REPUBLIQUE DU BENIN
REPUBLIQUE DU TOGO
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UNIVERSITE D'ABOMEY-CALAVI
UNIVERSITE DU BENIN (UB)
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FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCES
FACULTE DE DROIT (FD)
POLITIQUES (FADESP)
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MEMOIRE DE D.E.S.S.
(DIPLOME D'ETUDES SUPERIEURES SPECIALISEES)
OPTION :
DROIT DES AFFAIRES ET FISCALITE
LE REGLEMENT DES CONFLITS
ENTRE
ACTIONNAIRES DANS LES
SOCIETES
ANONYMES DE L'ESPACE OHADA :
ANALYSE ET PERSPECTIVES
Réalisé et soutenu par :
Sous la direction de :
Julien C. HOUNKPE
Professeur Dorothé C. SOSSA
Agrégé des
Facultés de Droit
Doyen de la FADESP (U.A.C.)
ANNEE ACADEMIQUE : 2006-2007 2006
« LA FACULTE N'ENTEND DONNER
AUCUNE APPROBATION NI IMPROBATION AUX OPINIONS
EMISES DANS LES MEMOIRES. CES OPINIONS DOIVENT ETRE CONSIDEREES COMME
PROPRES A LEURS AUTEURS. »
A
Mon épouse Augustine KPEHOUNTON, avec toute mon
affection.
Mes enfants Orphé, Peggy et Spero, sachez qu'un
travail opiniâtre vient à bout de tout.
A
Monsieur Dorothé C. SOSSA, notre maître de
mémoire qui malgré ses multiples
occupations a bien voulu accorder une attention à notre
travail ;
Tout le corps professoral du DESS Droit des Affaires et
Fiscalité, pour la contribution
apportée à notre formation et la
qualité du travail ;
François HONKPEHEDJI pour l'assistance permanente,
et tous nos camarades de promotion pour le temps passé ensemble ;
Vous excellence Monsieur le Président et les
honorables membres du jury qui avez
accepté de juger ce travail.
REPERTOIRE DES SIGLES ET
ABREVIATIONS
Al. : Alinéa
Art. : Article
AUSCGIE : Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et
du groupement
d'intérêt économique
Cass. Com. : Arrêt de la chambre
commerciale de la cour de cassation
Civ. : Arrêt de la chambre
civile de la cour de cassation
C.CIV. : Code Civil
D. : Dalloz
Ed. : Edition
Gaz. Pal. : Gazette du Palais
J.C.P. : Juris classeur périodique
J. soc. : Journal des sociétés
L.G.D.J. : Librairie Générale
de Droit et de Jurisprudence
OHADA : Organisation pour l'harmonisation en
Afrique du droit des
affaires
P. : Page
R.P.S. : Revue pratique (belge) des
sociétés
R.T.D.C. : Revue trimestrielle de droit
commercial
S.A. : Société Anonyme
T. : Tome
Trib. : Tribunal
Vol. : Volume
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : L'ENCADREMENT JURIDIQUE DES CONFLITS
ENTRE ACTIONNAIRES
Chapitre I : Les dispositions préventives des conflits
entre actionnaires
Section I : Les droits individuels d'actionnaire
Section II : La réglementation des assemblées
d'actionnaires
Chapitre II : Les modes de résolution des conflits
entre actionnaires
Section I : Le recours au juge
Section II : L'arbitrage
DEUXIEME PARTIE : LES PERSPECTIVES DU REGLEMENT DES
CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
Chapitre I : La prévention interne des conflits par les
pactes d'actionnaires
Section I : Les conventions de vote entre actionnaires
Section II: Les conventions relatives à la
cessibilité des actions
Chapitre II : Les nouveaux mécanismes de résolution
des conflits entre actionnaires
Section I : L'exclusion et le retrait judiciaire d'un actionnaire
Section II : La médiation et la conciliation
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
GENERALE
L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires (OHADA), à travers l'Acte Uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du GIE (AUDSCGIE), a adopté le 17
avril 1997 un nouveau droit des sociétés en Afrique1(*). Aussi bien des innovations que
des réaménagements de textes ont été faits à
divers niveaux.
La société anonyme est l'objet des innovations
les plus importantes et les plus modernes de l'Acte sur les
sociétés. Des divers points du droit des sociétés
où l'Acte a fait des apports intéressants, celui qui a surtout
attiré notre attention est le règlement des conflits entre
actionnaires.
Par définition, la société anonyme est
une société commerciale dont le capital a donné lieu
à l'émission de titres de propriété appelés
actions, souscrites par des investisseurs et épargnants appelés
actionnaires2(*). Chaque
actionnaire est porteur d'au moins une action.
Comme en toute matière supposant le rapprochement
d'intérêts patrimoniaux distincts, s'y pose, dès l'origine,
la question de l'organisation du rapport ainsi créé. Si les
questions préalables à l'union entre actionnaires sont, le plus
souvent, résolues dans un climat de relative harmonie, les
difficultés essentielles surgissent dès lors que la relation doit
s'inscrire dans une certaine durée.
Les incidents de fonctionnement internes ont le plus souvent
à leur origine un conflit plus ou moins aigu entre actionnaires. Les
exemples ne manquent pas : deux groupes devenus antagonistes bloquent
toute décision qui permettrait de reconstituer le conseil
d'administration; les dirigeants refusent pendant de très nombreuses
années toute distribution de dividendes; ou encore un actionnaire
disposant d'une minorité de blocage en assemblée
générale extraordinaire interdit toute modification statutaire,
pourtant indispensable à la survie de la société,
etc3(*).
La survenance d'un conflit entre actionnaires est un des
avatars qui peut marquer la vie d'une société anonyme et se
révéler particulièrement néfaste lorsqu'il affecte,
voire paralyse, le fonctionnement des organes sociaux. A l'évidence, les
implications économiques et sociales du rapprochement sociétaire
imposent, une intervention extérieure par l'application d'une
règle de droit et souvent une interruption du pouvoir judiciaire dans la
vie sociétaire.
Sous l'empire de la loi française du 24 juillet
18674(*), le
règlement des conflits entre actionnaires est une tâche à
laquelle, curieusement, le législateur s'est longtemps attelé
avec une carence manifeste. Dès lors, c'est le plus souvent le Tribunal,
usant des ressources de la loi (et singulièrement des règles
légales créées dans d'autres perspectives) et des moyens
que lui donne la procédure (on songe à l'intervention du
Président dans le cadre de la procédure de
référé répondant aux conditions d'urgence et de
provisoire) qui a dû faire oeuvre de créateur et tenter de
suppléer les carences du législateur.
Il a fallu attendre l'Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du GIE pour voir un panel de
dispositions visant la protection des associés, dont l'application
pratique permet de prévenir et de résoudre les conflits entre
actionnaires au sein de la société anonyme.
Dans la réforme de l'OHADA, les rapports entre
actionnaires sont fondés sur le principe d'égalité qui
constitue lui-même un gage de prévention des conflits. C'est dans
ce souci que le législateur a prévu de manière
générale dans les articles 53 à 55 de l'Acte uniforme
« les droits et obligations attachés aux titres »
des sociétés commerciales.
Or, si le principe d'égalité entre les
actionnaires confère à chacun d'eux des droits individuels
totalement équivalents, il en va différemment en ce qui concerne
la gestion. En effet, la gestion de la société est exclusivement
assurée par les détenteurs de la majorité du capital
social. En vue de prévenir les conflits d'intérêts qui
naîtraient des rapports majorité-minorité, le
législateur a affirmé la primauté de
l'intérêt social sur les intérêts personnels des
actionnaires5(*).
Une autre disposition préventive des conflits entre
actionnaires est la possibilité que leur accorde désormais l'Acte
uniforme de déclencher l'alerte et de demander en justice la
désignation d'un expert de gestion6(*). Donc, outre les commissaires aux comptes, dans les
sociétés anonymes de l'espace OHADA, l'alerte peut être
déclenchée par tout actionnaire, quelle que soit la fraction du
capital qu'il détient.
Enfin, les dispositions des articles 147 à 149 de
l'Acte uniforme prévoient les modes de règlement des conflits
entre actionnaires. L'article 147 dispose que : « tout
litige entre associés (...) relève de la juridiction
compétente ». Nous partons maintenant de l'hypothèse
où la survenance d'un conflit entre différents actionnaires n'a
malheureusement pas pu être évitée et qu'un actionnaire
minoritaire ou majoritaire souhaite introduire une action en justice. Parmi les
"solutions curatives" aux conflits entre actionnaires, on distinguera :
· la désignation, par le juge des
référés, d'un administrateur provisoire ;
· l'introduction d'une action en justice en cas d'abus de
majorité ou de minorité ;
· la dissolution judiciaire pour justes motifs.
Aux termes de l'article 148 de l'AUSCGIE : « Ce
litige peut également être soumis à l'arbitrage, soit par
une clause compromissoire, statutaire ou non, soit par compromis ».
L'arbitrage consiste à faire trancher un litige par des particuliers,
appelés arbitres, en dehors du système judiciaire7(*). Mais leur décision,
appelée sentence, a la même autorité qu'un jugement rendu
en première instance par une juridiction étatique.
Toutes ces dispositions démontrent clairement que le
règlement des conflits entre actionnaires est une préoccupation
constante dans l'Acte uniforme de l'OHADA sur les sociétés
commerciales et le GIE. Les textes nouveaux, afin d'éviter les carences
antérieures, sont très méticuleux et laissent trop peu de
place à la volonté individuelle. L'une des
caractéristiques essentielles de l'Acte uniforme, c'est que ses
dispositions sont impératives (AU, art. 2). Les lois n'offrant pas des
solutions à tout conflit pouvant survenir entre actionnaires, la
question est de savoir si les actionnaires peuvent prévoir, par
convention, leur propre solution de sortie de crise plutôt que de devoir
recourir à une décision de justice à l'issue incertaine
8(*).
Cette souplesse est conforme à la récente
évolution du droit des sociétés. Sensibles aux pressions
de la pratique, le législateur et la jurisprudence modernes admettent de
plus en plus libéralement la validité des pactes d'actionnaires.
En effet, une analyse du droit positif en France et en Belgique laisse voir
apparaître un véritable mode de gestion d'origine contractuelle
des relations entre actionnaires dans la perspective de prévention et de
résolution des conflits sociétaires. Les leçons
tirées du droit comparé nous ont amené à apporter
un autre éclairage sur cette problématique : la
prévention des conflits par les pactes d'actionnaires, et la
résolution des conflits par des mécanismes spécifiques.
La matière des pactes d'actionnaires englobe d'une
part, les conventions qui restreignent la cessibilité des titres, et
d'autre part, celles qui portent sur l'exercice du droit de vote. Les
premières recouvrent les clauses d'inaliénabilité,
d'agrément et de préemption, et les autres clauses issues de la
pratique et dont on ne trouve guère mention dans aucun code9(*). Les conventions de vote varient
de l'engagement ponctuel de concertation avant le vote à une
assemblée générale, jusqu'à des obligations plus
larges telles que celle de souscrire à une augmentation de
capital10(*).
Lorsque ces conventions ne jouent pas leur rôle
pacificateur, les dissensions et les situations de blocage qui en
résultent peuvent conduire à la solution de l'exclusion d'un
actionnaire (la cession forcée d'action) ou de son retrait (le rachat
forcé d'actions)11(*). Ainsi la loi permet à tout actionnaire de
demander en justice, pour justes motifs, que les autres actionnaires reprennent
ses actions. Il s'agit de deux nouveaux mécanismes de règlement
des litiges entre actionnaires, tous deux fondés sur la disparition de
l'actionnariat, d'une des parties au conflit.
S'il ne faut pas systématiquement éviter les
tribunaux, les actionnaires doivent garder à l'esprit qu'il existe des
alternatives, applicables même en cours de procédure
judiciaire : la conciliation et la médiation12(*). La solution ne passe pas
nécessairement par les tribunaux et les parties restent libres d'avoir
recours à une méthode alternative. Plutôt que de laisser le
juge prendre une décision à leur place, les actionnaires peuvent
solliciter l'intervention soit d'un conciliateur ou d'un médiateur.
En définitive, l'intérêt du
thème : « LE REGLEMENT DES CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
DANS LES SOCIETES ANONYMES DE L'ESPACE OHADA » réside dans la
mise en exergue des mécanismes juridiques institués par le
législateur OHADA pour la prévention et la résolution des
conflits entre actionnaires au sein des sociétés anonymes, avec
les perspectives qui s'offrent en la matière dans d'autres
systèmes juridiques.
Nous avons choisi le thème en raison des implications
économiques et sociales des conflits dans la société
anonyme, qui réalise des investissements tant recherchés pour le
développement de l'Afrique. Il faudra tout mettre en oeuvre pour
empêcher la naissance des conflits ou les solutionner au mieux des
intérêts de l'entreprise lorsqu'ils surviennent. La bonne
qualité des relations entre actionnaires est sans nul doute un
élément essentiel dans la poursuite d'une entreprise commune.
Les données recueillies de nos investigations serviront
à orienter le développement du thème en suivant deux axes.
Dans une première partie intitulée «L'encadrement
juridique des conflits entre actionnaires en droit
OHADA », nous ferons ressortir de
façon claire et simple les dispositions que comporte l'AUSCGIE par
rapport au règlement des conflits entre actionnaires.
Une seconde partie intitulée «Les
perspectives du règlement des conflits entre
actionnaires», nous permettra d'appréhender les
mécanismes de règlement des conflits tirés d'autres
systèmes juridiques. Nous y verrons par exemple que l'on peut faire
jouer la liberté contractuelle dans la perspective de prévention
et de résolution des conflits sociétaires.
PREMIERE PARTIE :
L'ENCADREMENT JURIDIQUE DES CONFLITS ENTRE
ACTIONNAIRES
L'Acte Uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique,
contient de nombreuses dispositions assurant la protection des associés,
dont l'application pratique permet de prévenir et de résoudre les
conflits entre actionnaires au sein de la société anonyme.
Les droits individuels de l'actionnaire et la
réglementation des assemblées d'actionnaires seront
examinés dans le premier chapitre. Dans un second chapitre, nous
étudierons le recours au juge et l'arbitrage.
CHAPITRE I : LES DISPOSITIONS PREVENTIVES DES
CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
Le fonctionnement de la société anonyme est
dominé par la règle de la majorité dans les organes de
gestion et les organes délibérants, selon laquelle toutes les
décisions sont prises à la majorité simple ou
qualifiée (art. 129 et 550 AUSCGIE). Dans ce contexte, les
intérêts des actionnaires minoritaires, c'est-à-dire ceux
qui ne détiennent pas une fraction de capital suffisante pour
contrebalancer le pouvoir des majoritaires, se trouvent parfois
sacrifiés. Il en est de même de l'intérêt social,
intérêt propre de la société personne morale
indépendante des actionnaires qui la composent.
Ayant conscience qu'une telle situation peut déboucher
sur des conflits sociaux préjudiciables à l'économie et
aux protagonistes dont l'entreprise, le législateur africain a interdit
la violation des droits que l'actionnaire tient de la création de la
société anonyme. Des prérogatives paraissent à ce
point indissociables de la qualité d'actionnaire que leur protection
fait l'objet d'une réglementation impérative dans la
réforme OHADA. Ainsi, l'Acte Uniforme sur les sociétés
organise, dans des dispositions éparses, un système de
prévention des conflits fondé sur les droits individuels
appartenant à l'actionnaire.
L'actionnaire ne peut décider dans la
société anonyme d'une manière unilatérale. Sa
décision passe toujours par le biais des assemblées
d'actionnaires. En vue de préserver les intérêts
légitimes des actionnaires, une réglementation très
minutieuse des assemblées a été instaurée. Elle
concerne la convocation des actionnaires et leur admission à
l'assemblée, leur information et la tenue de l'assemblée.
Au total, cerner les dispositions préventives des
conflits entre actionnaires reviendrait à examiner dans un premier temps
les droits individuels des actionnaires (section I), et dans un second temps la
réglementation des assemblées d'actionnaires (section II).
Section 1 : Les droits individuels de l'actionnaire
La loi, par certaines de ses dispositions impératives,
et la jurisprudence13(*)
ont reconnu que l'actionnaire est titulaire de droits irréductibles, de
droits propres auxquels les statuts ou la décision d'un organe social ne
peuvent porter atteinte. Une classification traditionnelle distingue les droits
sociaux de l'actionnaire (§1) et ses droits financiers (§2) 14(*).
Paragraphe 1 : Les droits sociaux de l'actionnaire.
Nous rangeons dans les droits sociaux de l'actionnaire, le
droit de l'actionnaire de faire partie de la société, le droit de
participer aux décisions collectives, le droit de l'actionnaire
d'être désigné aux fonctions sociales et enfin le droit de
l'actionnaire d'agir en justice.
A- Le droit de faire partie de la société
La conception contractuelle de la société nous
permet d'expliquer facilement que l'actionnaire a le droit de se
prévaloir du contrat conclu avec la société. La
souscription constitue un contrat synallagmatique conclu par le souscripteur et
la société émettrice. L'obligation du souscripteur est de
libérer les actions qu'il a souscrites. Celle de la
société est la délivrance de l'action qui confère
au souscripteur le droit de faire partie de la société.
Le droit de faire partie de la société est
lié à l'existence de la société et sa forme
anonyme. Ce droit disparaît si la société est dissoute ou
est transformée. Mais si une société anonyme ordinaire est
absorbée par une société anonyme au capital variable dont
les statuts autorisent l'exclusion des actionnaires, la
délibération qui décide l'opération de la fusion
encourt la nullité parce qu'elle porte atteinte au droit des
actionnaires de faire partie de la société15(*).
En revanche, le législateur décide que
l'exclusion peut intervenir dans deux cas à titre de sanctions. D'une
part, l'exclusion est encourue par l'actionnaire qui manque à son
engagement de libérer l'action qu'il a souscrite. Cette exclusion se
fait par la procédure dite d'exécution en bourse (article 775
AUSCGIE). D'autre part, lorsque la société anonyme est en
redressement judiciaire, et si les dirigeants sont frappés de la
faillite personnelle ou de l'interdiction de diriger, de gérer,
d'administrer ou de contrôler une entreprise, le tribunal peut leur
enjoindre de céder leurs actions ou ordonner leur cession forcée
par les soins d'un mandataire de justice au besoin après
expertise16(*).
Exceptionnellement, la société anonyme
peut :
- racheter ses actions pour les annuler en cas de la
réduction du capital non motivée par des pertes (art 639,
alinéa 2 AUSCGIE) ;
- racheter un nombre déterminé d'actions pour
les distribuer aux salariés de la société en vue de
promouvoir l'actionnariat des salariés (art 640 alinéa 2
AUSCGIE) ;
- enfin racheter ses actions entièrement
libérées à la suite d'une transmission de patrimoine
à titre universel ou à la suite d'une décision de justice
(art 641 alinéa 1er AUDSCGIE).
Lorsque la société réduit son capital
social en diminuant le nombre des actions, les actionnaires qui ne
possèdent pas le nombre minimum d'actions anciennes pour obtenir une
action nouvelle, se trouvent exclus de la société dès lors
qu'ils n'augmentent pas leurs engagements.
Le droit de faire partie de la société ne peut
être subordonné à l'obligation pour l'actionnaire de faire
un sacrifice pour rester actionnaire. L'assemblée générale
extraordinaire ne peut en modifiant les statuts, augmenter les engagements des
actionnaires, par exemple leur imposer un nouveau versement pour augmenter le
capital ou bien transformer la société anonyme en une
société en nom collectif (art. 692 AUSCGIE).
Le droit de faire partie de la société n'est
énoncé nulle part de manière formelle dans l'Acte
uniforme. Ce n'est pas le cas du droit de participer aux décisions
collectives.
