2. Enjeux dans le secteur de la Bancassurance
Tendances et évolutions de la Bancassurance
Le métier de la Bancassurance doit faire face à
deux tendances fortes : la mondialisation et la concentration sectorielle, ces
deux tendances étant liées. En effet, les marchés
financiers ont été les pionniers de la mondialisation dans les
années 80, qui ont été les premiers marchés
globaux. A l'inverse, la mondialisation entraine une compétition
mondiale et oblige les Bancassurances à devenir des poids lourds
mondiaux, et donc favorise la concentration sectorielle.
Aujourd'hui, les banques doivent absolument atteindre une
taille critique pour pouvoir évoluer sur le marché mondial,
cette mondialisation ne se limitant plus aux marchés financiers
mais s'étendant à l'ensemble des métiers de
la bancassurance (banque de détail ou assurance par exemple).
La banque globale, capable d'avoir une présence
commerciale dans différents pays, est un enjeu supplémentaire
pour les banques françaises car elles évoluent sur un
marché intérieur saturé. La stratégie de banque
universelle, qui consiste à offrir l'ensemble des produits bancaires,
financiers et d'assurance, au sein d'un guichet unique atteint ses limites.
Ainsi, dès les années 80, en plus de proposer les produits
bancaires classiques (moyens de paiements, prêts, placements), les
banques françaises se sont lancés sur le marché lucratif
de l'assurance. Il s'agit du début de la bancassurance, qui consiste
à offrir via un canal de distribution unique, des produits bancaires et
d'assurance. Cette tendance a contraint les acteurs de l'assurance de
développer une offre équivalente en proposant elles aussi des
produits bancaires. Par exemple, Axa lance Axa Banque en 1991. Cette
concurrence s'est encore accrue encore au cours des années 90, avec la
Grande Distribution qui propose elle aussi des services financiers (carte de
paiement, crédit à la consommation,...) et avec le renforcement
du marché des courtiers (en assurance, prêts ou investissement
boursier) grâce à Internet.
Cette concurrence importante sur le marché de la
bancassurance entraine une très forte atomisation de l'offre. Pour
exister, les banques ont été contraintes d'ouvrir un nombre
conséquent d'agences entrainant une saturation du réseau de
distribution. Enfin, les banques ont été contraintes de proposer
une offre commerciale agressive qui a fait que le taux d'équipement des
ménages français en produits de banque et d'assurance est
très élevé. Tout ceci rend très difficile et
très couteux le développement sur le marché
français.
Ainsi, a été lancée l'idée de
chercher des relais de croissance à l'étranger, en capitalisant
sur le savoir-faire acquis sur le marché français pour
équiper la clientèle étrangère. Ce
développement a été d'abord mené en Europe de
l'Ouest, notamment en Italie, où les marges étaient encore
très supérieures à celles de la France au début des
années 2000. Aujourd'hui, la nouvelle concurrence sur cette zone a
considérablement réduit cet écart. Il est
dorénavant nécessaire de se tourner vers les pays
émergents, notamment l'Europe de l'Est, le Bassin
Méditerranéen, et le groupe BRIC (Brésil, Russie, Inde,
Chine).
La Société Générale, comme la
plupart des banques françaises, suit cette tendance et
possède des filiales banque de détail à
l'étranger, notamment en Roumanie (BRD), au Maroc (SGMB)
ou en République Tchèque (KB). L'axe de
développement de la Société Générale se
situe principalement en Europe de l'Est et dans le Bassin
Méditerranéen, et ceci par croissance externe, c'est à
dire en rachetant des banques locales déjà implantées dans
le pays. Ce réseau de distribution est ensuite utilisé pour
proposer l'ensemble des produits du Groupe.
