Droit uniforme en droit du commerce international( Télécharger le fichier original )par Sokpheaneath HOUN Université Lumière Lyon 2 - Master 1 Droit des entreprises en difficulté 2005 |
Chapitre 1er : La nécessité de l'existence d'un droit uniformeIl faut montrer que l'apparition du droit uniforme est nécessaire. Pour ce faire, il nous incombe de dire que seul le droit uniforme est susceptible de mieux régir les relations commerciales internationales. C'est la raison pour laquelle il convient de passer avant tout par expliquer et montrer les intérêts du droit uniforme afin de mieux éclairer l'importance de son existence (section 1), et de finir par l'étude sur l'élaboration du droit uniforme (section 2). SECTION I : Les intérêts du droit uniformeLe droit uniforme est une notion juridique qui présente quelques intérêts à l'égard de la communauté internationale et, partant, la nécessité de son existence peut se justifier. Il vise notamment à assurer la sécurité dans la vie juridique et à simplifier les droits (§ 1). Pour autant, les rapports entre le droit uniforme et le droit international privé sont maintenus. Cela s'explique par le fait que la seule existence de l'un d'entre eux ne suffit pas à éliminer tous les soucis ou problèmes qui découlent de conflit de lois (§ 2). § 1 : Assurer la sécurité dans la vie juridique et simplifier les droitsLa dimension du monde est affectée par les découvertes modernes. Les relations privées, en conséquence de ce développement, se sont établies de plus en plus nombreuses sur le plan international. Cependant, l'absence des lois spécialement faites pour les régir, le conflit des lois nationales et l'incertitude qui en découle, constituent une entrave non négligeable à la formation et à l'exécution des transactions internationales9(*). L'unification internationale du droit comme d'ailleurs l'unification de la solution de conflit de lois apparaissent comme se rattachant à l'idée de sécurité10(*) (A). En effet, la sécurité n'est pas la seule base du droit. L'unité est un besoin qui a toujours hanté les hommes, pas seulement dans la vie sociale, mais dans tous les domaines, fussent-ils les plus techniques11(*). Donc l'idée de clarté, de simplicité est aussi une idée fondamentale, car il répond à un des besoins de notre esprit, peut-être à son insuffisance12(*) (B).
A. Assurer la sécurité dans la vie juridique Certes, le droit uniforme participe activement à assurer la sécurité juridique des commerçants car il permet aux juges de régler de manière uniforme tous les rapports juridiques. Alors, le commerçant n'est plus soucieux car il sait que quel que soit le juge compétent, leurs rapports juridiques seraient soumise aux mêmes règles. Cette argumentation a été renforcé par le rappel sur l'histoire, au moyen âge, lorsqu'une affaire se présentait devant un tribunal et qu'on pouvait hésiter entre l'application de plusieurs lois, des marchandises ayant été vendues à l'étranger par exemple, le juge appliquait sa propre loi et aucune autre13(*). Ce système de territorialité absolue de la loi enlevait toute sécurité dans les relations avec les autres pays. Comme on ne savait pas toujours à l'avance devant quel tribunal un procès pourrait s'élever, on ne savait pas d'avantage quelle règle de droit serait appliquée à un contrat.14(*) D'ailleurs malgré l'existence de droit international privé de l'Etat qui s'occupe de régir les rapports à caractère internationaux entre les individus, la sécurité demeure non assurée à cause, d'une part de la diversité et incertitude des règles de conflit (1) et, d'autre part de la difficulté de connaître et interpréter la loi, lorsqu'il s'agit d'une loi étrangère à celle du juge saisi du litige (2). 1. La diversité et incertitude des règles de conflit Normalement, la technique que les Etats utilisent pour résoudre les problèmes qui leur sont posés est certes celle de conflit de lois15(*). Mais le recours à cette technique ne donne pas des résultats purement justes et corrects dans toutes les circonstances car la règle de conflit de lois varie d'un Etat à l'autre entraînant de différents résultats pour un seul problème. Prenons l'exemple de cas d'un commerçant français qui a conclu un contrat de vente des marchandises en Allemagne ou en Angleterre qui doivent faire l'objet d'un transport de l'Allemagne ou de l'Angleterre en France. La question se pose alors de savoir comment vont être déterminés, dans un tel cas, le moment où le contrat est conclu, les obligations du vendeur, la sanction de ses obligations, les circonstances qui peuvent mettre fin au contrat. Pour répondre à tous ces problèmes dans tous les Etats, il faut appliquer les règles d'un droit national de droit international privé, ce qui pose premièrement la question de savoir quel droit national, cependant, sera applicable ? A ce point, les réponses se divergent selon le droit de chacun des pays. Tout d'abord, en droit anglais, la réponse est alors que l'on doit appliquer « the proper law of the contract »16(*). Pour la première vue la réponse parait adéquate à la question. Mais le problème demeure exister si on continue de poser ensuite ce qu'est cette « proper law » - c'est-à-dire quelle est la loi la plus propre à régir le contrat en cause? Pour se prononcer, les juristes anglais vont prendre en considération toutes les circonstances. Mais de façon générale, il n'y aura aucune circonstance qui puisse conduire, de façon décisive, à choisir la loi anglaise ou la loi française pour régir le contrat. Celui-ci est 50% anglais et 50% français ; plus exactement il n'y a pas de nationalité. Les circonstances auxquelles on va s'attacher pour donner au contrat une nationalité seront en fait, le plus souvent, dépourvues de signification et de poids17(*). En conclusion, le droit anglais se caractérise par la grande incertitude qu'il laisse planer sur la question18(*).
