2. Les principales limites du modèle Kirkpatrick
2.1 Critiques et remèdes énoncés
par Alliger et Janak
Alliger et Janak (1989) (cités par
Dunberry.A et Péchard.C, 2007) dénoncent le
caractère hiérarchique et causal du modèle Kirkpatrick.
D'une part, ils préconisent que la relation
causale entre les différents niveaux de cette taxonomie n'a pas
été démontrée par les recherches en la
matière et particulièrement la relation causale du niveau 1 sur
le niveau 2 qui ne se confirme pas toujours (en se basant sur les études
de Remmers, Martin et Elliott, (1949) et Rodin et Rodin, (1972)). De
même, ils infirment la relation causale entre les niveaux ainsi que la
corrélation qui en résulte.
D'autre part, les deux auteurs remettent en cause le
caractère hiérarchique en insistant sur le fait que les actions
de formation ne visent pas une ou tous les niveaux du modèle de
Kirkpatrick. Par exemple en cas de formation d'intégration à
l'entreprise, l'évaluation des apprentissages ou des satisfactions sera
plus importante.
De plus, Alliger et Janak énoncent que le
modèle de Kirkpatrick utilise un vocabulaire facile et un certain nombre
de suppositions qui peuvent induire à l'émergence de malentendus
et à des généralisations accrues.
Pour faire face à ces défaillances, et
suite à un travail plus récent, Alliger, Tannenbaum, Bennett,
Traver, et Shortland (1997) ont essayé de rectifier le sort en
subdivisant les niveaux du modèle de Kirkpatrick.
En effet, ce modèle subdivise la réaction
en trois dimensions : la dimension de l'utilité, la dimension
affective et la dimension mixte.
L'apprentissage, de son côté, est
subdivisé en connaissances immédiatement en fin de formation,
rétention des connaissances un certain temps après la fin de la
formation, et comportements dans le contexte de la formation.
2.2 Critiques et remèdes énoncés
par Kraiger, Ford et Salas
La majeure critique énoncée par Kraiger
et al. (1993) (cités par Dunberry.A et Péchard.C, 2007) à
l'encontre du modèle de Kirkpatrick, c'est que ce modèle souffre
d'un manque de clarté et de précision de part le fait qu'il est
simple.
A cela Kraiger (2002) ajoute d'autres limites :
1) les construits utilisés, tels que la satisfaction ou
l'apprentissage, ne sont pas clairement définis, se
révélant plus complexes qu'il n'apparaît
2) une application stricte de l'approche amène des
comportements illogiques, comme ne pas évaluer les apprentissages avant
d'avoir confirmé une réaction positive alors que les participants
ne sont peut-être plus disponibles
3) l'approche présume des relations entre les
résultats de la formation qui ne se confirment pas, comme c'est le cas
entre la satisfaction et l'apprentissage
4) l'approche ne tient pas compte du but de
l'évaluation, en incitant à évaluer les quatre niveaux,
alors que dans certains cas l'évaluation d'autres critères serait
plus pertinente en regard des besoins de l'entreprise.
Pour pallier ces insuffisances, Kraiger (2002) propose
un modèle d'évaluation de la formation.
Ce modèle identifie trois cibles
d'évaluation à savoir le contenu et le design de la formation,
les changements chez les apprenants et le rendement pour l'organisation. Pour
chaque cible, Kraiger précise des objets à évaluer ainsi
que les méthodes appropriées et énonce les raisons
principales d'évaluer. Le tableau ci-après illustre le
modèle de Kraiger (2002) :
Les cibles de l'évaluation (Dunberry.A et
Péchard.C, Février 2007)
Cibles
|
Objets
|
Méthodes
|
Raisons
|
Contenu et design de la formation
|
Design Livraison Validité
|
Méthodologies établies d'élaboration de
formation Jugement d'expert Comité conseil Évaluation de la
satisfaction
|
Feedback au formateur
|
Changements chez l'apprenant
|
Changements cognitifs Changements comportementaux Changements
affectifs
|
Tests écrits Enquêtes Entrevues Échantillons
de travaux
|
Feedback à l'apprenant Prise de décision
|
Rendement pour l'organisation
|
Transfert Résultats Performance
|
Estimations Enquêtes Analyses bénéfices
coûts
|
Prise de décision Marketing
|
1.2.2 Critiques et remèdes
énoncés par Holton
Holton (1996) (cité par
Dunberry.A et Péchard.C, 2007) considère que le modèle de
Kirkpatrik est une simple taxonomie. Il ne constitue ni un modèle ni
une théorie. Il ajoute qu'un véritable modèle ne se limite
pas à identifier juste ce qui doit être évaluer.
Ainsi, un modèle doit soutenir des construits
corrélés entre eux, mieux préciser les résultats de
la formation et présenter des limites à la
généralisation de ces résultats.
De plus, le modèle Kirkpatrick ne tient pas
compte des variables intermédiaires qui peuvent influencer les
résultats d'une action de formation. Ces variables peuvent être
d'ordre organisationnel, individuel ou encore liées au travail
lui-même. Parmi elles on distingue le design de la formation, la
préparation et la motivation des apprenants, les caractéristiques
des apprenants eux-mêmes, les conditions d'application de ce qui a
été appris en situation de travail. Ces variables
intermédiaires influencent les résultats de la formation et
identifient des relations de cause à effet.
Pour remédier ces lacunes, Holton propose un
modèle qui intègre diverses variables contextuelles susceptibles
de mieux exprimer l'apprentissage, les performances individuelles et les
résultats organisationnels. A cet égard, l'auteur identifie les
éléments susceptibles d'influencer ces résultats et il les
regroupe en trois catégories. Les éléments facilitateurs
comme l'influence des aptitudes individuelles sur l'apprentissage ou encore
l'influence du design du transfert sur la performance. Les
éléments environnementaux tels que l'influence de la
réaction sur l'apprentissage ou l'influence du climat du transfert sur
la performance. Et les éléments motivationnels par exemple
la motivation à apprendre ou à transférer.
A côté des éléments
précités, Holton ajoute des facteurs pouvant avoir une influence
qu'il qualifie de secondaire tel que les caractéristiques de la
personnalité ou les attitudes au travail.
Outre ces remèdes, d'autres modèles ont
été conçus soit comme extension du modèle
Kirkpatrick, soit comme moyen pour combattre les failles de ce
modèle.
Le tableau ci-joint trace une analyse comparative de variantes
du modèle de Kirkpatrick.
Modèle de Kirkpatrick et autres modèles
(Dunberry.A et Péchard.C, Février 2007)
Kirkpatrick (1959)
|
Hamblin (1974)
|
Molenda et al. (1996)
|
Phillips (1997)
|
Kearns et Miller (1997)
|
|
|
Comptabilité des activités
|
|
|
Réaction
|
Réaction
|
Réaction
|
Réaction
|
Réaction
|
Apprentissage
|
Apprentissage
|
Apprentissage
|
Apprentissage
|
Apprentissage
|
Comportement
|
Comportement au travail
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Transfert de l'apprentissage
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Mis en application au travail
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Transfert au poste de travail/comportement
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Résultats
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Organisation
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Impact d'affaires
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Résultats d'affaires
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Valeur ajoutée
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Valeur ultime
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Impact social
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Retour sur l'investissement
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Dans cette section on a traité les
différents modèles dans le domaine d'évaluation de la
formation en partant du modèle de référence de
Kirkpatrick. Malgré la différence des définitions des
niveaux d'évaluation de chaque modèle, il est possible d'admettre
deux moments majeurs dans le processus d'évaluation de la formation.
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