Ces acquisitions en dehors des frontières
françaises ont entrainé l'intégration de nombreux
systèmes d'informations et processus métiers très
différents d'une banque à une autre. De plus, dans certains cas,
le système d'information de ces petites structures était presque
inexistant et les processus étaient souvent mal définis et non
respectés. L'enjeu est de pouvoir équiper ces filiales d'outils
modernes en capitalisant le déploiement sur l'ensemble des filiales. Les
achats ont alors un rôle important sur ce type de projet.
Dans ce contexte, les banques doivent être
particulièrement rentables, d'une part pour permettre l'amortissement de
leurs acquisitions, et d'autre part pour soutenir leur cours de Bourse et
rendre difficile une OPA hostile de la part d'une banque concurrente. Il n'est
donc pas étonnant que de grands plans d'économie soient
lancés. Un des objectifs est bien sûr de rationnaliser les
dépenses, notamment en mutualisant les moyens entre les
différentes filiales. Ceci impacte particulièrement les achats
informatiques, qui ont un poids important dans la banque2.
C'est dans ce cadre (mondialisation, plan d'économie,...)
que la Direction des Achats d'une grande banque française doit
évoluer et que s'inscrit l'émergence de l'offshore outsourcing
Externalisation et délocalisation dans la
Bancassurance
Comme défini au début de ce mémoire,
l'offshore outsourcing est constitué de deux éléments :
l'externalisation et la délocalisation. Chacun de ces deux
éléments connaît un développement important
actuellement, dans tous les secteurs d'activités, et
particulièrement dans celui de la Bancassurance.
L'externalisation, dans le secteur de la Bancassurance, est une
nécessité. En effet, les banques sont très
concentrées verticalement. Selon une étude de la Deutsche Bank
sur les banques
2 Je traiterai de ce sujet dans la suite de ce
mémoire
allemandes, mais qui s'applique aussi aux banques
françaises, 80% de leur revenu est produit en interne. Elle
maîtrise la construction de leur offre (produits financiers, bancaire ou
d'assurance) ainsi que sa distribution par un réseau d'agence
très important dont ils sont propriétaires. Ce schéma est
particulièrement vrai en France. Ainsi, plus cette intégration
est importante plus les banques sont contraintes d'être centré
uniquement sur leur coeur de métier.
Ainsi, dès la fin des années 70, les
établissements de crédits décident, pour des raisons
économiques, d'externaliser certaines activités administratives,
comme l'imprimerie et le stockage de données. En effet, les banques se
développent en terme de couverture géographique (ouverture
d'agence sur tout le territoire) ainsi qu'en terme de métier
(développement de l'offre financière).
L'outsourcing informatique dans le secteur de la Bancassurance
ne débute que plus tard, dans les années 90. En effet,
l'informatique est un domaine sensible pour les banques que ce soit en terme de
sécurité ou de qualité. De plus, les banques sont des gros
consommateurs de bien et de service informatiques, principalement parce que
l'activité d'une banque consiste à gérer des flux
informationnels et monétaires. Or, l'informatique a été
justement une révolution dans le domaine de la gestion des flux et des
données. Cette révolution a donc permis aux banques de diminuer
leurs coûts de traitement et d'accéder plus rapidement à
des informations à jour. Cette activité étant donc un
facteur clé de succès pour les sociétés de
Bancassurances, ces dernières ont d'abord développé leurs
propres services d'ingénierie informatique.
La volonté de recentrer l'activité des banques
sur leur coeur de métier, la complexification d'une partie de
l'informatique ainsi que la banalisation de certaines tâches ont
entrainé une nouvelle vague d'externalisation dans les banques. Entre
1990 et 2003, les prestations relatives à l'infrastructure informatique
représentaient, en valeur, les deux tiers des contrats
d'externalisation.3 A la Société
Générale, comme dans la plupart des banques, les achats
liés à l'informatique (prestations, progiciels et logiciels,
matériels et consommables) représentent plus de la moitié
du montant total des achats.
