combat,
Claire Elisabeth Mourot présente « une contusion sur l'oeil
droit avec ecchymoses, une contusion sur la main droite, et une blessure
légère (morsure) à un des doigts de la main
gauche361(*) ». Le chirurgien précise en outre
qu'elle se trouve dans un état de souffrance important.
De manière générale, le type
d'accessoire utilisé détermine la gravité des blessures.
Les bagarres à mains ne laissent que quelques cocards tandis que les
coups de bâton et de pierres laissent des plaies plus importantes.
d. parties du corps
visées.
D'après l'histogramme suivant recensant tous les coups
échangés, il apparaît que le visage est la partie du corps
la plus visée puisque 46,23 % des coups y sont portés. Robert
Muchembled trouve des chiffres identiques, « visés par
près de la moitié des meurtriers qui obtiennent une lettre de
rémission, le crâne humain est assurément le centre vital
du « moi » de ces hommes362(*) ». La tête chez l'homme est
culturellement la personnification du corps tout entier. C'est donc
naturellement une cible de premier choix.
Figure 28, Parties du corps visées lors des
rixes.
Si le chapeau est porté par tout le monde, c'est avant
tout pour la protection qu'il offre. Cet attribut n'est cependant ni plus ni
moins qu'une pièce de feutre, un rempart parfois bien fragile. A
Punerot, Joseph Habémont, se fait assaillir par Joseph Ferbus qui
« s'élança sur le dit Habémont lui appliquant
un coup de son tranchant sur la tête lui fend son chapeau et le blesse
cruellement à la tête et le baigne dans son sang363(*) ». Comme le
précise Robert Muchembled cette barrière est avant tout
symbolique.
Sur les trente et une blessures au crâne, treize sont
situées autour des yeux, cinq à la gorge, deux sur les joues, et
une aux oreilles, le reste n'est pas précisé. Le visage est donc
la zone la plus martyrisée.
Aurore Véron précise, qu' « il
est de fait exact qu'ordinairement si d'autres parties du corps sont
blessées, cela relève plus du hasard que d'une
préméditation364(*) ». Le bras et les mains servent souvent
à parer les coups comme Marie-Claire Apolline Bardot qui se
protège avec les bras de Françoise Gouzy. Cette dernière
l'a frappée « à coups de pierres365(*) ». Le dos et les
fesses sont de même couramment touchés lorsque l'un des deux
combattants fuit.
Les autres parties du corps que la tête sont peu
sollicitées, mais parfois spécifiquement visées comme
François Evrard qui frappe Marie Poutoux avec une bûche de bois.
Cette dernière présente des blessures sur les deux bras, les
épaules, les côtes et les reins. On imagine que pour recevoir des
coups à de tels endroits, la victime s'est mis en position foetale pour
se protéger de son assaillant366(*) ».
Vivre dans un village sous-entend cohabiter avec des individus
avec lesquels l'amitié ne prévaut pas forcément. Lorsque
que les quolibets n'ont rien résolus, la violence physique débute
alors par des bousculades ou des empoignades. Ensuite viennent les coups,
à mains nues ou avec des accessoires. Ces querelles violentes laissent
des séquelles. Vaincus et vainqueurs arboreront pour quelques jours yeux
au beurre noir et ecchymoses.
C.
Aux marges et à l'extérieur de la commune.
Une commune comprend le village où vivent ses
habitants, mais également des terres attenantes et des forêts plus
ou moins fournies selon les localités. L'expression des délits
est liée à des endroits particuliers au sein de la commune.
Dans le village certains lieux sont particulièrement
exposés au délit. En dehors du bâti s'étendent les
champs et la forêt, théâtres d'infractions
particulières, majoritairement tournées vers la nature. La
surveillance n'y est pas aussi importante qu'au village, ce qui peu influer sur
l'intensité des pratiques «illégalistes«.
1.
Les délits commis au village.
a. Les lieux d'expression
privilégiés du délit au sein de la paroisse.
Figure 22,
répartition géographique des délits.
Le premier graphique ci-dessus nous montre, que 47,45 % des
délits se commettent dans le village lui-même. C'est en effet le
lieu de vie par excellence, c'est le lieu ou se trouve le plus de richesse
attirant le vol. Les villageois y sont d'avantage concentrés que dans
les autres parties de la commune ce qui accroit les risques de violences
verbales ou physiques. La proximité y est à son comble et influe
nettement sur le nombre de délits.
Figure 23,
répartition géographique des délits commis dans le
village.
Au sein du village, la répartition géographique
des délits de la figure ci-dessus révèle que de nombreux
délits ont pour théâtre les maisons. Celle-ci sont des
lieux ouverts, lors des veillées de nombreux villageois sont
invités, les visites sont nombreuses mais pas toujours heureuses comme
en témoignent les 79 délits commis dans les maisons. Les vols et
les dégradations gonflent les chiffres et constituent la majeure partie
de ces délits.
Les débits de boissons sont également des hauts
lieux de la délinquance367(*). Il s'agit, contrairement aux maisons,
essentiellement de violence. Au début du XIXème siècle le
rapport à l'alcool n'en est cependant qu'à ses balbutiements,
« entre 1830 et 1900 la consommation moyenne de l'adulte se hausse de
quinze litres d'équivalent alcool pur l'an à trente-cinq
litres368(*) ». Les cabarets font souvent office de
bal, où se massent les jeunes gens du village. En 1816, lors d'un
bal à Autigny-la-Tour, Sébastien Noël après
s'être passablement enivré « se courrouce sur la
personne du garde Adam lui provoquant coups et blessures369(*) ». Arlette Farge
souligne que « le cabaret est évidemment un catalyseur
d'agressivité et d'échauffourées sanglantes370(*) », l'effet
désinhibant de l'alcool exacerbe les susceptibilités, et met les
buveurs dans des états seconds. Ainsi, à Grand en 1811, Jean
Baptiste Bertrand épris de vin sort du cabaret et outrage le garde
Collot. Lors de son interrogatoire le prévenu ne se souvient absolument
de rien371(*).
De nombreux délits ont pour théâtre la
rue372(*). Il s'agit
là encore essentiellement de violence. La rue est un lieu de rencontre
important, ce qui accroît le risque de tension. A Rollainville, en 1811,
Anne Reynauld se fait ainsi poursuivre dans la rue par deux matrones du village
qui lui jettent des cailloux avant de la battre373(*).
Les maisons ont toutes pignon sur rue, les habitants gardent
toujours un oeil sur la rue et n'hésitent pas à agresser les
passants avec lesquels ils sont en mauvais terme. A Coussey le 20 octobre 1823,
Catherine Hierlé voit passer Thérèse Ariet dans la rue,
Catherine « est sortie de sa maison et la assailli et lui a
donné beaucoup de coups d'un bâton qu'elle avait dans sa
main374(*) ».
b. Délits typiques de
villages.
· Le « tapage nocturne » et le
« trouble de l'ordre publique ».
De nombreux délits nocturnes bénins sont
regroupés sous l'appellation de « tapage nocturne »
ou de « trouble de la tranquillité publique ». Il
s'agit de délits commis nuitamment, par de jeunes gens dans un but le
plus souvent festif. A Punerot, Nicolas Vannier a pris l'habitude de faire le
tour du village en jouant de la musique avec des instruments « tels
que trompettes, arrosoirs et violons375(*) ». Le mélomane est
dénoncé car ses performances musicales portent atteinte à
la morale religieuse et au curé du village.
A Greux, la nuit du 1er Mai, « des
inconnus se sont permis dans la nuit de renverser des chariots dans les rues de
placer des herses les dents en haut, du bois et des épines contre les
portes des particuliers 376(*)». Il s'agit ici de la «nuit des mais«
tradition villageoise qui consiste à placer des branches fraîches
sous les fenêtres des jeunes filles du village.
L'alcool semble jouer un rôle important, tout comme la
nuit. L'obscurité favorise en effet l'anonymat, et offre une
liberté d'action inespérée pour de nombreux
couche-tard.
· Des usuriers répandus mais peu
dénoncés.
L'usure est un délit répandu dans les villages
bien que seulement quatre affaires passent devant la justice. Ce délit
est par nature difficile à déceler, pour être
avéré les témoins doivent être nombreux, or le
prêteur sur gage est économiquement vital. Ses avances, à
des taux frôlant les 20 %, sont néanmoins vitales pour acheter un
bout de pré, des outils ou encore du grain lorsque les greniers sont
vides. On trouve à Midrevaux un prêteur sur gages lourdement
condamné en 1839. La procédure nous révèle que
« depuis longtemps Louis Vanniot, propriétaire demeurant
à Midrevaux exploite, comme usurier, toutes les communes avoisinant son
domicile, sa cupidité peu satisfaite de ravager une partie de
l'arrondissement de Neufchâteau, s'enfonce jusque dans les
départements de la Haute-Marne et de la Meuse 377(*)». Le nombre de
témoins est exceptionnellement élevé, cinquante personnes
ont ainsi eu recours à des prêts allant de vingt-quatre à
mille cinq cents francs.
Les délits commis au village sont les plus nombreux.
Il s'agit avant tout de violences, de vols, de non respect des
règlements locaux sur la voirie et autres infractions. Le village
concentre en permanence l'essentiel de la population dans un
périmètre réduit, la surveillance par les autorités
locale y est renforcée mais n'empêche pas les dérapages.
L'action des agents de l'Etat diminue progressivement dès lors que le
délit se commet à l'extérieur du village.
2.
La périphérie du village
43,33 % des délits des villageois sont commis à
l'extérieur du village. La périphérie est
constituée du terroir et de la forêt. Ces parties de la commune
sont les moins fréquentées, mais aussi le moins
surveillées.
a. La périphérie
du village, des champs éloignés où l'autorité du
maire est déjà moins palpable.
Figure 24,
répartition géographique de tous les délits
commis.
Le terroir est composé des champs, des
chènevières, des vergers, et des vignes. Cet espace vient en
seconde position des lieux où sont commis le plus de délits avec
28,24%. C'est l'endroit des travailleurs des champs comprenant également
les chènevières et les vergers. Les délits y sont presque
toujours commis par des hommes, sauf dans les cas de vaine pâture
où les gardiens de troupeaux sont plus couramment des jeunes filles ou
des garçons. Dans cette aire géographique, les contraventions
sont également dressées contre des particuliers n'étant
pas dans un cadre professionnel. Nombreux, sont les marchands coupant à
travers champs, avec leur charrette, dans des terrains
ensemencés378(*),
et les chasseurs indélicats confondant gibier et
fermière379(*).
Les chènevières et les vergers apparaissent
comme des lieux connaissant peu d'incivilités, ce qui s'explique
aisément par leur faible superficie. En effet seulement 0,52 % de la
superficie totale du canton est dévolue aux chènevières et
aux vergers.
· du droit d'usage abusif au saccage de
récolte.
La circulation est limitée aux chemins vicinaux et aux
chemins communaux, les chemins privés et les champs sont interdits
à tous types de transport, même au simple passage à pied.
Lorsque les champs ont été ensemencés, ils deviennent de
véritables «no mens land«. A Coussey en 1810, Claude Ory
en fait les frais. Ce cultivateur rentre dans son village avec un chariot
tiré par des chevaux, et décide de prendre un raccourci en
passant « sur des pièces de terre emplantées de
blé », malheureusement pour lui deux gardes l'arrêtent
et lui donnent un procès-verbal380(*).
Les chemins privés sont également
défendus mais rarement surveillés par leurs propriétaires.
· Des dégradations résultant souvent
d'inattentions.
Celles-ci revêtent différents degrés de
gravité selon qu'elles soient accidentelles ou volontaires et qu'elles
soient dirigées contre des particuliers ou contre des biens
communautaires. L'éloignement du village encourage certains
délinquants à détruire sans vergogne.
Ces destructions peuvent être d'une rare
intensité. A Lamarche, l'adjoint au maire constate que ses 217 pieds de
saule fraîchement plantés dans un pré, ont
été coupés avec une serpe. L'homme précise que ce
n'est pas la première fois qu'il est victime de malveillances,
« voulant maintenir la police et le bon ordre il a attiré la
malignité et la vengeance de tous les mal intentionnés qu'il
en a déjà éprouvés les effets qu'on lui a
déraciné les arbres de son verger381(*)».
Les dégradations sont le plus souvent involontaires et
touchent de nombreux chemins exposés à une utilisation intensive.
En 1821, plusieurs habitants de Sionne abîment le chemin qui mène
du village au cimetière, en creusant un fossé382(*).
