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e 104 à Paris en 2008: Un projet de transversalité artistique et sociale ?

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par Elsa Gobert
Université Paris III - Master 1 2007
  

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TABLE DES MATIÉRES DES ANNEXES

· Annexe1...................................................................56

Frédéric Fisbach et Robert Cantarella : Directeurs du 104 

Lucie Nicolas : responsable des passeurs pour La Traversée

27 décembre 2007, Visite du lieu

· Annexe 2..................................................................59

Discussion avec Monsieur Demange,

Président du conseil de quartier du 19e

29 décembre 2007, café Mathis, Paris

· Annexe 3..................................................................61

Rencontre Victor Dixmier,

Mairie de Paris,

30 Décembre 2007, 104, La Traversée

· Annexe 4..................................................................62

Entretien avec Frédéric Fisbach,

Codirecteur du 104,

7 avril 2008, 11 rue Curial

· Annexe 5..................................................................68

Entretien

Stéphanie Lefebvre : Présidente de l'association La Générale en Manufacture, Artiste Photographe

Caroline Pradal : Présidente de l'association La générale et présidente adjointe Association La générale en manufacture, Artiste Sculpteur

Pierre Lempens : « Coordinateur », artiste vidéo

Le 10 Mai 2008, Ateliers de la manufacture de Sèvres

Annexe 1

Visite du lieu

Frédéric Fisbach et Robert Cantarella : Directeurs du lieu 

Lucie Nicolas : responsable des passeurs pour La Traversée

27 décembre 2007

R.C : Donc on va faire la visite du chantier ensemble, c'est cette visite que vous ferez avec les visiteurs samedi et dimanche pour La Traversée. C'est aussi un acte de confiance pour nous que de vous déléguer ce rôle de passeur parleur de notre projet (...)

L.N : Alors vous êtes passé et c'est à vous de faire passer les autres et de faire partager à tous l'ambition et la passion du projet (...)

F.F : Là on est pile à l'endroit où les gens rentreront. Donc il y aura un décompte puisque vous savez qu'il n'y aura pas plus de deux mille quatre cents personnes qui peuvent être simultanément sur le chantier. Un comptage sera fait forcément, donc les gens attendront à l'extérieur.

R.C  : Autre chose importante à identifier, c'est que le passage, quand on dit c'est un passage en fait c'est ça. Ici c'est l'entrée ou la sortie et ça va jusque de l'autre côté. C'est la rue qui fait 250m de long et 70m de large. C'est ça la rue ouverte à tous en question où l'on pourra voir l'art en train de se faire. C'est un chemin de création.

F.F  : Quand on arrive du côté de la rue d'Aubervilliers, en fait on est de plain-pied avec la rue, de ce côté ci, on est obligé de monter des marches. Simplement parce que en fait, à l'origine tout le site était en pente puisque il y avait trois cents chevaux, donc il fallait évacuer le purin et que le purin était évacué à grands jets d'eau vers la rue d'Aubervilliers. C'est pour ça que le site était en pente.

R.C  : Ici c'est la cour Curial. Là c'est la halle Curial et après il y a la cour de l'horloge et la cour d'Aubervilliers. Donc c'est là qu'il y aura la pépinière d'entreprise

E.G : Qu'est ce que vous entendez par pépinière d'entreprise ?

R.C  : Ca veut dire qu'on accueille des jeunes entreprises qui commencent. Tu as une idée, tu es une jeune entreprise, tu ne sais pas où te mettre, et bien là, pendant trois ans tu as des bureaux, des accompagnements juridiques, des salles mutualisées, jusqu'à ce que ton produit soit tellement bien que l'entreprise puisse voler de ses propres ailes.

F.F : Là, on est dans la halle Curial au niveau des commerces. C'est-à-dire que de part et d'autre il y aura derrière ces...parpaings, des espaces qui sont des commerces en fait. Là, en face, il y aurait une librairie, ici il y aurait une maison des enfants, c'est un endroit pour les enfants accompagnés, de 6 mois à 6 ans.

R.C  : Une maison verte

F.F  : et en face un restaurant, et là...

R.C : Là ; en fait on ne sait pas, peut-être une supérette, il y aura un commerce qu'on n'a pas encore déterminé, il y a plein d'études qui ont été faites. En tout cas, ce sont vraiment les deux halles commerciales qui sont de part et d'autre. Là, au centre, c'est ce qu'on appelle le Jardin. On a demandé à des paysagistes une fois par an de faire un projet de jardin, vous voyez avec la verrière ça fait une lumière parfaite, et ça sera un jardin public et couvert. Donc chaque année il y aura...Les premiers paysagistes, ce sera un potager par exemple, mais ça sera toujours un jardin public.

F.F  : En dessous ce sont les anciennes écuries. Je vous parlais de chevaux tout à l'heure, ils étaient en dessous. Ce sera des endroits à commercialiser pour des petits salons de professionnels, des réunions d'entreprises par exemple. En fait c'est des espaces commerciaux, 2400 mètres carrés, d'espaces qui donnent sur deux cours anglaises. Toute cette halle sera éclairée par la lumière du jour, c'est à plein ciel. Au-dessus, ce seront des ateliers d'artistes plus petits, de 100 m carré.

