1.1.2. L'innovation financière et la globalisation
des marchés :
La contrainte favorise l'imagination ;
La levée des contraintes la favorise tout autant.
Les opérateurs américains n'ont pas attendu
l'apparition des conditions psychologiques favorables à la
déréglementation pour chercher à détourner la loi
qui leur interdisait certaines opérations. Le meilleur exemple est celui
des cautions qui ne peuvent être délivrées aux Etats-Unis
que par les compagnies d'assurances. La généralisation des
stand-by letters of crédit ("lettres de crédit en attente"
c'est-à-dire engagement de payer sous certaines conditions) remplit le
même office en faisant appel à la technique documentaire
accessible aux banques.
Mais dès lors qu'on a permis à un plus grand
nombre d'opérateurs d'accéder à un plus grand nombre de
marchés et d'opérations, on a connu une véritable
explosion d'innovations financières et bancaires. On peut citer la
naissance des marchés comme celui des contrats à terme ou des
options en tous genres. On peut citer la création de tous les types
possibles d'obligations ou d'actions. On peut citer également la
floraison de tous les services de gestion de trésorerie favorisée
par la généralisation des technologies micro-informatique.
Depuis plusieurs décennies déjà,
l'innovation américaine sert de référence et d'exemple aux
transformations engagées dans un grand nombre de pays
industrialisés. La déréglementation bancaire et
financière américaine s'est propagée sur toutes les places
importantes du monde, avec plus ou moins de rapidité et de
brutalité suivant qu'il s'agissait de lever un grand nombre de
contraintes, ou qu'au contraire l'absence de réglementation
contraignante n'exigeait pas de réelles mutations. C'est
incontestablement les places anglaise et canadienne qui ont été
les premières touchées et qui ont connu une véritable
révolution financière. Là, comme aux Etats-Unis, le
système était archaïque, contraignant et très
cloisonné. La, comme aux Etats-Unis, les imaginations fertiles et les
progrès technologiques ont permis une déréglementation
rapide et donné naissance à une grande vague d'innovations
financières.
Les places française et japonaise suivent tout à
la fois en termes de chronologie et d'intensité. Mais c'est peut
être le cas de la France qui est le plus original. Il l'est par la
brutalité d'apparition du phénomène, par son ampleur et
par son essence : les pouvoirs publics ont pris de vitesse les
opérateurs, en mettant en place un cadre adéquat, si bien qu'il
faut attendre désormais que les opérateurs prennent le relai, ce
qui semble être tout à fait le cas. En effet, les réformes
ont été voulues en France par les autorités de tutelle
(quels que soient les gouvernements en place) et non par les marchés et
se sont inspirées des techniques pratiquées sur les
marchés anglo-saxons.
Enfin les places allemande et suisse sont touchées
à un moindre degré. Les progrès technologiques motivent
principalement les innovations. La déréglementation
n'apparaît pas en revanche comme une très forte
nécessité tellement la réglementation existante
était peu contraignante.
Sur un plan purement européen, est venue très
rapidement s'ajouter à ces éléments de mondialisation, la
création de 1'« espace unique
européen » à compter du 1er janvier
1993, qui implique notamment la liberté de concurrence en matière
de prestation de services bancaires dans l'ensemble de la Communauté.
Cette " globalisation " dans le cadre européen a été
fortement amorcée dès le 1er juillet 1990, date
à laquelle la liberté totale de circulation des capitaux entre
les pays-membres de la CEE a été établie ou
rétablie.
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