B- Le droit de participer aux décisions de la
société
L'actionnaire a le droit de participer à toutes les
assemblées générales, peu importe le nombre de titres
sociaux qu'il détient. C'est un droit fondamental pour l'actionnaire, et
tout acte de nature à le priver de ce droit doit être
proscrit17(*). Bien que la
participation aux assemblées soit personnelle, l'actionnaire peut se
faire représenter par un mandataire de son choix (art. 538 AU SCGIE).
Le droit de participer aux décisions collectives
appelle celui de prendre part au vote. Le droit de vote est l'un des droits
individuels les plus importants de l'actionnaire. La doctrine l'a même
qualifié de « vache sacrée du droit des
sociétés »18(*). Selon les articles 543 et 741 AUSCGIE, le droit de
vote attaché aux actions est proportionnel à la quotité du
capital représentée; et à chaque action est attaché
un droit de vote. A ce principe, l'Acte uniforme apporte trois
exceptions :
- la limitation du nombre de voix attachées à
chaque action, à condition que cette limitation soit imposée
à toutes les actions sans distinction de catégorie ;
- l'augmentation du nombre de voix affectées à
une action. Ainsi, l'Acte uniforme reconnaît la possibilité de
créer des actions à droit de vote double (article 544, 752 et 753
AUSCGIE) ;
- la suppression du droit de vote en cas notamment de rachat
par la société de ses propres actions (article 542 AUSCGIE).
Le législateur prévoit la suppression
exceptionnelle du droit de vote dans deux séries de cas. Primo,
le droit de vote est supprimé à titre de sanction à
l'encontre de l'actionnaire qui n'effectue pas les versements exigibles sur ses
actions. Secundo, le droit de vote peut être supprimé
exceptionnellement en cas de conflit d'intérêts. Par exemple
lorsque l'actionnaire a conclu un contrat avec la société et
l'assemblée doit délibérer sur l'approbation ou non de ce
contrat, il n'a pas droit au vote (article 440 AUSCGIE).
Sur la question de renonciation et de la cession du droit de
vote, le législateur OHADA (par inadvertance ou par prudence ?) ne
s'est pas prononcé. En revanche, les tribunaux ont une position
rigoureuse face à la question de renoncer ou de céder son droit
de vote. Ils estiment que tout ce qui concerne le droit de vote est d'ordre
public. Donc un actionnaire ne peut renoncer à son droit de vote
puisqu'il s'agit d'un droit essentiel attaché à sa
qualité. Pas davantage, il ne peut céder son droit de vote en le
séparant de son action19(*).
Le législateur OHADA accepte la représentation
de l'actionnaire par un mandataire de son choix ; cependant les tribunaux
estiment qu'un mandat irrévocable doit être
considéré comme une cession et est prohibé au même
titre que la cession20(*).
En revanche, le mandat à blanc qui ne porte pas atteinte au libre
exercice du droit de vote reste valable. Les pouvoirs permanents
eux-mêmes ne paraissent pas condamnés par les tribunaux car ils
restent révocables21(*).
L'actionnaire qui dispose du droit de vote a le droit
d'être désigné aux fonctions sociales.
C- Le droit d'être désigné aux fonctions
sociales
L'actionnaire a le droit de se faire élire dans les
fonctions sociales qui reviennent à l'ensemble des actionnaires. Puisque
toutes les délibérations de l'assemblée d'actionnaires
sont prises dans le respect de la loi de la majorité, l'actionnaire qui
veut se faire élire à un poste doit rechercher par des
tractations avec ses paires cette majorité. Le problème ne se
pose pas si l'actionnaire en question détient la moitié des voix
plus une, c'est-à-dire la majorité.
Selon l'article 414 AUSCGIE, la société anonyme
peut être administrée soit par un conseil d'administration, soit
par un administrateur général. Le mode d'administration de la
société anonyme est choisi par les statuts de manière non
équivoque.
Sous l'empire de la loi du 24 juillet 1867, l'institution du
conseil d'administration était une création de la pratique.
L'Acte uniforme l'a légalisé. Le conseil est formé de
trois membres au moins et de douze membres au plus (article 416 AUSCGIE). Ce
nombre des membres du conseil d'administration peut être
exceptionnellement dépassé lorsque la société fait
appel public à l'épargne ou lorsque ses actions sont admises
à la bourse des valeurs ou en cas de fusion de la société.
Ce nombre ne peut être supérieur à vingt quatre (article
418 AUSCGIE).
Les actionnaires sont éligibles aux postes du conseil
d'administration. Les non actionnaires sont également éligibles,
mais dans la limite d'un tiers (article 417 AUSCGIE). Il convient de rappeler
que la disposition de l'article 417 de l'Acte uniforme n'est pas
impérative car tous les membres du conseil d'administration peuvent
être des actionnaires. L'actionnaire peut donc se faire élire
à n'importe quel poste du conseil d'administration.
L'actionnaire peut cumuler un mandat d'administrateur et un
contrat de travail dans la même société. Ce cumul n'est
autorisé que lorsque l'actionnaire se livre dans la
société à une véritable prestation de travail.
L'actionnaire peut être à la fois membre de cinq conseils
d'administration de sociétés anonymes ayant leur siège sur
le territoire d'un même Etat partie à l'Acte uniforme.
L'actionnaire qui est élu à un poste
d'administration doit déposer ses actions en garantie de sa gestion
à la société. La question est impérative dans les
sociétés anonymes faisant appel public à l'épargne
ou dans les sociétés anonymes dont les actions sont cotées
à la bourse des valeurs d'un Etat partie.
Les droits attachés aux actions ne seront effectivement
exercés que si l'actionnaire dispose du droit d'agir en justice.
D- Le droit d'actionnaire d'agir en justice
Le recours à la justice est une prérogative si
importante que la jouissance de la faculté d'ester en justice est
ouverte à tout actionnaire personne physique ou personne morale. Mais il
ne suffit pas d'être seulement victime de l'infraction pour agir en
justice. Il faut encore que la victime ait la capacité et un
intérêt à agir. La capacité d'un actionnaire
d'exercer une action en justice obéit aux règles ordinaires de
capacité du droit commun. L'intérêt à agir
appartient à ceux qui ont personnellement et directement subi un
préjudice du fait de l'infraction.
Sur la question des intérêts à agir en
justice dans la société anonyme, il est de principe que les
actionnaires d'une société anonyme ne peuvent utiliser leur
pouvoir que dans l'intérêt social. Une des applications les plus
intéressantes en est sans doute, l'action en abus de majorité.
Cette action permet d'obtenir l'annulation de toute résolution qui a
été prise sans aucun égard pour l'intérêt
social et uniquement en vue de favoriser l'intérêt d'un
actionnaire minoritaire.
L'action sociale étant la garantie des droits
essentiels de l'actionnaire à l'intérieur de la
société, il est naturel que les actionnaires aient seuls le
pouvoir d'agir. Il en est de même pour l'action en annulation d'actes
accomplis par les organes sociaux. Puisque de telles actions participent de la
défense de l'intérêt social, nous pouvons dire valablement
que l'actionnaire peut se baser sur l'intérêt social pour intenter
une action sociale.
L'actionnaire minoritaire en cas de conflit avec la
majorité, peut recourir en justice. Il peut à cet effet demander
par exemple en justice la nomination d'un expert chargé de
présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion
qu'il soupçonne d'être irrégulière ou inopportune
(159 et 160 AUSCGIE). Le minoritaire y trouvera des éléments de
preuve qui serviront, le cas échéant de fondement à une
action en responsabilité contre les dirigeants sociaux.
Lorsque la société traverse une crise
particulièrement grave, les actionnaires obtiennent parfois en justice
la désignation d'un administrateur provisoire chargé de
gérer la société à la place des dirigeants et
tenter de trouver une solution22(*).
Le droit d'agir en justice est considéré comme
un droit propre de l'actionnaire qui ne peut pas être supprimé ni
réduit par une clause des statuts de la société anonyme
tout comme les droits financiers de l'actionnaire.
Paragraphe 2 : Les droits financiers de
l'actionnaire.
A travers cette expression23(*), il faut entendre le droit aux
bénéfices, le droit de souscription aux augmentions du capital,
le droit de négocier l'action et enfin le droit au remboursement de la
valeur nominale des actions et au bénéfice de liquidation.
A- Le droit aux bénéfices
L'actionnaire a fait un apport à la
société dans le dessein de participer aux bénéfices
qui seront réalisés par l'emploi du capital social24(*). Dans la société
anonyme les actionnaires n'ont que la vocation aux bénéfices
parce qu'ils ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence
de leurs apports. Donc c'est la société anonyme qui se charge
elle-même de régler les dettes que constitue la perte de la
société. L'exercice de la vocation aux bénéfices se
concrétise par l'attribution d'un dividende à l'actionnaire. En
principe un dividende est attribué chaque année à chaque
action.
La décision du partage des bénéfices est
prise par l'assemblée générale ordinaire annuelle (article
546 AU) et exécutée par le conseil d'administration (article 756
AU), dans un délai de neuf mois après la clôture de
l'exercice, sauf prorogation de délai accordé par le
président de la juridiction compétente (art. 146 al. 2 AU).
Toutefois les actionnaires minoritaires obtiennent en justice parfois
l'annulation des décisions de mise en réserve systématique
et prolongée des bénéfices, s'ils parviennent à
établir que les majoritaires prennent cette décision non pas dans
l'intérêt social mais afin de léser les minoritaires et de
les inciter à céder leurs actions à vil prix25(*).
L'Acte uniforme exige que le paiement des dividendes soit fait
en une seule fois (art. 756 AU). Aucune exigence n'étant posée
quant à la nature des dividendes, ceux-ci revêtiront de
préférence la forme pécuniaire. Mais il est
également possible avec le consentement des actionnaires de
procéder à un paiement des dividendes en nature
c'est-à-dire en biens produits par la société26(*). Il est aussi possible que ce
paiement soit effectué par distribution d'actions, à l'image de
ce qui se pratique aux USA sous le nom d'«accumulating
shares »27(*).
Une clause léonine est toute convention donnant
à un associé la totalité des bénéfices ou
l'affranchissant de la contribution aux pertes. Et, bien que les actionnaires
puissent consentir à l'insertion de la clause dans les statuts,
l'article 54 al. 2 de l'Acte uniforme, la répute non écrite.
Le droit aux bénéfices qui est la contrepartie
des apports faits à la société, risquerait d'être
illusoire si les actionnaires ne disposèrent pas aussi d'un droit
préférentiel de souscription en cas d'augmentation de capital.
B- Le droit de souscription aux augmentations du
capital
Lorsque la société augmente son capital en
numéraire, les actionnaires disposent d'un droit
préférentiel de souscription (art. 573 AU). Les actionnaires ne
sont jamais obligés de souscrire aux augmentations de capital, car ce
serait une augmentation de leur engagement et donc une atteinte à leurs
droits fondamentaux. Par conséquent, l'actionnaire qui ne souscrit pas
ne s'expose à aucune sanction, même s'il a voté la
résolution décidant l'augmentation du capital.
A l'inverse, lorsque l'actionnaire veut souscrire, il doit
pouvoir le faire dans l'exacte proportion du capital qu'il détient afin
que l'augmentation de capital n'entraîne pas une dilution de ses droits
au sein de la société (art. 757 AU). Le délai
accordé aux actionnaires pour l'exercice de leur droit
préférentiel de souscription ne peut être inférieur
à vingt jours. Ce délai court à compter de la date de
l'ouverture de la souscription (art. 577 AU).
L'assemblée générale extraordinaire qui
autorise une augmentation du capital peut, en faveur d'un ou de plusieurs
bénéficiaires nommément désignés, supprimer
le droit préférentiel de souscription pour la totalité de
l'augmentation de capital ou pour une ou plusieurs tranches de cette
augmentation (article 586 AU). Cette suppression du droit
préférentiel de souscription est opportune par exemple pour
sauver la société en difficulté, en faisant entrer dans
son capital un tiers par le truchement de l'augmentation du capital ou encore
lorsque la société entend attribuer des actions nouvelles
à ses salariés en vue de promouvoir l'actionnariat.
L'actionnaire peut renoncer à son droit
préférentiel de souscription au profit d'une ou plusieurs
personnes dénommées. Il peut également renoncer à
son droit de souscription sans indiquer un bénéficiaire.
L'actionnaire qui renonce à son droit préférentiel de
souscription, doit en aviser la société avant l'expiration du
délai d'ouverture de la souscription (art. 757 AU).
Le droit préférentiel de souscription est d'une
connotation patrimoniale très poussée car ce droit peut faire
l'objet de la négociation tout comme l'action elle-même.
C- Le droit de négocier les actions
Au sens de l'article 764 de l'Acte uniforme, les actions sont
en principe librement négociables. Il s'agit de modalités de
transmission simple, accordées aux actionnaires qui dérogent aux
formalités qu'exige l'article 1690 du code civil pour les cessions de
créances. La transmission peut avoir lieu à cause de mort, pour
succession ou alors entre vifs, c'est la cession.
Le législateur OHADA a repris dans l'article 754, les
modes traditionnelles de transmission des actions. Il distingue entre les
sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne,
et celles qui ont recours à ce mode populaire de financement.
Dans le premier cas, la modalité de transmission varie
selon la nature des actions : actions nominatives ou actions au porteur.
La transmission des actions nominatives se fait par transfert sur le registre
de la société. Au contraire, la transmission des actions au
porteur se fait par simple tradition. Le porteur de l'action est
réputé en être le propriétaire.
Dans le second cas, outre l'option pour les modalités
ci-dessus, la transmission des actions peut s'opérer par virement de
compte à compte lorsqu'elles ont été
représentées par une inscription dans un compte ouvert au nom de
leur propriétaire et tenu soit par la société
émettrice, soit par un intermédiaire financier
agréé par le ministre chargé de l'économie et des
finances.
L'exercice du droit de négocier les actions est soumis
à des conditions minimales que l'actionnaire doit remplir. L'article 2
de la loi française du 24 juillet 1867 prévoyait que les actions
soient négociables après leur libération du quart. L'Acte
uniforme est plus rigoureux. Les actions de numéraires ne sont
négociables qu'après avoir été entièrement
libérées.
L'actionnaire qui négocie la totalité de ses
actions perd cette qualité dès la conclusion de l'acte de
négociation. Il est rayé du registre de la société
et une nouvelle rubrique est créée par l'inscription de
l'identité du nouvel actionnaire. Le cédant perd son droit au
remboursement de la valeur nominale de ses actions et au bénéfice
de liquidation de la société.
D- Le droit au remboursement de la valeur nominale de
l'action et au boni de liquidation
Cette prérogative de l'actionnaire intervient au moment
de la liquidation de la société (art. 53 al. 2 AU). Après
la réalisation de l'actif, les deniers sont répartis entre les
créanciers. S'il reste encore de deniers après le
désintéressement de tous les créanciers de la
société, il est procédé au remboursement de la
valeur nominale des actions aux actionnaires.
Enfin, lorsque les dettes sociales sont honorées et la
valeur nominale des actions remboursée, la somme qui reste dans le
compte ouvert pour la liquidation de la société constitue boni de
liquidation. La procédure de liquidation est alors clôturée
avec la répartition entre les actionnaires de cette somme
proportionnellement à leur quote-part dans le capital social.
Il convient d'examiner à présent les
assemblées d'actionnaires qui font objet d'une réglementation
impérative assurant la prévention des conflits internes.
Section 2 : La réglementation des assemblées
d'actionnaires
La société anonyme étant conçue
comme une démocratie, le pouvoir suprême appartient aux
actionnaires réunis en assemblée générale
souveraine. Une réglementation minutieuse de ces assemblées a
été instaurée en prévention des conflits entre
actionnaires.
Nous étudierons dans un premier temps la
diversité des assemblées d'actionnaires (§1) ; et dans
un second temps, nous verrons le fonctionnement des assemblées
d'actionnaires (§2).
Paragraphe 1 : La diversité des
assemblées d'actionnaires.
L'Acte uniforme distingue trois sortes d'assemblées
d'actionnaires, à savoir les assemblées générales
ordinaires, les assemblées générales extraordinaires, et
les assemblées spéciales. La pratique révèle encore
l'existence d'assemblées mixtes.
A- L'assemblée générale ordinaire
C'est le droit commun des assemblées.
L'assemblée générale ordinaire se tient au moins une fois
l'an, dans les six mois de la clôture de l'exercice. Lorsque les
conditions ne sont pas encore réunies pour la tenue de
l'assemblée, ce délai peut être prorogé par une
décision de justice sur demande des administrateurs ou du conseil
d'administration28(*). La
réunion est indispensable, même s'il n'y a pas d'administrateurs
ou de commissaires à nommer, ou de dividende à répartir.
En principe le droit de participer à l'assemblée
générale ordinaire est libre pour tout actionnaire sans aucune
distinction entre les différentes catégories d'actions d'apport,
de jouissance ou de priorité. Cependant, s'il est exigé dans les
statuts un nombre minimal d'actions pour bénéficier de ce droit,
ce nombre ne peut être supérieur à dix. Plusieurs
actionnaires peuvent se réunir pour atteindre ce minimum et se faire
représenter par l'un d'entre eux (art. 548 al. 3 AUSCGIE).
Pour les attributions de l'assemblée
générale ordinaire, l'Acte uniforme dispose en son article 546,
que l'assemblée prend toutes les décisions autres que celles qui
sont expressément réservées par l'article 551 (2) pour les
assemblées générales extraordinaires, et par l'article 555
(3) pour les assemblées spéciales.
Elle est notamment compétente pour : statuer sur
les états financiers de synthèses de l'exercice, décider
l'affectation du résultat, nommer les membres du conseil
d'administration ou l'administrateur général ainsi que les
commissaires aux comptes, approuver ou refuser d'approuver les conventions
conclues entre les dirigeants sociaux de la société,
émettre les obligations, enfin approuver les rapports des commissaires
aux comptes prévus par la disposition de l'article 547 (4) de l'Acte
uniforme de l'OHADA.
Il convient à présent de préciser la
compétence de l'assemblée générale extraordinaire.
B- L'assemblée générale
extraordinaire
C'est une réunion importante pour la vie de la
société. L'assemblée générale extraordinaire
est appelée en effet à prendre des décisions assez graves.
Ainsi, l'assemblée générale extraordinaire est-elle seule
habilitée à :
- modifier les statuts dans toutes leurs dispositions. Le
statut d'une société anonyme est son contrat constitutif. Si
l'assemblée extraordinaire doit modifier l'appareil juridique qui a
été créé et accepté par les premiers
actionnaires alors, elle doit faire cette modification suivant les mêmes
règles que l'assemblée constitutive qui adopte les statuts. La
règle est d'ordre publique29(*).
- autoriser la fusion, la scission, la transformation et les
apports partiels d'actifs. La fusion est toujours précédée
d'un protocole établi entre les sociétés
concernées, et qui est soumis aux assemblées
générales d'actionnaires. Le projet de scission est soumis aux
assemblées extraordinaires respectives en vue de son approbation
préalable. La transformation d'une société anonyme est un
acte par lequel la société anonyme change de régime
juridique.
L'assemblée générale extraordinaire peut
dissoudre par anticipation la société ou en proroger la
durée qui est généralement de quatre-vingt-dix-neuf ans
(art. 551 al. 3 AU). Les assemblées générales
extraordinaires sont aussi habilitées à transférer le
siège social en toute autre ville de l'Etat partie à l'Acte
uniforme de l'OHADA, où il est situé sur le territoire d'un autre
Etat (art. 27 AU).
Quelle est la spécificité des assemblées
spéciales ?