La réponse sera différente à celle de droit anglais si, en suit, cette même question concernant la loi applicable au contrat, est posée à un juriste français, celui-ci déclara qu'il y a lieu d'appliquer la loi d'autonomie, c'est-à-dire celle que les parties ont choisi. Comme le droit anglais, cette solution parait la première vue parfaite. Mais le problème va encore se poser si les parties n'ont pas choisi le droit applicable à ses contrats. Comment alors fait le juge ? Le juge français aura tendance à appliquer le droit qu'il est le plus naturel pour un juge français d'appliquer, à savoir le droit français19(*). Pareil cas, l'incertitude sera la même pour le contrat conclu dans les rapports franco-allemands. Le juriste français pour déterminer la loi d'autonomie prend en considération le lieu de conclusion du contrat alors à l'inverse pour le juge allemand, lui, se réfère, de référence, au lieu d'exécution caractéristique du contrat20(*). En conclusion à travers de l'exemple montré, on voit que la diversité des règles de conflit de lois qui diffèrent de l'Etat à l'autre met sérieusement en cause la sécurité dans la vie juridique des individus notamment la sécurité juridique des commerçants car les règles de conflit de lois de chaque Etat donnent le résultat au mêmes questions posées complètement différent selon ses raisonnements et conception juridique propre ; ce qui ne permet pas de savoir quelle est la meilleure solution qui répond de manière juste aux litiges. En plus la confrontation entre les conceptions juridiques des Etats provoquera le problème non négligeable dans la procédure d'exécution de jugement. Elle rendra, certes, la décision d'un Etat étranger sans valeur dans un Etat où la décision doit être exécutée. Autre que les difficultés nées de la diversité et incertitude de conflit de loi qui souvent rend difficile à déterminer la loi applicable dans les rapports qui présentent un caractère internationaux, on trouve que la difficulté est également liée à l'application de la loi étrangère. 2. La difficulté d'application de la loi étrangère
Dans l'étape de la détermination de loi applicable au litige, dans l'application de la règle nationale de conflit de lois, il résulte que la loi compétente sera, soit celle interne, soit celle étrangère. S'il s'agit de la loi interne qui à vocation à s'appliquer, il n'y a aucune difficulté parce que c'est la loi du juge saisi et lui, il connaît bien le contenu de son for. A l'inverse s'il s'agit d'une compétence de la loi étrangère, le problème se pose inévitablement sur la compréhension de cette loi étrangère. Ce problème est le problème majeur que souvent rencontrent tous les juges lorsqu'ils trouvent dans ses règles nationales de conflit de loi que la loi étrangère est applicable. De cette manière, la difficulté est née car il s'agit du cas où le juge applique une loi qui échappe à ses connaissances juridiques. Notamment une loi qui appartient à une autre famille juridique que son droit national comporte un autre jeu de concepts, appelle d'autres méthodes d'interprétation que son droit national21(*). Alors le droit étranger applicable est complètement incompréhensible au juge saisi et comment alors le juge applique et interprète une loi qu'il lui-même ne comprend pas à l'affaire litigieuse ? L'application du droit étranger par le juge interne risque d'aboutir à une déformation de ce droit, ne serait-ce qu'en raison du fait que le juge ne peut avoir généralement un accès direct aux sources de ce droit, écrites en une langue qui n'est pas la sienne22(*). En conclusion, sur le point de vue de ce problème la situation de sécurité juridique des individus est gravement malade car s'il s'agit de faute d'interprétation ou mal d'interprétation d'une loi par le juge et il peut paraître injuste pour les parties. C'est pour cette raison qu'on essaie d'unifier les règles de droit qui est le seul moyen pour assurer la sécurité dans la vie juridique. A travers de droit uniforme on n'est plus soucieux sur le point de vue de l'application de droit par le juge car tous les juges, quel que soit leur système juridique, doivent appliquer le même droit qu'ils sont tous au courant.