R.C  : Et le jour de La Traversée, en fait, la question est : où est ce qu'on est ? Comment on commence ? Et bien, vous vous serez là, des deux côtés de la rue. Les gens passeront comme vous, en traversée humaine. Vous vous mettez où vous voulez, l'important, c'est de passer à côté de quelqu'un, et si vous êtes à côté quelqu'un, de lui expliquer ce que c'est que là, comme on est en train de se le dire. Souvent vous verrez que certaines personnes ont peur de la venue de beaucoup d'étranger au quartier avec l'arrivé du 104. La peur de l'autre, de ce qui est différent. Nous au contraire, il faut leur expliquer que nous cherchons un art qui va à la rencontre de l'autre, et non qui s'en éloigne.

R.C  : Cette halle sera entièrement fermée par des grandes portes en verre en hiver, et donc il sera possible d'avoir une température plus clémente. Pour accueillir par exemple un travail avec du cirque, du théâtre de rue...

F.F : Depuis cette cour, la cour de l'horloge, on voit les habitants du quartier, et inversement les habitants du quartier nous voient. C'est-à-dire que là on voit bien que le bâtiment est complètement pris dans des habitations. C'est ce qui fait qu'on ne pourra pas faire des concerts de 2400 personnes, parce qu'il y a des gens qui habitent dans la villa Curial, et ça fera beaucoup de bruit. C'est pour cela qu'il y aura deux salles de spectacle isolées acoustiquement et un grand atelier isolé aussi. Et ces salles seront disponibles par tous hein, puisque c'est un lieu qui évite les attributions. Si un artiste vidéo veut un plateau de danse, il y en a un sur place, qu'il l'investisse. C'est la façon d'utiliser l'instrument de travail qui fait la spécificité de l'art et non l'inverse.

R.C  : Dans la cour Aubervilliers, le plus important est que c'est la cour des ateliers d'artistes justement. Lieu de résidence pour les artistes, tous les arts, toutes les pratiques artistiques, on peut rester d'un mois à douze mois, on a un des ateliers. Et sur la gauche là-bas, il y aura un café presse (...)

Annexe 2

Discussion

Monsieur Demange : Président du conseil de quartier du 19e

29 décembre 2007, café Mathis, Paris

E.G : Ca fait longtemps que vous habitez dans le 19?

M.D : Ha oui ça fait trente ans.

E.G : Donc vous avez connu aussi quand c'était les pompes funèbres...

M.D : ha oui, mais attendez, les pompes funèbres je crois que ça s'est arrêté en 75

E.G : Comment vous avez vu l'évolution du projet ?

M. D : Ce qu'il faut savoir c'est que jusqu'en 2002...heu.....la Mairie de Paris, c'était Tiberi le Maire. Et Roger Madec, de gauche était maire du 19ème mais n'avait aucun pouvoir décisionnaire. C'était Tiberi qui décidait. Alors ce que Roger Madec fait, il a bloqué le fait qu'on en fasse des logements en faisant classer le lieu « monument historique », donc ça a arrêté la procédure de démolition. Delanoë a été élu en 2002, donc il y a eu une bonne entente si je puis dire. Parce que je me souviens avant 2002 il y avait des désagréments entre la mairie du 19e et La Ville. Parce qu'on avait un Conseil de Quartier qui n'était pas « légal », puisque à l'époque c'était pas obligatoire de le faire. Je me souviens quand on sollicitait les services de la Mairie, il y en avait qui ne voulaient pas nous entendre, parce qu'ils nous disaient : vous êtes le conseil de quartier...on ne vous connaît pas, on veut pas avoir etc. Mais alors après 2002, il y a eu une réflexion qui s'est faite, on nous a donc chargé de voir un peu ce qu'on pouvait faire et puis ça a pris corps puis Delanoë a tranché en disant « faudrait que ça soit un lieu culturel ». C'est quand même lui qui a tranché parce que là aussi, il y a eu des discussions de savoir ce qu'on en faisait de ça...Disons que pendant deux trois ans ça a été un lieu où on ne savait pas trop quoi en faire. Alors entre le moment où la ville a dit, on abandonne, parce que c'était là où il y avait les services sociaux de la ville...A un moment donné les pompiers devaient venir là...

E.G : Est ce que le lieu a été squatté à un moment ?

M.D : Non, jamais. Non, parce que c'était les services sociaux de la ville qui habitaient là. Alors il y a eu à un moment c'est vrai, c'était pas des squatteurs, on a mis des gens...des sortes de drogués, des SDF qui, disons, devaient être réinsérés etcetera. Mais c'étaient pas des squatteurs, non ça a jamais été squatté. Parce que c'était fermé, on ne pouvait pas rentrer dans le lieu. C'était fermé, abandonné, barricadé. On pouvait rentrer par une petite porte qui n'existe plus maintenant, il y avait une petite porte à droite où il y avait les services de la ville. Mais on ne pouvait pas aller à l'intérieur.

Annexe 3

Brève rencontre

Victor Dixmier : Mairie de Paris

Samedi 30 Décembre 2007, 104, lors de l'événement La Traversée

E.G : Vous travaillez pour la Ville, ça représente quoi le 104 pour la Mairie ?