C- Les assemblées spéciales
Les assemblées spéciales réunissent les
titulaires d'actions d'une catégorie déterminée. Les
porteurs de ces différentes actions forment une assemblée
spéciale qui doit délibérer sur toutes les questions
intéressant le régime de ces actions. Le consentement de la
majorité de cette assemblée est indispensable pour que le
régime des actions concernées soit modifié.
Cela se comprend sans peine. Il aurait été trop
facile sans cela à l'assemblée générale
extraordinaire des actionnaires de supprimer les privilèges après
les avoir accordés.
Quand à l'assemblée mixte, elle a un
intérêt pratique.
D- L'assemblée mixte
L'assemblée mixte est celle qui est réunie pour
se prononcer sur des résolutions relevant de la compétence de
l'assemblée ordinaire et de celle de l'assemblée extraordinaire.
Ainsi évite-t-on d'avoir à convoquer et réunir deux
assemblées successives pour approuver par exemple les comptes de
l'exercice écoulé et décider d'une augmentation de
capital, qui entraîne une modification des statuts.
L'assemblée mixte est une création de la
pratique. Elle n'est pas réglementée par la loi. Les
délibérations de l'assemblée mixte doivent respecter les
règles particulières qui gouvernent respectivement les deux
catégories de décisions à prendre.
En pratique, il conviendra par exemple, de calculer quorum et
majorité, résolution par résolution, suivant la nature des
décisions à prendre, en étant vigilant sur les actions en
usufruit.
Après les attributions des assemblées
d'actionnaires, nous examinerons les règles légales qui
régissent leur fonctionnement.
Paragraphe 2 : Le fonctionnement des assemblées
d'actionnaires.
Pour prévenir les conflits entre actionnaires, le
législateur OHADA a mis en place une réglementation très
minutieuse des assemblées. Elle concerne la convocation et l'information
des actionnaires, l'organisation et la délibération de
l'assemblée d'actionnaires.
A- La convocation des actionnaires
Avant la tenue de l'assemblée générale,
les actionnaires doivent être convoqués. En principe,
l'assemblée générale est convoquée soit par le
conseil d'administration, soit par l'intermédiaire de son
président, dans les sociétés avec conseil
d'administration, soit par l'administrateur général (art. 516
AU).
Il peut arriver que l'organe habilité pour des raisons
diverses, ne parvienne pas à convoquer l'assemblée
générale, c'est pour cela que le législateur OHADA a
prévu que pourrait également convoquer l'assemblée
générale :
- le commissaire aux comptes, après que celui-ci ait
vainement requis de l'organe compétent la convocation, dans le cadre de
la procédure d'alerte qui est une innovation dans le droit des
sociétés des pays membres de l'OHADA. Il doit déclencher
l'alerte lorsqu'il prend conscience d'un risque sérieux de cessation
d'exploitation, donc de mise en redressement ou en liquidation judiciaire.
- un mandataire désigné par le président
de la juridiction à la demande de tout intéressé en cas
d'urgence ou alors des actionnaires représentant au moins un
dixième du capital social s'il s'agit d'une assemblée
générale ordinaire, ou le dixième des actionnaires de la
catégorie intéressée s'il s'agit d'une assemblée
spéciale30(*).
- le liquidateur nommé dans le cadre de la liquidation
amiable de la société consécutivement à sa
dissolution par les actionnaires ou par décision de justice.
Lorsque la société a émis des actions au
porteur, la convocation de l'assemblée générale se fait
par avis de convocation inséré dans un journal habilité
à recevoir les annonces légales. Lorsque la société
n'a émis que des actions nominatives, l'avis de convocation peut
être remplacé par une convocation faite aux frais de la
société par lettre au porteur contre
récépissé ou par lettre recommandée avec demande
d'avis de réception.
Dans tous les cas, il doit s'écouler un délai de
quinze jours au moins entre la convocation et la tenue de l'assemblée
lorsqu'il s'agit de la première convocation. Ce délai est de six
(6) jours au moins pour les convocations suivantes lorsque l'assemblée
n'a pas pu se tenir sur première convocation. Lorsque c'est le
mandataire désigné par le juge qui a convoqué
l'assemblée, un délai plus court peut être fixé.
L'acte portant convocation de l'assemblée
doit :
- indiquer la dénomination de la société
suivie le cas échéant, de son sigle SA, la forme de la
société, le montant du capital social, l'adresse du siège
social, le numéro d'immatriculation au registre de commerce et de
crédit mobilier et les jours et lieu de l'assemblée, ainsi que sa
nature ordinaire, extraordinaire ou spéciale. En principe
l'assemblée se tient au siège social aux jours et heures
indiquées. Mais tout autre lieu peut être également
désigné.
- indiquer l'ordre du jour de l'assemblée. Cette
indication de l'ordre du jour est essentielle pour la tenue de
l'assemblée. Cet ordre du jour est établi en principe par
l'auteur de la convocation de l'assemblée. Lorsque l'assemblée
est convoquée par un mandataire de justice, l'ordre du jour est
fixé par le président du tribunal qui l'a désigné.
- enfin, l'acte de convocation doit indiquer le cas
échéant, le lieu où doivent être
déposés les actions au porteur ou le certificat de
dépôt de ces actions, pour ouvrir le droit de participer à
l'assemblée, ainsi que la date à laquelle ce dépôt
doit être fait.
L'avis de convocation est adressé à toute
personne habilitée à participer à l'assemblée. Il
s'agit des actionnaires, des commissaires aux comptes, des représentants
des obligataires. Il peut s'agir des personnes étrangères
à la société, des experts de tous ordres, des
créanciers ou débiteurs de la société, etc. Il
appartient à la société ou au président du tribunal
qui a désigné un mandataire de décider des personnes
à convoquer.
L'information des actionnaires est nécessaire au bon
fonctionnement des assemblées.
B- L'information des actionnaires
Pour pouvoir délibérer sur toutes les
questions en toute connaissance de cause, l'actionnaire a le droit, d'une part
d'obtenir communication de certains documents et, de manière plus large,
d'autre part de poser des questions écrites aux dirigeants sociaux.
Le droit d'obtenir communication de documents peut s'exercer
soit de manière permanente, soit de manière ponctuelle. Dans le
premier cas il est prévu que tout actionnaire peut à toute
époque de l'année, prendre connaissance au siège
social : des documents sociaux concernant les trois derniers
exercices, des procès-verbaux et les feuilles de présence
des assemblées tenues au cours de ces trois derniers exercices, de
tout autre document si les statuts le prévoient ;
Dans le second cas, l'actionnaire a le droit de prendre
connaissance au siège social, 15 jours avant la tenue de
l'assemblée générale extraordinaire : de
l'inventaire, des états financiers de synthèse et de la liste des
administrateurs; des rapports du commissaire aux comptes et du conseil
d'administration ou de l'administrateur général; du texte de
l'exposé des motifs des résolutions proposées; et de la
liste des actionnaires.
Il faut reconnaître que le droit de prendre
communication serait dérisoire s'il n'est pas assorti de droit de
prendre copie. Mais le législateur a pris le soin de mettre à la
charge des actionnaires les frais de la copie des documents. Le
législateur OHADA comme le législateur français, a
autorisé la prise de connaissance de l'inventaire mais a interdit la
prise de copie de l'inventaire aux actionnaires (art. 525 AU).
En cas de refus de communiquer à l'actionnaire les
documents requis, celui-ci peut saisir par voie de référé
le président du tribunal de première instance du lieu du
siège social de la société. Ce dernier peut ordonner
à la société le cas échéant sous astreinte,
la communication de ces documents31(*).
Le droit de poser des questions écrites aux dirigeants
sociaux est tout à fait nouveau. Il améliore le contrôle
interne exercé par les actionnaires sur la gestion de la
société. Il est ainsi prévu que l'actionnaire peut deux
fois par exercice poser des questions écrites au président
directeur général ou au directeur général ou
à l'administrateur général sur tous les faits de nature
à compromettre la continuité de l'exploitation (art. 158 AU). Le
dirigeant interpellé est tenu de répondre à l'actionnaire
par écrit dans un délai d'un mois.
Dans le même temps, il adresse copie de la question et
de sa réponse aux commissaires aux comptes. Le commissaire aux comptes
est l'organe de contrôle par excellence de la société
anonyme. Il transmet les résultats de son contrôle et
vérification au conseil d'administration ou à l'administrateur
général. Il signale à l'assemblée
générale les irrégularités ou les inexactitudes
relevées de même que les faits délictueux ; il les
signale aussi au ministère public.
Lorsque la société anonyme fait appel public
à l'épargne ou lorsque ses actions sont inscrites à la
bourse des valeurs, elle doit publier au journal habilité à
recevoir les annonces légales le projet d'états financiers de
synthèse avant la tenue de l'assemblée générale
ordinaire. Pour les sociétés anonymes ayant des filiales pour des
participations, elles doivent publier les états financiers de
synthèses consolidés s'ils sont disponibles. La
société doit reprendre la même publication après la
tenue des assemblées générales ordinaires.
L'actionnaire exerce son droit à l'information
lui-même ou par le mandataire qu'il a nommément
désigné pour le représenter à l'assemblée.
Ce représentant peut être un autre actionnaire ou son conjoint. Il
peut se faire assister par un expert.
Comment sont organisées les assemblées
d'actionnaires ?
C- L'organisation de l'assemblée d'actionnaire
L'assemblée d'actionnaires est dirigée par un
bureau composé du président, de deux scrutateurs et d'un
secrétaire. Le président est selon les cas, le président
du conseil d'administration, le président directeur
général (PDG) ou alors l'administrateur général. En
cas d'empêchement du président, l'assemblée est
présidée par l'actionnaire ayant ou représentant le plus
grand nombre d'actions, sauf dispositions statutaires contraires. En cas
d'égalité d'actions, le législateur OHADA a
préféré le doyen d'âge des actionnaires (art. 529
AU).
Il faut néanmoins préciser que lorsque
l'assemblée est convoquée par le commissaire aux comptes, c'est
lui qui fixe l'ordre du jour mais ne préside pas les débats. Il
en est de même du mandataire de justice. Lorsque la société
anonyme est en liquidation des biens, il faut certainement admettre, tous ces
organes étant mis en veilleuse, que le liquidateur préside
l'assemblée. Les deux scrutateurs nommés sous réserve de
leur acception sont les deux actionnaires représentant le plus grand
nombre d'actions (art. 530 AU). Le secrétaire est nommé par
l'assemblée et non par le bureau pour établir le procès
verbal des débats. Il peut être choisi en dehors des actionnaires.
Au premier chef se trouvent les actionnaires, naturellement
ceux-ci jouissent du droit de participer aux assemblées. L'actionnaire
n'est pas obligé de participer personnellement à
l'assemblée. Il peut se faire représenter par un mandataire.
L'Acte Uniforme de l'OHADA admet de manière libérale que
l'actionnaire puisse se faire représenter par un mandataire de son choix
(art. 528 AU). C'est une innovation car la loi française du 24 juillet
1966 n'admet pas cette liberté de choix du mandataire. L'article 161 al.
2 de la loi française du 24 juillet 1966, n'admet comme mandataire d'un
actionnaire qu'un autre actionnaire ou alors le conjoint de l'actionnaire
mandant.
Peut également siéger à
l'assemblée d'actionnaires, toute personne ayant reçu une
convocation et habilitée par une disposition légale ou par une
stipulation de statuts de la société. Ainsi l'Acte uniforme de
l'OHADA accorde ce droit aux personnes suivantes : les commissaires aux
comptes, les représentants des groupements des obligataires, les
administrateurs non actionnaires.
Pour la régularité de la réunion, il est
tenu une fiche de présence qui permettra en effet de calculer par la
suite le quorum et la majorité lors des votes (art. 532 AU). Elle permet
également de vérifier la qualité de participants à
l'assemblée. Elle doit être émargée par les
actionnaires présents et par les mandataires au moment de
l'entrée en salle. Cet objectif ne peut être atteint que si la
fiche ou feuille de présence contient les noms, prénoms et
domicile, si possible leur numéro de téléphone, ainsi que
le nombre des actions et le nombre de voix de chaque actionnaire
présent, de chaque mandataire et de chaque actionnaire
représenté.
A l'instar de l'organisation, le législateur OHADA a
réglementé la délibération de l'assemblée
d'actionnaires.
D- La délibération de l'assemblée
d'actionnaires
L'assemblée générale prend toutes
décisions par voie de vote. Le législateur n'a pas
réglementé spécialement le droit de vote. Celui-ci peut
donc être restreint par les dispositions statutaires. Ainsi peut-il
être prévu que les actionnaires présents ou
représentés ne pourront voter que s'ils ont libéré
leurs actions de versements exigés. De même, il peut être
prévu que les votes seront exprimés au scrutin public, soit
à main levée, soit par appel nominal.
L'assemblée générale d'actionnaires ne
peut valablement délibérer que dans le respect des règles
de quorum et de majorité. Ce quorum est fixé par les statuts,
mais le législateur OHADA fixe un chiffre minimum qui varie suivant la
nature de l'assemblée.
Ainsi dans les assemblées générales
ordinaires, le quorum est du quart des actions avant le droit de vote à
la première convocation; à la seconde convocation le quorum n'est
pas exigé (art. 549 AU). Si un seul actionnaire ayant un droit de vote
est présent, l'assemblée peut donc valablement
délibérer sur la question inscrite à l'ordre du jour.
Pour l'assemblée générale extraordinaire,
l'importance des questions à débattre explique l'exigence d'un
quorum plus élevé. Alors elle ne délibère
valablement que si les actionnaires présents ou
représentés possèdent au moins la moitié des
actions ayant le droit de vote sur la première convocation, et le quart
sur la deuxième convocation. Ce quorum du quart est maintenu en cas
d'une troisième convocation éventuelle de l'assemblée
générale extraordinaire. Celle-ci doit intervenir au plus tard
deux mois à compter de la date fixée par la deuxième
convocation (art. 553 AU).
Le quorum lors des assemblées générales
extraordinaires est le même dans les assemblées
générales constitutives. Ainsi cette dernière ne peut
valablement délibérer que lorsque les souscripteurs
présents ou représentés possèdent au moins la
moitié des actions. Si ce quorum n'est pas atteint, une deuxième
convocation doit être adressée aux souscripteurs six jours au
moins avant la date de l'assemblée. Le quorum est fixé au moins
au quart des actions. A défaut, une troisième convocation peut
être adressée aux souscripteurs dans les mêmes conditions
que la deuxième pourvu qu'elle soit dans un délai maximum de deux
mois à compter de la date fixée pour la deuxième
convocation. Le quorum demeure fixé au quart des actions.
L'assemblée générale ordinaire statue
à la majorité simple des voix exprimées, il n'est pas tenu
compte des bulletins blancs (art. 550 AU). En d'autres termes, lorsque
après le vote le nombre de voix exprimées pour la
résolution est supérieur au nombre de voix exprimées
contre la résolution, cette dernière est adoptée et
l'assemblée générale délibère sur cette
résolution. Dans le cas contraire, c'est-à-dire lorsque le nombre
de voix favorables est inférieur au nombre de voix contre, la
résolution n'est pas votée.
L'assemblée générale extraordinaire
statue à la majorité des deux tiers des voix exprimées. Il
n'est pas tenu compte des bulletins blancs (art. 554 AU). L'unanimité
est même exigée en cas de transfert du siège social de la
société sur le territoire d'un autre Etat; en effet celui-ci peut
être lourd de conséquences, notamment le changement de
nationalité ou la soumission de l'entreprise à un régime
d'imposition qui peut être défavorable aux actionnaires.
A la fin de l'assemblée, le bureau de
l'assemblée générale annexe les procurations à la
fiche de présence qui est certifiée sincère et
véritable par les scrutateurs. Le bureau établit le procès
verbal de la délibération. Le législateur OHADA
énumère à l'article 535 al. 2, les différents
éléments que la feuille de présence doit contenir. Ce qui
constitue l'innovation du législateur OHADA est l'exigence d'un
résumé des débats. Ainsi depuis l'entrée en vigueur
de l'Acte uniforme de l'OHADA, il ne suffit plus que figurent au
procès-verbal les résolutions adoptées; il faut aussi que
les discussions au cours de l'assemblée soient résumées
dans le procès verbal.
Au total, les dispositions préventives des conflits
entre actionnaires tels qu'ils viennent d'être exposés ne doivent
souffrir d'aucune restriction. L'actionnaire est titulaire de droits
irréductibles, de droits propres auxquels les statuts ou la
décision d'un organe social ne peuvent porter atteinte. De plus, le
pouvoir suprême appartient aux actionnaires réunis en
assemblée générale souveraine dont le fonctionnement est
minutieusement réglementé.
CHAPITRE II : LES MODES DE RESOLUTION DES
CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
L'Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés
Commerciale et du GIE prévoit les modes de résolution des
conflits entre actionnaires. L'article 147 dispose
que : « tout litige entre associés (...)
relève de la juridiction compétente ». Si, en
dépit des dispositions préventives évoquées au
chapitre précédent, un conflit n'a malheureusement pas pu
être évité, les actionnaires peuvent introduire une action
en justice. En fonction de la situation dans laquelle ils se trouvent et du
résultat qu'ils souhaitent atteindre, ils choisiront entre
différentes solutions prétoriennes.
Aux termes de l'article 148 de l'AUSCGIE : « Ce
litige peut également être soumis à l'arbitrage, soit par
une clause compromissoire, statutaire ou non, soit par compromis ».
Dans cette hypothèse, le litige est tranché par des particuliers
appelés arbitres en dehors du système judiciaire. Mais leur
sentence a la même autorité qu'un jugement rendu en
première instance par une juridiction étatique.
L'étude des modes de résolution des conflits
entre actionnaires nous conduira à examiner dans un premier temps le
recours au juge et dans un second temps l'arbitrage.
Section 1 : Le recours au juge
Le législateur OHADA n'a pas voulu poser des
règles qui auraient été nécessairement trop rigides
pour résoudre ces conflits. Ce sont les juges qui sont intervenus pour
tenter de mettre un terme à ces difficultés de fonctionnement.
Ils l'ont fait en élaborant peu à peu des constructions
remarquables: l'administration provisoire (§1), l'abus de majorité
ou de minorité (§2), la dissolution de la société
pour justes motifs (§3).
Paragraphe 1 : La désignation d'un
administrateur provisoire par le juge des référés
La désignation d'un administrateur provisoire par le
juge des référés32(*) est une mesure exceptionnelle, tant à travers
les conditions de cette désignation que le contenu de la mission de
l'administrateur provisoire.
A- Les conditions de désignation de l'administrateur
provisoire
On rappellera que l'intervention du juge des
référés dans la vie des sociétés, est
soumise à quatre conditions par la loi : l'urgence, le provisoire,
une apparence de droit, et l'absence d'immixtion du juge - dans la mesure
où la société continue à être
gouvernée par le principe d'autonomie de volontés
exprimées à la majorité.
Pour que le juge des référés soit
compétent, il suffit que le demandeur invoque l'urgence de son
intervention33(*). Si le
magistrat ne reconnaît pas l'existence de cette urgence, il ne pourra se
déclarer incompétent, mais devra dire qu'il n'y a lieu à
référé et déclarer la demande non fondée.
Le caractère provisoire de l'intervention du juge des
référés constitue une des conditions traditionnelles de sa
capacité à agir, puisqu'on ne peut en principe lui demander que
des mesures provisoires ne portant pas préjudice au fond du droit,
lequel reste de la compétence des juridictions statuant selon les
règles ordinaires34(*).
Ne décidant pas au fond, et n'arbitrant pas
définitivement le bien fondé des thèses en
présence, on conçoit que le juge des
référés, statuant le plus souvent d'une manière
rapide, puisse se contenter de constater une apparence du droit dont on lui
demande la sanction.