D'ailleurs la sécurité dans la vie juridique n'est pas la seule base de l'unification de droit. Il ne faut pas oublier que dans l'opération du commerce l'idée de simplification est aussi importante. B. Simplifier les droits, but principal du droit uniforme Pour quoi on unifie le droit ? Ce n'est pas pour rien et ce n'est pas non plus pour plaisir qu'on essaie d'unifier le droit. Le besoin de clarté, de simplicité est une idée fondamentale, car il donne la réponse à un des besoins de notre esprit, peut-être à son insuffisance. En plus, l'unité est un besoin qui a toujours hanté les hommes, pas seulement dans la vie sociale, mais dans tous les domaines, fussent-ils les plus techniques23(*). Il existe d'autant plus que nos sociétés doivent pour se progresser être plus complexes, plus savantes. Cette complexité des institutions ne peut cadrer avec la construction de notre esprit, qu'autant que par un effort constant, nous éliminons du monde extérieur les complications inutiles24(*). Vue le caractère important de droit uniforme qui participe activement à simplifier et qui de ce fait donner plus de sécurité par un droit plus facile à connaître, on constate qu'à l'intérieur des Etats il y a des mouvements de codification, celle-ci substituant à une série de texte difficile à retrouver une série méthodique de solution facile à consulter. L'absence de codification au niveau interne nous rend difficile dans le rapport de recherche car les lois se trouvent partout sans classification des ordres. Mais si c'est au niveau international, on parle de l'unification de droit et non de codification. A vrai dire, le but de l'unification et de codification est le même : c'est de simplifier les droits et rendre les règles juridiques plus faciles à comprendre et plus lisibles. L'unification du droit consiste en ce que la même règle de droit s'appliquera dans un certain nombre de pays sur un point donné de sorte que tout se passera à ce point de vue comme s'il ne constituait qu'un seul territoire25(*). L'exportateur des différents pays ayant établi entre eux l'unification n'aura plus qu'à appliquer une seule loi, la sienne, et il ne sera plus exposé suivant les cas, à savoir appliquer des lois de nombreux pays à l'étranger. Sous ce régime, le droit s'adapte véritablement aux nécessités pratiques car elle permet de faciliter les opérations des échanges commerciaux parce que quand on parle du commerce, on parle de la rapidité. En effet, « le tempe, c'est de l'argent » pour les commerçants et pour cela on veut supprimer, en mesure du possible, toutes les complexités inutiles et notamment celles qui résultent de la diversité du droit. C'est ainsi qu'en délaissant les larges domaines dont le régime national n'est pas susceptible d'être remplacé par une réglementation internationale, en raison de son acclimatation dans la conscience juridique des différents peuples et de son accent national légitime26(*), les Etats ont pu, dans d'autres domaines non moins vastes, éliminer des divergences de droit d'un pays à l'autre grâce à une réglementation uniforme précisée dans une convention internationale. On arrive finalement à conclure à ce que l'apparition et le développement des relations privées, notamment les relations commerciales au sein du monde exigent indispensablement un rapport de droit spéciale et commun pour les régir. La loi interne de chaque Etat ne peut pas s'adapter à la situation internationale, en plus ses Etats ont des systèmes juridiques propres qui traitent de manière différente une question de droit. Alors les individus ne sont pas assurés sur le plan de sécurité dans ses rapports juridiques. Le seul moyen à suivre pour résoudre tous ces problèmes est de recourir à un droit qui est uniforme pour tout le monde. En constatant le caractère important et nécessaire du droit uniforme qui prévaut sur la règle de droit international privé, une question vient de se poser : est-ce dire qu'en ces matières, le droit uniforme ayant effacé la diversité des loi nationales, les règles de solution des conflits de lois doivent disparaître ? La réponse à cette question est tout à faite négative. Malgré les intérêts que procure le droit uniforme ce la ne signifie pas que l'apparition de droit uniforme fait disparaître la règle de droit international privé. D'où l'intérêt de fait les études sur les rapports entre les deux branches de droit. * 9 Salés Jaques, Droit uniforme et conflits de lois, p. 1 * 10 Démogue René, « L'unification internationale du droit privé », RTD. Civ. 1928. p. 8 * 11 Philippes MALAURIE, loi uniforme et conflits de lois, Travaux du Comité français de droit international privé, 1964-1966, Séance du 2 avril 1965. p. 83 * 12 Démogue René, « L'unification internationale du droit privé », RTD. Civ. 1928. p. 10 * 13 BATTIFFOL Henri, Traité élémentaire de droit international privé, 3e éd. L.G.D.J. 1959. n° 13. * 14 Salés Jaques, Droit uniforme et conflits de lois. p. 2 * 15 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968. p. 22. * 16 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968. p.23. * 17 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968. p. 24 * 18 Graveson (R.H.), Hague Conference on private International Law, 2 int. and Comp. Law Quarterly, 1953 p.605. * 19 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968.p. 24 * 20 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968. p. 25 * 21 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968. p. 33. * 22 René DAVID, Cours de droit privé comparé, rédigé d'après les notes et avec l'autorisation de M. RENÉ DAVID, 1967-1968. p. 33 * 23 Philippes MALAURIE, loi uniforme et conflits de lois, Travaux du Comité français de droit international privé, 1964-1966. Séance du 2 avril 1965. P. 83 * 24 Démogue René, « L'unification internationale du droit privé », RTD. Civ. 1928. p. 10 * 25 Démogue René, « L'unification internationale du droit privé », RTD. Civ. 1928. p. 11 * 26 Zweigert, « une juridiction supranationale pour l'interprétation du droit unifié ? », Rev. int. de droit comparé, 1961. p. 717 |
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