V.D : Symboliquement il faut montrer que voilà c'est vraiment le chantier culturel phare de la Ville...Ils ont mis ça pour l'affiche des voeux. C'est un des projets phares...C'est très beau en tout cas. Le montrer en chantier, c'est vraiment bien, ça donne envie de venir voir ce qu'il y aura dans ce lieu, une foi les travaux finis...Ça a un petit côté Nuit Blanche...Par contre leur site Internet je n'ai pas tout compris, je n'arrive pas à cliquer au bon endroit...Je suis resté un peu sur ma faim quoi...Mais il faudra voir en quoi les travaux artistiques sont vraiment des entrées dans le quartier. Qu'ils ne soient pas là simplement pour faire joli quoi...

E.G : Moi j'ai vu pas mal de gens du quartier

V.D : Oui, ils ont l'air assez curieux

Annexe 4

Entretien

Frédéric Fisbach : Codirecteur du 104,

7 avril 2008, 11 rue Curial.

E.G : Comment définiriez-vous le « 104 » ?

F.F : Le « 104 » c'est avant tout un lieu de l'art qui s'éprouve au quotidien, qui se transmet au quotidien. C'est un lieu de transmission qui travaille la relation à l'oeuvre. Il n'y a pas de lieu de création, d'art en train de se faire à Paris. L'oeuvre est toujours achevée quand elle est visible par le public. Or, nous nous pensons que pour comprendre l'art, et les artistes, il faut les voir faire, et les entendre expliquer leur travail. Parce que l'art vient d'où ? Il ne vient pas du divin, il vient des artistes, et il faut les écouter ces artistes. Il n'y a rien de plus intéressant que d'écouter quelqu'un expliquer son travail. On en retient toujours quelque chose et il nous reste toujours quelque chose. Qui peut le mieux parler de l'art sinon les artistes ? Alors bien sûr ça ne veut pas dire qu'il faut un mode d'emploi aux oeuvres, ça n'a rien à voir. Parce qu'il n'y a pas un seul chemin pour comprendre l'oeuvre, il y en a une infinité, non, nous ce qu'on cherche, c'est créer des relations entre l'art et le quotidien. Voilà, le 104 c'est un lieu de l'art qui s'éprouve au quotidien.

E.G : L'art au quotidien des artistes mais l'art aussi dans son quotidien ?

F.F : Oui mais sans que le mot quotidien ait une connotation péjorative. Il ne doit pas y avoir non plus de côté banal dans le lieu. Presque, on pourrait parler de fréquentation, comme on fréquente un parc ou un lieu où on aime aller, on fréquenterait le 104. Vous savez, on est parti d'un constat très simple : à Paris, il n'y a pas de lieu de l'art en train de se faire. Pour voir l'art en train de se faire, il y a un besoin de temps et d'espace. Il y a beaucoup de lieux de représentation, mais peu de lieux de travail. Donc, avec Robert Cantarella nous nous sommes fait la réflexion qu'il fallait partir ou bien inventer un nouveau lieu de transmission. La transmission tient à ce qu'on retiendra quelque chose de l'art. Il nous reste quelque chose, vice-versa, l'artiste aussi garde quelque chose et enrichit son art en échangeant avec autrui. Nous voulons créer l'échange, nous voulons voir l'art en amont du travail, en fin de compte, et non en aval, du côté de la production. Parce qu'il y a un ressenti différent, parce que nous pensons vraiment que l'oeuvre d'art peut changer quelque chose. Voilà, alors j'ai fait long mais le 104 c'est tout ça. Puis, c'est un lieu urbain, ça c'est important aussi. C'est un lieu qui s'inscrit dans une ville. Contrairement à la Villette qui voit la ville de loin, le 104 s'inscrit dans son quartier. Nous cherchons à ce qu'il devienne un lieu de fréquentation des gens du 19e, un lieu qu'ils pourraient inscrire dans leur quotidien. Je pense que ça raconte une chose toute bête. Parce que l'art fait quoi finalement ? Il réarticule des représentations du monde. Pourquoi y aurait-il un art populaire et un art élitiste, pourquoi l'art ne pourrait pas être accessible par tous, compris par tous ? Pourquoi il faudrait encore et toujours créer des lieux d'art avec un grand A ? Nous, on veut un art qui soit dans la ville et, plus, un art qui s'intègre dans le quartier. Je trouve qu'il y a un grand courage politique et une grande compréhension aussi d'avoir voulu installer un lieu d'art ici, dans ce contexte culturel. Mais c'est palpitant comme projet de faire ça dans ce quartier que l'art a oublié. Justement pour dépasser ces apories il y a une réelle volonté sociale de faire un lieu d'art dans le quartier de ceux qui ne rentrent pas dans les cases. Parce que vous savez tout le monde rentre dans des cases pour la culture, mais ici non, ici, je pense, c'est le quartier des oubliés. C'est vrai, le 19e ce n'est pas un quartier Haussmannien. Nous, on a décidé d'installer nos bureaux ici pour vivre ce quartier au quotidien, essayer de comprendre ce quartier, essayer de..., c'est toujours sur le principe de l'échange. Ici, on est ailleurs, mais on veut comprendre ce quartier, que les gens puissent passer, toquer à la portes du 11 bis et venir discuter avec nous, on cherche le rapprochement. Par ce que ça marche dans l'autre sens aussi. Ici on ressent la peur des gens de l'autre, de ce qui est différent, de ce qui va changer leurs habitudes. Nous recherchons un acte qui va a la rencontre de l'autre et non qui s'en éloigne. C'est le principe même d'un acte de confiance aussi, je crois que c'est important de faire confiance, c'est des choses qui devraient aller de soi. C'est comme pour La Traversée. On vous a délégué notre savoir, on vous a transmis ce que nous savions sur le lieu pour qu'à votre tour vous le transmettiez et le partagiez avec le public. C'est un acte de confiance, les médiateurs deviennent alors les acteurs du lieu à notre place.