Enfin, en matière de sociétés
commerciales, le juge des référés ne dispose que d'un
pouvoir d'intervention marginal : il n'a pas reçu, il ne
reçoit et ne revendique d'ailleurs pas, le pouvoir de gérer la
société à la place de ses actionnaires qui demeurent
omnipotents. Le juge n'est pas le tuteur de la société
commerciale.
Respectant avec plus ou moins de scrupules, les principes que
nous venons de rappeler, les plaideurs ont toutefois saisi et saisissent
aujourd'hui de manière croissante, les juridictions commerciales et
singulièrement le Président du Tribunal de Commerce, de demandes
de désignations de «Mandataire de Justice» le plus souvent
qualifié d'administrateur provisoire.
Peut-on envisager la désignation d'un administrateur
judiciaire provisoire dès lors qu'un conflit entre actionnaire
surgit ? Si le conflit est de telle nature et de telle importance, et si
les circonstances de fait de la constitution de l'actionnariat y conduisent, il
paraît évident qu'une situation de blocage paralysant la
société imposera l'intervention du juge et la désignation
d'un administrateur judiciaire provisoire.
Il est arrivé qu'en un certain nombre de circonstances,
le Président du Tribunal de Commerce soit sollicité pour
intervenir afin d'éviter qu'une majorité abuse de ses droits ou
que les organes dont elle a veillé à la désignation,
détournent les pouvoirs qui leur ont été
conférés. Il demeure qu'on relève un certain nombre
d'hypothèses où le comportement de l'actionnaire majoritaire a
entraîné, à la demande de l'actionnaire minoritaire, la
désignation d'un administrateur provisoire.
Les circonstances où ce genre de désignations
interviennent présentent cependant des caractéristiques souvent
exceptionnelles : cas de dissentiments graves entre deux groupes
d'actionnaires rendant impossible la tenue des assemblées, ou
d'opposition entre les organes de gestion et les actionnaires, ou de conflits
entre deux organes rivaux d'administration35(*).
La société peut être paralysée par
la défaillance des organes de gestion : le conseil ne peut plus
fonctionner régulièrement par suite de mésentente entre
administrateurs ou encore les actionnaires minoritaires et majoritaires se
heurtent, à un point tel qu'ils compromettent les intérêts
sociaux. Il faut que l'entrave soit telle qu'elle empêche le
fonctionnement régulier de la société et compromette les
intérêts. De simples divergences de vue seraient
insuffisantes36(*).
La désignation d'un administrateur provisoire peut
être demandée soit par les dirigeants de la société,
soit par un ou plusieurs actionnaires : il est exigé que le
demandeur ait un lien de droit avec la société37(*). L'action doit être
intentée devant le tribunal de commerce. En fait, il s'agit le plus
souvent d'une action en référé introduite devant le
président du tribunal de commerce, et la société doit
être mise en cause. La décision qui nomme l'administrateur fixe sa
rémunération, qui est en principe, à la charge de la
société.
L'administrateur provisoire est désigné pour
accomplir des missions précises.
B- Les missions de l'administrateur provisoire
Il appartient à la décision qui nomme
l'administrateur provisoire de délimiter l'étendue de ses
pouvoirs. En principe, sa nomination dessaisit les dirigeants en fonction, mais
il pourrait également n'être désigné que pour des
pouvoirs limités.
On doute qu'il soit de la capacité du tribunal de
désigner un administrateur provisoire chargé d'assurer d'une
manière générale, la gestion journalière de la
société tant cette mission comporte des implications techniques,
intimement liées à l'objet social, et des responsabilités,
qui paraissent excéder les limites de ce que l'on peut raisonnablement
attendre d'un mandataire de justice. Il est toutefois des circonstances,
notamment dans l'hypothèse des conflits graves entre actionnaires
où, à peine de paralyser la gestion sociale, la
désignation d'un administrateur provisoire
« délégué à la gestion
journalière » est la seule solution envisageable38(*).
La convocation d'une assemblée générale,
l'inventaire des biens, des investigations et des mesures de sauvegarde
relatives à la structure du capital social ou à la
répartition des actions entre les actionnaires, un pouvoir
d'autorisation préalable ou un droit de veto réservé au
Mandataire de Justice, constituent autant de missions limitées dans le
temps dont il paraît opportun de recommander le libellé lorsque
les circonstances l'imposent39(*).
On ne doit pas oublier qu'il est avant tout chargé de
dénouer une crise, et n'est qu'un dirigeant provisoire. C'est pourquoi
il doit être particulièrement prudent s'il a à effectuer
des actes de disposition engageant de façon irrémédiable
la société, d'autant que souvent il connaît encore mal
l'entreprise à la tête de laquelle il a été
nommé.
Lorsqu'une clause d'agrément figure dans les statuts,
il n'appartient pas à l'administrateur provisoire de se substituer au
conseil d'administration pour exercer le droit d'agréer de nouveaux
actionnaires. Et lorsqu'il s'agit de procéder au dépôt de
bilan de la société, sa responsabilité pourrait être
engagée s'il ne s'assurait pas d'un minimum de précautions
(audition des anciens dirigeants, consultation des actionnaires, absence de
précipitation ...)40(*).
L'ordonnance de référés
déterminera avec précision la durée de la mission de
l'administrateur provisoire, le cas échéant en se
réservant le droit, dans le dispositif de son ordonnance, de proroger
cette désignation. L'administrateur provisoire encourt les mêmes
responsabilités qu'un dirigeant social, à l'égard de la
société, des actionnaires ou des tiers.
La désignation d'administrateur provisoire n'est
toutefois pas une panacée et doit demeurer exceptionnelle. Lorsque les
conditions de nomination d'un d'administrateur provisoire ne sont pas
réunies, la jurisprudence admet l'introduction d'une action en abus de
majorité ou de minorité
Paragraphe 2 : L'introduction d'une action en cas
d'abus de majorité ou de minorité.
La théorie d'abus de majorité ou de
minorité a été développée par les cours et
tribunaux et se fonde essentiellement sur l'article 1382 du Code Civil. Une
action en abus de majorité ou de minorité peut être
intentée par les associés victimes de cet abus. Si les conditions
sont remplies, le plaignant obtiendra l'annulation de la décision
abusive (art. 1844-10 C.civ.), ainsi que l'octroi éventuel de dommages
et intérêts s'il peut démontrer un préjudice.
A- L'abus de majorité
Alors qu'en droit français l'abus de droit est une
création purement jurisprudentielle, dans l'optique de sanctionner tout
comportement abusif lié à l'exercice du droit de vote des
majoritaires41(*),
l'AUSCGIE a le mérite de préciser les contours de cette notion en
posant de façon explicite à l'alinéa 2 de l'article 130
qu'« il y a abus de majorité lorsque les associés
majoritaires ont voté une décision dans leur seul
intérêt, contrairement aux intérêts des
associés minoritaires, et que cette décision ne puisse être
justifiée par l'intérêt de la
société ».
Les décisions collectives peuvent être
annulées pour abus de majorité et engager la
responsabilité des associés qui les ont votées à
l'égard des associés minoritaires (art. 130 al. 1 AUSCGIE). Cette
assertion a été renchérie par la cour de cassation qui a
affirmé que : « le droit de vote est
conféré à l'associé pour qu'il l'utilise dans
l'intérêt commun et non pas à des fins égoïstes
(..) et qu'ainsi, aucune délibération d'un organe
sociétaire n'est à l'abri de la qualification d'abus de
majorité »42(*).
L'abus de majorité peut se manifester au sein de
l'assemblée générale comme au sein du conseil
d'administration. L'administrateur est titulaire d'un droit de fonction, ce qui
signifie qu'il doit suivre l'intérêt de la société
et ne peut rechercher son intérêt personnel lorsqu'il prend une
décision. Il est en outre, le mandataire de l'assemblée
générale dans son ensemble, et non celui d'un groupe particulier
d'actionnaires. Il va de soi qu'il existe des affinités entre les
actionnaires d'une société et le conseil d'administration.
Les décisions du conseil d'administration ne peuvent
cependant pas devenir l'instrument d'un abus de majorité. C'est aux
administrateurs qu'il appartient d'apprécier l'opportunité des
décisions à prendre dans l'intérêt de la
société, et le juge ne peut contrôler leur pertinence que
de manière marginale.
L'annulation d'une décision du conseil d'administration
pour abus de majorité suppose que deux conditions soient remplies :
la majorité doit délibérément sacrifier les
intérêts de la société aux siens propres ou à
ceux de tiers; et la décision doit causer un préjudice à
la société ou à tout le moins susceptible d'en causer un.
Lorsque ces conditions sont remplies, le juge peut annuler une décision
du conseil d'administration43(*).
Il convient de relever qu'il sera plus difficile
d'établir l'existence d'un abus au sein de l'assemblée
générale qu'au sein du conseil d'administration. En effet, c'est
la loi de la majorité qui régit le fonctionnement de celle-ci au
sein des sociétés anonymes. L'actionnaire est normalement libre
de voter dans le sens qu'il souhaite et il est même en droit de
rechercher son intérêt personnel. Son droit de vote est à
la fois un droit égoïste et un droit de fonction. Seul l'abus du
droit de vote est sanctionné.
Pour que l'exercice du droit de vote soit abusif, il faut la
majorité ait agit dans son intérêt propre, de
manière intentionnelle, et que l'avantage résultant de l'attitude
prise soit manifestement disproportionné par rapport à
l'inconvénient ou au préjudice qu'il cause.
Pour la mise en oeuvre de cette action, il faut que le
plaignant ait un intérêt à agir, et que la décision
soit entachée d'excès de pouvoir. Un actionnaire qui a
voté en faveur de la décision attaquée ne peut introduire
une action en annulation, sauf si son consentement a été
vicié. De même, un intéressé ne peut plus introduire
d'action, s'il a expressément ou tacitement renoncé à se
prévaloir de cette nullité44(*).
Habituellement ce sont les minoritaires qui se plaignent des
abus des actionnaires majoritaires. L'inverse peut cependant se produire.
B- L'abus de minorité
L'abus de minorité est comparable à l'abus de
droit, sans pouvoir lui être assimilé45(*).
C'est une attitude d'actionnaires minoritaires contraire
à l'intérêt général de la
société, en créant un obstacle à la
réalisation d'une opération essentielle pour celle-ci et dans
l'unique dessein de favoriser leurs propres intérêts. La
minorité peut ainsi imposer sa volonté à la
majorité soit par une opposition injustifiée soit par un vote de
surprise abusivement préparé. Il existe en effet, des
minorités de blocage qui peuvent de manière abusive
empêcher l'adoption de résolutions conformes à
l'intérêt social.
Aux termes des dispositions de l'article 131 al. 2 AUSCGIE
« Il y a abus de minorité lorsque, en exerçant leur
vote, les associés minoritaires s'opposent à ce que des
décisions soient prises, alors qu'elles sont nécessitées
par l'intérêt de la société et qu'ils ne peuvent
justifier d'un intérêt légitime ». L'exemple
classique d'un abus de minorité est le blocage abusif d'une
décision nécessitant une majorité spéciale
(modification des statuts, augmentation de capital)46(*).
Les mécanismes de prise de décision au sein de
l'assemblée générale sont alors systématiquement
entravés lorsque la société doit prendre une
décision importante. Les juges ont donc dû trouver une base
légale permettant de débloquer ce genre de situation.
L'action en abus de minorité n'est pas régie par
la loi sur les sociétés commerciales. C'est une création
jurisprudentielle. La sanction de l'abus de minorité ne sera bien
évidemment pas l'annulation d'une décision qui n'a pu être
prise.
Les juges ont donc dû imaginer différentes
sanctions.
1°) Soit le juge déclare non avenu le vote
négatif abusif émanant des associés minoritaires.
2°) Soit la décision du juge tient lieu de
délibération.
Quoi qu'il en soit, le juge et, le plus souvent, le juge des
référés sera amené à s'immiscer dans les
délibérations des assemblées générales.
Cette assertion a été approuvée par la cour de cassation
française par un arrêt de principe du 09 mars 1993. Elle
décide « ...de désigner un mandataire aux fins de
représenter les associés minoritaires défaillants à
une nouvelle assemblée et de voter en leur nom dans le sens des
décision conformes à l'intérêt social mais ne
portant pas atteinte à l'intérêt légitime des
minorités »47(*).
En cas d'abus de majorité ou de minorité, un
redressement de la situation est escompté; ce qui n'est pas le cas de
la dissolution judiciaire.
Paragraphe 3 : La dissolution de la
société pour justes motifs
Le tribunal peut prononcer la dissolution anticipée
à la demande d'un actionnaire pour justes motifs (art. 200 al. 5
AUSCGIE). Le texte cite comme exemples l'inexécution de ses obligations
par un associé et la mésentente entre associé paralysant
le fonctionnement de la société.
Le second motif visant la mésentente entre
associés, est beaucoup plus invoqué. C'est une arme
fréquemment utilisée comme l'abus de majorité ou l'abus de
minorité, dès lors que la zizanie s'installe entre actionnaires.
Elle est également invoquée lorsqu'un minoritaire qui veut
quitter la société ne trouve pas d'acquéreur ou quand les
majoritaires ne lui offrent pas un prix de sortie suffisamment
élevé. Mais les tribunaux ne font droit à ces demandes de
dissolution qu'avec beaucoup de réserve :
- la mésentente doit paralyser le fonctionnement de la
société. Un simple désaccord entre actionnaires ne
concernant que des questions d'intérêt personnel est
insuffisant48(*).
- le demandeur ne doit pas être lui-même à
l'origine du trouble social49(*) ;
- lorsque la société est prospère, les
juges tenteront préalablement de faire dénouer la crise en
désignant un administrateur provisoire50(*).
En revanche, la dissolution doit être prononcée
lorsque deux groupes d'actionnaires possédant chacun la moitié du
capital social sont en telle opposition qu'il est impossible de reconstituer le
conseil d'administration et donc de désigner un président, ou
encore la mésentente entre actionnaires est tellement grave qu'elle
interdit en pratique la moindre activité sociale et que les
dénonciations démontrent qu'il n'y a plus de volonté de
collaboration commune. Dans toutes ces hypothèses, la disparition de
l'affectio societatis ne permet plus à la société
de survivre.
L'action en dissolution appartient à tout actionnaire
qui se prévaut d'un intérêt légitime; elle est
d'ordre public et ne saurait être entravée par une quelconque
disposition statutaire ou extrastatutaire. La demande en dissolution impose de
mettre en cause la société.
L'action en dissolution relève de la compétence
du tribunal de commerce. Les juges disposent d'un large pouvoir
d'appréciation qui est souverain et échappe au contrôle de
la Cour de cassation51(*).
Les juges peuvent toujours nommer un administrateur provisoire s'ils estiment
que la crise n'est que temporaire ou demander à être
éclairés par une expertise. Il n'est cependant pas possible
qu'ils puissent exclure de la société un actionnaire contre son
gré.
Mais le tribunal pourrait estimer qu'il n'y a pas juste motif
de dissolution dès lors que le demandeur refuse que ses droits sociaux
lui soient rachetés à dire d'expert. L'action doit être
intentée de bonne foi. Si elle est exercée de façon
abusive, le demandeur peut être condamné à des dommages
intérêts52(*).
Cette procédure est tout à fait exceptionnelle,
et ne doit être considérée que comme un remède
ultime qui ne serait appliquée qu'à des conflits entre
actionnaires ne pouvant être réglées par d'autres moyens.
Le législateur OHADA permet également aux actionnaires de
recourir à l'arbitrage comme mode de résolution de leurs
conflits.
Section 2 : L'arbitrage
.Nous avons supposé dans les développements
précédents que le litige était porté par les
actionnaires devant un juge public. Mais rien ne les empêche de confier
cette mission à un simple particulier qui leur inspire confiance
à raison de sa réputation d'intégrité ou de ses
connaissances techniques sans oublier les institutions permanentes d'arbitrage.
L'ordre chronologique du mécanisme arbitral suppose au
départ des opérations d'arbitrage (§1), dont l'issue est une
décision arbitrale (§2).
Paragraphe 1 : Les opérations d'arbitrage.
L'arbitrage ne peut avoir lieu que si certaines conditions
sont remplies. C'est la preuve que l'autonomie de la volonté a des
limites. Cela signifie qu'il existe des conditions pour que les
opérations d'arbitrage puissent être déclenchées.
Une fois que nous les aurons précisées (A), nous pourrons nous
pencher sur les effets du déclenchement des opérations
d'arbitrage (B).
A- Le déclenchement de la procédure
La condition sine qua non pour qu'il y ait arbitrage
est l'existence d'une convention d'arbitrage53(*). C'est cette exigence que traduit l'art. 21 du
Traité : « En application d'une clause compromissoire ou
d'un compromis d'arbitrage, toute partie à un contrat, ... peut
soumettre un différend d'ordre contractuel à la procédure
d'arbitrage prévue par le présent titre ».
Le Traité limite le domaine de la convention
d'arbitrage au « différend d'ordre contractuel » et
l'Acte Uniforme autorise les personnes physiques et morales à recourir
à l'arbitrage mais uniquement « sur les droits dont elles ont
la libre disposition » (art. 2 alinéa 2).
Les litiges arbitrables sont « les
différends d'ordre contractuel ». Ne seront arbitrales que les
litiges nés à l'occasion de la conclusion, de l'exécution
ou de la rupture d'un contrat. Donc, seront exclus du domaine arbitrable tous
les litiges délictuels, quasi-délictuels et
quasi-contractuels.
La convention d'arbitrage doit être faite par
écrit, ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve,
notamment par la référence à un document la stipulant
(art. 4).
La procédure déclenchée, il y a lieu de
s'interroger sur ses effets.
B- Les effets du déclenchement de la
procédure
Le déclenchement des opérations d'arbitrage a
pour conséquence immédiate l'incompétence des juridictions
étatiques. Donc le litige ne peut, en principe, être connu que par
les arbitres (art. 23 du Traité et 13 de l'Acte Uniforme). Il faudra
alors constituer la juridiction arbitrale et organiser l'instance arbitrale
proprement dite.
Le contrat d'arbitrage ne produit d'effet qu'entre les parties
contractantes. Il est en principe inopposable aux tiers qui ne peuvent pas
être attraits devant une juridiction arbitrale s'ils n'ont pas
personnellement renoncé à la compétence des tribunaux
d'Etat.
Les conventions d'arbitrage obligent, au jour de la naissance
du litige, les parties à y donner exécution. Ici
l'inexécution est sanctionnée par la désignation d'office
de l'arbitre (art. 10 du Règlement d'arbitrage : « si
l'une des parties refuse ou s'abstient de participer à l'arbitrage,
celui-ci a lieu nonobstant ce refus ou cette abstention»). En tout
état de cause, « l'instance arbitrale est liée
dès le moment où l'une des parties saisit le ou les arbitres
conformément à la convention... ».
Généralement, ce sont les parties qui
désignent les arbitres. Mais, pour éviter que le défendeur
s'abstienne de désigner son arbitre, la loi prévoit des
mécanismes de substitution à la volonté des parties (art.
5 A.U).
Dans l'arbitrage ad hoc, la
désignation des arbitres est organisée dans la convention
d'arbitrage qui peut, soit régler totalement la question, soit renvoyer
à un règlement d'arbitrage. Si les parties désignent les
arbitres pair, et qu'ils ne sont pas d'accord sur le troisième, il
appartient à la partie la plus diligente ou au tribunal lui-même
de saisir la juridiction compétente aux fins de nommer un autre arbitre
(art. 8 al. 2 A.U). Dans l'arbitrage institutionnel les
parties s'en remettent généralement au règlement
d'arbitrage de ce centre.
