3.5-DISCUSSION -- CONCLUSION
Après la désarticulation manuelle des
cônes, les graines obtenues sont de 2 types : les graines fertiles et les
graines vaines. Ces dernières sont composées de trois
catégories : aplaties, attaquées et en forme de bec. Les graines
fertiles et attaquées sont localisées surtout dans la partie
centrale du cône.
136
L'étude de la production grainière par
cône est représentée par la figure n°37 ; elle montre
que l'année de la fructification et la station influencent d'une
façon significative la qualité et la quantité des graines
:
La production totale des graines par cône est
très importante quand la fructification est forte, par contre, elle est
peu variable entre les stations quand l'année de fructification est
faible à moyenne.
Celle des graines fertiles est également variable et plus
importante sur l'exposition Nord et durant l'année de forte
fructification : elles nous renseignent sur l'état de la
cédraie
Le nombre de graines vaines d'une part et celui des
différentes catégories varie également d'un cône
à un autre selon l'année et la station.
Aussi, quand l'année de production est forte on assiste
à une importante production de graines fertiles, ces dernières
sont négativement corrélées aux graines tout venant. Ceci
nous permet de dire que chez le cèdre de l'Atlas, la majorité des
ovules donneront des graines fertiles (la pollinisation et la
fécondation atteignent l'optimum)
Durant les années de faible à moyenne
production, les graines vaines sont composées essentiellement de graines
aplaties; ces dernières occupent la quasitotalité des graines
totales (tout venant) surtout quand la station est défavorable. Elles
ont tendance à diminuer au profit des graines fertiles, au fur et
à mesure que la fructification augmente, particulièrement quand
les conditions climatiques sont favorables.
L'estimation des graines aplaties (graines sans embryon) est
très importante pour l'étude de la
régénération naturelle du cèdre de l'Atlas. Leur
existence est due à l'avortement des ovules (non-pollinisation et /ou
non-fécondation) est le résultat de la compétition entre
le cycle de reproduction et végétatif, l'état de
santé et l'âge de l'arbre ... cette catégorie de graines
pourraient nous renseigner sur la qualité de la station et l'état
du peuplement. Au Belezma le nombre de ces graines est très important
quand la fructification est faible surtout sur l'exposition Sud.
Il apparaît l'existence d'un système de
compensation entre la production des graines fertiles et aplaties. Autrement
dit, le cèdre de l'Atlas, tend à moduler sa production
grainière en fonction de la disponibilité des ressources de la
station (facteurs extrinsèques) et de l'arbre lui- même (facteurs
intrinsèques). Ces facteurs qui caractérisent
généralement tous les arbres (forestiers et fruitiers) sont
considérés comme étant une adaptation
quelles que soient les conditions écologiques : c'est le
phénomène de l'alternance entre la fructification et
l'accroissement.
Cette alternance qui affecte selon COURANJOU (1982) un grand
nombre ou la totalité des mécanismes physiologiques qui se
traduisent par une diminution de la surface foliaire durant l'année de
forte fructification. Ainsi, au cours de nos différentes observations
sur l'estimation de la fructification, il n'est pas rare de rencontrer des
pieds de cèdre qui portent peu ou pas de cônes mais, sont pourvus
d'une importante surface foliaire.
Outre, l'année de fructification, la qualité de
la station joue également un rôle très important sur la
qualité et la quantité des semences. TOTH (1978 a ; 1980 b)
rapporte que la production des cônes et la qualité physiologique
et biologique des graines de Cedrus atlantica M sont liées aux
conditions climatiques et la sylviculture mise en oeuvre durant toute la
137
période du cycle de reproduction ; le nombre de graines
dépend du milieu BOUDY (1950) ; il résulte aussi du houppier, du
diamètre et de la hauteur de l'arbre : elle est d'autant plus importante
quand la cime est plus étalée et éclairée
être donc plus espacée (LEE in KROUCHI,1995 ).
DERRIDJ,(1990 ) a mis en évidence l'influence de la
station sur la production qualitative et quantitative des graines entre les
cédraies humides et sèches, ainsi que l'altitude pour une
même station. Des études réalisées par KROUCHI
(1995) ont montré l'existence de très grandes variabilités
dans la production des graines tout venant et des graines fertiles pour une
même station.
Au Belezma, l'exposition Nord est caractérisée
d'une part, par un ensoleillement journalier et saisonnier favorable et d'autre
part, d'un froid nocturne et matinal ; ces deux éléments qui
influencent fortement l'ensemble des paramètres favorables au
développement des graines de cèdre : Floraison -- pollinisation
-- maturation -- dissémination et germination.
A l'échelle du cône, le nombre de graines
attaquées est variable selon la station, l'année de
fructification et la position des cônes dans l'arbre. Leur importance est
liée aux fluctuations des cônes (hôte) donc à
l'alternance de la fructification et aux facteurs climatiques. ROQUES (1983) a
montre qu'il existe une étroite corrélation entre la levée
des diapauses et l'intensité de la floraison de l'année, cette
diapause peut durer 5 années consécutives.