Cette externalisation a été effectué
suivant deux axes. D'abord la cession des
entités spécialisées des banques dans le service
informatique. Ainsi, Atos, une des plus grosses SSII
3 Etude Roland Berger (2004)
françaises, est issue de la fusion en 1997 de Axim et
Sligos, fondées respectivement par le Crédit du Nord et le
Crédit Lyonnais, dans les années 70. L'autre axe a
été de confier l'exécution de nombreuses activités
à des prestataires. Ainsi, à la Société
Générale, la moitié du personnel informatique est
composé de personnes appartenant à un prestataire
extérieur. Ce cas n'a d'ailleurs rien d'exceptionnel, et est identique
dans la plupart des banques françaises.
Aux Etats-Unis, le développement de l'externalisation
de l'informatique est encore plus important. Au début des années
2000, des gros contrats ont été signés entre les
sociétés de service et les banques. Ainsi, en 2002, JP Morgan, la
deuxième banque du pays, a signé un contrat d'externalisation de
5 milliards de dollars avec I.B.M. pour 7 ans. Ce contrat est annulé par
la banque, deux ans plus tard, et les 4 000 employés
transférés à Big Blue sont
réintégrés. Cet événement marque les esprits
et signe la fin des gros contrats d'externalisation. Malgré tout, il
convient d'expliquer les causes de ce revirement. Le choix de JP Morgan
n'était pas motivé par les mauvaises performances d'I.B.M. mais
faisait suite à la fusion avec Bank One, reconnu pour son savoir-faire
dans la réduction de ses frais de structure. Ainsi, entre 2000 et 2003,
Bank One a réduit ses frais de structure de 12% quand ses revenues
augmentaient de 17%. Ainsi, JP Morgan a souhaité gérer
l'intégralité de son infrastructure en interne pour pouvoir
intégrer le savoir-faire de Bank One. Il s'agit donc plus d'une mauvaise
publicité faite par les détracteurs de l'externalisation que d'un
réel échec.
Depuis quelques années, le secteur de la Bancassurance
se tourne vers le BPO et le KPO. Mais il s'agit d'une tendance très
récente et en fort développement. En effet, ces externalisations
touchent les processus métiers de l'entreprise. Les Bancassurances
américaines commencent à développer le BPO pour certains
processus métiers, comme pout la gestion des cartes de crédit. En
France, des expériences commencent à se développer dans le
traitement des chèques, avec malgré tout des risques très
forts (respect des délais, confidentialité, protection des
données personnelles).
Voici donc un panorama non exhaustif des différentes
prestations propices à externalisation, mais aussi à la
délocalisation, dans les banques et les assurances.
- traitement des chèques,
- gestion des demandes de crédit, - gestion des
cartes de crédit.
|
![](le-role-des-achats-dans-l-offshore-outsourcing4.png)
F.P.O. B.P.O. K.P.O.
![](le-role-des-achats-dans-l-offshore-outsourcing5.png)
A S S U R
A N
C E
B A N Q U E
- comptabilité,
- gestion des ressources humaines.
- infogérance des postes de travail, -
helpdesk
- maintenance des systèmes de production
bancaire,
- mise en place d'outil CRM (Customer Relationship
Management).
- traitement des indemnisations, - gestion des
remboursements,
- gestion des transferts de dossier.
|
- mise en place d'outil CRM, - maintenance des
systèmes de gestion des contrats d'assurance.
- modélisation financière, - analyse
financière,
- étude de marché.
|
- offre à créer.
- évaluation des risques, - calcul des
primes.
|
- offre à créer.
Prestation non I.T.
Prestation I.T.
Le développement de l'externalisation n'est donc pas un
phénomène nouveau pour les Bancassurances. Par contre la
délocalisation de ces prestations l'est beaucoup plus. Ainsi, BNP
Paribas a ouvert deux filiales à Casashore, la zone franche
située à Casablanca : Mediha Paribas et BDSI. Ces deux centres
assurent le développement et la maintenance d'applications ainsi que
diverses tâches informatiques pour le compte de la banque
française. La Société Générale, quant
à elle, a possède depuis 2000, un centre de développement
à Bangalore, en Inde. Dans le secteur de l'assurance, Axa
développe son centre de Casablanca. Le projet est porté par le
Président du Directoire de l'assureur, Henri De Castries, qui en a fait
une stratégie affichée.