L'arbitre ou les arbitres tranchent le litige
conformément aux règles de droit à moins que, dans la
convention d'arbitrage, les parties n'aient donné mission de statuer en
amiable composition (art. 15 A.U). Le principe est que les parties
règlent la procédure arbitrale sans être tenues de suivre
les règles établies pour les tribunaux de l'Etat, sauf si elles
en ont décidé autrement dans la convention d'arbitrage. Mais
comme l'arbitrage doit aboutir à une sentence
exécutoire, les principes directeurs du procès sont
applicables (art. 9 A.U).
En règle générale, le déroulement
de la procédure est le suivant :
- Etablissement de l'acte de mission qui détermine les
prétentions des parties, installation du tribunal et
détermination des délais de procédure ;
- Echange de mémoires écrits dans lesquels les
parties exposent leurs arguments de fait et de droit et communiquent les
pièces justificatives ;
- Quand l'affaire lui paraît en état
d'être jugée, le tribunal fixe l'audience de plaidoirie qui n'est
pas publique et se déroule au lieu fixé par la convention ou
à défaut par les arbitres. En principe le choix du lieu de
l'arbitrage n'implique aucune conséquence juridique.
- A l'issue de l'audience, le tribunal fixe la date à
laquelle l'affaire sera mise en délibéré. Après
cette date, aucune demande ne peut être formée ni aucun moyen
soulevé; aucune observation ne peut être présentée
ni aucune pièce produite, si ce n'est à la demande de
l'arbitre.
L'instance arbitrale peut être émaillée
de nombreux incidents susceptibles de retarder la solution du litige. L'Acte
Uniforme prévoit certains de ces incidents de procédure. Si
devant l'arbitre, l'une des parties conteste dans son principe ou dans son
étendue, le pouvoir juridictionnel de l'arbitre, il appartient à
celui-ci de statuer sur la validité ou les limites de son investiture
(art. 11). Ainsi, les dilatoires peuvent être évités.
Les arbitres peuvent être révoqués. La
révocation ne peut intervenir que du consentement unanime des parties.
La partie qui entend récuser un arbitre doit prouver l'existence d'une
cause de récusation révélée ou survenue
après désignation. La partie qui entend se prévaloir d'une
cause de révocation doit la soulever sans délai (art. 7 de l'Acte
Uniforme). Les difficultés relatives à ces questions sont
tranchées devant le juge étatique.
La procédure arbitrale aboutit à une
décision appelée sentence.
Paragraphe 2 : La décision arbitrale
L'aboutissement de la procédure arbitrale est la
décision de l'arbitre (sentence) tout comme celle de la procédure
judiciaire est la décision du juge. Elle est susceptible de recours. Ce
sont les articles 19 à 34 de l'Acte Uniforme qui réglementent la
sentence.
Nous verrons la sentence proprement dite (A) avant d'examiner
les voies de recours (B).
A- La sentence arbitrale
Elle n'est pas un véritable jugement car elle ne
bénéficie pas en elle-même de la formule exécutoire
nécessaire pour une exécution forcée. Mais elle n'est pas
non plus une simple recommandation dont l'exécution dépendrait de
la bonne volonté des parties car elle a l'autorité de la chose
jugée54(*).
La sentence n'est pas soumise aux mêmes règles
de forme que le jugement. Mais la loi exige qu'elle contienne les mentions dont
la liste est fixée à l'article 20.
La sentence dessaisit l'arbitre de la contestation qu'elle
tranche (art. 22 al. 1). La sentence a, dès qu'elle est rendue,
l'autorité de la chose jugée relativement à la
contestation qu'elle tranche. Mais, contrairement à un jugement, elle
n'est pas revêtue de la formule exécutoire d'où la
nécessité d'une procédure particulière pour la
reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales que
prévoit le chapitre VI de l'Acte Uniforme.
Ce sont les articles 30 à 34 de l'Acte Uniforme qui
règlent la question de la reconnaissance et de l'exécution des
sentences arbitrales.
· La reconnaissance est une
procédure défensive. On l'utilise quand un tribunal est saisi
d'une demande portant sur un litige qui a déjà été
soumis à l'arbitrage. La partie à qui la sentence a donné
satisfaction soulèvera l'autorité de la chose jugée et,
pour en faire la preuve, communiquera la sentence au tribunal en lui demandant
de reconnaître sa validité et son caractère obligatoire
à l'égard des questions qu'elle tranche.
· En revanche, dans
l'exécution, on demande au juge au delà
de la simple reconnaissance, de faire exécuter, au moyen des pouvoirs de
coercition dont il est investi, la sentence arbitrale. Si le juge accorde
l'exécution, c'est parce qu'il reconnaît que la sentence est
valable et oblige les parties.
La reconnaissance et
l'exécution sont toujours de la compétence des juridictions
étatiques dépositaires de l'imperium des
autorités publiques. L'Acte Uniforme opère à ce propos une
distinction selon que la sentence est rendue sur le fondement des règles
de l'OHADA ou non.
· l'exequatur des sentences
O.H.A.D.A.
Le juge ne revient pas sur le fond de l'affaire, il
procède à des vérifications liées à la
régularité formelle de la sentence, à la validité
de la convention d'arbitrage et au respect de l'ordre public international
(art. 25 Traité) ou l'ordre public international d'un Etat partie (Art.
31 al. 4 de l'Acte Uniforme). L'ordonnance qui accorde l'exequatur n'est
susceptible d'aucun recours sauf s'il est frappé d'un recours en
annulation (art. 32 al. 2 de l'Acte Uniforme). Mais celle qui refuse
l'exequatur peut être frappée d'un pourvoi en cassation devant la
Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (Art. 32 al. 1 de l'A.U.).
B- Les voies de recours
L'examen de la réglementation
de l'arbitrage montre, qu'en matière de recours contre la sentence, deux
procédés coexistent : des voies de recours arbitrales et des
voies de recours étatiques.
Les voies de recours arbitrales consistent
à prévoir, après la sentence rendue par un premier
tribunal, l'examen de l'affaire par un deuxième degré arbitral,
en appel. Il s'agit donc d'un recours interne à la procédure
arbitrale. Ce procédé contient l'inconvénient majeur
d'alourdir la procédure et de retarder la solution du litige car, les
recours étatiques d'ordre public ne peuvent être
écartés par ces voies de recours interne à l'arbitrage.
Du fait de l'originalité de la
procédure arbitrale et, surtout de son caractère ambivalent, les
voies de recours étatiques obéissent à un régime
original et plus restrictif qu'en droit commun. Il s'agit en effet d'assurer
l'efficacité et la rapidité de l'arbitrage.
« La sentence arbitrale n'est pas susceptible
d'opposition ni d'appel, ni de pourvoi en cassation » Art. 25 al. 1.
- L'opposition qui est la voie de
recours tendant à faire rétracter un jugement rendu par
défaut et qui n'est ouverte qu'au défaillant, ne peut
prospérer ici. Elle est exclue en raison du caractère contractuel
de l'arbitrage. En effet, ce caractère exclut la notion de jugement par
défaut. D'ailleurs si la convention d'arbitrage était
considérée comme ne s'étant pas formée, il s'en
survient une nullité de la sentence (Art. 26 de l'A.U.).
- Le pourvoi en cassation
n'étant ouvert qu'à l'égard des décisions
rendues au dernier ressort par les juridictions de droit commun, la sentence en
tant que telle ne remplira jamais cette condition. Mais, s'il s'agit d'un
jugement sur l'annulation, le pourvoi en cassation est possible (Art. 25 al.2
et 3).
- L'appel est exclu du fait
peut-être de la compétence juridictionnelle de la CCJA et des
nécessités de rapidité de la procédure.
Les voies de recours qui sont recevables en matière de
sentence arbitrale regroupent :
- La tierce-opposition : La
sentence peut être frappée de tierce-opposition devant le tribunal
arbitral. On sait que la tierce-opposition est ouverte à toute personne
qui y a intérêt et qui n'a été ni partie, ni
représentée au jugement dont la rétraction ou la
réformation est demandée par cette voie. Donc si la sentence a
porté atteinte aux droits d'un tiers, il peut former
tierce-opposition.
- Le recours en annulation : Il
est toujours possible d'engager un recours en annulation de la sentence. C'est
ce que prévoit l'Art. 25 al. 2. Il serait en effet scandaleux qu'une
sentence nulle puisse produire des effets de droit et obliger les plaideurs.
· Les cas d'ouverture du recours en annulation sont les
suivants : le dépassement de sa mission par l'arbitre (convention
d'arbitrage inexistante nulle ou expirée, tribunal
irrégulièrement composée, l'arbitre a statué
ultra petita) et la violation d'une règle impérative
(non respect des principes directeurs du procès, violation d'une
règle d'ordre public international des Etats parties par le tribunal
lui-même).
· La procédure et les effets du recours sont
prévus aux Art. 27 et 28 de l'Acte Uniforme.
- Le recours en révision (Art.
25 al. 5)
Ce recours correspond à la requête civile ouverte
en cas de découverte d'un élément suffisamment grave pour
remettre en cause l'autorité de la sentence (fraude, faux
témoignage...).
En somme, dans l'hypothèse de la survenance d'un
conflit entre actionnaires, ceux-ci peuvent choisir entre deux modes de
résolution, en fonction de la situation dans laquelle ils se trouvent et
du résultat qu'ils souhaitent atteindre. Le juge public, investi de
l'obligation d'appliquer la loi et de veiller à son
interprétation, demeure un élément actif de la
résolution des conflits entre actionnaires, notamment en toutes
circonstances où la loi est silencieuse ou insuffisante. En outre, les
actionnaires peuvent avoir recours à l'arbitrage en raison des besoins
spécifiques du monde des affaires : rapidité,
discrétion et surtout cas d'espèces très
spécialisés.
DEUXIEME PARTIE :
LES PERSPECTIVES DU REGLEMENT DES CONFLITS ENTRE
ACTIONNAIRES
Les leçons tirées des législations
modernes étrangères nous ont amené à apporter un
autre éclairage sur le règlement des conflits entre actionnaires
dans l'espace OHADA. Nous prônons une approche différente et
novatrice des conflits internes et suggérons de mettre l'accent sur la
promotion des règles de type contractuel afin de les gérer. Il
est évident que les actionnaires seront prudents, soit par voie
statutaire, soit par voie de convention, pour restreindre tant que faire se
peut la possibilité d'émergence des conflits sociaux ainsi que,
pour le cas où ils surviendraient, esquisser dans les grandes lignes ou
dans les détails, les mécanismes de résolution de ces
conflits.
Dans le premier chapitre, nous consacrerons quelques
développements aux pactes d'actionnaires. L'expérience enseigne
que ces instruments conventionnels, essentiels à une bonne entente, sont
le plus souvent méconnus ou insuffisamment utilisés dans l'espace
OHADA. Puisqu'il faut bien envisager la situation où l'ensemble des
démarches préventives serait inefficace, nous consacrerons le
second chapitre aux nouveaux mécanismes de résolution des
conflits entre actionnaires que sont l'exclusion et le retrait judiciaire, la
médiation et la conciliation.
CHAPITRE I : LA PREVENTION INTERNE DES
CONFLITS PAR LES PACTES D'ACTIONNAIRES
Nous avons vu dans les développements
précédents que porter le litige devant un tribunal n'est pas une
panacée pour les actionnaires. En effet, l'issue de tout procès
comporte une part d'incertitude. Chaque mode de résolution des conflits
suppose, en outre, que certaines conditions soient remplies et ne permettent
d'atteindre que des résultats déterminés. La solution
judiciaire n'intervient qu'après un laps de temps plus ou moins long, et
la société a déjà souvent lourdement souffert du
conflit avant qu'un jugement n'intervienne.
De plus en plus, les actionnaires d'une société
anonyme concluent des conventions appelées pactes d'actionnaires, par
lesquelles ils cherchent à régler le contrôle de la
conduite des affaires et de la composition de leur société. Ces
pactes sont l'expression d'un intérêt porté à
l'aspect contractuel du droit des sociétés55(*). Comme le souligne à
juste titre le Professeur Pedro SANTOS, « les pactes d'actionnaires
sont totalement licites au regard des principales branches du droit
privé, ils sont conformes aux règles du droit civil, comme
à celles du droit des sociétés. Une organisation
d'actionnaires (...) n'a rien de frauduleux » 56(*).
Or, les pactes d'actionnaires permettent de mettre en place un
certain nombre de mécanismes qui s'avéreront efficaces dans la
prévention interne des conflits. En fermant la porte aux
imprévus, ils enrayent à la source des conflits qui risquent de
dégénérer, et prévoient des moyens pour solutionner
ceux qui pourraient survenir pendant la vie de la société. La
matière des pactes d'actionnaires englobe deux grandes catégories
de conventions, d'une part les conventions qui restreignent la
cessibilité des titres (section 2) et, d'autre part, celles qui portent
sur l'exercice du droit de vote (section 1).
Section 1 : Les conventions de vote entre actionnaires
Les conventions de vote portent sur l'exercice du droit de
vote des actionnaires à l'assemblée générale. Leur
portée varie de l'engagement ponctuel de concertation avant le vote
à l'une ou l'autre assemblée générale
jusqu'à des obligations plus larges, telles que celle de souscrire
à une augmentation du capital ou le recours à des
mécanismes qui affectent, aménagent ou infléchissent les
principes de fonctionnement de la société, tels que les clauses
de représentation proportionnelle des administrateurs ou celles qui
portent sur la révocabilité des administrateurs.
Le régime des conventions de vote (§1), et la
typologie des conventions de vote (§2) retiendront notre attention.
Paragraphe 1 : Le régime des conventions de
vote.
Nous évoquerons les conditions de
licéité et les effets des conventions de vote.
A- Les principes généraux
Les conventions de vote ne font l'objet d'aucune interdiction
par les textes législatifs et réglementaires57(*). S'inspirant de la doctrine,
la cour de cassation belge s'est prononcée par un arrêt de
principe du 13 avril 1989 en faveur de la validité des conventions de
vote à condition qu'elles soient limitées à
l'opération visée, conformes à l'intérêt
social et exemptes de toute idée de fraude58(*).
Mais la nullité s'applique sans difficulté
à la convention par laquelle un actionnaire prendrait l'engagement de ne
pas voter ou de ne voter qu'avec l'accord ou l'autorisation d'autrui. Telle est
la situation lorsque quelques actionnaires majoritaires conviennent de prendre
à l'unanimité des décisions concernant la bonne marche des
affaires sociales. Pour distinguer entre les bonnes et les mauvaises
conventions, il convient de se reporter à la jurisprudence qui tient
compte d'une part de la gravité de l'atteinte portée à la
liberté des contractants, et d'autre part de l'intérêt que
la clause peut présenter pour le fonctionnement de la
société.
Sont considérées comme nulles les conventions
par lesquelles un actionnaire s'engage par avance à voter dans tel ou
tel sens59(*). Ces
engagements sont fréquents à l'occasion de cessions d'actions.
Est également nulle la convention qui ne laisse aucune liberté de
choix aux actionnaires pour la désignation des administrateurs60(*). La cour de cassation
française a cassé les décisions des juges du fond ayant
considéré des protocoles d'accords, servant à
répartir les votes des actionnaires et les sièges au sein des
organes de direction, comme «tendant à dépouiller les
actionnaires de leur droit ou à restreindre leur liberté dans des
conditions illicites ».61(*)
En revanche sont considérées comme valables par
la jurisprudence les conventions qui, certes, limitent la liberté de
vote des actionnaires, mais sont passées dans l'intérêt
social62(*). En dehors de
l'hypothèse exceptionnelle d'achat de voix, le courant jurisprudentiel
est plus favorable à de tels accords. « Les engagements de
vote qui ne comportent pas un avantage consenti pour voter dans un certain
sens, ne sont pas prohibés par le droit positif. Il convient de les
déclarer licites dans leur principe... » 63(*). Par la loi du 12 juillet
1985, le législateur français a particulièrement
affirmé la validité des conventions de vote dans les groupes de
sociétés (art. L. 233-3, I, 2° et L 233-16, II, 3°
C.com.).
Afin de rendre plus efficace les conventions de vote, il est
usuel de prévoir des sanctions.
B- Efficacité et sanction des conventions de
vote
La convention de vote crée indiscutablement des droits
et obligations dans le chef des parties contractantes. Une opinion
traditionnelle considère que la convention est une « res
inter alios acta », que le contrat ne déploie ses effets
qu'entre les parties, lesquels effets sont dès lors inopposables aux
tiers ou à la société. Mieux, tierce à la
convention, la société ne doit pas voir son fonctionnement
affecté par le vote pris par un actionnaire qui a violé son
obligation de vote.
On oppose souvent à cette opinion le principe
d'opposabilité des effets externes du contrat aux tiers. Ainsi,
une convention valide et parvenue à la connaissance de la
société (ou d'un actionnaire minoritaire) doit donc être
respectée, et la société ne peut feindre de l'ignorer.
C'est la théorie de la tierce complicité. Transposée au
cas de la violation du pacte de votation, la solution pourrait conduire
à l'anéantissement du vote en question. Pour cela, il faut
démontrer que la société a eu connaissance de la
convention de vote et qu'en dépit de cette convention, elle ait permis
l'expression d'un vote contraire à cette convention.
Par analogie aux principes de réparation par
équivalent, le créancier de l'obligation de voter dans un certain
sens pourra en toute hypothèse obtenir réparation de la violation
du contrat, par le paiement de dommage et intérêts, sanction
naturelle de l'obligation de faire ou de ne pas faire (art. 1142 C. civ.).
Telle est à tout le moins la solution généralement retenue
par la doctrine classique64(*) pour laquelle la réparation par
équivalent est la seule concevable en l'espèce.
L'exécution en nature, consistant en la révision
des votes émis au mépris d'une convention de vote, est-elle
possible ? La question est délicate et sa réponse mêle
principes de droit civil et de droit de sociétés souvent
contradictoires65(*). La
jurisprudence n'a pas à ce jour apporté la clarté que
cette matière réclame lorsqu'on l'aborde sous l'angle de la
sanction66(*).
Une convention de vote peut être renforcée par
des pénalités privées (chèques en blanc,
dépôt de garantie entre les mains d'un tiers) ou une promesse de
cession d'actions signée par chacun des contractants, qui s'applique
dès la défaillance de l'un d'eux.
Le régime des sanctions de la violation des conventions
de vote licites est ignoré du code de commerce. Il mérite
toutefois l'attention du législateur pour un renforcement de leur
efficacité. Les parties resteront particulièrement attentives
à la prégnance de l'ordre public et à la
prééminence des statuts en certaines matières.
Ceci nous incite à ne pas opposer
systématiquement dans la suite du travail, les conventions
d'actionnaires aux statuts, pour aborder dans leur ensemble les accords portant
sur l'engagement de vote, qu'ils aient une assise statutaire ou strictement
contractuelle. Dès règles communes s'appliquent dans l'un ou
l'autre cas.
Paragraphe 2 : Typologie des conventions de vote.
L'objet des conventions de vote est multiple et varié.
Nous aborderons successivement les conventions qui ont trait à
l'engagement de voter dans un sens déterminé (A), les conventions
relatives au statut des dirigeants (B), et les conventions relatives au
fonctionnement des organes (C).
A- L'engagement ponctuel ou régulier de voter dans
un sens déterminé
On vise ici les conventions en vertu desquelles un
actionnaire s'engage à voter dans un sens à l'assemblée
générale ou à se concerter avant celle-ci avec les membres
du pacte, pour déterminer le sens dans lequel il votera. Sous la forme
d'une procuration irrévocable, ces conventions sont diverses :
- engagement de concertation pour une ou plusieurs
assemblées ;
- cession du droit de voter, pour une ou plusieurs
assemblées.
La convention peut aussi porter sur des questions
précises telles que : le maintien du siège ou de la
dénomination, l'engagement de participer à une augmentation de
capital, etc.