· La vaine pâture.
La vaine pâture est une tradition d'Ancien Régime
qui devient réglementée à la fin du XVIIIème
siècle. Alain Jacquet montre que l'édit de 1767 sur le libre
parcours des bestiaux « est mal perçu, 20 ans après,
l'unanimité se fait contre les enclosures [...] parce qu'avec le temps
les paysans ont pu en mesurer les effets pervers notamment le manque de
pâturages pour les plus pauvres, ce qui met en péril la survie des
quelques animaux qu'ils possèdent 383(*)».
Les villageois pouvaient laisser librement pâturer leur
animaux dans leur commune mais aussi dans les communes voisines, la vaine
pâture « s'exerce pour les troupeaux sur les lieux ouverts
à la vaine pâture jusqu'au milieu du village (coutumes de
Lorraine), si par titre ou usage il n'y a pas d'autres bornes 384(*)».
Les délits liés aux troupeaux apparaissent dans
nos sources pour la première fois en 1818, ce délit
s'accroît par la suite, « au cours des années 1830, le
développement des prairies artificielles exclue la vaine pâture,
et la disparition des troupeaux communs multiplie les atteintes aux
propriétés385(*) ».
Les délits liés aux pâturages sont
faiblement punis, on observe néanmoins un alourdissement des peines dans
les années 1850, les propriétaires semblent de moins en moins
disposer à voir des hordes de bestiaux ravager impunément leurs
propriétés. Maurice Fouillouse un important propriétaire
terrien semble avoir donné des consignes pour que les gardes surveillent
au mieux ses propriétés, les gardiens de troupeaux sont punis 3
fois en six mois après avoir pâturé dans ses champs en
1823.
De façon générale, le pâturage
illicite semble bien supérieur aux quelques cas punis par procès
verbal. Fabien Gaveau nous donne l'exemple d'un juge de paix du canton de
Laigne qui estime que la divagation d'animaux « se renouvelle 20 fois
par jour dans chaque commune sans donner lieu à
procès-verbal ». Les jeunes bergers profitent donc du peu de
surveillance effectué loin dans les terres pour engraisser leurs
animaux, en se faisant rarement prendre.
En périphérie du village le terroir
apparaît bien vaste, assidûment fréquenté par les
villageois pour leurs divers travaux agricoles, l'autorité moindre, par
rapport au village encourage certains à enfreindre les
règlements, ce qui s'observe de manière encore plus flagrante
dans la forêt.
b. Aux marges du finage, des
délits ruraux et forestiers difficiles à constater.
La dernière zone géographique du village, celle
que nous qualifions de «marge« est celle réservée
à la forêt, aux vignes, et aux chemins vicinaux. Cette zone est le
royaume du braconnage et du délit forestier. On observe ci-dessus la
part importante de la forêt entre Grand, Midrevaux, Sionne, Chermisey et
Avranville.
· Un lieu exempt de tout contrôle.
La forêt jouit d'une réputation sulfureuse,
Braudel écrit « que les guerres s'étant tellement
prolongées en Lorraine que les paysans trop longtemps exilés de
leur maisons s'ensauvagèrent et devinrent « les loups des
bois ». Ils détroussaient sans vergogne officiers et soldat du
roi386(*) ».
La partie boisée est l'endroit le plus éloigné du village
et implicitement celui le plus éloigné de l'autorité et
des règlements municipaux. Seuls 14,69 % des délits y sont
commis, alors que cette étendue correspond en moyenne à 33,26 %
du territoire des communes. La forêt n'est pas une zone déserte,
elle est utilisée pour circuler vers d'autre village, et pour son aspect
économique. Les bûcherons y élisent parfois domicile, les
villageois vont y chercher des compléments alimentaires, souvent en
braconnant, ou du bois pour se chauffer. Le risque d'y croiser un garde est peu
important, ce qui explique le faible nombre de délits qui y sont
constatés
· Des délits ruraux et forestiers nombreux.
Marie Renée Santucci donne la définition
suivante pour les délits ruraux et forestiers ;
« appropriation, utilisation, enlèvement du sol, ou des
produits naturels du sol situés dans les communaux ou dans les
forêts ainsi que les abus du droit d'usage387(*) ». Les biens
spoliés peuvent être de toutes nature. Dominique Henry à
Neufchâteau enlève de la terre dans un terrain appartenant
à autrui388(*) ». A Grand, il s'agit « d'un
tombereau de sable soustrait frauduleusement dans un héritage
appartenant à Philippe Grélot389(*) ».
La coupe de bois arrive en tête de ce type de
délit, à Morizecourt en 1812, des vignerons ramassent ainsi des
ételles laissées dans un chêne dans la forêt
communale390(*) ». Il s'agit des découpes
effectuées dans l'arbre pour mieux l'abattre, ces morceaux de bois
reviennent traditionnellement au bûcheron. Le glanage est
également interdit mais peu représenté. La plupart des
délits forestiers se commettent dans la partie ouest du canton,
correspondant aux neufs villages les plus délictueux, car ceux-ci sont
les plus boisés. Le caractère sylvestre de l'infraction rend le
délit par nature difficilement répréhensible, les
délinquants disposant de centaines d'hectares pour se fondre
littéralement dans la nature. Les plus malchanceux se feront cueillir en
lisière de forêt ou sur les chemins en rentrant, à moins
qu'ils ne décident de couper à travers champs.
· Le braconnage, une activité forestière,
d'hommes armés et parfois dangereux.
Le délit de chasse se commet également dans le
terroir où il est d'ailleurs plus représenté dans les
procès verbaux. Cependant on peut estimer à juste titre que la
forêt est un des lieux privilégié du braconnage de part sa
faune plus importante et plus diversifiée.
Les principales infractions constatées font suite
à la chasse sans permis. Le recueil des actes administratifs n°18,
précise la façon dont sont délivrés ces permis,
« nul individu ne peut chasser, sauf les exceptions
déterminées par l'article 2, s'il ne lui a pas été
délivré un permis de chasse, sur l'avis du maire et du
sous-préfet 391(*)».
La deuxième infraction la plus courante est le non
respect des dates d'ouverture. A Bréchainville en 1828,
François-Xavier Grojean, le maire de Grand, se fait prendre en chassant
en dehors de la période réglementaire de la chasse. De plus, il
opère sans permis de port d'armes et rentre chargé de gibier
« à travers les champs chargés de récolte en
grains 392(*)».
Les autres infractions les plus courantes concernent les
engins utilisés, les gardes parlent parfois d'arme de guerre pour des
fusils trop dangereux.
Le braconnage semble important, les gardes dans leurs
rapports parlent même de professionnels de la chasse. Dans un
procès verbal, Nicolas Baudot, garçon majeur de Tollaincourt, est
qualifié de « braconnier de profession393(*) ».
Au delà du délit de chasse pur et simple ce sont
les armes placées en de mauvaises mains qui font peur, on ne compte pas
les fermières aux champs qui reçoivent plus ou moins
accidentellement des gerbes plombs. « Tous les jeunes gens
s'imaginent avoir le droit de porter des fusils de chasse et faire acte de
chasse sur tout le finage [...] Il serait à désirer qu'on
désarme cet homme (Nicolas Baudot) qui est réellement
dangereux ».
La forêt est une zone reculée où le
délinquant peut opérer dans une totale impunité
c. Aux limites des communes,
routes et chemins sont les terrains de jeu des brigands.
Le Brigandage comprend toutes les attaques
opérées à proximité immédiate de voies de
communications, sous la menace d'une arme, dans le but de s'approprier les
richesses des voyageurs. Nous avons recensé six affaires rentrant dans
cette catégorie.
Les bandits pour ne pas être reconnus utilisent des
déguisements. A Villotte, François Chamet se fait agresser par
trois hommes dont l'un est habillé en femme394(*). Sur la route menant de
Coussey à Neufchâteau, Christophe Fépoux se fait
arraisonner par des individus avec des sacs sur le visage, l'un deux ayant sur
la tête un chapeau à trois cornes395(*). La volonté
d'anonymat est importante car les brigands connaissent souvent leur victime, on
peut même parler de rançonnage de proximité. Malgré
tous ces artifices, l'identité des agresseurs est parfois
découverte. Christophe Fépoux qui parvient à s'enfuir de
son embuscade, rencontre plus tard dans la journée trois individus
suspects, qu'il reconnaît comme étant ses agresseurs. Les brigands
étant des habitants du village voisin de Maxey-sur-Meuse.
Les bandits de grand chemin sont armés. A Villotte,
ils portent des serpes et des sabres, à Coussey ils sont
équipés de fusils et se montrent menaçants,
« l'homme armé d'un fusil ayant continué de s'approcher
les a couchés en joue à une telle proximité que le bout du
canon se trouvait déjà engagé dans la charrette dont il
s'agit en leur criant d'une voix menaçante (- arrête ou je te
tue !) ». Certains «bandits amateurs« faute
d'équipement adéquat se contentent d'agresser les voyageurs
à coups de poings ou de gourdins.
Le butin capturé est composé essentiellement
d'argent, Chaumet de Villotte se fait délester de 82 Louis
d'or396(*) tandis que
Jean Baptiste Gérardin de Punerot se fait voler de 141 francs et quatre vingt centimes397(*).
Cinq cas de brigandage sur six se commettent pendant les
trois périodes de disette que nous avions mis en évidence dans la
partie sur la conjoncture. Ceci laisse à penser qu'il ne s'agit pas de
«brigands de profession« mais de simples paysans qui en sont
réduit à attaquer des passants pour leur propre survie ou
améliorer leur quotidien.
Ces larcins ne sont jamais commis aux alentours du village.
Les lieux des attaques sont souvent des zones floues, des chemins à la
limite de deux communes. Les brigands opèrent là où ce
genre d'activité est peu risqué, là où les gardes
champêtres se rendent rarement.
3.
Le village et l'extérieur.
a. Des
« étrangers » mal tolérés par la
communauté villageoise.
Le village est un monde relativement
clos. Les habitants d'un même village se connaissent tous, ils
connaissent certains habitants des villages voisins mais ont rarement des
relations au-delà. Toute personne franchissant l'enceinte de la commune
est rapidement repérée et devient immédiatement le centre
des conversations. A l'image du vagabond, toutes les personnes venant de
l'extérieur font peur ou intriguent.
· Le Vagabond et la peur de l'étranger.
Le vagabondage et la mendicité représentent dans
le canton 4,18 %, de tous les délits commis. Le vagabondage est
régulier tout au long de la période avec toutefois des pics en
temps de crise de quelque nature quelle soit. De 1823 à 1826,
époque de conjoncture agricole défavorable, on dénombre
entre un et deux cas par an.
Défini comme délit, le vagabondage, forme
paroxystique de la misère pose problème aux autorités
locales qui voient toujours d'un mauvais oeil ces individus qu'ils affublent de
tous les maux et qu'ils considèrent comme des délinquants en
puissance. A Brancourt, le 16 juin 1837, Nicolas Rambaud, sans profession,
mendiant d'habitude s'introduit dans les maisons pour y trouver de quoi se
nourrir, il est rapidement dénoncé au maire par les habitants qui
font front commun lorsqu'un danger extérieur se présente.
· Les employés de l'Etat dans les villages.
Cette « union sacrée » s'observe
contre certains représentants de l'état. A Ruppes en 1812 des
inspecteurs des droits réunis viennent perquisitionner chez le
cabaretier Joseph Thouvenin. Les employés de la régie
« ont trouvé au cours de leur visite des bouteilles suspectes
dont ils ont voulu faire l'inspection à laquelle le sieur Thouvenin
s'est opposé, opposition qui a été accompagné et
suivie d'outrages et violences graves exercées envers ces deux
employés de la régie398(*) ».
Le cabaretier bouscule les deux employés « de
la recette à cheval des droits réunis de
Neufchâteau399(*) », il est imité par « des
personnes qui se trouvaient alors dans son domicile, et les ont
renversés à terre sur des débris de bouteilles
cassées. Thouvenin s'est saisi de la gorge d'Etienne Louis Berthelot et
tout le monde a participé en applaudissant ou encourageant les
violences400(*) ». Le maire présent prend
même le parti de ses administrés et somme les inspecteurs de se
retirer. L'évènement attire immédiatement tout le village
qui avait été avertit de l'arrivée des deux
« étrangers », « une foule de
peuple », attiré par la rixe, se forme rapidement
devant le cabaret.
Lors du procès, le délit est qualifié de
rébellion chose assez rare dans le canton pour être
soulignée, au total quinze personnes sont impliquée dans la rixe.