E.G : Est-ce que vous apparentez le 104 à une Friche institutionnelle ?

F.F : Friche ou squat. On devrait pouvoir parler de ça, oui c'est vrai. Mais ce n'est pas ça. Le 104, c'est l'époque d'après ça. En tout cas, c'est vrai qu'on s'est beaucoup inspiré de ce mouvement qui laisse un champ artistique assez libre, ouvert. C'est un mouvement qui sort du mono disciplinaire pour aller vers le pluri et vers le collectif. Et puis il y a un paradoxe dans le terme des friches indus...Tenez, j'ai failli dire friches industrielles. Oui, friche institutionnelle c'est tout le paradoxe entre la friche et l'institution. Le squat s'établit toujours dans une durée limitée avec le facteur risque, mais c'est intéressant aussi de travailler dans la durée limitée, avec toujours cette histoire qu'on est jamais sûr du devenir du squat.

Parce qu'il faut faire attention à la tranquillité et au formatage, c'est très dangereux pour l'art le formatage. Vous savez, les petites cases dans lesquelles on nous met encore. C'est pour ça que c'est bien de partir du modèle du squat qui justement évite le formatage

E.G : Vous saviez qu'il y avait la Générale avant dans le 19ème justement. Et qu'ils ont récemment été expulsés pour êtres relogés à Sèvres...

F.F : bien sûr, bien sûr, oui. C'est pour ça que je dis qu'il faut faire attention. La Générale c'était un squat très artistique, vivant, ancré dans son quartier. Certains des artistes sont partis à Sèvres, d'autre se sont dispersés. C'est le monde artistique, les squats artistiques s'inscrivent dans une prise de risque, il n'est pas forcément fait pour durer. Il s'inscrit dans un temps donné. C'est très sain d'ailleurs de se dire qu'on travaille dans un temps limité. Là, nous on réfléchit beaucoup à ça nous, on se dit : qu'est ce qui se passera quand on devra partir ?

E.G : Vous avez signé pour une durée limitée avec la ville, (comme les directeurs de CDN qui doivent se renouveler régulièrement) ?

F.F : Pour l'instant nous avons signé un contrat de trois ans, après ouverture du lieu, bien sûr. Mais le contrat est renouvelable. Je pense que l'idéal est de rester cinq ans après l'ouverture. Pour pouvoir vraiment lancer le lieu pendant trois ans et puis après pouvoir profiter un peu du lieu, vivre le lieu. Ça ne veut pas dire qu'on n'en profite pas en ce moment mais c'est simplement qu'on n'a pas beaucoup de temps, que tout passe vite. Mais peut être que, voilà, au bout de trois ans, on jugera qu'on aura fait le tour et on partira, vous savez, la pérennité des choses... Mais c'est bien que ça change aussi, qu'il y ait d'autres personnes qui viennent avec d'autres programmes artistiques. Là où il faut faire attention, c'est au contexte culturel actuel. Ce qui est paradoxal c'est que nous ne choisirons pas les gens qui nous succéderont et que peut-être eux chercheront la productivité.

E.G : Vous dites que vous ne cherchez pas la productivité, en ce moment il y a quand même une crise dans la culture et justement on tend vers une forme d'art plus productive, je pense à la lettre de mission du président à la ministre de la culture. Il y a une tendance à fermer les lieux qui...

F.F : Là vous parlez de l'Etat. Il y a un problème au niveau de l'Etat. Ici nous dépendons de la Ville de Paris. Je pense que le système aujourd'hui est complètement perverti, ce n'est pas que ce gouvernement. Je pense qu'il faut modifier le fonctionnement des lieux subventionnés, pas forcément les changer, mais les modifier. Les modifier ça veut dire... je pense que les administrations restent en place pendant trop longtemps. Tout à l'heure je parlais de l'intérêt qu'il y a à travailler dans une durée limitée, mais là, les directeurs des structures changent mais les administrations restent. Lorsqu'un nouveau directeur arrive dans une structure, il se heurte à des habitudes culturelles et les politiques restent les mêmes. Alors c'est délicat, hein, comme discours mais je ne pense pas qu'il y ait trop de compagnies en France, enfin, il y en a peut-être trop, mais peut-être pas assez aussi. Parce que les compagnies, avant tout, c'est quoi ? C'est par là qu'arrive la création, et c'est la création qui fait l'art pas uniquement les lieux de l'art. Je pense qu'à un moment donné, il faut faire les missions qu'on a et tenter de développer un maximum la création. Parce que les administrations des théâtres ce sont des salariés qui travaillent, ils sont tranquilles, mais les compagnies sont dans un système de on-off en permanence, elles sont toujours en déplacement. Il y a un trop grand décalage entre ces deux régimes. C'est-à-dire que ce qui est contradictoire en ce moment, et c'est là que je trouve qu'il y a un courage fort de la part de la Ville, c'est qu'il y a de plus en plus de lieux de production pure mais qu'il y a moins de lieux de création, de travail pour ces compagnies. Alors, bien sûr, le 104 ne va pas résoudre tous les problèmes, mais le 104 propose une alternative à ces lieux. Je pense que c'est un lieu qui est pionnier dans cette réflexion-là, c'est un lieu pour accueillir la création dans la volonté de montrer l'art en train de se faire. Et tous les arts. Alors moi, je ne suis pas très « trans » là-dedans. Ça ne veut pas dire qu'on va prendre le meilleur du théâtre, de la vidéo, de la danse et puis que tout ça, ça va faire une oeuvre. Non. Ce qui est intéressant c'est de faire que des gens qui vont travailler côte à côte dialoguent, échangent, s'influencent parfois même sans le savoir. On est plus dans le domaine de l'inspiration, de l'empreinte que les arts peuvent se laisser entre eux. Je pense qu'avec un lieu comme ça, on essaie de sortir du travail parfois trop individuel de l'artiste pour entrer dans le collectif. Là où je trouve qu'il y a un courage politique c'est qu'il est quand même assez drôle de voir que le seul champ qui caractérise l'art aujourd'hui c'est sa valeur. Sa valeur marchande je veux dire. Comme si l'art n'était que marchandise !