Signalons pour le surplus que les conventions relatives
à l'exercice du droit de vote au sein d'organes autres que
l'assemblée générale ne sont pas valables67(*), bien qu'une certaine doctrine
influencée pas des auteurs français, remette en cause ce
principe68(*).
Certaines conventions de vote ont pour objet de régler
la situation des dirigeants.
B- Le statut des dirigeants
Selon la classification établie par le professeur Yves
GUYON69(*), les accords en
cette matière portent le plus généralement sur :
i. Le renforcement de la stabilité des
dirigeants
Les actionnaires peuvent tirer parti d'une désignation
statutaire du dirigeant dont la révocation implique la preuve de motifs
graves. Le même avantage peut se retrouver dans le chef du conseil
d'administration au cas où les statuts auraient instauré un
régime dérogatoire à la révocation ad
nutum. Dans ces cas, le dirigeant n'est pas soumis au principe de la
révocation ad nutum.
ii. Les conventions tendant à éviter la
révocation
Certains dirigeants qui sont également actionnaires
peuvent en dépit de la vente de leurs titres, souhaiter conserver leur
position dans la société (mandats sociaux, contrats de travail ou
de consultant) et prévoir des modalités d'indemnisation en cas
d'éviction.
En vertu du principe de la révocabilité ad
nutum des actionnaires, tout engagement par lequel une
société s'interdit à l'avance de révoquer ses
administrateurs ou s'engager à leur verser une indemnité
substantielle en cas d'éviction est nul.
En revanche, il se déduit des termes de l'arrêt
de la Cour de cassation du 13 avril 198970(*), que les actionnaires sont admis à souscrire
un tel engagement, à titre personnel, et s'oblige à
dédommager l'administrateur en cas de vote de la révocation,
position qui est, depuis, régulièrement confirmée par la
jurisprudence.
iii. Les conventions limitant les effets de la
révocation
Nous ne revenons pas sur l'interdiction d'affaiblir
statutairement le droit de l'assemblée générale de
révoquer les administrateurs, ni sur le mécanisme décrit
au (ii) pour le contourner. La pratique recourt aussi à la technique des
conventions de management dont les termes doivent être
soigneusement choisis.
Il présente un intérêt lorsque,
cumulé avec une charge d'administrateur, il stipule le paiement d'une
indemnité contractuelle à charge de la société.
iv. Les clauses de représentation proportionnelle
au sein du conseil d'administration
Nous avons évoqué la toute puissance de la
règle majoritaire. Or, le cessionnaire d'une participation minoritaire
peut souhaiter participer effectivement à la gestion de la
société et, par conséquent, être
représenté dans les différents organes de direction.
Ce même souci se retrouve également dans le chef
des signataires d'une convention visant à constituer une filiale
commune. Pour répondre à cette préoccupation, une solution
consiste à prévoir que le droit de chaque actionnaire de
présenter tel nombre de candidats variera, par exemple, en fonction du
pourcentage de sa participation dans le capital social71(*).
Les actionnaires concernés par cette question peuvent
vouloir inscrire cet accord dans un pacte de votation. Les statuts paraissent
être le lieu naturel où doivent être insérés
ces clauses. La jurisprudence subordonne, on le sait, la validité de
telles conventions à la preuve qu'elles ne suppriment pas la
liberté effective de vote à l'assemblée72(*).
D'autres conventions de vote ont pour objet de régler
le fonctionnement de la société.
C- Fonctionnement des organes de la société
Il convient de rappeler que les répartitions de
compétence au sein du conseil d'administration sont autorisées
mais sont inopposables aux tiers. Aussi est-il permis, dans ces limites, de
créer des accords sur :
i. Le renforcement des conditions de majorité
à l'assemblée générale.
Les statuts peuvent stipuler des majorités
qualifiées pour la prise de décisions de l'assemblée
générale, voire imposer l'unanimité. Rien ne paraît
s'opposer à procéder de la même manière pour les
délibérations du conseil d'administration.
ii. Le vote plural des administrateurs
Le vote plural des actionnaires est prohibé73(*). Rien de tel pour les
administrateurs. Il nous paraît raisonnable de recourir à ce
procédé au profit des administrateurs à condition
d'éviter les écueils qui ont conduit à son interdiction
pour les actionnaires et à respecter le principe de
collégialité. La stipulation d'un droit de vote double pourrait
ainsi s'accorder avec ce principe à condition de ne pas conduire
à un abus, tel que le cumul de ce droit avec celui de la voix
prépondérante du président du conseil d'administration.
iii. Les limitations du pouvoir votal
Il existe différentes méthodes de
réduction du pouvoir votal des actionnaires. Rappelons celles dont
l'utilité et la souplesse n'ont pas échappé aux auteurs.
Nous empruntons à la doctrine les exemples suivants de clauses74(*) :
- une réduction progressive ou dégressive de la
puissance votale ;
- une réduction de cette puissance à partir d'un
certain seuil ;
- une réduction à un certain
pourcentage ;
- une réduction à un certain nombre de
voix ;
- une réduction à un pourcentage des actions
représentées à l'assemblée ;
- une réduction proportionnelle à partir d'un
certain seuil.
Comme mécanismes de prévention des conflits, les
conventions de vote ont pour but d'éviter des blocages fâcheux
dans la prise de décisions au sein des sociétés anonymes.
Les conventions restreignant la cessibilité des titres, quant à
elles, visent à empêcher « qu'un loup n'entre dans la
bergerie ».
Section 2 : Les conventions relatives à la
cessibilité des titres
Le législateur consacre la liberté reconnue aux
actionnaires de restreindre la cessibilité des titres par voie
conventionnelle (art. 228-23 ss. C. com.; rappr. art. 900-1 C. civ.)75(*). Les statuts, les actes
authentiques d'émission de droits de souscription et toutes autres
conventions peuvent limiter la cessibilité des actions. Par ces clauses,
les actionnaires maintiennent un équilibre entre les groupes existants,
ou augmentent leur participation dans le capital si l'un d'entre eux se retire.
En assurant la stabilité de l'actionnariat, les clauses restrictives de
cessibilité des actions sont considérées comme des moyens
par excellence de prévention interne des conflits.
Le régime des clauses restrictives de
cessibilité des actions (§1), et la typologie des conventions
relatives à la cessibilité des actions (§2) retiendront
notre attention.
Paragraphe 1 : Le régime des clauses
restrictives de cessibilité d'actions.
Il s'agit du régime légal ordinaire76(*). Nous évoquerons les
conditions de validité et les sanctions des clauses restrictives de
cessibilité d'actions.
A- Les conditions de validité
Le champ d'application de ces clauses est
particulièrement large. Toute forme de clause restrictive de
cessibilité est autorisée qu'elle soit contenue dans les statuts,
dans les actes authentiques, voire dans toute autre convention77(*).
Ainsi ces clauses pourront être stipulées, soit
au moment de la constitution de la société, soit en cours
d'existence. Elles pourront en outre être insérées dans des
conventions, non seulement entre actionnaires mais également à
l'égard des tiers.
Seules les clauses d'inaliénabilité, les
clauses d'agrément et les clauses de préemption sont soumises au
présent régime, à l'exclusion des autres clauses issues de
la pratique qui peuvent également moduler la cessibilité des
titres 78(*). Ces
dernières n'en demeurent pas moins licites mais ne sont pas soumises aux
conditions de validité qui seront examinées ci-après.
Qu'en est-il de la conformité des clauses restrictives
de transmissibilité à cause de mort avec l'interdiction des
pactes sur succession future contenue dans le code civil ? La clause
restrictive de la cessibilité des actions entravant la
transmissibilité à cause de mort des actions d'une
société anonyme, ne constitue pas un pacte sur succession future
dans la mesure où cette clause lie aussi le disposant. La clause sera
donc valable si elle lie également, de son vivant, le
propriétaire des titres, souscripteur de la clause.
La loi distingue les conditions particulières
applicables aux clauses d'inaliénabilité et celles applicables
aux clauses d'agrément et de préemption.
* Les clauses d'inaliénabilité doivent
être limitées dans le temps et être justifiés par
l'intérêt social à tout moment (art. 900-1 C.civ.).
Contrairement à ce qu'à prévu le législateur
français pour les sociétés par actions
simplifiées79(*),
le législateur belge ne fournit aucune durée
d'incessibilité maximale. L'on considère que la durée
d'incessibilité doit être raisonnable. Elle fera l'objet d'une
appréciation au cas par cas. Quoique des durées
d'inaliénabilité particulièrement longues (10 ans ou 20
ans) puissent être rencontrées, la jurisprudence ne fournit,
à l'heure actuelle, aucune indication précise permettant une
réponse tranchée sur la question80(*).
La condition liée à l'intérêt
social s'ajoute à la limitation dans le temps. En principe, la question
de la conformité d'une clause d'inaliénabilité avec
l'intérêt social ne se posera qu'à posteriori
(c'est-à-dire après la cession des titres, notamment en raison du
refus du conseil d'administration d'entériner la cession). La
validité de la clause au regard de l'intérêt social
s'appréciera donc par référence à
l'intérêt, tant des actionnaires (restant et sortant) que des
tiers (cessionnaires), le tout dans le cadre plus général des
activités de l'entreprise.
De surcroît, l'inaliénabilité doit
être conforme à cet intérêt pendant toute la
durée de validité de la clause. Ainsi faut-il considérer
que la clause pourrait être frappée de caducité en raison
de l'évolution des circonstances de la vie de la société.
Par exemple pour les actions du Crédit Commercial de France, il avait
été prévu un blocage pendant deux ans de 90 % des actions,
et pour les trois années suivantes, leur aliénabilité
était subordonnée à l'accord du conseil
d'administration81(*).
* Le régime des clauses d'agrément et de
préemption est sensiblement plus allégé que celui des
clauses d'inaliénabilité. Aucune condition de respect de
l'intérêt social n'est ici imposée. La clause
d'agrément peut figurer dans les statuts de la société
(art. L.228-23 al. 1 C. com.)82(*). En cours de vie sociale, elle peut y être
insérée par décision de l'assemblée
générale extraordinaire. Pour être opposable aux tiers, les
clauses d'agrément doivent faire l'objet de mesures de
publicité83(*).
Les clauses d'agrément sont généralement
le plus souvent suivies d'une clause de préemption pour éviter
que le candidat cessionnaire des titres redevienne propriétaire des
titres, en cas de refus d'agrément, à l'expiration de la
période d'incessibilité maximale de trois mois.
Des délais stricts pour la mise en oeuvre de
l'ensemble des procédures d'agrément, de préemption et, le
cas échéant, de détermination du prix seront
stipulés. La détermination du prix ne doit pas conduire à
dépasser le délai légal. Au-delà, le candidat
cédant est libre de céder sa participation au tiers offrant.
L'agrément est en principe purement
discrétionnaire. Lorsque la compétence d'agrément revient
à un organe de la société, celle-ci devra être
exercée dans l'intérêt de la société et non
dans l'intérêt particulier des personnes
bénéficiaires du droit de préemption subséquent.
L'exercice de l'agrément doit seul rencontrer l'intérêt
social et non la clause elle-même.
Il convient de noter que le mode de fixation du prix ne peut
être laissé à l'entière discrétion des pactes
à peine d'être jugé comme potestatif et entraîner la
nullité de la clause84(*). Quid si le prix auquel aboutit le tiers
arbitre paraît déraisonnable à l'une ou l'autre des
parties ? Cette circonstance est sans effet et la cession devra être
exécutée, hormis le cas d'un droit de repentir prévu par
la clause. Ce n'est qu'en cas d'erreur manifeste ou grossière, de dol ou
d'application de la clause contrairement au principe de la bonne foi, qu'un
tribunal pourra s'immiscer dans la détermination du prix et le
réviser à la hausse ou à la baisse.
La clause d'agrément est interdite dans les
sociétés dont les actions sont admises aux négociations
sur un marché réglementé (art. L. 228-23 al.
1er nouv. C. com.). La raison est que ces sociétés ont
un caractère ouvert et que les opérations boursières ne
doivent pas être entravées. En outre, la clause d'agrément
ne peut être valablement stipulée que si les actions
revêtent la forme nominative en vertu de la loi ou des statuts (art.
228-23 al. 2 nouv. C. com. ; rappr. art 765 al. 1 AUSCGIE).
Pour être complètes, les clauses
d'inaliénabilité, d'agrément et de préemption
doivent être assorties de sanctions en vue d'assurer une
efficacité juridique à ces conventions.
B- Les sanctions
Deux catégories de sanctions doivent être
abordées. D'une part, celles qui sanctionnent une clause contraire
à la loi et, d'autre part, celles qui sanctionnent le non respect d'une
clause restrictive de cessibilité.
* Les conventions entre actionnaires qui sont contraires
à la loi sont nulles. La loi ne visant que les « conventions
entre actionnaires », s'applique t-elle également aux
dispositions statutaires ? Qu'en est-il en outre des conventions conclues
avec des tiers ? Il n'est pas douteux que les statuts soient aussi
visés par la loi. Pour ce qui est des conventions avec les tiers, la
sanction en cas de non respect d'une limitation dans le temps et d'un
intérêt légitime sera aussi la nullité mais, ici en
vertu du droit commun (art. 900-1 C.civ.). Relevons qu'il n'y a point de
nullité dans le cas des clauses d'agrément ou de
préemption portant un délai d'incessibilité de plus de
trois mois puisqu'en l'occurrence, le délai sera simplement
ramené à trois mois.
* La loi étant muette, le recours au droit commun
s'impose dans le cas du non respect d'une clause restrictive de
cessibilité. Conformément au droit commun, la violation fautive
du pacte peut entraîner la condamnation du responsable à des
dommages et intérêts et la résolution judiciaire du
pacte85(*). L'on distingue
à cet égard le cas des clauses statutaires de celles figurant
dans des conventions extrastatutaires.
L'inobservation des clauses statutaires
(d'inaliénabilité, d'agrément ou de préemption)
rend la cession intervenue en contravention avec celles-ci inopposable à
la société et, partant, totalement inefficace (art. 227-15 C.
com.). Ainsi la société pourra-elle refuser de transcrire la
cession au registre des actionnaires et pour des actions aux porteurs,
s'opposer au vote, à l'assemblée générale, du
porteur des titres acquis en violation de ces clauses.
Le tiers cessionnaire ne pourra donc se voir
reconnaître la qualité d'actionnaire et, sauf recours fructueux
devant les cours et tribunaux contre la société, il ne pourra que
se pourvoir en dommages et intérêts contre le cédant. La
cession pourra cependant sortir ses effets entre parties liées entre
elles, le cas échéant, par une convention de croupier.
Doctrine et jurisprudence admettent l'annulation de la
cession lorsque le tiers cessionnaire avait connaissance, au moment de la
cession, de la clause de préemption, d'inaliénabilité ou
d'agrément que le cédant violait de la sorte par application de
la théorie de la tierce complicité86(*). En effet, la présence
des clauses restrictives de cessibilité des titres dans les statuts est
constitutive d'une présomption, réfragable, de connaissance de
celles-ci pas un tiers acquéreur. Il sera toutefois possible au tiers,
selon les cas, d'apporter la preuve contraire comme c'est toujours le cas
lorsqu'un justiciable veut prouver ce qui va à l'encontre du cours ou
de l'état normal des choses.
La société est tiers aux conventions
extrastatutaires et ne dispose d'aucun droit pour refuser les effets d'une
cession conclue en fraude de la convention d'actionnaires. Il s'agit de
l'application de la théorie des effets internes du contrat. En vertu de
la même théorie, les bénéficiaires de clauses
restrictives ne pourront prétendre à l'annulation d'une cession
opérée en fraude de leurs droits dans la mesure où il ne
pourrait être reprochée au tiers cessionnaire de ne pas avoir
respecté une clause contenue dans une convention à laquelle il
n'est pas partie. Dans ce cas, les bénéficiaires
lésés n'auront d'autre choix que de poursuivre la
réparation de leur préjudice, contre le cédant, par voie
de dommages et intérêts.
Comme pour les clauses statutaires, l'annulation de la cession
demeure possible, dans la seule hypothèse où le tiers
acquéreur est de mauvaise foi et s'est rendu complice de la violation de
ses obligations par le cédant. Ici il appartiendra au
bénéficiaire de la clause d'apporter la preuve de la
connaissance, par le tiers, de la clause à la violation de laquelle il a
contribué.
Dans un souci très net de prévention, la
pratique supplée dès lors à la fragilité de ces
clauses en les assortissant de clauses pénales fixant le montant de la
sanction. Parfois, on recourt encore au remède plus radical du blocage
des titres dans les mains d'un tiers, voire à la mise en gage des
titres, de telle sorte que l'acquéreur se voit opposer un droit
réel.
Il n'existe point de typologie unique des clauses relatives
aux cessions de titres.
Paragraphe 2 : Typologie des clauses restrictives de
cessibilité d'actions.
Après avoir décrit les clauses restrictives de
cessibilité visées par le code (clauses
d'inaliénabilité, d'agrément et de préemption),
nous aborderons les autres mécanismes contractuels ignorés par le
texte du code mais qui s'apparentent aux premiers.
A- Les clauses d'inaliénabilité,
d'agrément et de préemption
* La clause d'inaliénabilité
Appelée aussi clause de blocage, la clause
d'inaliénabilité interdit à celui qui la souscrit de
céder ses actions pendant une durée déterminée.
Compte tenu de cette condition particulière à laquelle vient
s'ajouter celle de la motivation par l'intérêt social, cette
clause revêt rarement la forme statutaire et se retrouve plus souvent
dans des conventions d'actionnaires dont les signataires entendent geler leurs
relations durant la courte période suivant la mise en place de la
convention.
L'objectif d'une telle clause est d'éviter que les
éventuelles dissensions qui pourraient naître dans cette
période ne ruinent les efforts qui ont été fournis pour
l'élaboration de l'accord. C'est en effet dans cette période que
les signataires devront éprouver les mécanismes prévus par
le pacte, et qui pourront, à l'épreuve de la pratique, ne plus
satisfaire certains. Il s'agit, en quelque sorte d'un apprentissage
forcé de la vie commune.
Les fondateurs d'un joint venture recourent
régulièrement à ces clauses. Elles furent également
prises lors des privatisations françaises de la fin des années 80
en vue d'agréger les investisseurs au sein de « noyaux
stables »87(*).
Ces noyaux durs peuvent être particulièrement utiles lorsque la
société se lance dans les programmes d'investissement lourds.
Parfois, le recours à la clause de blocage est destiné à
garantir une opération de crédit88(*).
* La clause d'agrément
La clause d'agrément est celle qui soumet la cession
des titres à l'agrément d'un organe ou d'une personne
déterminée tel que le conseil d'administration (dans la plupart
des cas) ou tout autre organe de la société (comité de
direction par exemple), un groupe d'actionnaire voire même des tiers.
L'objectif poursuivi est de permettre aux titulaires du droit d'agréer
la cession de s'opposer à l'entrée, dans l'actionnariat de la
société, de personnes jugées indésirables.
Instaurant un élément d'intuitus personae dans une
société revêtant, par définition, la forme anonyme,
la clause n'en demeure pas moins fréquente, souvent par voie d'insertion
directe dans les statuts de la société.
Afin d'éviter que le candidat cédant ne demeure
«prisonnier » de son titre en cas de refus d'agrément, la
clause d'agrément est généralement couplée à
un mécanisme de préemption. A défaut, la clause
d'agrément est dite pure et simple mais dans ce cas, les effets
du refus d'agrément seront limités dans le temps en vertu de la
loi.
Alors que le législateur belge a réservé
la possibilité de faire figurer une clause d'agrément dans des
pactes d'actionnaires (art. 510 C. Soc.), la loi française impose que
celle-ci se retrouve nécessairement dans les statuts de la
société, à l'exclusion des conventions extrastatutaires
(art. L 228-23 al. 1 C. com.)89(*).