De telles résistances collectives sont rares, il s'agit ici de
« violence défensive » le cabaretier se sent en
danger ce qui provoque sa réaction violente, les clients prêtent
alors main forte au débitant pour renvoyer les inspecteurs.
Les villageois n'apprécient pas les intrus, mais ce
genre de violence reste rare.
b. Marchands ambulants et
colporteurs.
Les marchands ambulants sont accueillis différemment au
sein des villages. Leur présence, étant uniquement due au
commerce, semble rassurer les villageois et même les enchanter. En 1831,
s'établissent à Domrémy-la-Pucelle, Jean-Baptiste Perbost
se disant médecin de la faculté de Paris, et Jean Joseph Bertrand
se disant dentiste401(*). Ces marchands ambulants, sont très bien
équipés « ils avaient domestiques chevaux voitures et
musiciens402(*) ». Les deux «hommes de
médecine« proposent des médicaments un peu trop efficaces
qui sont censé guérir aussi bien « la puanteur de la
bouche403(*) », que les fièvres, les tumeurs et
autres maladies. Ces remèdes miracles inquiètent les
autorités et ce ne sont pas moins de quatre maires qui avertissent le
procureur des agissements des guérisseurs miracles qui seront
condamnées pour usage illégal de la médecine.
Lors de leur arrivée les marchands ambulants
s'annoncent et « ont bien vite rassemblé un assez grand nombre
de personnes et ils ont annoncé la vérité de
médicaments, ils ont aussi demandé que si trois personnes ayant
des parties du corps malade il voulait bien les guérir
gratuitement404(*) » ils trouvent facilement trois
volontaires que les deux compères iront frictionner avec une graisse
mystérieuse.
Les tarifs des fioles miracle correspondent presque à
une journée de travail, mais celle-ci se vendent si bien que les
marchands restent sur place pendant quatre semaines.
Les commerçants sont les seuls
« étrangers » qui ne suscitent pas de
méfiance au sein de la communauté villageoise. En effet leur
arrivée est mise en scène et attire les habitants.
c. Le sentiment
d'impunité du délinquant en dehors de son
« pays ».
Les habitants d'un village peuvent se sentir
grisés d'échapper un moment à la pesanteur sociale de leur
village. La proximité et le cancanage au sein d'une commune sont
fatigants. Les villageois apprécient en de rares occasions, de
s'éclipser de ce climat lourd.
L'anonymat dans les villages éloignés est un
atout pour certains délinquants. Certains escrocs comme Christophe
Bonneville de Grand en usent à merveille. Au mois de mars 1831,
accompagné d'un ami, ils « se sont rendus à
Pargny-sous-Mureau en se faisant passer pour le fils de M. Gérard de
Grand, ce qui leur a permis de souper, coucher, et déjeuner
gratuitement, et de faire la cour à la demoiselle de la maison qui
croyait bien que c'était M. Gérard405(*) ». L'usurpation
d'identité fonctionnant à merveille les deux compères
rééditent leur méfait en empruntant 12 francs chez Salzard
à Greux, sous le nom de M. Gérard fils de Grand, ils
dépensent ensuite l'argent « à Coussey où se
faisant passer pour garçons ils se sont mis en promesse de
mariage406(*) ».
L'anonymat est bien souvent total à quelques kilomètres de son
village, ce qui conduit les délinquants à en abuser.
De tous les délits commis à l'extérieur
de la commune, le vol arrive en tête. Voler dans son village est
risqué, la honte atteindrait immanquablement l'honneur de la famille. A
la ville, les tentations sont fortes, notamment pour les femmes, qui se rendent
dans les merceries. La profusion des marchandises semble hypnotique puisque
qu'on recense neufs vols dans de telles échoppes. A Neufchâteau,
en octobre 1827, Élisabeth Cuny se fait ainsi prendre en flagrant
délit de vol dans une mercerie407(*).
En dehors de son espace de vie les cadres volent en
éclats.
d. Les relations avec les
villages voisins.
Le sentiment d'appartenance à un village est
réel. Il s'observe notamment au moment des conscriptions, cependant il
ne donne pas lieu à des batailles rangées entre les habitants
d'un clocher contre un autre. Les seules marques de frictions entres villages
s'observent au travers d'individus isolés et notamment des pâtres
qui défendent couramment leur territoire contre les bergers voisins.
Le 23 juin 1811, Nicolas et François Leclerc
pâtres domiciliés à Coussey rencontrent le pâtre de
Sionne et sa femme près de la ferme de Berthelévaux en limite des
deux communes. Le couple tente de faire battre en retraite le troupeau des
Cussetois en lançant des pierres à leurs animaux. Les deux
pâtres de Coussey tentent de protéger les animaux sous leur garde
et s'arment également de pierres qu'ils utilisent contre les Sionnards.
Barbe Pierrot est touchée d'une caillasse à la tête, tandis
que son mari se fait rosser par les deux bergers408(*).
De tels exemples sont peu nombreux, les relations entre
villages semblent assez limitées. On se souvient de l'affaire Biez, cet
homme violent de Grand est jugé en 1811 pour avoir entre autre
« exercé des actes de violence grave, à
différentes époques, sur les personnes de Joseph Gérard de
Chermisey, et de hyacinthe Lartillon d' Allianville409(*). Chermisey et Allianville
sont deux communes voisines de Grand.
L'absence de conflits entre villages, si ce n'est des
bagarres entre individus isolés démontrent de faibles relations
entre habitants de communes voisines.
Le Village apparaît comme un microcosme. La
communauté se recroqueville sur elle-même lorsqu'elle se sent
agressée et n'a que peu d'occasions de se rendre dans le reste du
canton, seuls les commerçants lancent quelques pénétrantes
vers les villages du canton. L'anonymat le plus total entoure les villageois au
delà de quelques kilomètres de leur lieu de résidence.
Certains petits escrocs en profitent, ce qui entretient la méfiance
envers l'étranger, les vagabonds sont eux aussi redouté car il
est rare qu'ils puissent décliner leur identité.
De la maison à la forêt, les
théâtres de la délinquance sont nombreux. Dans le village
la délinquance s'observe surtout dans les maisons ou la richesse
toujours relative attire les voleurs en tout genre, tandis que les cabarets et
les rues sont des hauts lieux de la rixe. La nuit venue le village est le
terrain de jeux des rôdeurs et des buveurs éméchés
susceptibles de troubler l'ordre public. Dans les champs les agriculteurs ne
sont plus surveillés que par le garde champêtre et en profitent
pour faire pâturer illégalement leurs bestiaux ou commettre
diverses destructions. Plus loin encore dans le terroir, la forêt
apparaît comme une zone de non droit où il est aisé de
tirer illégalement profit des fruits de la nature, et de
rançonner les passants circulant sur les grands chemins. La forêt
délimite souvent la fin du territoire communal, au-delà le
villageois apparaît comme un inconnu, attiré par les richesses de
la ville et des marchés. Les relations avec les villages proches sont
limitées, car le village vit en vase clos. Quelques conflits entre
usagers « étrangers » peuvent survenir aux marges.
Conclusion de la troisième partie.
L'organisation sociale au sein du village est très
stricte, chaque niveau d'appartenance sociale s'emboîte parfaitement. Les
familles apparaissent comme des unités de base, elles veillent
scrupuleusement à maintenir leur degré d'honorabilité, ce
qui leur vaut des relations privilégiées avec les familles
riveraines. La bonne entente entre voisins est importante économiquement
et humainement. Les multiples services mutuellement rendus facilitent le
quotidien. Mais, lorsque les liens entre riverains se rompent, la situation
peut vite devenir difficile, il n'y à plus qu'à se tourner vers
son réseau de solidarité pour se faire soutenir lors d'un
éventuel procès. Quelques familles ont la mainmise sur le
village, réunies dans des coteries où elles défendent
mutuellement leurs intérêts. Au sommet de cette construction
humaine se situe le maire souvent leader d'un puissant réseau de
solidarité.
Cette pyramide sociale ne peut cependant pas toujours
protéger ses membres. L'affrontement est parfois inéluctable. Les
dissensions, l'alcool et la foule favorisent les rixes qui émaillent le
calme du village. Les affrontements villageois répondent
néanmoins à des schémas traditionnels. Ainsi, les coups
font souvent suite à des avertissements verbaux. Les lettres anonymes,
les insultes et autres mises en gardes doivent être
considérées comme annonciatrices d'un conflit. Lors de leurs
oppositions les adversaires s'affrontent le plus souvent à main nue et
se laissent parfois de douloureux souvenirs.
La vie de village impose de respecter des normes. Les
autorités locales veillent à limiter conflits et délits,
pour garantir l'ordre public. Paradoxalement le village siège de
l'autorité du maire et de ses satellites, est aussi l'endroit où
se commet le plus de délit. La concentration de la population influe sur
les chiffres de la délinquance qui n'est cependant pas en reste dans les
champs et dans la forêt. Loin des yeux du village, les infractions s'y
commettent dans un sentiment d'impunité qui augmente avec
l'éloignement du clocher. En dehors du village et loin de ses cancans
les villageois se sentent libérés et désinhibés au
point de commettre de nombreuses rapines. Dans les champs et dans la
forêt, les pratiques illicites sont essentiellement des formes de
délinquance professionnelle ou de subsistance.
Le village apparaît comme un microcosme
autorégulant ses conflits, et limitant ce que nous pouvons qualifier de
délinquance de proximité. Peu ouverts vers l'extérieur,
les ruraux se méfient des étrangers et s'aventurent rarement
au-delà du village. Hermétique et replié en partie sur
lui-même, le pays craint les intrusions. De la maison à la
forêt, les théâtres de la délinquance sont nombreux.
Dans le village les délits s'observe surtout dans les
maisons où la richesse toujours relative attire les voleurs en tout
genre, tandis que les cabarets et les rues sont des hauts-lieux de la rixe. La
nuit venue, le village devient le terrain de jeux des rodeurs, et des buveurs
éméchés susceptibles de troubler l'ordre public. Dans les
champs les agriculteurs ne sont plus surveillés que par le garde
champêtre et en profitent pour faire pâturer illégalement
leurs bestiaux ou commettre diverses destructions. Plus loin encore dans le
terroir, la forêt apparaît comme une zone de non droit où il
est aisé de tirer illégalement profit des fruits de la nature, et
de rançonner les passants circulant sur les grands chemins. La
forêt délimite souvent la fin du territoire communal,
au-delà, le villageois apparaît comme un inconnu attiré par
les richesses de la ville et des marchés. Les relations avec les
localités voisines sont cependant limitées, car le village vit en
vase clos. Quelques conflits entre usagers
« étrangers » peuvent toutefois survenir aux marges.
CONCLUSION GENERALE.
Le sujet initial : la délinquance dans les Vosges
de l'Ouest durant le premier XIXème siècle, a pour but de saisir
la réalité de la délinquance dans le canton. La
problématique nous a conduit à nous questionner sur les
formes d'expression et de régulation de la délinquance dans le
canton de Coussey au XIXème siècle.
La première partie consacrée à la Justice
et la délinquance cherche à déterminer les moyens de
régulation des pratiques illicites. En avançant
l'hypothèse d'un maire relais, interlocuteur privilégié de
l'Etat, nous avons tenté de montrer son rôle central. Il est
notamment omniprésent pour déceler les infractions et soutenir
les habitants dans la nécessité. Sur place le chef du village est
épaulé par des professionnels. Leur action qui n'est pas toujours
aisée interpelle sur l'efficacité des moyens répressifs
mis en oeuvre localement. Les autorités ne peuvent réguler que la
délinquance quotidienne, les crimes et les délits les plus graves
nécessitent immanquablement l'intervention de la
maréchaussée.
La deuxième partie quant à elle se focalise sur
la délinquance et le délinquant. Elle amène à se
questionner sur la possibilité de définir un profil type de
criminel. En ce qui concerne les origines de la délinquance, plusieurs
pistes sont possibles. Dans cette optique, les facteurs politiques, la
conjoncture militaire ou même les crises frumentaires sont autant de
causes possibles au phénomène. Ensuite, l'étude des
infractions au sens strict, mise en parallèle avec les délits
observés nous a permis déterminer le degré de
gravité des méfaits à Coussey.