Mais l'art est créateur de beauté, d'esthétisme de vie, je trouve qu'on a tendance à oublier que l'art c'est aussi un prétexte à la rencontre. Il y a un désengagement de l'Etat sauf... et c'est encore autre chose...

E.G : dans le patrimoine...

F.F : alors oui dans le patrimoine et puis dans les arts visuels, on continue de dire qu'on va encore débloquer des fonds pour l'audiovisuel... et on oublie presque le reste de la création. C'est pour ça que je dis encore une fois qu'il y a un enjeu énorme. Alors bien sûr, y a d'autres lieux en France qui fonctionnent un peu comme ça...

E.G : justement, en quoi trouvez-vous que le 104 sera différent des endroits comme le Lieu Unique à Nantes ou la Belle-de-Mai à Marseille par exemple.

F.F : C'est déjà beaucoup plus grand et puis ici on verra les ateliers, c'est un lieu du public le 104, je pense que c'est plus ouvert ; mais bien sûr il y a des ressemblances avec ces friches dans le fonctionnement, dans tout ce qui a rapport au collectif. Le Lieu Unique par exemple, il y a peu d'ateliers d'artistes qui travaillent directement sur place, c'est plus un lieu de diffusion et on retrouve beaucoup moins ce système d'échange. La Belle-de-Mai c'est encore autre chose. Mais le 104 c'est à ma connaissance le seul lieu d'art où l'on n'est pas obligé de rentrer par le même endroit que là où on est sorti.

E.G: Pourquoi vous associer à d'autres lieux, pourquoi le Radial System par exemple ?

F.F : Je pense que ces lieux partagent leur expérience et mettent en commun leur force. Prenez le Radial à Berlin, c'est un lieu privé qui a failli fermer l'année dernière. Ils fonctionnent avec leur propre subvention, ils louent beaucoup d'espace et pratiquent de moins en moins de diffusion. Chaque ville a sa propre particularité. À Berlin, il y a plus d'espace et la vie est beaucoup moins chère qu'à Paris. Beaucoup d'artistes vivent là-bas, ils travaillent là-bas parce qu'il y a plus de possibilité d'avoir des ateliers, mais ils ne montrent pas toujours leur travail sur place. Mais c'est encore autre chose parce que le mouvement des squats est entrain de s'épuiser à Berlin, alors le RadialSystem est construit encore sur un autre modèle...Enfin c'est intéressant de voir comment un lieu évolue, de s'inspirer les uns les autres. Comme il n'y a pas de lieu équivalent au 104, il faut trouver des gens avec qui on a envie d'échanger, de réfléchir ensemble.

E.G : Pour revenir à la Ville. Les 70% de subventions que vous recevez de la part de la Ville de Paris ne risquent-ils pas d'obliger un rendu, une certaine légitimité du lieu, dans le sens d'une certaine dépendance? Quel est votre degré de dépendance vis-à-vis de la ville ?

F.F : Alors, maximum 70%.

E.G : alors vous voulez diminuer l'apport de la Ville

F.F : Non, on ne veut pas diminuer. Dans l'idéal, nous ce qu'on aimerait c'est augmenter nos revenus propres bien sûr. Entre autres grâce au mécénat. Non, je ne pense pas qu'on ait peur d'une main mise de la part de la Ville. Quel intérêt pour la Mairie de Paris de garder un contrôle total sur le lieu ? C'est vraiment très important de conserver l'indépendance du lieu. De toute façon, il n'y a pas trente-six solutions, si nous on n'avait pas eu la chance d'avoir la mission d'ouvrir un lieu comme ça, maintenant, à Paris, on serait parti à l'étranger.

E.G : Vous avez eu des craintes au moment des élections ?

C'est sûr qu'on y a pensé mais finalement ça ne sert à rien parce que...D'abord on n'a pas de temps à perdre avec ça et puis, bien évidemment, ça serait très dommage qu'un tel projet soit laissé aux oubliettes. Mais je pense que ça peut marcher, que ça doit marcher.

E.G : Quels moyens pratiques comptez-vous mettre en place pour que le processus de rencontre fonctionne ? Comment ne pas attirer un public uniquement bobo mais également des gens qui traverseront le lieu dans leur vie quotidienne ?