* La clause de préemption
La clause de préemption est une clause de
préférence en vertu de laquelle le candidat cédant devra,
préalablement à toute cession de ses titres, les proposer au
bénéficiaire de la clause. Il peut s'agir d'un actionnaire ou
d'un tiers.
Alors que la clause de préférence donne
à son bénéficiaire le droit d'acquérir les titres
à des prix et conditions identiques à ceux proposés par le
tiers candidat acquéreur, la clause de préemption permet
l'acquisition à un prix différent, déterminé le
plus souvent par un expert, voire par l'assemblée générale
des actionnaires.
Comme la clause d'agrément avec laquelle elle est
souvent couplée, la clause de préemption assure le
caractère fermé de la société en permettant aux
actionnaires restants, d'éviter l'intrusion de tiers en reprenant les
titres de l'actionnaire sortant. Selon les cas, le candidat cédant devra
disposer ou non, d'une offre préalable d'un candidat acquéreur
afin de mettre la clause en mouvement.
Notons enfin que les clauses de préférence et
de préemption peuvent également prévoir un droit de
repentir autorisant le candidat cédant, s'il juge insuffisant le
prix définitivement offert ou fixé par expertise, de retirer son
offre.
La pratique révèle de nombreuses autres clauses,
plus ou moins apparentés à celles évoquées.
B- Les autres clauses issues de la pratique
Le foisonnement des clauses créées
par la pratique témoigne à suffisance de l'utilité
réelle des mécanismes destinés à garantir le
caractère fermé d'une société ou, à tout le
moins, atténuer la libre cessibilité des actions conçue
comme un principe de base de la société anonyme. Quoique non
visées directement par la loi, une énumération de
celles-ci permet d'apprécier le cadre général dans lequel
les clauses restrictives de la négociabilité des titres
s'insèrent fréquemment. Il s'agit ici des clauses les plus
communément retrouvées dans les conventions90(*).
* Les clauses de sortie commune
Aussi appelées clauses de remorquage, ces clauses ont
pour objet de permettre aux coactionnaires du cédant, de vendre
concomitamment leurs titres - en principe aux mêmes prix et conditions -
au cessionnaire des titres du cédant. Les coactionnaires de
l'actionnaire cédant peuvent ainsi choisir, soit de rester dans la
société en compagnie du cessionnaire, soit de contraindre ce
dernier à reprendre également leurs titres. Ces clauses sont
souvent combinées à des clauses d'agrément et de
préemption91(*).
Les tiers cessionnaires, par définition tiers au
contrat contenant la clause de sortie commune, ne sauraient être
légalement tenus d'acquérir les titres des actionnaires de celui
auquel il a formulé une offre. Pour pallier cet inconvénient, les
clauses de sortie commune reposent sur un mécanisme de rachat
préalable des titres de ses coactionnaires par le candidat
cédant.
Une solution plus appropriée est fournie par les
clauses dites de «sortie simultanée» par les quelles chaque
actionnaire s'engage en cas de volonté de céder sa participation,
d'en réduire le volume de manière proportionnelle afin de
permettre à ses coactionnaires de se joindre à l'offre à
concurrence du nombre de titres que le tiers s'est engagé à
acquérir. Il convient enfin de relever les clauses dites de «sortie
prioritaire» par lesquelles un actionnaire majoritaire s'engage, en cas de
cession de sa participation, à permettre aux minoritaires de
céder leurs titres, par priorité, au candidat cessionnaire.
* Les clauses d'interdiction
d'acquérir
Des actionnaires peuvent convenir de limiter la
cessibilité des titres qu'ils possèdent déjà. Ils
peuvent également décider de limiter, soit partiellement, soit
totalement, leur liberté d'acquérir des titres
supplémentaires. Telle est l'objet des clauses dites de non agression.
Ces clauses d'inaliénabilité inversées
permettent d'assurer la conservation d'un équilibre savamment
recherché et mis en place par les parties, évitant ainsi les
renversements ou renforcements non contrôlés de majorité.
Afin de ne pas figer la situation de manière indéfinie, la
prudence commandera toutefois d'insérer dans ces clauses un
mécanisme dérogatoire permettant l'acquisition de titres
supplémentaires en cas d'accord d'un ou plusieurs autres actionnaires,
sauf à prévoir une validité de clause limitée dans
le temps.
S'agissant d'une obligation de ne pas faire, l'absence de
respect d'une telle clause ne pourra faire l'objet d'une exécution
forcée mais uniquement d'une indemnisation par voie de dommages et
intérêts, d'où la nécessité de les doter,
comme les clauses de sortie commune, d'une clause pénale forfaitaire.
* Les clauses d'options sur
actions
Il convient de rappeler que la négociabilité des
titres d'une société peut également être
affectée par l'existence de promesses de vente ou d'achat, soit à
terme soit conditionnelle, que les actionnaires acceptent mutuellement de
consentir. Issus de la pratique anglo-saxonne, ces promesses sont
fréquemment identifiées selon la terminologie anglaise de
« put » et
« call ».
L'option « put » ou option de
vente, est une promesse d'achat par laquelle le promettant s'engage
irrévocablement à acquérir les titres du
bénéficiaire de la clause, sur demande (levée d'option) de
ce dernier. A l'inverse, l'option « call » ou
option d'achat, est une promesse de vente par laquelle le promettant s'engage
irrévocablement à vendre les titres au bénéficiaire
de la clause, sur demande de ce dernier. Dans un cas comme dans l'autre, le
bénéficiaire de la promesse est toujours libre de lever ou non
l'option d'achat ou de vente qui lui a été consentie.
En principe et quoiqu'il ne s'agisse pas d'une condition de
validité des clauses d'option, celles-ci sont pratiquement toujours
affectées d'un terme ou d'une condition dont la survenance autorisera le
bénéficiaire de l'option d'exercer son droit. Afin de ne pas
être vidées de leur objet en cas de cession de ses titres à
des tiers par le promettant avant la réalisation du terme ou de la
condition affectant la promesse, les clauses d'option devront
nécessairement être accompagnées de clauses
d'agrément et/ou de préemption qui permettront au
bénéficiaire de la promesse de faire obstacle à une telle
cession.
* Les conventions de portage (conventions
d'options de vente à prix plancher)
Les conventions de portage sont une espèce d'option par
laquelle la levée de l'option se fait à un prix fixé
préalablement dans la convention d'option. Ces conventions ne peuvent
heurter la prohibition des clauses léonines contraires à
l'article 1855 du Code civile92(*).
* Les conventions d'options
croisées (clause américaine ou shotgun)
Une autre solution consiste à mettre sur pied des
mécanismes d'options d'achat et de vente entrecroisées
destinés à faire pression sur les parties à la convention
d'actionnaires pour qu'elles usent le moins possible de leur droit de
céder ou d'acquérir des titres.
Ces options particulièrement complexes,
traditionnellement qualifiées de clauses américaines ou
shotgun, ne sont pas à confondre avec les promesses d'achat ou
de vente que se consentiraient réciproquement les actionnaires d'une
société, par exemple en cas de non respect par l'un d'eux des
obligations contenues dans le pacte d'actionnaire.
La clause dite shotgun permet à un
actionnaire, en certaines circonstances, d'initier un processus agressif
d'achat ou de vente des actions d'un actionnaire. Le coactionnaire aura alors
la possibilité d'accepter l'offre d'achat ou de vente ou de se porter
lui-même acquéreur ou vendeur aux mêmes termes et
conditions. L'actionnaire qui aura initié le processus n'aura pas le
choix d'accepter.
Le but recherché n'est pas ici d'assurer le transfert
des titres, mais au contraire de l'éviter dans la mesure du possible
puisque le principe d'une telle option croisée est de faire pression sur
le cosignataire du pacte afin que celui-ci use le moins possible de son droit
de céder ou d'acquérir des titres. Le respect des
équilibres étant assuré par la crainte des effets de son
acte, la doctrine a pu dire de ce genre de clauses qu'elles instauraient un
« équilibre de la terreur »93(*).
Cette clause ressemble quelque peu à la clause de
premier refus en ce qu'elle stipule qu'un actionnaire offre ses actions en
vente à ses partenaires, et que ceux-ci ont le choix d'accepter ou non
cette offre. Mais, et c'est la différence fondamentale, la clause ne
finit pas là. Elle ajoute que si les actionnaires à qui l'offre
est faite ne l'acceptent pas, ils ont automatiquement l'obligation d'offrir
leurs propres actions au même prix et aux mêmes conditions.
Parfois, la clause se présente à l'inverse, l'actionnaire offrant
d'acheter les actions des autres ou à défaut de leur vendre les
siennes.
Dans la pratique, les pactes d'actionnaires favorisent la
prévention des conflits en assurant la stabilité de
l'actionnariat et de la direction. Le moment idéal pour négocier
et signer un pacte d'actionnaires est au démarrage de l'entreprise. Une
convention d'actionnaires doit être taillée ou
rédigée sur mesure en fonction des besoins précis et
spécifiques de la société et des actionnaires.
CHAPITRE II : LES NOUVEAUX MECANISMES DE
RESOLUTION DES CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
Lorsque les pactes d'actionnaires ne jouent pas leur
rôle pacificateur, les conflits entre actionnaires peuvent conduire
à la solution radicale de la dissolution judicaire pour justes
motifs (art. 1844-7, 5° Civ), dont on sait toutefois
l'hostilité de la jurisprudence94(*). Moins radical, l'administration provisoire constitue
une alternative à laquelle les plaideurs recourent volontiers. Quoique
consentie avec moult précaution, uniquement en cas de risque manifeste
d'atteinte sérieuse à l'intérêt social, elle
intègre la perspective d'un dessaisissement du droit de présider
aux affaires de la société.
A côté de ces mécanismes traditionnels
pour sortir de la crise, il existe deux solutions plus
modernes, fondées sur la disparition de l'actionnariat d'une des
parties au conflit. Les procédures d'exclusion et de retrait d'un
actionnaire sont mises en oeuvre lorsque les circonstances
révèlent une dégradation irrémédiable des
relations entre actionnaires. L'exclusion d'un actionnaire peut être
initiée par ceux qui entendent rester dans la société,
alors que la procédure de retrait est initiée par l'actionnaire
sortant.
S'il ne faut pas systématiquement éviter les
tribunaux, les actionnaires doivent garder à l'esprit qu'il existe par
ailleurs des alternatives, applicables même en cours de procédure
judiciaire : la conciliation et la médiation. La solution ne passe
pas nécessairement par les tribunaux et les parties restent libres
d'avoir recours à une méthode alternative. Plutôt que de
laisser le juge prendre une décision à leur place, les
actionnaires peuvent solliciter l'intervention soit d'un conciliateur ou d'un
médiateur.
L'exclusion et le retrait judiciaire d'un actionnaire seront
examinés (section 1) avant la conciliation et la médiation
(section 2).
Section 1 : L'exclusion et le retrait judiciaire d'un
actionnaire
Les législations modernes étrangères
notamment le droit positif belge95(*), ont apporté un éclairage tout à
fait nouveau sur la problématique de résolution des conflits
sociétaires en introduisant un mécanisme assez radical. S'il
existe de justes motifs96(*), un actionnaire peut être tenu de céder
ses actions à un ou plusieurs coactionnaires (art. 636 à 641 Code
Belge des Sociétés) §1, ou d'acheter les actions d'un ou
plusieurs coactionnaires (art. 642 à 643 Code Belge des
Sociétés) §2.
Paragraphe 1 : L'exclusion judiciaire pour justes
motifs.
Nous examinerons brièvement la procédure et les
effets de l'exclusion pour justes motifs.
A- La procédure d'exclusion d'un actionnaire
L'exclusion de l'actionnaire est obtenue par un
mécanisme de cession forcée de ses actions au profit des
actionnaires qui en font la demande devant le tribunal. L'article 635 C. Soc.
limite l'application du mécanisme d'exclusion aux seules
sociétés anonymes n'ayant pas fait ou ne faisant pas publiquement
appel à l'épargne.
i. Les titulaires de l'action en exclusion
Seuls les actionnaires disposent du droit d'agir en exclusion.
Ce droit n'appartient, ni à la société elle-même, ni
à l'une de ses filiales (article 636 alinéa 2, C. Soc.). L'action
en justice peut être intentée par un ou plusieurs actionnaires
possédant, individuellement ou ensemble soit 30 % des voix
attachées à l'ensemble des titres existants, soit des actions
dont la valeur ou le pair comptable représente 30% du capital de la
société.
Les seuils visés par le texte sont formulés non
seulement en termes de vote mais également en termes de parts du
capital, permettant de viser les détenteurs d'actions sans droits de
vote. L'action ne pourrait cependant pas être introduite par des
titulaires de parts bénéficiaires sans droit de vote. En cas de
démembrement de la propriété des titres, il a
été considéré par la cour d'appel de Bruxelles que
le nu-propriétaire conservait son droit d'introduire l'action et ce,
même s'il avait été prévu par les statuts que tous
les droits liés aux titres seraient exercés par
l'usufruitier97(*).
Il convient enfin de relever que l'action en exclusion
requiert que l'on possède la capacité d'effectuer des actes de
disposition sur les actions qui font l'objet de la procédure, ce qui
n'est pas sans conséquence au regard, notamment du droit successoral
(l'action doit être introduite par l'ensemble des héritiers,
à peine d'irrecevabilité) et du droit patrimonial de la famille
(l'action en exclusion revenant au seul époux au nom duquel les actions
sont inscrites dans le registre des actionnaires).
ii. Les actionnaires susceptibles d'exclusion
A moins de détenir suffisamment de titres privant les
autres actionnaires des seuils minima évoqués ci-dessus, tout
actionnaire est susceptible d'être exclu. Il peut donc s'agir de
l'actionnaire minoritaire comme de l'actionnaire majoritaire.
La demande ne suppose ni la démonstration ni même
l'existence d'une faute à charge de l'actionnaire candidat à
l'exclusion. Le principe ne va donc pas sans poser problème en cas de
demandes d'exclusion croisées lorsque aucun des actionnaires n'a commis
de faute. Le juge n'aura en effet, en soi, aucun motif pour
préférer l'actionnaire minoritaire et inversement98(*).
La qualité d'actionnaire doit exister au moment de
l'introduction de la demande. Si cette qualité est contestée par
le défendeur (parce qu'il a déjà cédé ses
titres par exemple), il ne doit pas impérativement en rapporter la
preuve. La demande sera simplement déclarée non fondée
à son égard.
iii. Les causes de l'exclusion
L'exclusion ne peut être demandée que
pour de « justes motifs » constituant, depuis le code civil
(article 1871), une cause de dissolution des sociétés. La
jurisprudence se plaît d'ailleurs à le rappeler
régulièrement tout en soulignant que le fondement de l'action
contre le défendeur suppose au moins que le juste motif puisse lui
être imputé99(*). La cession forcée d'actions a
été conçue comme un mécanisme de règlement
des conflits destiné à protéger la société
anonyme. C'est donc à la lumière de l'intérêt de la
société que les termes de justes motifs doivent être
interprétées.
En cas de demandes de cession forcée croisées
(hypothèse où le défendeur à l'action introduit une
demande reconventionnelle visant à entendre condamner le demandeur
à lui céder ses actions) et devant l'impossibilité
d'imputer la situation délétère à l'un ou à
l'autre des actionnaires, il conviendrait de choisir, celui des deux
actionnaires qui, soit témoigne de l'affection societatis le
plus marqué, soit présente le plus de garantie pour assurer la
pérennité de l'entreprise sociale.
La procédure d'exclusion est de nature subsidiaire,
puisqu'elle ne se justifie que lorsque la survie de la société
est mise en péril et qu'il faut sortir de l'impasse. L'action, qui
trouve toujours son origine dans des dissensions entre actionnaires, sera
déclarée comme étant fondée lorsque la
mésentente grave et durable, rend toute collaboration impossible, et
entrave le fonctionnement normal de la société. Une simple
divergence d'opinions entre actionnaires ne suffit cependant pas pour faire
application de ce mode de règlement des conflits, vu les
conséquences assez lourdes.
iv. Aspects de la procédure
L'action est introduite devant le président du tribunal
de commerce de l'arrondissement judiciaire dans lequel la société
a son siège, siégeant comme en référé
(article 637, alinéa 1er, C. Soc.). La société
doit être citée à comparaître. Cette formalité
permet à la société d'informer à son tour les
porteurs d'actions nominatives qui ne sont pas nécessairement au fait de
l'existence de la procédure. Cette information leur permettra, le cas
échéant, d'intervenir volontairement à la cause pour
soutenir la position d'un des actionnaires, et ce pour autant que le tiers
intervenant ait intérêt à un tel soutien.
L'intervention volontaire à la cause n'est pas
réservée aux seuls actionnaires résiduaires. La cour
d'appel de Bruxelles a déclaré recevable l'intervention
volontaire d'un créancier hypothécaire pour soutenir la position
de l'actionnaire dont l'exclusion était demandée100(*).
Pour éviter que le défendeur ne fasse
échec à l'action en cédant ses titres, l'article 638,
alinéa 1er C. Soc. prévoit qu'il ne peut plus,
après que la citation lui ait été signifiée,
aliéner ses actions ou les grever de droits réels, sauf avec
l'accord du juge ou des parties à la cause.
En cas d'action au porteur, l'interdiction portée par
la loi pourrait aisément être contournée. Dès lors,
la désignation d'un séquestre, chargé de conserver les
titres du défendeur, pourra être demandée.
Le juge peut également ordonner la suspension de droits
liés aux actions à transférer (droit à
l'information, au vote, à la participation aux assemblées)
à l'exception du droit aux dividendes. Cette décision n'est
susceptible d'aucun recours (art. 638, alinéa 2, C. Soc.)
B- Les effets de l'exclusion pour justes motifs
Le juge condamne le défendeur à
transférer, dans un délai qu'il fixe à dater de la
signification du jugement, ses actions aux demandeurs qui sont tenus de les
accepter contre paiement d'un prix.
La reprise s'effectue, le cas échéant
après l'exercice des éventuels droits de préemption
visé par le jugement, au prorata du nombre d'actions et détenues
par chacun, à moins qu'il n'en ait été convenu autrement.
Les demandeurs sont solidairement tenus au paiement du prix (article 640,
alinéa 4, C Soc.).
Il est utile de noter que le jugement tient lieu de titre
pour le transfert des titres nominatifs, tandis que pour les actions au
porteur, le juge pourrait assortir sa décision d'une astreinte pour
forcer l'actionnaire exclu à délivrer ses titres.
La décision prononcée par le juge est
exécutoire par provision, nonobstant tout recours; l'exécution de
la décision malgré l'introduction d'un recours entraîne
cependant les effets de l'article 638, soit la suspension des droits
attachés au titre (art. 640, in fine C. Soc.)
Le juge d'appel peut restaurer le droit au cantonnement,
encore que ce droit aurait-il été expressément
écarté par le premier juge101(*).
L'article 641 C. Soc. traite le cas de l'élimination
des « votants gênants » dans les hypothèses
d'une dissociation du droit de vote et du droit de propriété
(usufruit, gage, mandat, indivision, etc). Cette disposition offre la
possibilité pour des actionnaires, dans les mêmes conditions,
d'intenter une action ayant pour objet de transférer le droit de vote
aux autres titulaires des actions. Ces derniers seront appelés à
la procédure à peine d'irrecevabilité (art. 641, al. 2, C
Soc.).
L'ensemble des règles décrites ci-dessus
à propos du jugement et de la procédure sont également
applicables dans la procédure de retrait d'un actionnaire.
Paragraphe 2 : Le retrait judiciaire pour justes
motifs.