Au sein du village enfin, on observe une construction
sociale pyramidale. En mettant en parallèle, l'organisation villageoise
et la violence nous cherchions à déterminer si celle-ci est
présente à tous les niveaux. Le jeu d'échelle est un outil
utile lorsqu'il s'agit d'illustrer les comportements illicites au sein de la
commune. Nous avons en effet tenté de déterminer si
l'éloignement au village favorisait certaines déviances.
La Justice du XIXème siècle, apparaît
dans le canton, comme un efficace outil de régulation de la
délinquance. Qu'elle soit traditionnelle, ou qu'il s'agisse
d'infrajustice, un différent ou un délit trouve toujours un
verdict approprié. Cependant, le nombre incalculable de délits
réellement commis mais non constatés, nous amène à
nuancer cette affirmation. Quoiqu'il en soit, le maire est localement
l'interlocuteur privilégié de la Justice. Il apparaît sur
tous les fronts, tantôt juge officiel, tantôt juge officieux. Il
est souvent le point de départ d'une instruction en fournissant à
la Justice de nombreuses affaires. Ce sont ces ramifications au coeur des
villages qui permettent aux tribunaux de normaliser le nombre de délit
et de réguler efficacement les conflits. Les infractions, délits
majoritaires, sont jugées par le maire lui-même dans son tribunal
de simple police. Cette Justice de proximité est particulièrement
adaptée à son milieu. Cependant, les connaissances judiciaires
limitées des maires, et les inimitiés entre prévenus et
juges peuvent nuire à l'impartialité des procès.
Les délits sont quand à eux examinés par
le juge de paix. Les procédures sont méticuleusement
menées conjointement avec le procureur. Une fois l'instruction
suffisamment étayée le délinquant est confronté au
verdict du tribunal.
L'âge, le milieu, et le sexe, sont, nous l'avons vu,
des facteurs influant considérablement sur la nature et le nombre de
délits commis. Les plus jeunes délinquants se manifestent
essentiellement par des atteintes aux propriétés, tandis que
leurs pères s'illustrent surtout par la violence contre les personnes.
Le milieu professionnel apparaît lui aussi déterminant. Les
agriculteurs et les ouvriers sont ainsi les plus violents. En analysant les
origines du méfait, il apparaît clairement que l'intensité
du délit est étroitement liée aux récoltes
agricoles, les autres facteurs apparaissant finalement comme secondaires.
Enfin, au sein du village, la famille constitue la base de
l'organisation sociale. Les coteries, de puissantes organisations de
propriétaires servent à protéger les intérêts
de leurs membres contre les petits délinquants. Le maire nous l'avons
vu, a la main mise sur son village, mais il lui est difficile de
prévenir tous les délits. En effet, la majorité des
actions répréhensibles s'effectuent au village bien que le
délit soit également présent dans l'arrière pays.
En s'éloignant du village, la pesanteur sociale s'estompe, ce dont
profite de nombreux villageois pour sortir de la légalité. Aux
marges, dans la forêt impénétrable ou aux alentours des
chemins, les délinquants souvent armés apparaissent hors de
contrôle, sans qu'on assiste cependant à une flambée de
délit dans ces zones reculées.
Les pratiques illégales semblent s'estomper dès
les années 1830, pour réapparaître épisodiquement
jusqu'à l'issue de la période traitée. Une étude
inscrite dans une durée plus longue permettrait de tirer davantage de
conclusions. Les troubles suscités par la révolution auraient
tout à fait leur place dans une recherche similaire sur une
période d'un siècle. De même, il est possible d'envisager
un cadre géographiquement plus large comprenant des cantons limitrophes
et surtout la ville de Neufchâteau. Chef-lieu d'arrondissement, cette
ville à la population plus importante présente sans aucun doute
des spécificités différentes des villages
étudiés.
La baisse brutale du nombre d'affaires jugées en
correctionnelle reste difficile à expliquer. Est-elle la
conséquence d'une normalisation précoce des comportements ?
Les affaires sont-elles jugées par d'autres instances ? Les maires
font-ils preuves d'une autorité accrue ? De nombreuses
interrogations à ce sujet restent en suspend. De même, la
disparité observée au sein même du canton laisse dubitatif.
Comment ainsi expliquer que la violence soit essentiellement verbale à
l'ouest et physique à l'est ? Pourquoi les délits
liés à la paysannerie sont-ils essentiellement
représentés à l'ouest, alors que l'agriculture est
présente dans tous le canton ?
Cet objet de recherche nous amène à envisager
des questions connexes qui mériteraient d'être approfondies.
Ainsi, le rapport à l'alcoolisme nécessiterait d'être
traité car il apparaît comme un catalyseur de la violence. Si le
dimanche est un des jours les plus délictueux la fréquentation
assidue des cabarets n'y est certainement pas étrangère. De
même, une étude spécifique de la sociabilité
villageoise, permettrait de saisir les caractères propres de la
population du canton. Enfin, une étude systématique des
solidarités au sein des villages de tout le canton permettrait
d'avancer des conclusions à l'échelle de tout le canton.
Cette étude contribue à donner localement un
aperçu d'un phénomène constitutif de toute
société. A notre sens, la délinquance possède des
caractéristiques générales et des
spécificités propres selon les milieux. Ainsi, le vol, la
violence ou même les atteintes à la propriété, ainsi
que la propension à sortir des normes font partie intégrante de
toute société. Ce qui différencie finalement le plus la
criminalité selon les localités, c'est la minorité typique
de délit qui y sera commis. A Coussey cette spécificité se
distingue par la légèreté des infractions, leur
caractère rural, et leur précoce diminution.
LEXIQUE.
Lexique technique.
- Assassinat : meurtre commis avec
préméditation ou guet-apens.
- Brigandage : rançonnage des voyageurs sous la
contrainte d'une arme le plus souvent.
- Civile (Justice) : régule les rapports entre
individus.
- Contravention (syn. Infraction) : infraction que les
lois punissent des peines de police.
- Condamné : personne jugée coupable, et
à qui est imposée une sanction.
- Coupable : individu reconnu comme l'auteur d'une
infraction par les tribunaux pénaux.
- Crime : infraction que les lois punissent d'une peine
afflictive ou infamante.
- Coterie : forme de sociabilité villageoise supra
familiale. Petit groupe de personnes qui se soutiennent pour faire
prévaloir leurs intérêts.
- Délit : infraction que les lois punissent de
peines correctionnelles.
- Discours/cris séditieux : propos et chansons
considérés comme une forme d'opposition illicite par
l'autorité.
- Infrajustice : forme non officielle de règlement
des conflits.
- Infraction : peut qualifier toute action
illicite quelle qu'en soit la gravité ; contravention,
délit, ou crime.
- Justice de paix : justice cantonale de
proximité, juge au civil comme au pénal.
- Loi du 28 avril 1832 : Cette loi étend à
tous les crimes les circonstances atténuantes, dans le but de
réduire les acquittements qui étaient dispensés trop
facilement par les jurés de peur de condamner trop lourdement le
prévenu.
- Meurtre : homicide commis volontairement.
- Ministère public : est chargé de veiller
au respect de la loi et aux intérêts de la collectivité en
requérant l'application de la loi qui en est l'expression.
- Outrage : parole, geste, ou menace contre un
dépositaire de la force publique.
- Partie civile : personne qui s'estime
victime d'une infraction,
à propos de laquelle l'
action publique a
été déclenchée, et qui entend, obtenir une
indemnisation
de son
préjudice.
- Pénale (Justice) : juge les infractions. Elle
est exercée par les tribunaux de simple police, de police
correctionnelle et les Cours d'Assises.
- Procureur : Représentant du ministère
public chargé de la poursuite en justice, il est le supérieur du
juge de paix.
- Plaignant : qui dépose une plainte devant la
justice.
- Prévenu : Auteur supposé d'une
infraction, et qui doit à ce titre en répondre devant un tribunal
pénal.
- Procédure : règle et processus qui
permettent d'instruire un procès.
- Peine : punition infligée au condamné.
- Relaxe (renvoi des poursuites): s'applique
aux prévenus blanchis par la justice mais aussi aux prévenus
bénéficiant d'erreurs dans leur procédure.
- Récidive : au sens légal, elle est
l'action de commettre plus d'une infraction au cours des douze mois
précédant un jugement. Ce cas étant rarissime dans nos
archives, nous préférons lui préférons le sens de
rechute.
- Vaine pâture : pâturage illicite.
- Violence physiques : regroupement de plusieurs
délits ; agressions, rixes, viols, attentats à la pudeur,
meurtres, assassinats.
- Violence verbale : regroupement de plusieurs
délits ; outrages, insultes, diffamation, lettre anonymes,
menaces.
Vocabulaire.
- Affouage : droit de prendre du bois dans les
forêts appartenant aux communes ; la part de ce bois revenant
à chaque personne.
- Anticipation : débordement effectué par
un exploitant agricole, lors de la mise en valeur d'une terre en
empiétant sur celle du propriétaire voisin.
- Cure : Logement de fonction du curé.
- Décrottoir : Accessoire de charrue, pièce
mobile en fer.
- Trémois : céréale, poussant en
trois mois, semblable à l'orge ou à l'avoine.
- Javelle : gerbe.
- Religion : (surprendre la religion de quelqu'un) :
abuser quelqu'un par des subterfuges ou des sophismes.
- Héritage (pièce d') : parcelle de terre,
synonyme de sole.
- Placard : lettre anonyme.
- Tournière (faire) : action de faire
tourner la
charrue en fin de
sillon.
- Ka : bêche à deux dents.
TABLE DES ILLUSTRATIONS.
Figure 1, le canton de Coussey au sein du
département.
2
Figure 2, Le canton de Coussey et le village de
Grand.
2
Figure 3, table réalisée à
l'aide du logiciel Access.
12
Figure 4, total du nombre d'accusés par le
tribunal correctionnel de Coussey de 1808 à 1855.
22
Figure 5, Tableau présentant les
délits jugés par la cour d'Assise du département.
23
Figure 6, métiers des maires.
29
Figure 7, Peines prononcées dans le canton
de Coussey par son juge de paix.
63
Figure 8, Issue des jugements rendus dans le canton
de Coussey par son juge de paix, avec détail de la durée ou du
montant.
63
Figure 9, durée des peines de prison
prononcées par le juge de paix du canton de Coussey.
64
Figure 10, Montant des amendes de la justice de
paix de Coussey.
67
Figure 11, peines prononcées par la cour
d'assise du département pour les ressortissants du canton de
Coussey.
76
Figure 12, nombre de délits classés
par catégories ayant bénéficiés de la relaxe.
79
Figure 13, Répartition des peines de prison
par catégorie pour les 4 décennies.
80
Figure 14, Répartition des amendes par
catégorie pour les 4 décennies en %.
83
Figure 15, Graphique présentant l'âge
des délinquants, hommes et femmes confondus.
90
Figure 16, Répartition socioprofessionnelle
des accusés dans le canton de Coussey de 1810 à 1860.
92
Figure 17, proportion de femmes
accusées.
95
Figure 18, Evolution mensuelle du délit au
cours de l'année.
101
Figure 19, La délinquance selon les jours de
la semaine.
103
Figure 20, les heures de la délinquance.
105
Figure 21, Midrevaux, vue générale,
au premier plan ; les champs, au second ; les vergers, au
troisième ; le village, en arrière-plan vignes et friches.
Photographie, 1900.
142
Figure 22, répartition géographique
des délits.
174
Figure 23, répartition géographique
des délits commis dans le village.
175
Figure 24, répartition géographique
de tous les délits commis.
178
CORPUS.
Nous sources proviennent essentiellement des fonds des
archives départementales des Vosges.
Archives Départementales des Vosges. (ADV).
- Série U : Justice.
Sous série 22u : Justice de paix et
correctionnelle de l'arrondissement de Neufchâteau.
Dossiers de procédure :
de 22u41 à 22u81. (1809-1856).
Procès verbaux de l'administration
générale des eaux et forêts :
De 22u321 à 22u332. (1808-1826).
Sous série 17u : Tribunal criminel d'Epinal.
Registres des jugements :
de 17u104 à 17u199. (1817-1846).
Dossiers de procédure :
17u38, 57, 78. (1817, 1820, 1824). (Série fortement
lacunaire).
Sous série 4u9 : Justice de paix du canton de
Coussey.
Rapports de simple police :
de 4u9/29 à 4u9/32. (1815-1837).
Bureau de conciliation du juge de paix :
4u9/50. (1815).
- Série M : Police.
Sous série 4M :
Rapports de quinzaine, rapports mensuels, feuilles de
tournées:
4M58 (1835-1843).
Surveillance des pauvres et des vagabonds :
4M137 (1823-1836).
