I.1.2. Revue de la
littérature
En tant que domaine d'étude, les risques pour la
santé ne retiennent l'attention que depuis peu dans les pays en
développement. Or, la nécessité de les considérer
dans leur contexte local est encore plus évidente lorsque l'on analyse
les perceptions du risque dans ces pays, notamment lorsque les facteurs de
risque concernent des maladies potentiellement mortelles comme la tuberculose,
le paludisme et le VIH/SIDA. Il existe des menaces quotidiennes telles que la
pauvreté, l'insécurité alimentaire et l'absence de revenu,
et certaines familles doivent en outre faire face à des risques «
extérieurs » graves comme l'instabilité politique, la
violence, les catastrophes naturelles et les guerres. Les individus et les
familles doivent ainsi se préoccuper chaque jour de toute une
série de risques. Pourtant, c'est surtout dans les pays
industrialisés, où les gens sont le plus autonomes et le plus
libres d'agir, où ils ont le plus facilement accès à
l'information sanitaire et sont le plus à même de faire des choix
propres à améliorer leur santé, qu'ont été
mis au point des modèles de perception individuelle du risque et de
comportement à l'égard du risque. Ceux-ci peuvent donc être
moins adaptés aux pays à revenu moyen ou inférieur
où la morbidité et la mortalité sont étroitement
associées à la pauvreté et aux maladies transmissibles.
Dans les pays industrialisés, on a étudié
le VIH/SIDA et, dans une moindre mesure, des maladies non transmissibles telles
que le cancer et les cardiopathies coronariennes sous l'angle de
l'anthropologie médicale appliquée et de la sociologie.
Toutefois, dans les pays en développement où les maladies
transmissibles sont encore responsables d'une forte proportion de
décès évitables, ces disciplines ont été
très fréquemment adoptées pour aider à
évaluer l'efficacité des programmes de lutte contre la maladie.
Parmi les sujets souvent étudiés figurent les perceptions de la
maladie, l'utilisation des services de santé et les raisons du non
observance des traitements (Rodgers A, Vaughan P et al.,
2002).
Notons que l'impact des conditions de logement sur la
santé n'est pas une préoccupation récente.
Déjà, au début du XXe siècle à New-York, un
mouvement s'était formé en vue d'améliorer les conditions
de logement à l'origine de divers problèmes de santé. En
1939, le Comité sur le logement et l'hygiène de l'Association
américaine de santé publique publiait la deuxième
édition d'un document préconisant 30 principes de base pour un
logement sain. Encore aujourd'hui, des chercheurs considèrent la
qualité du logement comme une des conditions préalables à
la santé.
Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les
conditions de vie comme le logement et le travail ont davantage d'impacts sur
la santé que les services de santé (Norman K et Jo Anne
S, 2001).
En France, même après avoir soumis toute une
liste de menaces potentielles pour la santé dans leur logement (bruit
extérieur, amiante, humidité, acariens, ...), plus des trois
quarts des habitants ne pensent pas que leur santé est aujourd'hui
menacée dans leur foyer (42% ne le pensant même "pas du tout").
Cette sérénité est largement majoritaire toutes
catégories socioprofessionnelles confondues ; les Français
inquiets ne représentent qu'une faible minorité de la population
: en effet, si 22 % pensent que leur santé est aujourd'hui
menacée, très peu d'entre eux en semblent véritablement
convaincus (5%).
En fin, le fait d'avoir des enfants semble également
prédisposer à une plus forte inquiétude que dans les
foyers sans enfant, notamment en ce qui concerne les acariens. Les menaces les
plus souvent avancées sont étroitement liées aux
problématiques environnementales et aux débats suscités
ces derniers mois dans ces domaines (le bruit, l'air, saturnisme, pollution de
l'eau...).Ainsi, le bruit provenant de l'extérieur (30 %, plus
particulièrement dans les zones urbaines), la qualité de l'air
dans l'habitation (29 %) et le plomb provenant des canalisations dans l'eau du
robinet (29 %) sont les menaces les plus souvent citées devant les
acariens (22 %), l'amiante (16%) et l'humidité (12 %).
Les Français s'estime "bien informée" sur les
différents risques qu'encoure ou que pourrait encourir leur santé
ou celle des membres de leur foyer dans leur logement. Plus d'un quart d'entre
eux s'estiment même "très bien informé". A contrario, un
Français sur quatre estime ne pas bien être informés (23 %
"plutôt pas" et 18 % "pas du tout"). Le niveau subjectif d'information
est d'autant plus élevé que l'âge des répondants est
jeune, ce qui ne signifie en rien que ces classes d'âge ressentent un
danger particulier. Seuls les Français qui ressentent une menace
s'estiment plus que les autres mal informés (50 %). En effet, si
information il doit y avoir, elle doit prioritairement émaner des
pouvoirs publics (41%) et, dans une moindre mesure, des médias (25 %).
(Zumsteeg S, 2000).
Selon Norman King et Jo Anne
Simard, Il n'existe que peu de données sur l'ampleur du
problème des logements insalubres dans la région
Montréalaise. En 1998, le nombre total de plaintes pour
insalubrité des logements enregistrées par 11
municipalités de l'Île, était de 1.352. Ces plaintes
concernaient principalement la présence de vermine, les problèmes
de chauffage et d'infiltration d'eau, d'humidité et de contamination par
les moisissures.