F.F : Le 104 ce n'est pas qu'un lieu où on voit de l'art. Tout le monde pourra trouver une raison de venir au 104, et particulièrement les gens du quartier. Il faut que les gens du quartier, voilà, s'associent le lieu d'une façon ou d'une autre. Il faut que les artistes travaillent avec eux. Avec des groupes qu'ils connaissent aussi. C'est pour ça qu'il y a plusieurs types d'espaces. Je pense aux espaces pour les pratiques amateurs, aux ateliers qui se mettront en place pour les jeunes, aux petits commerces. C'est aussi un lieu où on pourra venir se promener le dimanche après-midi par exemple. Je pense qu'il faut que les gens puissent se dire « si on allait au 104 ». On a mis en place un dispositif qui encourage le mélange, si vous voulez, ce n'est pas un lieu monopublic bobo et je pense, j'espère, que ça va marcher.

E.G : Pourquoi vous pensez qu'il y a besoin d'un lieu comme ça à Paris ?

F.F : Il n'y a pas de lieu de travail pour les artistes, peu de lieux d'échange. Je crois qu'aujourd'hui, il y a un besoin de paroles échangées. Il existe trop peu de lieux de rencontres à Paris, pour nous il fallait partir ou bien inventer un lieu de transmission. Avec les jeux vidéo et la télé, il y a plus de lieux de l'échange. La seule chose qui puisse faire barrage à ça, c'est un lieu qui ne soit pas trop éloigné de nous. Moi je pense que c'est dans le face à face et le dialogue que ça se passe. Il n'y a pas de lieu pour ça. Aujourd'hui je trouve que l'art ne s'inscrit pas assez dans le réel, voilà.

Annexe 5

Entretien

Stéphanie Lefebvre : Présidente de l'association La Générale en Manufacture, Artiste Photographe

Caroline Pradal : Présidente de l'association La Générale et présidente adjointe Association La Générale en manufacture, Artiste Sculpteur

Pierre Lempens : « Coordinateur », artiste vidéo

Le 10 Mai 2008, Ateliers de la manufacture de Sèvres

E.G : Bonjour. Je suis étudiante en Master Arts du spectacle à Paris III, je rédige un mémoire sur les squats artistiques. Mais pas que ça, parce qu'il y a eu déjà beaucoup d'études là-dessus. Je m'intéresse surtout à l'arrivée du 104 à Paris et j'essaie de voir en quoi ça découle, entre autres, des friches culturelles.

E.G : Tu es présidente de l'association établie ici. Comment s'appelle-t-elle ?

S.L : La Générale en Manufacture.

E.G : Donc c'est une nouvelle association qui a été fondée pour ce lieu ?

S.L : Oui, elle a été faite pour ce lieu. Parce que en fait quand on a quitté Belleville il ya eu scission. Une partie du regroupement -parce qu'on ne parle pas de collectif- est venue ici à La Manufacture de Sèvres, et l'autre partie qui est plus dans la branche du spectacle est restée sur Paris. Mais de ça, je ne peux pas trop t'en parler parce que je ne suis pas au courant de ce qui se passe.

E.G : Vous n'êtes pas restés en contact ?

S.L : Si, on est un peu resté en contact, mais enfin il y a eu quand même scission.

E.G : Et après il y a eu donc deux associations qui se sont créées ?

S.L : Oui eux je crois que c'est la Générale du 14

E.G : Et à la base, c'était quoi l'association ?

S.L : C'était la Générale

E.G : Toi tu étais déjà là-bas quand vous avez été expulsés ?

S.L : oui

E.G : Et tu étais déjà présidente ?

S.L : non pas du tout, moi ça fait quelques moi que je suis présidente.

E.G : Le squat de Belleville datait de quand ?

C.P : De février, mars 2005.

S.L : C'est parti de l'envie de trois, quatre personnes, qui avaient repéré le lieu déjà, d'ouvrir ce squat là et après...C'étaient des gens qui avaient rarement ou jamais même squatté ou ouverts des squats. Du coup on était quand même tous nouveaux là-dedans. La Générale c'était un truc qu'était pas vraiment un squat, en tout cas je pense pas que ça suivait les autres modèles de squat. Nous on a toujours voulu que ce soit un lieu ouvert, un lieu de travail pour les artistes.

E.G : Parce que vous aviez remarqué le bâtiment. C'était quoi avant ?

S.L : C'était un bâtiment qui était inoccupé depuis dix ans. Ça appartenait à l'Education Nationale en fait et ils étaient en pourparlers pour le revendre à la Santé. Parce qu'ils voulaient en faire un hôpital psychiatrique. Ils vont faire une Maison-Blanche là-dedans. Mais bon, ça faisait dix ans qu'il était fermé, donc si tu veux, nous on y est allé aussi en disant : voilà, nous on s'installe mais quand vous voudrez commencer les travaux on partira.

E.G : J'ai l'impression que la procédure d'expulsion a duré assez longtemps ?

S.L : On a été très bien défendus par un avocat qu'on avait pris. William Bourbon, c'était l'avocat qu'on voit dans le film Bamako. Et du coup ça a pu traîner, traîner, traîner, et on a pu rester plus.

E.G : Mais il y avait quand même une procédure d'expulsion...