Administration des forêts : procès verbaux
pour délits de chasse et de contravention sur le port d'arme :
4m170. (1841-1849).
- Série 4FI : Cartes et figurés.
Carte des Vosges :
2FI139 Carte des Vosges par Hogard.
2FI165 Département des Vosges.
Plans :
Eglise de Midrevaux : nouvelle : 2FI34, ancienne :
2FI35.
- 3P : Cadastres.
Cadastre de Grand :
de 3p5152/1 à 3p5152/3.
Matrices du cadastre de Grand :
3p2038 et 3p2039.
Archives Communales de Neufchâteau : (ACN).
Actes du maire de Neufchâteau :
De 1800 à 1810.
L'Abeille des Vosges : Journal d'annonces Judiciaires
et commerciales.
Années 1846, 1853, 1856.
Registres de Police : comptes-rendus sur les infractions
commises dans la ville et ses environs :
De1838 à 1858.
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- LEUILLIOT, P, « De la disette de 1816-1817 à
la famine du coton (1867) », Annales.
Économies, Sociétés, Civilisations, [En ligne]. 1957,
n° 2, p 317-325, consulté le 14/03/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1957_num_12_2_2641.
-PETITEAU, N, Voies nouvelles pour l'histoire de Premier
Empire, Territoires, Pouvoirs, Identités, Paris, la Boutique de
l'Histoire, 2003.
- PFISTER, C, « Fluctuations climatiques et prix
céréaliers en Europe du XVIe au XXe
siècle », Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations, [En ligne]. 1988, n° 1, p 29.
Consulté le 13/03/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1988_num_43_1_283474
TABLE DES MATIERES.
SOMMAIRE.
8
INTRODUCTION.
10
Choix du sujet.
12
Problématique.
13
Historiographie.
14
Corpus.
16
Méthode d'approche et outils d'analyse.
17
Plan de l'étude.
17
PREMIERE PARTIE :
19
LA JUSTICE ET LA REGULATION DE LA
DELINQUANCE.
19
A. Les tribunaux et les représentants de
l'état.
21
1. Une Justice tripartite, Justice civile, Justice
pénale et infrajustice.
21
a. La Justice civile et la normalisation des
rapports entre individus
21
b. La justice pénale et ses tribunaux.
24
· Le tribunal de simple police ;
des maires juges en leurs villages.
25
· Les cours d'assises et le crime.
28
c. L'infrajustice ou la régulation non
judiciaire du conflit.
29
2. Les représentants de l'état au
niveau communal, le maire, l'adjoint et l'appariteur.
32
a. Origine sociale et métiers des
représentants communaux.
32
b. Faire respecter la loi.
33
c. Une tâche difficile, des maires couramment
outragés.
35
d. Trois catégories d'outrages.
36
· Des outrages verbaux courants
:
36
· Les outrages par geste et/ou les
menaces menaces de mort :
37
· Les outrages par paroles et
agression :
38
e. Les abus de pouvoir des maires.
40
f. Les appariteurs, des relais de la commune.
41
3. Les agents professionnels de l'Etat et de ses
administrations.
42
a. La gendarmerie et le maintient de l'ordre
public
42
· Origines, et organisation de la
gendarmerie.
42
b. Les gardes.
47
· Le garde, un défenseur des
intérêts communaux.
48
· Des gardes adaptés à la
traque locale des petites infractions.
49
c. Les agents de la régie des droits
réunis et les huissiers.
50
· La régie des droits
réunis, une douane rurale peu appréciée.
50
· Les huissiers, des satellites de la
Justice.
51
B. L'accusé face à la justice, les
différentes phases de la procédure.
53
1. Découvrir les infractions.
53
a. Les correspondances des maires aux procureurs,
des points d'appuis à de nombreuses procédures
53
b. le rôle des représentants de
l'état dans la chasse aux infractions.
54
c. La plainte pour réparer les
injustices.
55
d. Clameurs publiques et dénonciations sont
des vecteurs importants de la découverte d'infractions en tous genres et
parfois anciennes.
56
2. Obtenir des éléments
complémentaires, enquêtes sur les lieux du crime.
57
a. Gendarmes et enquêtes sur le terrain.
57
b. Visite du juge et premières
impressions.
58
c. La visite du chirurgien : déterminer
l'ampleur des blessures, du simple constat d'ecchymoses au rôle de
médecin légiste.
59
3. Vers le dernier acte de la procédure.
60
a. Juges de paix et interrogatoires, la chasse aux
informations.
60
b. Audition des témoins, des
déclarations toujours plus contradictoires.
62
c. Le jugement, épilogue de l'affaire.
63
4. Justice manipulée, justice
parasitée.
64
a. Le faux témoignage pour fausser le
procès.
64
b. Procès abusifs et luttes judiciaires
65
C. Les peines, des sanctions de l'infraction.
67
1. Les peines des tribunaux correctionnels.
67
a. La prison, la peine la plus utilisée.
69
b. Les amendes, des punitions légères
en numéraire.
72
c. Une peine supplémentaire, la surveillance
de la police.
75
d. Peines les moins fréquentes.
76
2. Des peines les plus légères aux
plus lourdes.
79
a. Amendes légères et tribunaux de
simple police.
79
b. Les peines de l'administration des
forêts.
79
c. Les lourdes peines d'assises.
80
3. Des peines modulées à la
relaxe.
82
a. Des circonstances atténuantes toujours
aussi courantes.
82
b. Des taux de relaxe variables selon les
délits.
83
a. Evolution des peines de prison.
85
b. Evolution des amendes.
87
Conclusion de la première partie.
89
DEUXIEME PARTIE :
90
LES MULTIPLES VISAGES DE L'ILLEGALITE ;
PROFIL DES DELINQUANTS, CADRE SPATIO-TEMPOREL ET GRADATION DU DELIT.
90
A. Identité du délinquant, âge,
profil social et sexe.
92
1. La délinquance n'a pas d'âge.
92
a. Les mineurs, des délits limités et
bien ciblés.
92
b. Les jeunes de 18 à 25 ans et le
phénomène de groupe.
93
c. Des atteintes à la personne majoritaires
chez les moins de cinquante ans.
94
d. Des aînés plus calmes.
94
e. L'âge des délinquants.
95
2. Le profil social du délinquant.
97
a. Répartition socioprofessionnelle des
accusés.
98
b. Les catégories socioprofessionnelles et
le délit.
99
3. Les femmes commettent peu de délits.
100
a. Recul de la délinquance
féminine.
101
b. La délinquance féminine, entre
violence et délits contre les biens.
103
c. Rôle actif et rôle passif des femmes
dans l'infraction.
104
B. Le cadre spatio-temporel de l'infraction.
105
1. Les temps du délit.
105
a. Evolution annuelle de la délinquance.
105
b. Evolution hebdomadaire du délit.
107
c. Evolution des délits selon les heures de
la journée.
109
2. Géographie de la délinquance, des
diversités entre villages.
111
a. Villages et criminalité, des taux de
délinquance variables.
111
b. La délinquance concentrée dans la
partie ouest du canton.
113
c. Les villages de l'Est, moins délictueux
mais plus violents.
115
3. La part de la conjoncture dans la
délinquance.
117
a. La disette engendre la délinquance.
117
b. Impact des évènements militaires,
politiques, sur la délinquance.
121
c. Entre crise économique et perte de
repères.
123
C. De la simple infraction au meurtre en passant
par la récidive, une gradation de la délinquance.
125
1. Les contraventions, punitions
légères d'infractions légères.
125
a. Les contraventions de première classe
punies jusqu'à cinq francs.
126
b. Les contraventions de deuxième classe
punies de six à dix francs.
127
2. Les délits
130
a. les violences non aggravées restent des
délits
130
b. Les délits contre l'ordre social.
132
c. Les délits de cupidité et de
malice
133
3. le cas particulier de la récidive.
134
a. La rechute et la récidive.
134
b. La récidive dans le canton.
135
c. Une figure de la délinquance à
répétition, Jean Baptiste Biez de Grand.
137
4. Au sommet de l'infraction, le crime.
139
a. Les crimes contre les personnes.
140
b. Le vol, une infraction à la
gravité évolutive.
141
c. L'homicide, le crime le plus grave.
142
Conclusion de la deuxième partie.
144
TROISIEME PARTIE :
145
VIOLENCE ET DELITS DE VILLAGE ; UN RAPPORT
ETROIT A L'ORGANISATION SOCIALE ET GEOGRAPHIQUE DE LA COMMUNE.
145
A. Le village, individus, famille, clans.
147
1. Relations intrafamiliales.
148
a. L'Habitat de l'Ouest Vosgien.
148
b. Des violences conjugales difficiles à
quantifier.
149
c. Relations au sein de la famille.
151
2. Relations de proximité, le rapport aux
voisins.
153
a. Relations entre voisins.
153
b. Relations cordiales.
154
c. Mauvaises entente entre riverains.
156
3. Les réseaux d'alliance.
158
a. Les limites de l'exercice.
159
b. Les réseaux de solidarités.
160
c. Composition, origine et rôle des
solidarités.
161
d. Variables et évolutions au sein des
coteries.
163
e. Grojean et l'affaire de 1840.
164
B. La violence au village, des mots aux poings.
168
1. Violence verbale.
168
a. Les lettres anonymes et leurs menaces.
168
b. Les insultes.
171
c. Mises en gardes et menaces.
174
2. Rituels de l'affrontement et violences
physiques.
175
a. L'empoignade.
175
b. Les accessoires de la violence.
176
c. Des blessures le plus souvent
légères.
177
d. parties du corps visées.
178
C. Aux marges et à l'extérieur de la
commune.
180
1. Les délits commis au village.
180
a. Les lieux d'expression privilégiés
du délit au sein de la paroisse.
180
b. Délits typiques de villages.
182
2. La périphérie du village
184
a. La périphérie du village, des
champs éloignés où l'autorité du maire est
déjà moins palpable.
184
b. Aux marges du finage, des délits ruraux
et forestiers difficiles à constater.
187
c. Aux limites des communes, routes et chemins sont
les terrains de jeu des brigands.
189
3. Le village et l'extérieur.
191
a. Des « étrangers » mal
tolérés par la communauté villageoise.
191
b. Marchands ambulants et colporteurs.
193
c. Le sentiment d'impunité du
délinquant en dehors de son « pays ».
194
d. Les relations avec les villages voisins.
195
Conclusion de la troisième partie.
197
CONCLUSION GENERALE.
199
LEXIQUE.
202
Lexique technique.
202
Vocabulaire.
204
TABLE DES ILLUSTRATIONS.
205
CORPUS.
206
Livres anciens.
208
Délinquance, Justice dans les Vosges.
209
Délinquance monographies.
209
Délinquance, études
générales.
210
Méthodologie, Historiographie.
211
Justice.
211
Police.
212
Société Paysannerie.
212
Ouvrages traitant de la Lorraine ou des
Vosges.
213
Géographie, Sociologie, Histoire
générale.
214
TABLE DES MATIERES.
216
* 1 PLOUX, F, Guerres
paysannes en Quercy, Violences, conciliations et répressions
pénale dans les campagnes du Lot (1810-1860), La Boutique de
L'Histoire, 2002, p 14.
* 2 GARNOT, B, Débat sous
la présidence de Claude Gauvard, in GARNOT, B (dir.), La
délinquance du Moyen Age à l'époque contemporaine, Dijon,
EUD, 1998, p 155.
* 3 Compte Général
de L'Administration de la justice criminelle en France pendant l'année
1880 et rapport relatif aux années 1826 à 1880, Genève,
Slatkine Reprints, 1989.
* 4 PLOUX, F, op. cit.,
p 13.
* 5 FOUCAULT,
M, Surveiller et punir, naissance de la prison, Paris, Gallimard,
1975.
* 6 SANTUCCI, M-R,
Délinquance et répression au XIX siècle, Paris,
Economica, 1986.
* 7 GIOVANNI, L, Le pouvoir
au village, Histoire d'un exorciste dans le Piémont au XVIIème
siècle, Paris, Gallimard, 1989.
* 8 THOMAS, Y,
« La délinquance dans l'arrondissement de Nancy à
la fin du XIX° siècle », mémoire de Maîtrise
sous la direction de Denis Brunn, Nancy2 ,2004.
* 9 PLOUX, F, op. cit.,
p 14.
* 10 Ministère de la
Justice, « La justice en France », [En ligne].
Consulté le 24/04/2009. URL :
www.justice.gouv.fr/art_pix/plaquette_justiceenfrance_fr.pdf.