La délocalisation des prestations I.T. ne semble pas
être une possibilité, mais bien une nécessité
à long terme, pour rester compétitif. Ainsi, Deloitte
prévoit que d'ici 2010, 30% des dépenses informatiques mondiales
seront délocalisées (contre 6% aujourd'hui). Pourtant les banques
et les assureurs français sont très en retard par rapport
à leurs homologues anglais et américains.
Aujourd'hui, le niveau d'offshore outsourcing des banques
américaines, mais aussi anglaises, restent très
élevé. Ainsi, HSBC externalise auprès de Cap Gemini en
Inde, plus de 2 000 postes I.T. La délocalisation est aussi directement
gérée par les banques, sur place. Selon une étude de
Deloitte (2003), GE Capital employait 11 000 personnes en Inde, Citigroup 3 000
et HSBC 2 000. La même année, Axa, un des pionniers
français, n'employait que 380 personnes en Inde.
Quant à la délocalisation de processus
métier, il s'agit d'un sujet très sensible. Ainsi, trois grands
assureurs n'ont pas souhaité répondre à l'enquête
des Echos4. D'autres considérant cette pratique comme «
pas stratégique » (Groupama) ou étant « peu
concerné par le sujet » (La Mondiale). Seul Axa France semble
donner des informations sur cette pratique. L'assureur compte ouvrir 1 500
postes de télé commerciaux au Maroc pour le compte de sa filiale
Direct Assurance, pour des tâches de souscription et de gestion des
contrats. Cette activité est donc en plein développement.
Causes de l'émergence de l'offshore outsourcing et
limites dans la Bancassurance
Les raisons du développement de l'offshore outsourcing
sont nombreuses. Pour bien en comprendre les avantages, il convient encore une
fois de séparer l'analyse entre les éléments liés
à l'externalisation et ceux liés à la
délocalisation.
Le principal avantage de l'externalisation est de permettre
à l'entreprise cliente de faire réaliser ses prestations par des
entreprises spécialisées. Cela permet souvent une
amélioration de la qualité, car le prestataire a souvent une
grande expérience dans son domaine. L'informatique d'entreprise devenant
de plus en plus complexe, il est difficile pour les organisations non
spécialisées de suivre toutes les évolutions
technologiques, ce que les spécialistes peuvent faire. De plus, c'est
l'opportunité pour les banques ou les assureurs d'avoir accès
à des technologies qu'elles ne pourraient pas avoir accès en
interne.
Il est important de noter que l'amélioration de la
qualité dans un projet d'offshore outsourcing n'est pas due, comme
souvent avancé à tort, à la délocalisation, mais
à l'externalisation. Le
4 «Les assureurs restent prudents face aux
délocalisations», Les Echos, 17 avril 2007.
fait que la prestation soit réalisée à
l'étranger n'a pas d'impact sur le niveau de qualité. Au
contraire, souvent cette délocalisation entraîne une diminution de
la qualité car l'activité est souvent récente dans ces
pays et nécessite donc un apprentissage. Enfin, le cas de l'Inde est
particulier car le pays possède un savoir-faire et une forte
expérience dans ce domaine. Ils ont su justement crée une offre
spécialisée avec des prestataires de qualité. C'est donc
bien le fait de confier des prestations à des experts du domaine qui
fait la qualité de la prestation en Inde et non le simple fait de la
délocaliser.