Aussi, à travers les résultats obtenus, nous
avons noté que plus la production est forte et plus le nombre de graines
attaquées est important. Les pullulations des insectes ravageurs de
cônes et de graines suivent, selon ROQUES (1983) l'importance de la
fructification.
L'insecte ravageur des graines s'est adapté
au cycle de fructification du Cèdre de l'Atlas : plus le taux
de graines attaquées et important, par rapport aux graines fertiles, et
plus l'année de fructification est bonne. En outre, le nombre de graines
attaquées est relativement plus important sur les branches hautes que
les branches basses. Ceci est dû aux facteurs climatiques ou le
paramètre lumière, semble jouer le principal rôle ROQUES
(1988).
L'influence de ces insectes est susceptible de jouer un
rôle non négligeable dans la régénération des
essences forestières d'altitude. Ainsi, divers auteurs CANTGREL (1988),
DEMOLIS (1988) OTT (1988), SKRZYPCZYNSKA (1988) et TRO S SET (1988) ont
insisté sur l'importance de l'impact des insectes ravageurs de graines
sur la régénération des peuplements forestiers dans les
zones tempérés. TOTH (1975a, 1978b 1980c) a souligné
l'influence sur la régénération, des ravageurs de graine
dans les cedraies artificielles. MOUNA (1993) a répertorié au
niveau des cédraies naturelles du Maroc 4 insectes
inféodés aux fleurs mâles, aux inflorescences femelles, aux
cônes et aux graines.
L'étude des caractères biométriques (le
poids, la longueur et le diamètre) des cônes en relation avec la
station et la position des cônes dans
l'arbre est la figure n° 37 synthétise les principaux
résultats ; ces derniers nous a permis de constater l'existence
d'écarts, particulièrement le poids. Ainsi, ceux de l'exposition
Nord sont plus importants que ceux de l'exposition Sud. Par ailleurs, pour une
même exposition, les paramètres biométriques des
cônes des branches hautes sont les plus dimensionnés, que ceux des
branches basses..
L'écart obtenu pour chaque caractère nous permet de
constater que le poids apparaît comme étant le
meilleur critère pour spécifier les populations.
En outre les cônes dont la
138
biomasse est importante possèdent non seulement les
dimensions les plus importantes mais sont les plus fertiles (initiation
précoce des inflorescences femelles, station favorable forte
fructification...).
Le poids des cônes murs présentent de grandes
variations selon DERRIDJ (1990) les cônes des cédraies de l'Atlas
Tellien sont plus lourds que ceux de l'Atlas Saharien. Ces grandes
variabilités géographiques ont amené plusieurs auteurs,
notamment GAUSSEN (1964) et DERRIDJ (1990) a émettre l'hypothèse
selon laquelle le cèdre de l'Atlas Saharien est plus primitif que celui
de l'Atlas Tellien.
Les tendances évolutives pour les cônes
correspondent à une augmentation leur taille (GAUSSEN (1967).
Ainsi, nous sommes tentés par l'hypothèse que le
cèdre de l'exposition Sud s'est adapté à une
sécheresse plus prononcée et constitue peut être un "
écotype ".
Le poids des graines chez une espèce donnée est
considéré selon HARPER et al (in HENDRIX, 1984) comme un
caractère constant ; cependant d'autres auteurs ont signalé qu'il
peut varier énormément. (SALISBURY BLACK HARPER et al in HENDRIX,
1984).
En outre, LALONDE et al (1989) ont noté que les arbres
attribueraient un taux de ressources fixe à chacune des graines,
au-delà d'un certain seuil l'arbre a tendance à produire une
nouvelle graine ;les graines seront donc, approvisionnées de la
même manière, il y aurait par conséquent peu de variation
dans leurs poids.
Il est considéré comme étant le
caractère le plus indiqué pour étudier la
variabilité géographique des essences forestières. Il est
influencé selon BIROT (in DERRIDJ, 1990) par les effets maternels, mais
il est davantage sous dépendance climatique. TOTH (1980) note que parmi
les facteurs principaux, la pluviométrie et la durée de
sécheresse sont les plus importantes.
Il a été proposé par BARITEAU et al.
(1990) comme critère de sélection chez les cèdres de
l'Atlas, TOTH (1978 a) pour étudier les possibilités de
régénération naturelle et DERRIDJ (1990) pour discriminer
les populations du cèdre en Algérie, KROUCHI (1995) et HARROUCHE
(1991) pour analyser le succès reproductif de Cedrus atlantica
M.
Comme pour les cônes, ce sont les arbres de l'exposition
Nord, qui produisent les graines fertiles les plus lourdes et les plus longues.
On peut dire, que le poids des graines fertiles est influence par les
caractères biométriques des cônes : plus les cônes
sont lourds et plus le poids des graines est important.
Par ailleurs l'analyse du poids des graines fertiles et
attaquées montre que ces derniers sont deux fois moins lourdes que les
graines fertiles.
DERRIDJ (1990) et HARROUCHE (1991) ont mis en évidence,
la variation du poids des graines fertiles entre les cédraies
sèches et humides. Ce caractère est lié fortement à
l'altitude pour une même station.