* 11 JOUBERT, J,
Pensées, Essais, Maximes et Correspondances, Paris, Le Normand,
1850, p 50.
* 12 DELARRE, S,
« L'analyse des infractions multiples », Pénal
Field, nouvelle revue Française de criminologie, [En ligne].
Consulté le 17/02/2009. URL :
http://champpenal.revues.org/document6443.html.
* 13 Le terme d'infrajustice
n'existe dans aucun dictionnaire, mais sont emploi est répandu
auprès des historiens spécialistes du droit et de la Justice.
* 14 ROYER J-P, Histoire
de la Justice en France, 3° édition refondue, Vendôme,
P.U.F, 2001, p 285.
* 15 CARRE, M, A, Nos
petits procès, notes sur le droit familier, Paris,
bibliothèque du magasin des demoiselles, 1894, p 4-6.
* 16 CARRE, M, A, op.
cit., p 8.
* 17 CHAUVAUD, F, PETIT, J-G,
YVOREL, J-J, Histoire de la Justice de la Révolution à nos
jours, Bonchamp-lès-Laval, Presses Universitaires de Rennes, 2001,
p 189.
* 18 Archives Nationales,
« Les justices de paix (1790-1958) aux Archives
nationales », [En ligne]. Consulté le
23/02/2009. URL :
http://www.archivesnationales.culture.gouv.fr/chan/chan/pdf/caran/16_justices_de_paix.pdf.
* 19 CARRE M, A, op.
cit., p 54.
* 20 AD Vosges, 22u61,
Punerot, 1820.
* 21 CARRE M, A, op.
cit., p 55.
* 22 ROYER J-P, op. cit.,
p 455.
* 23 AD Vosges, 22u45,
Neufchâteau, 1812, (orthographe respectée).
* 24 AD Vosges, 22u45,
Neufchâteau, 1812.
* 25 Ministère de la
justice, « La justice en France, la Justice », [En ligne].
Consulté le 03/02/2009. URL :
http://www.ado.justice.gouv.fr/php/page.php?ref=2d3.
* 26 Que sais-je, Histoire
de la Justice, Vendôme, P.U.F, 1960, p 53-54.
* 27 CARRE, G-L-M, Le
droit français dans ses rapports avec la juridiction des justices de
paix, T. 4, Paris, Delamotte, 1833, p 456.
* 28 AD Vosges, 4u9/29,
Seraumont, 1814.
* 29 AD Vosges, 4u9/29,
Coussey, 1816.
* 30 AD Vosges, 4u9/29,
Midrevaux, 1814.
* 31 Ibid.
* 32 CARRE, M, A, op.
cit., p 59.
* 33 ROYER, J-P, op.
cit, p 300.
* 34 PLOUX, F, op, cit., p 14.
* 35 Compte
Général, op. cit., p LVI.
* 36 CARRE, M, A, op.
cit., p 59.
* 37 AD Vosges, 17u38, Grand,
1817.
* 38 GARNOT, B, BASTIEN, P,
PIANT, H, WENZEL, E, La justice et l'histoire: sources judiciaires à
l'époque moderne : XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles, Lieu,
Edition Bréal, 2006, p 247.
* 39 FARCY, J-C, Peut-on
mesurer l'infrajudiciaire ?, in Garnot, B, (dir.), L'infrajudiciaire
du Moyen Âge à l'époque contemporaine, Actes du Colloque de
Dijon 5-6 octobre 1995, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 1996, p
109-127.
* 40 BILLACOIS, F, Le duel
dans la société française des XVIe et XVIIe, in
Garnot, Benoît, (dir.), op. cit., p 132.
* 41 AD Vosges, 22u69, Grand,
1827.
* 42 AD Vosges, 22u74,
Autreville, 1829.
* 43 CARRE, M, A, op.
cit., p 5.
* 44 AD Vosges, 4u950,
Sauvigny 1814.
* 45 QUENIART, J, Petite
délinquance et petits délinquants, La délinquance
de voisinage, in Garnot, B, (dir.), op. cit., p 132.
* 46 (Cf : page 29).
* 47 AD Vosges, 22u44,
Lamarche, 1811.
* 48 AD Vosges, 22u47,
Midrevaux, 25 avril 1813.
* 49 HERBILLOT, H,
« Etude de la vie d'une Municipalité sous le Consulat et
L'Empire », « l'exemple de
Neufchâteau », mémoire de Maîtrise de
première année, Nancy2, 2008, 85 pages.
* 50 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 6 mai 1806.
* 51 Ibid.
* 52 Ibid.
* 53 Affouage : droit de
prendre du bois dans les forêts appartenant aux communes ; la part
de ce bois revenant à chaque personne.
* 54 AD Vosges, 22u47,
Midrevaux, 1837.
* 55 BERRIAT-SAINT-PRIX, C,
Manuel de police judiciaire et municipale, Paris, 3°
édition, 1856, p 3.
* 56 AD Vosges, 22u75, Sionne,
1830.
* 57 AD Vosges, 22u68, Fruze,
1825.
* 58 Ibid.
* 59 Outrage, Le Petit
Larousse, Larousse-Bordas, Belgique, 1997.
* 60 Code Pénal, op.
cit., article 222.
* 61 Céréale,
poussant en trois mois, semblable à l'orge ou à l'avoine.
* 62 AD Vosges, 22u45, Grand,
1822.
* 63 AD Vosges, 22u83, Grand,
1845.
* 64 MUCHEMBLED, R, La
violence au village, Sociabilité et comportements populaires en
Artois du XVème au XVIIème siècle, Brepols, 1998,
p 144-179.
* 65 MUCHEMBLED, R, op.
cit., p 253.
* 66 GOFFMAN, E, Les rites
d'interaction, Paris, Les Editions de Minuit, 1974, p 10.
* 67 GOFFMAN, E, op.
cit., p 13.
* 68 AD Vosges, 22u82,
Punerot, 1842.
* 69 Code Pénal, art,
228.
* 70 AD Vosges, 22u81,
Avranville, 1839.
* 71 AD Vosges, 22u45,
Tignécourt, 1810.
* 72 AD Vosges, 22u44,
Ainvelle, 1812.
* 73 AD Vosges, 22u78, Coussey,
1831. (Surprendre la religion de quelqu'un équivaut à abuser
quelqu'un par des subterfuges ou des sophismes).
* 74 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 28 frimaire an XIII.
* 75 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 13 Germinal an XIII.
* 76 Loi du 3 brumaire an IV,
article 16.
* 77 LUC, J-N, Gendarmerie,
Etat et Société au XIX° siècle, Clamecy,
Publications de la Sorbonne, 2002, p 40.
* 78 Wikipédia,
« Gendarmerie nationale », [En ligne]. Consulté le
20/02/2009. URL :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Gendarmerie_nationale_%28France%29.
* 79 AD Vosges, 22u52,
Neufchâteau, 1816.
* 80 AD Vosges, 22u42, Sionne,
1810.
* 81 AD Vosges, 22u42, Sionne,
1810.
* 82 Ibid.
* 83 PETITEAU, N, Voies
nouvelles pour l'histoire de Premier Empire, Territoires, Pouvoirs,
Identités, Paris, la Boutique de l'Histoire, 2003.
* 84 CARTEYRADE, C,
L'ordre au village la brigade de gendarmerie du canton de Tauves
(1815-1854), in LUC, J-N, (dir.), Gendarmerie, État et
société au XIXe siècle, Paris, Publications de la
Sorbonne, 2002, p 368.
* 85 Logement de fonction du
curé.
* 86 AD Vosges, 22u83, Sionne,
1844.
* 87 Code d'instruction
criminel, op. cit., article 16.
* 88 ORLENT, J-A, Manuel
des gardes-champêtres et gardes forestiers, Bruxelles, 1861, p
20.
* 89 ORLENT, J-A, op.
cit., p 21.
* 90 BERRIAT-SAINT-PRIX, C,
op. cit., p 56.
* 91 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 1811.
* 92 AD Vosges, 22u42, Punerot,
1810.
* 93 AD Vosges, 22u47,
Liffol-le-Grand, 1812.
* 94 FOURNIER, P, F, La
nomination d'un directeur départemental des droits réunis en
1813, Bibliothèque de l'Ecole des Chartres, 1962, numéro
120, p 186.
* 95 AD Vosges, 22u52, Grand,
1816.
* 96 CNH, Chambre Nationale des
Huissier de Justice, « Profession, Huissier de Justice »,
[En ligne]. Consulté le 25/02/2009. URL :
http://www.huissier-justice.fr/MsgByReg.aspx?id=148.
* 97 AD Vosges, 22u56,
Liffol-le-Grand, 1832.
* 98 AD Vosges, 22u54,
Liffol-le-Grand, 1816.
* 99 Ibid.
* 100 AD Vosges, 22u66,
Avranville, 1821.
* 101 AD Vosges, 22u76,
Coussey, 1830.
* 102 AD Vosges, 22u64, Grand,
1823.
* 103 AD Vosges, 22u48, Grand,
1813.
* 104 AD Vosges, 22u42, Aouze,
1818.
* 105 AD Vosges, 22u51,
Midrevaux, 1816.
* 106 AD Vosges, 22u43,
Outrancourt, 1813.
* 107 Ibid.
* 108 AD Vosges, 22u63,
Frébécourt, 1821.
* 109 Code Pénal,
op. cit., article 309.
* 110 AD Vosges, 22u41,
Lamarche, 1811.
* 111 SANTUCCI, M-R,
Délinquance et répression au XIX siècle, Paris,
Economica, 1986, p 65.
* 112 AD Vosges, 22u44,
Midrevaux, 1816.
* 113 Ibid.
* 114 Ibid.
* 115 AD Vosges, 22u71,
Coussey, 1830.
* 116 Ibid.
* 117 AD Vosges, 22u60,
Seraumont, 1830.
* 118 AD Vosges, 22u77,
Coussey, 1830.
* 119 AD Vosges, 22u60,
Midrevaux, 1819.
* 120 AD Vosges, 22u77,
Punerot, 1830.
* 121 AD Vosges, 22u46,
Neufchâteau, 1812.
* 122 AD Vosges, 22u45,
Sérécourt, 1812.
* 123 Travaux
forcés.
* 124 Emprisonnement
solitaire.
* 125 PETIT J-G, Ces
peines obscures, la prison pénale en France (1780-1875), Paris,
Fayard, 1990.
* 126 (Cf : page 63).
* 127 AD Vosges, 22u65,
Seraumont, 1822.
* 128 AD Vosges, 22u73, Grand,
1829.
* 129 Les formes de violences
physiques ici rencontrées, sont plutôt bénignes, et
comprennent les coups ne provoquant ni blessures ni effusion de sang, ou encore
les vols concernent des effets de peu de valeur.
* 130 AD Vosges, 22u54,
Midrevaux, 1817.
* 131 AD Vosges, 22u81, Grand,
1845.
* 132 AD Vosges, 22u83,
Punerot, 1847.
* 133 Compte
Général, op. cit., p XLIX.
* 134 SANTUCCI, M-R, op.
cit., p 79.
* 135 AD Vosges, 22u62,
Grand, 1820.
* 136 AD Vosges, 22u63,
Grand, 1821.
* 137 Appellation des
parcelles de terre.
* 138 SANTUCCI, M-R, op.
cit., p 369.
* 139 L'anticipation, est le
débordement effectué par un exploitant agricole, lors de la mise
en valeur d'une terre en empiétant sur celle du propriétaire
voisin.
* 140 Faire tournière,
est l'action de
faire
tourner la
charrue en fin de
sillon.
* 141 AD Vosges, 4u9/29,
Coussey, 1816.
* 142 AD Vosges, 4M170,
recueil des actes administrative n°18.
* 143 (Cf : Figure 11,
page suivante).
* 144 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XII. Nature des vols jugés par la Cour
d'Assises du département). p 196.
* 145 AD Vosges, 17U104,
Harmonville, 1818.
* 146 AD Vosges, 17U199,
Chermisey, 1846.
* 147 AD Vosges,
Neufchâteau, 17u111, 1830.
* 148 AD Vosges, 17u194,
Pargny-sous-Mureau, 1835.
* 149 AD Vosges, 17u108,
Clerey-la-Côte, 1824.
* 150 AD Vosges, 17u197,
Harmonville, 1842.
* 151 Cette loi étend
à tous les crimes les circonstances atténuantes, dans le but de
réduire les acquittements qui étaient dispensés trop
facilement par les jurés de peur de condamner trop lourdement le
prévenu.