S.L : Oui, on savait qu'on devait partir, donc on avait déjà déménagé avant l'expulsion. On avait déjà les locaux ici, c'était en avril 2007. On a dû partir le mardi et ils ont fermé les portes le mercredi. Et depuis, le lieu est gardé, ils ont pas encore commencé les travaux. Mais il y avait cette question-là surtout que nous, on voulait avoir un espace de travail, pas forcément un espace de vie, et puis donner la possibilité aux gens qui voulaient travailler de faire des expos...

E.G : Comment vous avez entendu parler de la Manufacture ?

S.L : C'est la DRAC qui nous a proposé ça. C'était le deal. Mais ici, ça court jusqu'en novembre prochain. Donc là on est dans les pourparlers pour, soit rester un peu plus, soit voir ce qu'on peut faire dans un autre lieu. Ici c'est 150 000 euros pour les impôts locaux que la DRAC paie, nous on paie les fluides : eau, gaz, électricité, assurance. Mais la DRAC ne peut pas prendre une telle somme en charge deux années de suite. Donc, à nous d'aller voir...le Conseil Régional....le maire de Sèvres...

C.P : En fait plus précisément la DRAC est venue à des expos qu'on organisait à la Générale à Paris. De là ils ont pris contact avec nous, en fait. Donc, ils savaient depuis le début que c'était un squat et qu'on était en procès, donc ils nous ont proposé de nous reloger, pour qu'on puisse continuer à travailler. Ils nous ont proposé ce site-là. Par ce qu'en fait il y a des liens assez forts avec la Manufacture de Sèvres. Avec David Caméo qui est le directeur de la Manufacture et Laurence Maynier son bras droit. C'est comme ça que le DRAC nous a proposé le site et on a dit ok on va voir. Donc voilà comment ça s'est passé en fait.

E.G : Donc après vous êtes venus ici ?

C.P : Donc oui. On a proposé ce lieu de trois milles mètres carrés à la Générale, une bonne partie avait très envie de venir ici. Et une autre partie beaucoup moins parce que ça collait moins avec leur projet en fait. Ils avaient besoin d'être dans Paris intra-muros pour leurs différentes activités, donc voilà on a déménagé.

E.G : Et les autres, ils se sont installés où ?

C.P : Ils vont aller dans un local qui est un ancien transformateur E.D.F. C'est avenue Parmentier. Eux ils n'ont toujours pas investi le lieu parce que c'est un bâtiment où il fallait pas mal de travaux. Eux, ils auront besoin d'accueillir le public parce que c'est un lieu de spectacle, d'arts vivants...Donc ça prend beaucoup de temps pour tout mettre aux normes et tout ça. Donc eux, ils fonctionnent pour le moment en petites cellules, dans des endroits différents, puis après ils se retrouveront. Mais le lieu sera un lieu de monstration, parce que c'est construit de telle façon qu'il ne peut pas y avoir d'ateliers ou des choses comme ça...C'est vraiment un grand plateau.

E.G : Ici vous faite du travail avec la Ville, le lycée ?

S.L : Pas encore

E.G : Pas encore ça veut dire que vous envisagez de le faire ?

P.L : On n'envisage pas de ne pas le faire. Mais pour l'instant....

E.G : Parce que il y a des options Arts Plastiques dans le Lycée...

S.F : Oui, le maire nous en a parlé la dernière fois qu'on l'a rencontré. Mais c'est toujours pareil, nous en théorie, on est ici jusqu'en novembre ; ça laisse peu de temps pour mettre en place des actions artistiques avec le lycée. Est-ce qu'on met en place un truc pédagogique ? Est ce qu'on a envie de mettre en place un truc pédagogique ? Caroline oui, mais c'est un peu compliqué quoi...

E.G : Et le public, certains vous ont suivi de Paris à ici ?

C.P : On arrive à avoir du public ici. Alors c'est un public de gens motivés et très intéressés en fait. Ici c'est plutôt rare que les gens passent sans savoir ce qu'il y a. A Belleville ça arrivait souvent. Alors qu'ici on invite les gens à venir, il faut qu'ils soient au courant de ce qui se passe... Il y a très souvent des vernissages, des performances, des concerts, des vidéos , par des artistes qui travaillent là, ou en résidence, ou des invités. Plusieurs fois par mois, et il y a toujours du monde. On fait des affiches, des flyers, sur internet...

E.G : Vous avez un site internet ?

C.P : oui...oui, on a plusieurs sites internet en fait...

S.L : la-g.org, sur celui-là tu as tous les autres sites.

E.G : Quelle est la procédure pour pouvoir venir travailler ici ?

C.P : Il y a plusieurs façons. On propose des résidences. Tu prends contact avec nous et puis on voit de quel type d'espace tu as besoin, ça va jusqu'à un mois, deux mois, puis à la fin il faut que tu puisses montrer ton travail. Sinon il y a aussi des systèmes d'échanges. Là par exemple, le 15 mai il y a des Marseillais qui vont venir exposer à la Générale, et la Générale va aller exposer à Marseille. A la friche de La-Belle-de-Mai.

E.G : Donc vous êtes en contact avec d'autre lieu ?

S.L : Oui, on essaie d'organiser des échanges, mais pas que avec des squats. On ne veut pas rester cloisonné dans le même niveau.

