Le développement récent des fraudes en
entreprise et leur mise en avant sur le plan médiatique ont fait prendre
conscience de l'ampleur des conséquences financières que
pouvaient engendrer de telles pratiques. Les Etats et les Ordres professionnels
des praticiens comptables libéraux ont vu ainsi leur
crédibilité mise en cause en matière de contrôle des
comptes.
Aussi, afin de restaurer la confiance du public, le
législateur a dû mettre en place de nouvelles mesures de nature
à montrer que l'Etat veille à la bonne marche de
l'économie. De même, les normes d'audit ont dû être
également rapidement adaptées pour tenir d'avantage compte du
risque de fraude dans les misions de contrôles des comptes, afin que les
auditeurs disposent de règles à suivre en la matière.
Les scandales financiers qui se sont succédés aux
Etats-Unis après la débâcle d'Enron ont remis en question
les systèmes comptables.
La faillite d'Enron a soulevé de sérieuses
interrogations sur le système comptable aussi bien au niveau des normes
elles-mêmes mais aussi au niveau de leur mise en oeuvre et de leur
contrôle. Les scandales qui ont suivi, notamment celui de World Com, ont
démontré les lacunes des normes actuelles même si ces
dernières sont loin d'être les seules causes des scandales
financiers. Suite à ces scandales, quelques grandes failles ont
été identifiées.
Les manipulations comptables se traduisent par exemple par:
> La possibilité de cacher des investissements
déficitaires ou peu rentables grâce aux engagements hors bilan;
> L'évaluation des charges et des revenus:
comptabilisation de profits inexistants ;
> La réévaluation du bilan en augmentant la
valeur d'actifs peu rentables;
> La divulgation d'informations matérielles:
opacité des commentaires pouvant induire des erreurs notamment pour
l'interprétation des chiffres et l'évaluation d'entreprise.
Ainsi les dirigeants d'Enron ont réussi à
exploiter à leur avantage certaines faiblesses dans les principes
comptables. Les règles qui ont le plus été
remarquées sont celles qui définissent le traitement des
structures d'accueil pour certaines activités que l'on veut garder hors
bilan.
En effet, les engagements hors bilan, constitué par le
biais de la titrisation ont ainsi permis à Enron d'alléger son
bilan.
Enron, par exemple, a eu recours au SPE "special purpose
entities" afin de diversifier le risque. Ces sociétés,
contrôlées par Enron mais non consolidées, portaient le
risque des transactions sans que ce dernier apparaisse dans les livres de la
société. Elle a ainsi créé une série
d'entreprises et de partnerships, les SPE, avec lesquelles elle a
été amenée à faire toutes sortes d'affaires tel que
la vente d'actifs, prêts, trading de produits dérivés ou
encore émission de garantie. Enron détenait des petites parts de
ces entités et d'autres investisseurs également. Elle a ainsi
utilisé d'une manière extensive ses SPE pour loger ses actifs
à risques et la dette qui leur était associée.
L'utilisation de telles structures a permis à Enron d'accroître
son levier financier sans avoir à reporter sa dette dans son bilan. Il a
ainsi réussi à alléger son bilan et à fausser la
valeur patrimoniale de son entreprise.
Cette technique de déconsolidation a pu être
utilisée très souvent aux Etats- Unis car les principes
comptables permettent d'enregistrer ce type d'investissement sur la base du
capital investi pour autant que la société mère ne
détienne pas plus de 50% du capital de la filiale et n'exerce pas de
contrôle sur cette dernière. De plus les régulateurs n'ont
pas formellement défini le capital minimal pour de telles structures
implicitement fixé par la SEC à 3% du bilan. Ce seuil de 3% est
généralement considéré comme trop bas, pouvant
favoriser les abus.
Ainsi, une société pouvait conserver la
majorité des risques et revenus sans avoir à les consolider dans
ses états financiers.
Les sociétés aux Etats-Unis disposaient ainsi
d'un outil d'une grande flexibilité pour aménager leur bilan.
Les normes françaises ont également
laissées la porte aux abus. En effet les normes françaises
interdisaient à une entreprise industrielle, de consolider une
entité dont on ne détient ni action, ni part. Pour éviter
de consolider une entité, il suffisait donc de ne pas en être
actionnaire, même si l'entreprise exerce sur l'entité un
contrôle de fait ou de droit, en tire les bénéfices, et en
supporte le risque. Dans ce contexte, les opérations de
déconsolidation étaient courantes.
Ainsi les différents scandales financiers ont
démontré que les normes comptables étaient mal
adaptées et que le contrôle était trop
laxiste.1