* 152 Un ka est une
bêche à deux dents
* 153 Code Pénal, art.
401.
* 154 La relaxe s'applique
aux prévenus blanchis par la justice mais aussi aux prévenus
bénéficiant d'erreurs dans leur procédure. Dominique Cyril
Aubry à la ferme des bouchons, commune de Ruppes, suite à un
procès verbal dressé par François Lecomte garde
champêtre de la commune de Jubainville est renvoyé de ses
poursuites pour irrégularités, le délit ayant
été commis sur la commune de Ruppes, il aurait dû
être affirmé devant le maire de Ruppes et non devant celui de
Jubainville. (AD Vosges, 22u61, Ruppes, 1820).
* 155 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe I. Pourcentage de relaxe par type de
délit. p 189).
* 156 La partie civile, est
la personne qui s'estime
victime d'une infraction
à propos de laquelle l'
action publique a
été déclenchée, par le ministère public ou
le doyen des juges d'instruction, devant les juridictions répressives et
qui entend, à ce titre, obtenir une
indemnisation
de son
préjudice.
* 157 Le Ministère
public est chargé de veiller au respect de la loi et aux
intérêts de la collectivité en requérant
l'application de la loi qui en est l'expression.
* 158 Compte
Général, op. cit., p LXXI.
* 159 1810-20 ; 13
cas : 1820-30 ; 36 cas : 1830-40 ; 11 cas (50%) :
1840-1850 ; 14 cas (100 %).
* 160 Compte
Général, op. cit., p CVXXII.
* 161 SANTUCCI, M-R, op.
cit., p365.
* 162 op. cit., pp,
56.
* 163 AD Vosges, 22u72,
1828.
* 164 AC, Actes du maire,
Neufchâteau, 1808.
* 165 Ibid.
* 166 AD Vosges, 22u42,
Domrémy-la-Pucelle, 1811.
* 167 JOLY, H, op.
cit., p 181.
* 168 AD Vosges, 22u60,
Neufchâteau, 1819.
* 169 PLOUX, F, op.
cit., pp, 125.
* 170 JOLY, H, op.
cit., p 184.
* 171 AD Vosges, 22u83, Grand,
1843.
* 172 SANTUCCI, M, R, op.
cit., p 120.
* 173 PIANT H, Une justice
ordinaire, Justice civile et criminelle dans la prévôté
royale de Vaucouleurs sous l'Ancien Régime, Rennes, Presses
Universitaires de Rennes, 2006, p 188.
* 174 PAUQUET A, La
société et les relations sociales en Berry au milieu du XIXe
siècle, Clamecy, l'Harmattan, 1998, p 466.
* 175(Cf : Annexes
d'illustration, Annexe VII. Tableau des délits commis selon les
origines du délinquant).
* 176 JACQUET, A, La terre
la charrue les écus, La société villageoise de la plaine
thermale des Vosges de 1697 à 1789, Nancy, PUN, 1998, p 125.
* 177 Ibid
* 178 JOLY, H, op.
cit., p 390.
* 179 D'HAUSSONVILLE, Les
établissements pénitentiaires en France et aux colonies,
Paris, Lévy frères, 1875, p 125.
* 180 (Cf : Figure 17,
proportion des femmes accusées, page suivante).
* 181 (Cf : page 95).
* 182 ADV, 22u41, 1820,
Houécourt.
* 183 L'Abeille des Vosges,
01/03/1846.
* 184 AD Vosges, 22u48, La
Vacheresse-et-la-Rouillie, 1813.
* 185 AD Vosges, 22u48,
Chermisey, 1811.
* 186 BOUZAT, P, PINATEL,
J, Traité de droit pénal et de criminologie, Paris,
Dalloz tome, 1963, tome III, p 120-121.
* 187 (Cf : Figure 18,
Evolution du nombre de délit commis au cours de l'année).
* 188 LEPAGE, H et CHARTON,
CH, Le département des Vosges, Statistique historique et
administrative, Aurillac, Berger-Levrault, 1845, p 329
* 189 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe II. La délinquance selon les saisons, p
189).
* 190 VERON Aurore, Entre
Vosges et Jura, violence, criminalité et justice dans la France de l'est
au XVII° siècle, La violence dans le ressort du Baillage et
siège présidial de salins au XVIII siècle,
Publications de la société savante d'Alsace, 2004, p 152.
* 191 (Cf : Figure 19, La
délinquance selon les jours de la semaine, page suivante).
* 192 ADV, 22u47, 1823
* 193 (Cf : Figure 20,
les heures de la délinquance, page suivante).
* 194 ADV 22u83, 1844.
* 195 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe X. Nombres d'accusés par village, et
ratio accusés/nombre d'habitant. (En rouge villages de la partie Ouest
du canton). p 194).
* 196
(Cf : Annexes d'illustration, Annexe IX. Nombre d'accusés
par villages, p 194).
* 197 (Cf : Annexes des
illustrations, Annexe IV. Carte des villages de l'Ouest du canton.
(logiciel carto explorer 3d).
* 198 ADV, 22U64, Coussey,
1822.
* 199 ADV, 22U63, Grand,
1821.
* 200 (Cf : Annexe des
illustrations, Annexe III. Carte des villages de l'Est du canton.
(logiciel carto explorer 3d).
* 201 ADV, 22U61, Punerot,
1820.
* 202 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe VIII. Evolution du nombre de condamnés
en correctionnelle, selon la conjoncture, p 192).
* 203 CHARTON, M, LEPAGE, H,
op. cit., p 130.
*
204 Nicolas Cordier de Grand est jugé en
par la Cour d'Assise d'Epinal, pour un assassinat commis en 1817. Le meurtrier,
surpris alors qu'il volait de la nourriture, porte un coup mortel à la
fille de la maison. Le délinquant voyant la porte ouverte, rentre pour
chercher du pain, n'en trouvant pas il y prend un peu de beurre, de lait et de
fromage, quand il se fait surprendre par la fille de Mangin. Celle-ci s'indigne
de sa présence en lui disant « -je le dirai à mon papa
que tu bois comme cela notre lait et que tu cherches dans nos
armoires ». Ce à quoi l'assassin répond
« -j'ai trop faim et je n'ai trouvé personne dans les maisons
pour y avoir du pain ». Il déclare dans son interrogatoire
avoir en outre dérobé quatre francs en pièces de cuivre
qu'il a mis dans un petit sac lié aux deux bouts et qu'il est
allé cacher « dans un trou d'un mur de l'écurie de son
père pour avoir du pain ».
* 205 PFISTER, C,
« Fluctuations climatiques et prix céréaliers en Europe
du XVIe au XXe siècle », Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations, [En ligne]. 1988, n° 1, p 29.
Consulté le 13/03/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1988_num_43_1_283474
* 206 AD Vosges, 4M32,
Coussey, 1813.
* 207 Ibid.
* 208 AD Vosges 22u44,
Rouceux, 1811.
* 209 LEUILLIOT, P,
« De la disette de 1816-1817 à la famine du coton
(1867) », Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations, [En ligne]. 1957, n° 2, p
317-325, consulté le 14/03/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1957_num_12_2_2641
* 210 AD Vosges, 22u41,
Houécourt, 1809.
* 211 Ibid.
* 212 Ibid.
* 213 Ibid.
* 214 HERBILLOT, H, op.
cit., p52.
* 215 AD Vosges, 22u52,
Longchamps, 1816.
* 216 AD Vosges, 17u53,
Mirecourt, 1820. (Cf : Annexe IV, chanson composée par Jeanne
Andrée de Mirecourt, en l'honneur de la mort du Duc de Berry). pp
190).
* 217 (Cf : Figure 22,
Moyenne des grands types de délit par crise, page 116).
* 218 Editions Elipses,
« La Seconde République » [En ligne].
Consulté le 26/03/2009. URL:
http://209.85.229.132/search?q=cache:MSaKy05gGhMJ:editions-ellipses.fr/PDF/4079_Extrait.pdf+crise+1846&cd=8&hl=fr&ct=clnk&gl=fr&client=firefox-a.
* 219 JUILLIARD, E,
« Études rurales : des économistes aux
géographes », Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations, [En ligne ]. 1959, n° 4, p
766. Consulté le 26/25/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1959_num_14_4_2880
* 220 Musée d'Orsay,
« le monde rural vu par les artistes 1848-1914 », [En
ligne]. Consulté le 21/02/2009. URL:
http://www.google.fr/search?hl=fr&client=firefox-a&rls=org.mozilla%3Afr%3Aofficial&hs=FhU&q=exode+rural+crise+1848&btnG=Rechercher&meta.
* 221 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XI. Classement récapitulatif des
infractions d'après les condamnations recensées pour chaque type
de délit). p195).
* 222 (Cf : Annexes
d'information, Annexe I. Article 471 du code pénal, relatif aux
infractions de premières classes. pp 188).
* 223 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 4 avril 1807.
* 224 Ibid.
* 225 Ibid.
* 226 Ibid..
* 227 (Cf : Annexes
d'information, Annexe II. Article 475 du Code Pénal, relatif
aux infractions de deuxième classe. pp 188).
* 228 AD Vosges, 22u60,
Bréchainville, 1818.
* 229 (Cf : Annexes
d'information, Annexe III. Article 479 du Code Pénal relatif
aux infractions de troisième classe. p 189).
* 230 AD Vosges, 22u43,
Rouceux, 1811.
* 231 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 3 Nivôse an X.
* 232 AC Neufchâteau,
Actes du maire, 3 Nivôse an X.
* 233 Code pénal, art,
480.
* 234 AD Vosges, 22u42,
Lamarche, 1810.
* 235 MUCHEMBLED R, op.
cit., p 161.
* 236 Code Pénal, art
1.
* 237 Ibid.
* 238 Code pénal, art,
431.
* 239 Code pénal, art,
433.
* 240 Code Pénal, art,
330.
* 241 AD Vosges, 22u81,
Midrevaux, 1845,
* 242 Code pénal,
op, cit., art, 269.
* 243 AD Vosges, 22u65,
Brancourt, 1837.
* 244 Code Pénal, art,
436
* 245 JACQUET, A, op,
cit., p 9.
* 246 AC Neufchâteau,
L'Abeille des Vosges, n° 475-529, 1846.
* 247 Compte
Général, op, cit., p LXXI.
* 248 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe V. Tableau présentant quelques
récidivistes, et leurs délits).
* 249 JOLY, H, op.
cit., p 36.
* 250 Ibid.
* 251 (Cf : Annexes d'illustration, Annexe VI.
Tableau présentant la récidive en matière de
chasse).
* 252 AD Vosges, 22u74,
Autreville, 1829.
* 253 AD Vosges, 22u46, Grand,
1811
* 254 AD Vosges, 22u71,
Grand, 1828.
* 255 Code Pénal, art.
1er.
* 256 Code Pénal, art.
7.
* 257 Code Pénal, art.
232.
* 258 Code Pénal, art.
331.
* 259 Code Pénal, art.
411.
* 260 Code Pénal,
art. 413.
Code Pénal, article 393 : « Est
qualifié effraction tout forcement, rupture,
dégradation, démolition, enlèvement de murs, toits,
planchers, portes, fenêtres, serrures, cadenas, ou autres ustensiles ou
instruments servant à fermer ou à empêcher le passage, et
de toute espèce de clôture, quelle qu'elle soit ».
Code Pénal, article 397 : « Est
qualifié escalade, toute entrée dans les maisons,
bâtiments, cours, basses-cours, édifices quelconques, jardins,
parcs et enclos, exécutée par-dessus les murs, portes, toitures
ou toute autre clôture ». L'entrée par une ouverture
souterraine, autre que celle qui a été établie pour servir
d'entrée, est une circonstance de même gravité que
l'escalade.
Code Pénal, article 398 : « Sont
qualifiés fausses clés, tous crochets,
rossignols, passe-partout, clés imitées, contrefaites,
altérées, ou qui n'ont pas été destinées par
le propriétaire, locataire, aubergiste ou logeur, aux serrures, cadenas,
ou aux fermetures quelconques auxquelles le coupable les aura
employées ».
* 261 Code Pénal,
art. 388.
* 262 Code Pénal, art.
385
* 263 AD Vosges, 17u108,
Clerey-la-Côte, 1824.
* 264 Code Pénal, art.
296
* 265 AD Vosges, 17u77,
Happoncourt, 1824.
* 266 Code Pénal, art.
304.
* 267 Code Pénal,
art. 302.