P.L : La Générale c'est en même temps un squat et pas un squat. C'est les deux et aucun des deux à la fois. C'est entre le squat et l'institution, entre le non-officiel et l'officiel. C'est une position qui n'est pas facile à défendre mais qu'on voudrait essayer de garder. Ici il n'y a personne qui s'occupent particulièrement de l'administration, on fait tous tout. Ce sont les artistes qui gèrent le lieu. Moi, par exemple, je gère les résidences, je coordonne un peu l'ensemble et je fais de la vidéo.

S.L : Quand il y a un vernissage, c'est nous qui faisons les courses, c'est nous qui tenons le bar. C'est la différence du 104 tu vois, où t'as un staff en place et après il y a les artistes qui viennent...

E.G : Et les résidents versent quand même de l'argent à l'association ?

S.L : Alors oui il y a quand même une cotisation pour aider à pallier par exemple la facture EDF qui est très très élevée en hiver...On a pas de mécénat, nous sommes nos propres mécènes...Après les résidences, comment tu viens, eh bien tu vois par le bouche-à-oreille, ou bien tu vas sur le site, enfin ça se fait simplement et puis il n'y a pas de dossiers ou de trucs comme ça...On n'invite pas les gens pour ce qu'ils font, c'est juste pour l'énergie qu'ils apportent au regroupement, ce qu'ils veulent donner...Enfin la base du truc quand même c'était : bon, tu viens mais tu essaies de t'investir aussi dans le fonctionnement du lieu, dans la vie de l'assos. Alors c'est vrai que là, ça fait quelques années qu'on tourne, alors oui nous on se retrouve entre nous par affection, mais ça reste ouvert. Il y a pas d'attribution quoi. Pour les résidences, on les rencontre voilà, y'a pas de dossier.

E.G : Vous êtes combien à être restés de Belleville à ici ?

S.L : On est une cinquantaine.

E.G : Qu'est ce que vous pensez du 104 ? Je sais pas si vous connaissez le lieu ?

C.P : C'est Cantarella et Fisbach non ?

E.G : Oui voilà, c'est la mairie de Paris qui subventionne l'ouverture de ce lieu pluridisciplinaire dans le 19e, dans l'ancien bâtiment des pompes funèbres...

C.P : Oui, oui j'en ai entendu parler...C'est pas du tout en fait la même approche, il y a le vice générationnel qu'est là évidemment, mais eux ils fonctionnent par attribution, je pense que c'est un projet déjà bien ficelé. L'approche est différente

S.L : Ils sont un petit peu sur-subventionné non ?

C.P : Enfin voilà c'est une autre approche, c'est moins ouvert peut être, par exemple pour obtenir des résidences là-bas, c'est quelque chose de complètement différent, puisqu'ils savent exactement qui va aller où, qui va travailler.

P.L : Et puis ça fait cinq ans qu'on en entend parler et puis voilà, on a jamais rien vu...

S.L : Moi je dis que c'est quand même un peu l'inverse, c'est-à-dire que si tu veux nous on commence à peine à faire des dossiers pour les envoyer à droite à gauche, en gros nous c'est canaliser une énergie, faire les choses, et puis après on pense éléments administratifs, eux c'est l'inverse.

P.L : On n'est pas rattaché à un lieu non plus, regarde, en quatre ans d'existence on en est à notre deuxième lieu. On est plus mobiles peut être, et puis on fait grandir aussi les choses, quand on est arrivés ici il y a des nouvelles personnes qui sont entrées, quand on partira d'ici y'en aura encore d'autres. Ça fluctue plus.

S.L : On est rattaché à un fonctionnement qui n'en est pas vraiment un en fait. Tu vois enfin c'est aussi le fait de ne pas rentrer dans les cases, ce n'est pas forcément quelque chose qu'on a voulu, mais voilà ça s'est présenté comme ça quoi...

E.G : Est ce que parfois il y a des personnes qui rentrent comme ça, ils ont entendu parler du lieu...

C.P : Ca arrive

S.L : Ca arrive pas beaucoup hein quand même !

C.P : Oui pas beaucoup, parce qu'on est vraiment très loin. Donc il faut quand même avoir très envie, puis un bon sens de l'orientation. Mais ça arrivait, surtout au début en fait, ça arrivait plus souvent. Ils rentrent et ils posent des questions. Oui, alors, des gens du coin, comme y a eu des petits articles dans le Sèvrien, et par curiosité...

S.L : Maintenant moins, par ce qu'en fait les gens passent directement par le site internet, et puis voilà, c'est beaucoup plus simple pour eux.

E.G : Vous êtes bien ici ?

C.P : On est bien ici, on est content. C'est très productif pour le travail d'être ici, très très efficace. Les bâtiments sont beaux, le site est classé site historique. Et puis même par rapport au travail, il y a une bulle de travail qui est très très forte. Par ce que à Belleville on était dans le centre de Paris, et il y avait toujours quelques choses à faire, on était plus dispersé. Ici tu viens et t'es dans une bulle de travail quand même.

E.G : Et vous pensez que si vous déménagez, vous arriverez à vous rétablir ailleurs ?

P.L : Oui

C.P : On l'a fait une fois, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas recommencer. Nous ici, y'a personne qui est accroché à son mètre cube. C'est bien, parce que ça renouvelle, ça fait de l'air. Y'en a qui restent, d'autre qui partent, qui font leur propre chemin...

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