Le deuxième avantage qui en découle est que
l'entreprise cliente peut se recentrer sur son coeur de métier,
élément stratégique pour les banques, ces dernières
étant fortement intégrées non seulement verticalement
(création et distribution de produits), mais maintenant aussi
horizontalement (concentration dans le secteur). L'externalisation permet de
variabiliser les charges fixes, comme les salaires du personnel ou
l'investissement en matériel, et donc de dégager des
liquidités, qui peuvent être utilisées pour d'autres
investissements. Cela permet aussi, suivant la même logique, de
libérer des postes, souvent à faible valeur ajoutée
(téléopérateur, développeur,...) et les
réaffecter sur des postes apportant plus de valeur (conseiller
clientèle par exemple).
Enfin, dernier point, comme les prestations sont
effectuées par des spécialistes, le coût est
inférieur, à périmètre identique. En effet, les
entreprises ont un savoir-faire et un plus grand niveau d'expertise qui lui
permettent d'avoir une productivité supérieure. De plus, les
investissements en formation et les coûts de fonctionnement peuvent
être mutualisés entre plusieurs clients.
L'émergence des centres de service s'appuie sur ce
constat. Un centre de service est le rassemblement, dans une seule
entité, physique ou virtuelle, d'activités identiques
antérieurement réparties entre plusieurs sites d'un même
groupe. Les ressources ainsi que les coûts de structure et de formation
sont partagés entre les différents clients du centre. Cela
nécessite une standardisation des processus pour que les tâches
puissent être effectuées par l'ensemble des ressources du centre
de service. Le centre de service est enfin la possibilité de profiter
des meilleures pratiques du marché.
J'insiste sur le fait que les prix ne doivent être
comparés que pour un périmètre identique. En effet,
l'externalisation entraine souvent une redéfinition de la prestation. De
plus, la prestation
est parfois enrichi car le prestataire dispose de
compétences supplémentaires et peut répondre à un
besoin plus large. Ainsi, l'externalisation de la paie peut être enrichie
en fournissant des indicateurs de benchmarks, qui n'était pas
présente dans la prestation auparavant.
La délocalisation, quant à elle, permet en
premier lieu de réduire les coûts, grâce au
différentiel de salaire et de coût de structure entre le pays
d'origine et le pays d'accueil. Le cabinet NeoIT dans son
étude5 avance un différentiel de salaire de 85
à 90% entre les Etats- Unis et l'Inde. De même, les loyers des
locaux professionnels à Casashore (zone franche marocaine
spécialisée dans l'I.T.) sont de 90 dirham/m2 (environ
8€) contre 15 à 20€/m2 à Sophia Antipolis,
dans le sud de la France. Ces gains ont un impact fort sur le coût final
de la prestation mais certains coûts additionnels doivent être pris
en compte comme les coûts de télécommunication, de gestion
de projet, de productivité,... Aujourd'hui il est très difficile
de mesurer les gains en terme de coût complet dans un projet de
délocalisation.
De plus, s'approvisionner à l'étranger permet
d'obtenir des compétences qui sont en pénurie dans le pays
d'origine. En effet, délocaliser l'exécution de la prestation
permet d'avoir accès à un nouveau réservoir de
compétence plus important. Ainsi, les compétences en Java J2E ou
en .Net sont peu nombreuses en France, tandis qu'il existe un pool de
compétence plus important en Inde. Attention, le marché de
l'offshore outsourcing étant en plein boom, certains pays deviennent eux
aussi en pénurie. L'Inde et le Maroc sont aujourd'hui des marchés
qui sont devenus tendus dans ce domaine.
Le dernier avantage est qu'il est possible pour certaines
prestations, d'obtenir une couverture mondiale en continue, en jouant avec les
décalages horaires des différents sites. Par exemple, faire
réaliser le développement d'une application en Inde pendant la
nuit du client, pour que le client situé à New York travaille sur
ses remarques pendant la nuit en Inde. Ainsi, le développement est
assuré 24h/24.
