F. De nouvelles problématiques en sciences
géomatiques
L'objet de cette section consiste à proposer une
synthèse des différents points abordés
précédemment, de manière à introduire la
problématique de recherche proposée. Le premier
élément à considérer est celui de la
convergence des différents facteurs qui
caractérise la genèse et le développement du nouveau
contexte de développement des technologies géospatiales 2.0.
L'importance accordée au spatial et à la géolocalisation
engendre de nouvelles logiques. Les nouvelles pratiques spatiales des citoyens
(GPS, géocaching, communautés de pratiques) sont désormais
liées à la notion de proximité. A cela s'ajoute
l'idée du local comme échelle de référence pour
l'information, la décision et la participation. De plus le
développement des approches participatives dans les politiques publiques
locales modifie les rapports entre élus, techniciens et citoyens. Le
tout se combine avec l'émergence du Web 2.0 et de son utilisation dans
de nouveaux processus liées aux politiques publiques.
Par ailleurs, la question des nouveaux usages et des
nouveaux contenus liés aux Géoweb 2.0 doit
également être prise en compte dans la formalisation de la
problématique. Pour faire simple, les internautes disposent de nouveaux
outils plus accessibles et conviviaux pour s'informer et cartographier le
(leur) monde. Au-delà de la simple création de cartes
personnelles, ces derniers deviennent potentiellement et à
différent niveau d'intensité, selon différentes
modalités, de nouveaux producteurs d'information géographique.
Dans ce contexte et comme précisé précédemment,
nous assistons à la genèse d'un nouveau processus de production,
de collecte et de diffusion de l'information géographique appuyé
sur de nouvelles techniques et de nouvelles logiques. Par ailleurs, les
contenus se diversifient et désormais photos, vidéos, flux RSS,
avis, POI, tracés, réseaux ou encore « individus »
deviennent des composantes à part entière de l'information
géographique.
Enfin, nous avons beaucoup parlé des concepts
d'interaction, de participation, de collaboration et de contribution volontaire
lesquels caractérisent les nouvelles formes d'intelligence
collective territoriale qui sont associées au Géoweb
2.0. D'où de nouveaux questionnements sur le devenir des
technologies géospatiales et plus largement de la géomatique en
termes d'utilisation, de perception, d'appropriation, d'adoption et de
diffusion.
Le projet de recherche proposé s'appuie sur cet
ensemble de questionnements. Il s'inscrit dans la continuité des travaux
réalisée depuis le début des années 1
99073 sur le rôle et l'utilisation des technologies
géospatiales dans les processus de prise de décision
73 CRAIG W. J., HARRIS T. M., WEINER D., 2002,
Community Participation and Geographic Information Systems, CRC Press,
383 p.
collectives74, sur les nouvelles logiques de
mutualisations75 de l'information géographique et sur les
PPGIS76. Le positionnement adopté ici suit une approche non
technique des technologies géospatiales (interactionnisme social), ces
dernières étant considérées comme des objets
d'étude, dans leurs interactions avec les usagers, les données et
les espaces. Les entrées choisies ici sont sociologiques, cognitives et
organisationnelles, tout en se focalisant sur l'utilisation des nouvelles
technologies et du nouveau contenu nés dans le contexte du
Géoweb2. 0.
Les axes de recherches développés dans ce
projet s'articulent autour de deux dimensions en interaction:
· De nouvelles pratiques, de nouveaux usages et de nouveaux
usagers des technologies géospatiales 2.0.
· De nouveaux processus de production d'information
géographique et de nouveaux contenus disponibles.
La question générale de recherche
:
Dans quelles mesures les nouvelles technologies
géospatiales, les contenus et les pratiques associés aux
Géoweb 2.0 offrent-elles de nouvelles perspectives de
géocollaboration au service des processus de gestion territoriale au
sein des collectivités locales?
Les questions secondaires de recherche :
La question générale de recherche se
décline en une série de questions secondaires, lesquelles
alimenteront la formalisation ultérieure d'un projet de thèse de
doctorat.
· Sur la place et le rôle potentiel des contributions
volontaires dans les processus de géocollaboration et de
participation.
Comment les usages de ces nouvelles technologies
peuvent-ils permettre aux acteurs du territoire non seulement de travailler
ensemble dans le cadre de processus géocollaboratifs, mais
également avec les citoyens dans des procédures participatives
?
74 LAURINI R., 2001, Information Systems for
Urban Planning, CRC Press, 368 p.
75 Les travaux de M. Noucher (EPFL, IETI).
76 Public Participation GIS, correspond aux SIG dit
« participatifs » qui incluent les citoyens dans les processus de
prise de décision. Les PPGIS datent du début des années
1990, ils sont basés sur de logiques se type bottom-up.
Les nouveaux outils, usages, usagers et contenus du
Géoweb 2.0 peuvent-ils permettent de dépasser les
pratiques individuelles des technologies géospatiales dans les
collectivités en créant des occasions pour les différents
acteurs du territoire de travailler et de décider ensemble ? Quels
usages et pratiques à moyens termes pour les technologies
géospatiales 2.0 ? Comment ces nouvelles techniques et pratiques peuvent
s'intégrer dans les pratiques des professionnels de l'aménagement
du territoire ? Quelle est leur place dans des procédures d'aide de
prise à la décision ? Comment la dimension 2.0 de participation,
de collaboration et de partage peut-elle contribuer à des initiatives
comme les Public Participation GIS ? Selon quelles modalités pratiques,
les contributions volontaires (user generated content) peuvent-elles devenir
des composantes des processus de gestion territoriale ?
· Sur la légitimité et la
fiabilité de ces nouveaux acteurs (et de leur production) de
l'information géographique.
Les données créées sont-elles de
qualité (valides, pertinentes, complètes, à jour, etc.) ?
À qui appartiennent-elles ? Quel est leur degré de
fiabilité ? Dans quelle mesure ces usagers contributeurs volontaires
sont-ils responsables des conséquences potentielles liées
à l'usage de « leurs » données ?
Comment s'opère (s'il s'opère) le recours au
geocrowdsourcing comme support à l'aide à la prise de
décision politique au niveau local ? Comment les collectivités se
positionnent-elles vis-à-vis de cette nouvelle information
géographique ? Comment mobilisent-elles le cas échéant ces
connaissances ? La démarche participative est-elle une étape
obligatoire pour le recueil de ces données ? De quelles manières
les technologies géospatiales qui à la base sont conçues
pour mobiliser des données factuelles, peuvent-elles intégrer des
connaissances locales formalisées selon d'autres modalités? Quels
sont les impacts de l'intégration de ces nouvelles données sur
les processus de décision collective ? Comment l'intégration de
ces « autres » données dans les SIG traditionnels
modifient-elles les capacités cognitives des décideurs dans les
processus d'aide de prise à la décision ?
Une démarche de recherche en deux
temps
|