Code Pénal, art. 299, est qualifié
parricide le meurtre des pères ou mères légitimes,
naturels ou adoptifs, ou de tout autre ascendant légitime.
Code Pénal, art. 300, est qualifié
infanticide le meurtre d'un enfant nouveau-né.
Code Pénal, art. 301, est qualifié
empoisonnement tout attentat à la vie d'une personne, par l'effet de
substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement, de quelque
manière que ces substances aient été employées ou
administrées, et quelles qu'en aient été les suites.
* 268 Ustensile inconnu.
* 269 AC Neufchâteau,
L'Abeille des Vosges, n° 478, 25 janvier 1846.
* 270 Le Petit Larousse,
op. cit., coterie n. f. (anc. fr. cotier, association de
paysans). Péjor. Petit groupe de personnes qui se soutiennent
pour faire prévaloir leurs intérêts.
* 271 DEMANGEON, A,
« L'habitation rurale en France », Annales de
Géographie, 1920, n°161, p 365.
* 272 JACQUET, A, op.
cit., p 8.
* 273 AD Vosges, 22u75, Grand,
1833.
* 274 AD Vosges, 22u42,
Punerot, 1810.
* 275 Ibid.
* 276 Ibid.
* 277 AD Vosges,
22u43, Outrancourt, 1803.
* 278 Ibid.
* 279 LERIDON,
H, « Les violences envers les femmes : une enquête
nationale », Population, [En ligne]. 2003, n° 4, p
645-649. Consulté le 03/04/2009. URL :
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/informations/presse/2003/violencefemmes.shtml.
* 280 DEROUET, B,
« Pratiques successorales et rapport à la terre : les
sociétés paysannes d'Ancien
Régime », Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations, [En ligne]. 1989, n° 1, p 178.
Consulté le 22/03/2009. URL:
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1989_num_44_1_283584.
* 281 Ibid.
* 282 AD Vosges, 22u43,
Mont-près-Isches, 1811.
* 283 AD Vosges, 22u81,
Avranville, 1839.
* 284 Ibid.
* 285 AD Vosges, 22u65, Grand,
1823.
* 286 AD Vosges, 22u70,
Coussey, 1825.
* 287 MERCIER, C
« Ethnographie des archives officielles de l'État civil :
une société en filigrane », Ateliers, 32,
L'ethnologue aux prises avec les archives, 2008, [En ligne].
Consulté le 26/23/2009.URL :
http://ateliers.revues.org/document2832.html.
* 288 BONNAIN,
R, Une économie de la sociabilité : entraide,
échange et relations de voisinage dans un village
Pyrénéen, in GOY, J, (dir.), Les Baronnies des
Pyrénées, Paris, EHESS, 1981, p 169.
* 289 Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XVII. Carte des plaignants et des
accusés de Grand selon leur emplacement au sein du village). p 202.
* 290 PLOUX, F, op,
cit., p 61.
* 291 AD Vosges, 22u42,
Punerot, 1810.
* 292 AD Vosges, 22u43,
Liffol-le-Grand
* 293 AD Vosges, 22u44,
Neufchâteau, 1810.
* 294 PLOUX, F, op,
cit., p 65.
* 295 AD Vosges, 22u44,
Neufchâteau, 1811.
* 296 PLOUX, F, op,
cit., p 66.
* 297 Ibid.
* 298 AD Vosges, 22u43,
Martigny-les-Lamarche, 1810.
* 299 Ibid.
* 300 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XVII. Carte des plaignants et des
accusés de Grand, selon leur emplacement au sein du village. p197).
* 301 AD Vosges, 22u52, Grand,
1817.
* 302 AD Vosges, 22u64, Grand,
1822.
* 303 Ibid.
* 304 AD Vosges, 22u52, Grand,
1817.
* 305 AD Vosges, 22u64, Grand,
1822 et 22u72, 1828.
* 306 LEPAGE, H, CHARTON, Ch,
op. cit., p 1008.
* 307 AD Vosges , 22u43,
Grand, 1810.
* 308 AD Vosges, 22u81, Grand,
1840.
* 309 AD Vosges, 22u69, Grand,
1826.
* 310 AD Vosges, 22u82, Grand,
1842.
* 311 (Cf : p 129).
* 312 PLOUX F, op., cit.
* 313 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XVI. Procès auxquels participent
François Grojean. p 200).
* 314 AD Vosges, 22u82,
* 315 Ibid.
* 316 Ibid.
* 317 Ibid.
* 318 Ibid.
* 319 Ibid.
* 320 Etienne Durand, la
femme de Dutrône, Christophe Morlot, Nicolas Tabouret, Jean
François Victor Cottenot, Anne Marie Ledone, Joséphine Saleur,
Joseph Georgin, Christophe Morlot et que Victor Léonard.
* 321 Amis proches :
Jean-Baptiste Pelletier, François Guerre, Alexandre Durand.
Membres du conseil municipal : Pierre Maugras
(conseiller municipal), Elophe Melcion (conseiller municipal), François
Laurencier.
Autres témoins : Emilie Michel (domestique du
maire), Alexandre Desprez, Alexandre Durand, Nicolas Marchal, Charles Henri
Minette, Louis Napoléon Gaillot (garde champêtre), Pierre Laurent,
Vincent Durand.
* 322 AD Vosges, 22u81,
Liffol-le Grand, 1841.
* 323 Ibid.
* 324 (Cf : Annexes
d'information, Annexe V. Lettre anonyme adressée
à L'adjoint Guyot de Lamarche. pp 190).
* 325 AD Vosges, 22u77,
1831, Coussey.
* 326 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XIII. Lettre anonyme envoyée au maire
Muel de Sionne. p 197).
(Cf : Annexes d'information, Annexe VI. Lettre
anonyme adressée au Maire Muel de Sionne en 1812. pp 190. (AD Vosges,
22u44, Sionne 1812).
* 327 Ibid.
* 328 Ibid.
* 329 Ibid.
* 330 MUCHEMBLED, R, op,
cit., p 419.
* 331 Ibid
* 332 DEBILLY, X, La
petite délinquance en milieu rural au XVIIIe siècle : l'exemple
D'Ampuis, in GARNOT, B, (dir.), La délinquance du Moyen
Âge à l'époque contemporaine, Dijon, EUD, 1998, p 155.
* 333 AD Vosges, 22u42,
Neufchâteau, 1810.
* 334 AD Vosges, 22u46,
Liffol-le-Grand, 1814.
* 335 AD Vosges, 22u46,
Rollainville, 1814.
* 336 AD Vosges, 22u44,
Neufchâteau, 1811.
* 337 Ibid.
* 338 AD Vosges, 22u42,
Neufchâteau, 1810.
* 339 AD Vosges, 22u46,
Liffol-le-Grand, 1814.
* 340 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XIV. Insultes les plus courantes et leur
signification. p 198).
* 341 AD Vosges, 22u69,
Harmonville, 1825.
* 342 AD Vosges, 22u47,
Pargny-sous-Mureau, 1814.
* 343 Ibid.
* 344 AD Vosges, 22u46,
Punerot, 1813.
* 345 AD Vosges, 22u64, Grand,
1822.
* 346 AD Vosges, 22u42,
Neufchâteau, 1810.
* 347 AD Vosges, 22u83, Grand,
1843.
* 348 VERON, A, op.
cit., p 88-89.
* 349 AD Vosges, 22u43,
Mont-près-Ische, 1811.
* 350 AD Vosges, 22u45,
Sérécourt, 1811.
* 351 Ibid.
* 352 AD Vosges, 22u46, Grand,
1811.
* 353 AD Vosges, 22u44,
Maxey-sur-Meuse, 1811.
* 354 AD Vosges, 22u44,
Rouceux, 1811.
* 355 AD Vosges, 22u45,
Domrémy-la-Pucelle, 1811.
* 356 AD Vosges, 22u42,
Pargny-sous-Mureaux, 1810.
* 357 ADV, 22u44, 1814,
Chermisey.
* 358 Accessoire de charrue,
pièce mobile en fer.
* 359 AD Vosges, 22u48, Grand,
1813.
* 360 AD Vosges, 22u43,
Rouceux, 1811.
* 361 AD Vosges, 22u43,
Neufchâteau, 1811.
* 362 MUCHEMBLED R, op.
cit., Brepols, p 173.
* 363 AD Vosges, 22u62,
Punerot, 1832.
* 364 VERON Aurore, op.
cit., p 98.
* 365 AD Vosges, 22u44,
Rouceux, 1811.
* 366 AD Vosges, 22u44,
Mont-les-Neufchâteau, 1811.
* 367 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XVIII. Photographie. Midrevaux, café
« Fleury », 1920. Au centre, joueurs de belotte, à
droite le garde champêtre. p 203).
* 368 BERNARD, H,
« Alcoolisme et antialcoolisme en France au XIXe siècle :
autour de Magnus Huss, Histoire, économie et
société, [En ligne].1984, n° 4, p 610. Consulté
le 02/04/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1984_num_3_4_1380.
* 369 AD Vosges, 22u52,
Autigny-la-Tour, 1816.
* 370 FARGE, A, et ZYSBERG, A,
« Les théâtres de la violence à Paris au XVIIIe
siècle », Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations, [En ligne]. 1979, n° 5, pp,
1000, consulté le 22/04/2009. URL :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1979_num_34_5_294104
* 371 AD Vosges, 22u43, Grand,
1810.
* 372 (Cf :
Annexes d'illustration, Annexe XIX. Photographie. Midrevaux, rue
Neuve. p 202).
* 373 AD Vosges, 22u43,
Rollainville, 1811.
* 374 AD Vosges, 22u65,
Coussey, 1823.
* 375 AD Vosges, 22u83,
Punerot, 1844.
* 376 AD Vosges, 22u44,
Greux, 1811.
* 377 AD Vosges, 22u81,
Midrevaux, 1839.
* 378 ADV, 22U44, Coussey,
1811
* 379 ADV, 22U64, Grand,
1824
* 380 AD Vosges, 22u44,
Coussey, 1810.
* 381 AD Vosges, Lamarche,
22u44, 1811.
* 382 AD Vosges, Sionne,
22u62, 1821
* 383 JACQUET, A, op. cit.,
p174.
* 384 RISTON M, Analyse
des coutumes sous le ressort du parlement de Lorraine, adaptées au droit
commun et aux loix particulières à cette province, Nancy,
Lamort, 1782, p.391.
* 385 GAVEAU, F,
Délinquance et de pâturages dans le nord de la Côte-d'Or
: l'accident, l'usage et le délit 1830-1850, p.361, in Garnot
Benoît (dir.), La délinquance du Moyen Âge à
l'époque contemporaine, Dijon , E.U.D., 1996.
* 386 ROTHIOT, P, ROTHIOT
J-P, Vie journalière et Révolution dans les Vosges, Vittel
Mirecourt et son bailliage 1788-1791, Charmes, Imprimerie du Capucin
s.a.r.l, 1990, p 185.
* 387 SANTUCCI, M, R op.
cit., p 168.
* 388 AD Vosges, 22u48.
* 389 AD Vosges, 22u75,
Grand, 1830.
* 390 AD Vosges, 22u48,
Morizecourt,
* 391 AD Vosges, 4M170,
Recueil des actes administratifs du département des Vosges.
* 392 AD Vosges, 22u69,
Bréchainville, 1828.
* 393 AD Vosges, 22u44,
Tollaincourt, 1811.
* 394 AD Vosges, 22u44,
Villotte, 1824.
* 395 AD Vosges, 22u45,
Coussey, 1812.
* 396 AD Vosges, 22u44,
1812.
* 397 AD Vosges, 22u66,
Punerot, 1824.
* 398 AD Vosges, 22u50,
Ruppes, 1812.
* 399 Ibid.
* 400 Ibid.
* 401 (Cf : Annexes
d'illustration, Annexe XX. Affiche publicitaire de Jean Baptiste
Bertrand, marchand ambulant, se disant médecin. 1842. (AD Vosges, 22u83,
Domrémy-la-Pucelle, 1831). pp 203.
* 402 AD Vosges, 22u83,
Domrémy-la-Pucelle, 1831.
* 403 Ibid.
* 404 Ibid.
* 405 AD Vosges, 22u1831,
Grand, 1831.
* 406 Ibid.
* 407 AD Vosges, 22u71,
Neufchâteau, 1827.
* 408 AD Vosges, 22u44,
Berthelévaux, 1811.
* 409 AD Vosges, 22u46, Grand,
1811.
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