Nous savons que le cône de cèdre acquiert sa
maturité en 32 mois environ, durant lesquels l'arbre subit l'influence
des contraintes du milieu, qui aurait pour conséquence la
139
limitation ou non du taux d'approvisionnement sur la biomasse des
cônes et donc la production quantitative et qualitative.
Cette production est en relation directe avec la biomasse des
cônes et dépend de plusieurs facteurs :
- Edaphiques, climatiques et microclimatiques.
- Nutritionnel en relation avec la position du cône dans
l'arbre et celle de la graine dans le fruit.
- Phénologique, à savoir l'initiation de
l'inflorescence femelle et la synchronisation entre la disponibilité du
pollen, les fleurs femelles et l'ouverture de leurs bractées.
- Des conditions ayant prévalu durant le cycle de
reproduction, surtout l'année N + 1 elles peuvent constituer une
contrainte à l'approvisionnement.
- Peuplement : densité, traitements sylvicoles, âge,
état de santé et caractéristiques dendrométriques
(houppier, diamètre et hauteur).
- Année de fructification.
- Génétique (fertilité de l'arbre).
- Altitude pour une même station.
- Concurrence entre le cycle reproducteur et
végétatif.
140
TROISIEME PARTIE : LA REGENERATION DU CEDRE DE
L'ATLAS. CHAPITRE I : La germination des graines de
cèdre.
CHAPITRE II : Influence des prétraitements des
graines sur le développement des semis.
CHAPITRE III : Influence du travail du sol sur les
premiers stades des semis naturels
|
Introduction :
La régénération du cèdre de
l'Atlas demeure à l'heure actuelle un problème important pour la
pérennité des cédraies Algériennes en
général et celle des Aurès en particulier. Elle
dépend en grande partie des conditions du milieu. En effet, les
paramètres de station particulièrement les températures et
les précipitations influencent la fructification, le pouvoir germinatif
des graines, la germination, l'installation et le maintien des semis. Ils
agissent en même temps et dépendent en grande partie de
l'exposition et de l'altitude.
D'autres facteurs considérés généralement comme
secondaires peuvent devenir des facteurs limitants : sol (physique, chimique et
biologique), couvert et strate herbacée.
Selon VALETTE (1983) la régénération
artificielle en zones méditerranéennes rencontre de
sérieuses difficultés en raison des contradictions du milieu
souvent difficiles.
Au Belezma même si la régénération
naturelle du cèdre de l'Atlas est présente dans certains
endroits, la situation actuelle, particulièrement sur les expositions
défavorables, ne permet pas au cèdre de se
régénérer dans les limites acceptables ; les conditions
climatiques défavorables et l'absence des travaux sylvicoles
associés aux influences néfastes de l'homme ont
déséquilibré l'écosystème. Ainsi, la faible
densité des peuplements sur les expositions Sud ne permet pas à
cette essence de se renouveler normalement, car la présence de vieux
individus dépérissants et dispersés limite les
possibilités de productions et de dissémination.
Les travaux des différents auteurs, ont permis de
subdiviser le problème de la régénération en deux
sous - problèmes bien distincts : la germination de la graine et le
maintien des semis.
Ainsi, CARLIER (1988) souligne que parmis les nombreuses
causes possibles de l'insuffisance de la régénération des
péssières d'altitude pourraient consister en ce que les
conditions nécessaires à la germination ou à la
conservation des graines ne soient pas habituellement réalisées.
CANTEGREL (1988) rapporte que le renouvellement des fôrets
pyrénéennes est fonction de la germination.
La germination et le maintien des semis en milieu naturel du
cèdre de l'Atlas ont été surtout étudiés par
LEPOUTRE (1961,1963), LEPOUTRE et PUJOS (1963), MALKI (1992) leurs travaux de
recherches montrent que la régénération naturelle est
étroitement liée aux facteurs bioclimatiques, qui conditionnent
la date de germination, le développement des semis et leur
capacité à développer un système racinaire capable
d'assurer l'alimentation hydrique durant la période estivale.
TOTH (1971, 1973, 1978 a, 1980,1980 c) a mis en
évidence l'étroite relation entre le cycle de production des
graines, la régénération et les conditions
écologiques. Le même auteur a expérimenté
également au laboratoire et sur terrain l'influence de différents
facteurs (hydratation, température, éclairement, ...etc.) sur la
germination des graines de cèdre.
Notons également que la germination des graines de
Cédrus atlantica M et leur conservation à fait l'objet
de plusieurs publications : ZAKI, 1970 ; ABOUROUH, 1983 ; MULLER et al, 1984;
DERRIDJ, 1990 ; BARITEAU, 1993 et BARITEAU et al, 1994.
La germination pourrait contribuer aux difficultés et
aux entraves de la régénération naturelles et
assistées. Ces derniers pourraient provenir de : -l'hydratation
insuffisante des graines reposant sur le sol nu - la perte de vitalité
des graines insuffisamment hydratées principalement quand
l'été est précoce - médiocres taux de
germination.
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