Une étude effectuée en 1991 par
l'INRS-Urbanisation a conclu qu'environ 15 %
(50 000/325 000) des logements à Montréal
seraient mal entretenus ou dans un piètre état. En janvier 2000,
Laberge et al. présentaient des chiffres sur les variations
géographiques et annuelles de l'asthme au Québec. Leur
étude établit qu'il y a eu 102 551 visites à l'urgence
pour asthme en 1996. Elle indique également que les visites à
l'urgence et les hospitalisations dues à l'asthme augmentent dans les
territoires de CLSC socio-économiquement défavorisés. Des
études américaines appuient cette tendance et démontrent
également que les enfants des quartiers défavorisés sont
plus à risque pour le développement de l'asthme. Les chercheurs
identifient les conditions des logements insalubres comme un des facteurs qui
expliqueraient ce phénomène. En effet, les maisons vieillissent
et peuvent manquer d'entretien, surtout dans les quartiers
défavorisés (Norman K et Jo Anne S, 2001).
Au Congo Démocratique un ménage comptent six
personnes et près de la moitié, soit 42%, sont composés de
7 personnes ou plus. Par rapport à la promiscuité dans les
logements : dans l'ensemble du pays les ménages disposent en
moyenne de 3,3 pièces à usage d'habitation dans leur logement. Le
nombre moyen de chambres à coucher est de 2 ; mais 41% de
ménages n'ont qu'une chambre à coucher. La promiscuité
dans le logement est aussi importante en milieu rural qu'en milieu
urbain : deux ménages sur cinq habitent dans des logements à
une chambre et deux personnes sur cinq dorment à 4 ou plus par chambre
à coucher. En milieu urbain, la proportion des logements à une
chambre s'est accrue entre 1995(36%) et 2001 (43%), tandis que celle des
logements à 4 chambres ou plus a baissée, passant de 15 à
10% pendant cette période (Unicef,
MICS2 2001).
D'après UN-Habitat, pour l'ensemble de
l'Afrique, plus de 70% de la population urbaine souffre de privation d'abri,
c'est-à-dire se trouve sans logement adéquat, ni
approvisionnement en eau ou assainissement. La fréquence des situations
d'absence de normes sanitaires adaptées au niveau de densité
urbaine permet de comprendre pourquoi l'objectif de réduction de la
mortalité infantile des ODM est estimé ne devoir être
atteint en zones urbaines que dans un quart seulement (6/24) des pays
étudiés par Sahn et Stifel (2002), c'est
à dire encore moins que dans les zones rurales. Il serait
«rentable» de corriger ces inégalités
intra-urbaines ; Il n'est pas surprenant dans ces conditions de constater
que dans bien des villes africaines les entreprises et les ménages ne
subsistent que grâce à leur propre acharnement et d'observer la
quasi inexistence des services publics en dehors des quartiers
favorisés. Les États Africains sont les principaux
propriétaires et occupants des terres urbaines, comme à Addis
Abeba, il est clair que les coûts en termes de bien-être sont
élevés pour les entreprises comme pour les ménages.
Une prolifération de bidonvilles et d'installations
péri-urbaines en résulte (insalubres et illégales)
abritant la moitié ou les trois quarts de la population de la plupart
des villes Africaines.
Les enfants résidant dans les bidonvilles de Nairobi,
par exemple, sont soumis à des risques extraordinairement plus
élevés que ceux de leurs pairs vivant ailleurs dans les
mêmes villes ou dans des zones rurales. Au Ghana, les réponses au
questionnaire sur les indicateurs clés de bien-être de 2003 a
suggéré la considération non seulement de l'organisation
ou de l'utilisation des services de santé, mais aussi d'autres risques
qui sont peut-être en jeu tels que la médiocrité de
l'assainissement ou l'insécurité alimentaire.
L'accès à la littérature, nous a permis
d'identifier le problème relatif à la perception du risque
sanitaire lié à l'insalubrité et partant, nous avons voulu
appréhender comment les autres auteurs l'ont abordé à
travers le monde. Par cette occasion, notre attention est
restée marquée par le niveau de connaissance du risque
sanitaire attribuable à l'insalubrité de l'habitat en milieu
urbain.
Comparativement aux populations des pays
industrialisés, les risques sanitaires seraient restés
jusqu'alors plus faiblement perçus dans les pays en
développement.
Cette situation d'insuffisance de perception des risques, des
attitudes et pratiques dangereuses face à la salubrité du
logement dans la plupart des villes à travers le monde, nous pousse
à vouloir situer les villes de la RDC en générale et celle
de Lubumbashi en particulier, par rapport aux normes de la salubrité au
sein d'un habitat.
Ainsi, pour cette étude, nous formulons les
hypothèses telles que :
v Les populations sont informées sur les normes de
salubrité au sein de l'habitat et dans l'environnement en milieu urbain.
v Les populations sont conscientes des risques sanitaires
générés par l'insalubrité de leur habitat ;
v Les populations établissent des liens de
causalité entre certaines attitudes et pratiques et les problèmes
de santé au sein de l'habitat.
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