Les avantages sont donc différents pour
l'externalisation et la délocalisation. Même si le
gain financier est un avantage pour chacun des éléments, il
n'a pas la même source. Dans le cas de l'externalisation, il s'agit
d'un savoir-faire qui fait progresser l'organisation sur la courbe
5 Offshore and Nearshore ITO and BPO Salary Report,
NeoIT, Juin 2006
d'apprentissage. Pour la délocalisation, il s'agit d'un
différentiel de coût sur les facteurs de production. L'Inde
combine ces deux éléments, mais ce n'est pas le cas dans tous les
pays.
Malgré ces avantages, de nombreuses limites
ralentissent le développement de l'offshore outsourcing,
particulièrement dans la Bancassurance. Le premier risque vient de
l'image qui est associée à ce type de projet, que ce soit
à l'extérieur ou à l'intérieur de l'entreprise. En
externe, il s'agit d'un risque commercial, les délocalisations
étant souvent mal perçus, en particulier par les consommateurs
français qui sont très sensibles à ce sujet. Aujourd'hui,
bien que la plupart des consommateurs soient informée que les centres
d'appel sont localisés en dehors du territoire français, ceci est
souvent perçu de manière négative. En cas de
problème, l'erreur est mise sur le compte de la situation
géographique du centre et de la supposée non- qualification du
personnel délocalisé. De plus, les clients des banques ne sont
pas forcement prêts à accepter que d'autres activités
soient exécutées hors de France, notamment des prestations
touchant à leurs données financières.
En interne, le risque en termes d'image est aussi fort.
L'externalisation peut entrainer la suppression d'un poste en interne
seulement, souvent transférer au prestataire. La délocalisation
est plus grave car elle supprime complètement des emplois sur le
territoire français. Au delà du problème
macro-économique du positionnement de la France en termes d'emploi sur
le marché mondial, cela diminue le besoin en profil technique
(comptables, développeurs,...), dans l'entreprise. Ainsi, les profils
les plus recherchés actuellement en France sont ceux techniques, avec
des compétences managériales.
Comment trouver à terme ce type de profil en France,
par exemple, s'ils ne peuvent pas auparavant commencer par des projets
exclusivement techniques. Les projets les plus techniques permettent le plus
souvent de former, puis d'acquérir les compétences
managériales. Enfin, sur ce point, il est fortement probable que les
pays comme l'Inde, le Maroc ou la Roumanie ne se limiteront pas à la
fourniture de prestations purement techniques mais proposeront aussi de plus en
plus de prestation de gestion de projet, avec des profils de chef de projet ou
de conduite du changement. La concurrence risque donc de se faire sur tous les
profils.
La deuxième difficulté est de mettre en place et
de gérer ce type de projet. Il est délicat de gérer les
projets en offshore outsourcing et il est nécessaire pour les
entreprises de gagner en
maturité et en expérience. Cela nécessite
des compétences achats, juridique, de management de projet, de conduite
du changement, d'analyse des risques,...De plus, les entreprises ont souvent
une mauvaise vision de leur projet en interne. Ainsi, peu connaissent le
coût en interne de leurs prestations, peu suivent et connaissent le
coût total de ces prestations effectuées ensuite par un
prestataire. Sans ces données, il est très difficile
d'évaluer un projet passé en offshore outsourcing.
Enfin la troisième difficulté concerne la
politique interne de l'entreprise. En effet, les Directions
Générales ont limité le recours à l'Offshore
Outsourcing à cause de la mauvaise image perçue. De plus, les
sociétés françaises, et particulièrement les
banques, ne souhaitent pas que l'on sache qu'ils participaient à ce type
d'opération. Jusqu'à peu de temps, il s'agissait donc
principalement d'actions tests, en province ou dans les pays proches de la
France (Maroc, Espagne,...). Il est à noter que cette situation change,
et que même si peu de communication est faite autour de ces projets, le
recours à l'Offshore Outsourcing est de plus en plus poussé par
les Directions Générales.
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