Par rapport au mécanisme d'exclusion, le retrait
judiciaire présente des similitudes et des différences.
A- Les similitudes du retrait avec le mécanisme
d'exclusion
Dans la procédure de retrait, le demandeur à
l'action pourra quitter l'actionnariat de la société en obtenant
la condamnation d'un des autres actionnaires à lui racheter tous ses
titres.
Les sociétés visées sont les mêmes
qu'en matière d'exclusion, les sociétés ayant fait ou
faisant appel public à l'épargne n'étant pas
concernés par cette procédure.
Les titres de la société, objets de la demande
de rachat forcé, sont identiques à ceux visés par la
procédure d'exclusion et ne comprennent donc pas les obligations
ordinaires ou hypothécaires.
La référence aux « justes
motifs » est elle aussi maintenue, de même que les
règles de procédures. L'article 642, alinéa 2, renvoie en
effet aux articles 637, 638, alinéa 2 et 639 C. Soc.
Ici aussi, la décision du Président sera
exécutoire par provision nonobstant tout recours. Sa compétence
est strictement délimitée par la demande de retrait et il ne
pourra connaître d'autres questions relatives au fond de l'affaire.
Il existe cependant quelques nuances propres à la
procédure de retrait.
B- Les différences du retrait avec le
mécanisme d'exclusion
L'esprit de l'action en retrait est, en réalité
totalement différent de celui qui préside à l'action en
exclusion : alors qu'il s'agit en matière d'exclusion,
d'évincer un actionnaire dont le maintien de la présence peut
paraître préjudiciable pour la continuité de l'entreprise,
le demandeur à l'action en retrait entend, pour sa part, se
désintéresser totalement et définitivement du sort de
cette entreprise.
Dans le premier cas, le législateur a entendu
protéger les intérêts de la société alors
que, dans le second, c'est la protection des intérêts de
l'actionnaire sortant qui est poursuivie.
Cette différence de ratio legis, qui n'est pas
sans effet sur l'appréciation des justes motifs qui doivent exister pour
fonder la demande, en entraîne d'autres sur le plan du régime mis
en place. Il ressort de ce qui précède, que la preuve de
l'existence de « justes motifs » présente, par
rapport à la procédure d'exclusion, deux particularités
fondamentales:
- contrairement aux « justes motifs » de
l'article 641 C. Soc. qui vise avant tout la recherche de
l'intérêt de la société, c'est
l'intérêt personnel de l'actionnaire demandeur qui est ici
à l'avant-plan dans le cadre de la procédure de retrait.
- la reprise ne peut être exercée que contre
l'actionnaire qui est à l'origine des « justes
motifs ». Il faudra donc établir un lien de causalité
entre le juste motif invoqué et le comportement de l'actionnaire contre
lequel la demande est dirigée.
La notion de « justes motifs » comme
condition de fonction est donc plus restreinte qu'en matière d'exclusion
ou de dissolution judiciaire puisque toute possibilité d'obtenir gain de
cause sur cette base sera exclue si la situation qui justifie la demande ne
peut être imputée à un ou plusieurs actionnaires en
particulier.
Lorsqu'ils sont plusieurs, quid de la proportion
dans laquelle les actionnaires à l'origine des justes motifs devront
racheter les actions du retrayant ? En matière d'exclusion, la loi
prévoit que la reprise s'effectue au prorata du nombre d'actions
détenues par chacun, à moins qu'il en ait été
convenu autrement. Cette précision n'est pas portée par l'article
643, alinéa 3, traitant de la reprise des titres en matière de
retrait.
Doctrine et jurisprudence considèrent toutefois que
cette règle de reprise proportionnelle s'applique mutadis
mutandis à la procédure de retrait : les actionnaires
responsables des justes motifs reconnus par le juge seront tenus de reprendre
les actions en proportion de leur participation dans la
société102(*).
Entre actionnaires comme dans un couple, lorsqu'on ne
s'entend plus, il est préférable de rechercher une
séparation élégante à l'amiable. Mais lorsque c'est
impossible, soit parce que les positions de chacun sont trop
éloignées, soit parce que la rationalité est absente,
l'exclusion et le retrait sont des procédures judiciaires rapides et
efficaces pour en sortir.
Les procédures d'exclusion et de retrait ne sont pas
élisives d'autres modes, statutaires ou conventionnels, de
résolution des conflits. La pratique en a révélé
deux : la médiation et la conciliation.
Section 2 : La médiation et la conciliation
La médiation et la conciliation sont des
« modes alternatifs de résolution des conflits »,
conduites par une tierce partie neutre, à l'exclusion de l'arbitrage
proprement dit 103(*).
Il s'agit de véritables « justices privées »
qui se développent déjà dans la culture anglo saxonne. Ces
modes ont fait l'objet d'un Livre Vert104(*) au sein de la Commission Européenne qui
souhaite promouvoir ces nouveaux modes de résolution des conflits
relevant du droit civil et commercial.
L'engouement pour ces alternatives vient essentiellement de
trois facteurs : la rapidité, le coût et le fait qu'elles
mettent fin durablement au conflit en intégrant dans le processus les
aspects humains du différend. Leur avantage est en effet qu'elles
placent les parties au coeur de la discussion et leur rendent la parole. Ces
techniques sont également appliquées pour résoudre les
conflits entre actionnaires, avant que la justice publique n'intervienne, voire
en marge d'un procès déjà entamé.
Nous allons examiner l'application de la médiation
(§1) et de la conciliation (§2) dans les contentieux entre
actionnaires.
Paragraphe 1 : La médiation dans les
contentieux entre actionnaires
Nous distinguerons la médiation conventionnelle et la
médiation judiciaire.
A- La médiation conventionnelle
Cette médiation transactionnelle ou extrajudiciaire
est issue de la pratique. Les parties organisent une transaction, en
insérant dans un contrat une clause prévoyant le recours à
un médiateur.
La médiation est généralement
considérée comme une méthode en dehors des influences
juridiques, morales et culturelles qui a pour objectif de permettre aux
parties, accompagnées dans leur réflexion par le
médiateur, de trouver la solution la plus satisfaisante possible pour
elles - et non pour le tiers médiateur.
Le recours à la médiation naît de la
totale volonté des parties, tant dans le choix du processus que dans
celui du médiateur ou quant à l'issue finale ou le type de
solution retenue. La principale mission du médiateur, tiers neutre et
indépendant, est de les assister dans un processus de négociation
afin d'éviter le recours à la justice. C'est pourquoi elle se
place parfaitement avant qu'une procédure ne soit entamée.
Plus encore que la conciliation, la médiation rend le
pouvoir aux parties : si le conciliateur a un pouvoir (par les conclusions
du rapport qu'il rédigera en cas d'échec de la conciliation), le
médiateur n'a ni le pouvoir de décision ni celui d'imposer une
solution. A l'exception des médiations judiciaires, le médiateur
externe est indépendant du tribunal.
La médiation intervient en la présence des
avocats des parties qu'elles ont préalablement consultés,
notamment sur le choix du médiateur. L'objectif commun est alors
clairement d'éviter le recours à la justice. Le rôle des
avocats est de les assister dans ce processus, quitte en cas d'échec,
à poursuivre par la voie des tribunaux.
La médiation est une méthode rapide de
résolution des conflits : il n'est pas rare que quelques semaines
suffisent pour mettre fin au différend. Partant, elle sera
également relativement peu coûteuse, à la fois en
honoraires externes (médiateur, avocats, conseillers techniques) et en
temps que les protagonistes devront consacrer à régler leur
litige.
Combinant compétence, rigueur professionnelle et
outils de communication, mais sans les contraintes des procédures
judiciaires, le médiateur pourra également faire preuve de
créativité et favoriser l'émergence d'une solution
originale agréant les parties. Par ailleurs, aspect non
négligeable, la transaction entre parties pourra rester parfaitement
confidentielle.
Plutôt que de laisser un juge prendre une
décision à leur place, les actionnaires en conflit peuvent
solliciter l'intervention d'un médiateur durant deux ou trois
demi-journées. Avec eux, il recherche une solution acceptable par chacun
et préservant la société.
La clause de médiation peut être introduite dans
tous les contrats. Elle dispose que les parties signataires envisagent avant
tout recours à une procédure judiciaire de faire appel à
un médiateur. Cette clause peut a fortiori être
introduite dans un accord de médiation, prévoyant ainsi le cas
où les parties ont des difficultés à respecter l'accord
(qui est alors un nouveau contrat). L'accord peut rester sous seing
privé.
Depuis la loi du 8 février 1995 en France, la
médiation peut revêtir une forme judiciaire.
B- La médiation judiciaire
C'est la médiation par un tiers mais à
l'instigation du juge. Cette forme de médiation a été
instaurée en France à partir du décret d'application
n° 96-652 du 22 juillet 1996 qui ajoute un titre VI bis au
nouveau code de procédure civile (art. 131-1 à 131-15).
« Le juge peut, après avoir obtenu l'accord des parties,
désigner une tierce personne (...) pour procéder à une
médiation, en tout état de procédure et y compris en
référé, pour tenter de parvenir à un accord amiable
entre les parties » (art. 21 loi du 8 février 1995).
La médiation judiciaire peut intervenir à tout
stade de la procédure (mise en état, première instance,
appel, référé). Elle est acceptée par les parties,
et ordonnée par le juge qui désigne et mandate le
médiateur qui reçoit mission d'amener les parties à
rechercher une solution de compromis pour mettre fin à leur litige (art.
131.1, NCPC). Ce peut être une personne physique ou association. Le
médiateur doit posséder la qualification requise eu égard
à la nature du litige.
Dans le cas d'acceptation en cours de procédure, le
juge rend une ordonnance de médiation. La mesure de médiation
peut porter sur tout ou partie du litige; elle ne dessaisit pas le juge, qui
reste chargé de son contrôle et vis-à-vis duquel le
médiateur a une obligation d'information. Le juge peut, à tout
moment, prendre les mesures qu'il estime nécessaires (art. 131-2 NCPC).
La durée initiale de la médiation ne peut
excéder trois mois. Cette mission peut être renouvelée une
fois, pour une même durée, à la demande du
médiateur, du juge ou des parties (art. 131-3 NCPC).
Le médiateur aide les parties à élaborer
elles-mêmes la solution au litige; il ne dispose pas de pouvoir
d'instruction (art. 131-8 NCPC). Pour les besoins de la médiation et
avec l'accord des parties, il peut cependant entendre des tiers consentants. La
médiation est soumise au principe du contradictoire, et le
médiateur est tenu à la confidentialité ainsi qu'au devoir
de réserve.
Les fonctions de médiation sont payantes. La
rémunération du médiateur est fixée par le juge et
supportée par les parties qui doivent consigner les sommes
nécessaires, la désignation du médiateur étant
caduque faute de consignation105(*). Dès le prononcé de la décision
désignant le médiateur, le greffe de la juridiction en notifie
copie par lettre simple aux parties et au médiateur. Dès qu'il
est informé par le greffe de la consignation, il convoque les
actionnaires. Le juge peut mettre fin à la médiation à
tout moment, à la demande de l'une des parties ou du médiateur,
ou s'il estime que le bon déroulement de la médiation est
compromis (Art. 131-10 NCPC.).
Une originalité en droit est ici la décision
qui ordonne la médiation : elle vient en fait reprendre l'accord
des parties pour la médiation et définir les modalités
d'organisation de la médiation. Cette décision ressemble plus
à un contrat multipartite, incluant les protagonistes du
différend, le médiateur et le juge qu'à une
décision contraignante, puisque les parties peuvent s'y soustraire
à tout moment, quitte à déplaire au juge.
La décision ordonnant ou renouvelant la
médiation ou y mettant fin n'est pas susceptible d'appel. Les
constations du médiateur et les déclarations recueillies ne
peuvent être utilisées dans le procès au fond et sans
l'accord des parties (art. 25 NCPC). A l'expiration de sa mission, le
médiateur informe par écrit le juge de ce que les parties sont ou
non parvenues à un accord. En cas d'accord, le médiateur en
précise les termes et, au besoin, les formule par écrit; cet
accord peut être homologué par le juge. En cas de
désaccord, le médiateur prend acte de l'échec de la
médiation. Enfin, le juge autorise le médiateur à se faire
remettre, jusqu'à due concurrence, les sommes consignées comme
rémunération au greffe.
Les contentieux entre actionnaires peuvent également
faire l'objet d'une conciliation.
Paragraphe 2 : La conciliation dans les contentieux
entre actionnaires.
Nous devons d'abord énoncer les principes
généraux pour ensuite évoquer la procédure.
A- Les principes généraux
La conciliation consiste dans l'intervention d'un tiers qui
après avoir écouté les parties et analysé leur
point de vue leur propose une solution pour régler leur
différend, ce qui la distingue de la médiation106(*), laquelle reste un
accompagnement et de l'arbitrage qui est contraignant. Les parties sont
naturellement libres d'accepter ou de refuser. Le recours à un
conciliateur est donc libre.
Le conciliateur a pour mission de régler à
l'amiable les différents portant sur les droits dont les
intéressés ont la libre disposition. Il s'agit du
règlement à l'amiable des conflits entre particuliers à
l'exclusion des litiges concernant l'état des personnes, en dehors de
toute procédure judiciaire. N'étant pas magistrat, le
conciliateur ne prononce pas de jugement. Il recherche une solution amiable
satisfaisante pour les parties en conflit afin d'éviter le recours au
tribunal.
Les éléments caractérisant la
conciliation sont, outre la nécessité de respecter le principe du
contradictoire, de rechercher un compromis dans le cadre de débats
confidentiels dans lesquels le conciliateur devra adopter un comportement
impartial.
La réussite de la conciliation dépend
évidemment de la volonté conjointe. Si par exemple une partie a
entamé le procès dans le seul but de gagner du temps, elle
refusera la conciliation et fera durer la procédure aussi longtemps que
possible. De même, si ses calculs de probabilités lui font
espérer un gain supérieur en cas de décision judiciaire,
elle placera la barre haut pour mettre fin au litige.
La conciliation est donc une
« fenêtre » autorisant la prise en charge des aspects
émotionnels du litige : donner à chaque partie la
possibilité d'exprimer pourquoi elle fait des reproches à
l'autre. Mais, faute d'accord des parties, le conciliateur reprendra le cours
de sa mission qui se terminera par ses conclusions et le dépôt de
son rapport.
La procédure de conciliation obéît
à des règles spécifiques.
B- La procédure de conciliation
Les parties peuvent se concilier spontanément ou
à l'initiative du juge pendant toute la durée de l'instance (art.
127 NCPC). Ainsi, la saisine du conciliateur se fait directement par les
parties, ou sur délégation du juge d'instance si les parties sont
d'accord sur les principes de cette désignation. La conciliation peut
être recherchée au moment que le juge estime le plus favorable.
Les parties, même si elles se concilient en dehors du prétoire,
peuvent toujours demander au juge de constater leur accord.
Le conciliateur peut être privé ou être
désigné par un juge dans le cadre d'une procédure
judiciaire. Dans le cas d'une désignation par un juge, on parle de
conciliateur de justice. Le conciliateur de justice peut être saisi soit
directement par les parties, soit par le juge d'instance qui lui
délègue alors son pouvoir de conciliation en application des lois
des 8 février 1995 et 28 décembre 1998 en France107(*).
Lorsque le conciliateur est saisi par le juge d'instance,
l'accord des parties est nécessaire (art. 832 al.1 NCPC), recueilli le
plus généralement à l'audience du juge. Dans ce cas, la
mission de conciliation ne peut excéder un mois, renouvelable sur
demande du conciliateur, une fois pour la même durée.
Lorsque les intéressés se trouvent devant lui,
hors la présence de tout public, le conciliateur les écoute
successivement et tente par un dialogue approprié de les amener à
dégager la solution qui paraîtra la meilleure. Il doit veiller
à ce que le débat soit équitable et neutre. Il se doit
d'être impartial et est tenu à l'obligation de réserve.
A l'issue d'une conciliation réussie, le conciliateur
rédige - obligatoirement s'il est saisi par le juge d'instance,
facultativement en cas de saisine par les parties - un constat d'accord. Ce
constat d'accord, établi en autant d'exemplaires que de parties, est
signé par les parties et le conciliateur108(*). Le
secrétariat-greffe peut délivrer des extraits de ce procès
verbal. Un exemplaire est transmis au juge d'instance qui y appose la formule
exécutoire (art. 131 NCPC).
En cas d'échec, le conciliateur doit informer les
parties qu'elles peuvent saisir, si elles l'estiment utile, la juridiction
compétente selon les modalités de la présentation
volontaire (art. 834 NCPC). Les fonctions de conciliateur sont
bénévoles et gratuites en France.
La médiation et la conciliation se ressemblent quant
à l'esprit qui les anime et au but qu'elles poursuivent (éviter
le procès) mais présentent des spécificités. Lors
d'une conciliation et plus encore lors d'une médiation, tant la parole
que le pouvoir de décision sont rendus aux parties. Les actionnaires en
conflit ont recourent à cette justice plus rapide,
dédramatisée, et à moindre frais. C'est probablement une
des raisons de leurs taux de réussite élevés.
Le goût actuel des actionnaires pour la
médiation et la conciliation en France et dans le monde n'aurait pas
pour seule justification de contribuer à alléger la charge des
juridictions étatiques, il serait la traduction d'une tendance
à la pérennité dans la vie des affaires et porterait la
marque de besoins plus profonds, révélateurs d'une tendance
économique et comportementale dans la vie des affaires.
A la lumière des leçons tirées des
systèmes législatifs français et belge, il est possible
d'envisager une gestion d'origine contractuelle des relations entre
actionnaires dans la perspective de prévention et de résolution
des conflits dans les sociétés anonymes de l'espace OHADA.
CONCLUSION
GENERALE
Une chose est évidente, c'est que le législateur
de l'OHADA s'est vraiment montré audacieux dans les innovations
introduites au niveau des dispositions sur le règlement des conflits
entre actionnaires dans la société anonyme, après les
moyens longtemps consacrés par la loi et la jurisprudence.
Désormais, les actionnaires disposent d'un cadre juridique de
règlement des conflits fondé sur des dispositions
préventives et des modes de résolution idoines. C'est là
une heureuse initiative, étant donné qu'elle s'inscrit dans
l'optique de la sécurité juridique des investissements que
réalisent les actionnaires.
D'un autre côté, les leçons tirées
des législations modernes étrangères nous ont amené
à apporter un autre éclairage sur cette problématique. La
prévention interne des conflits se fait par les pactes d'actionnaires.
La convention d'actionnaires est un outil indispensable pour prévenir ou
au pire, baliser le règlement de ces conflits. Lorsque ces conventions
ne jouent pas leur rôle pacificateur, il existe des procédures
judiciaires rapides et efficaces pour s'en sortir. Mais plutôt que de
laisser le juge prendre une décision à leur place, les
actionnaires peuvent également solliciter l'intervention soit d'un
conciliateur ou d'un médiateur.
Face à cet état de chose, et compte tenu des
réflexions faites le long de ce travail, nous estimons que notre
système législatif devra comprendre deux nouveaux
mécanismes spécifiques de règlement des litiges entre
actionnaires, tous deux fondés sur la disparition de l'actionnariat
d'une des parties au conflit. S'il existe de justes motifs, un actionnaire peut
être tenu :
- de céder ses titres à un ou plusieurs
coactionnaires (action en exclusion) ;
- d'acheter les titres d'un ou plusieurs coactionnaires
(action en retrait).
C'est douloureux, mais au moins l'entreprise survit et reste
entière109(*). Il
est important de souligner que cette procédure de règlement des
conflits présente un caractère subsidiaire, en ce sens qu'il peut
seulement être invoqué lorsque les problèmes existant au
sein de la société ne peuvent pas être résolus
à l'amiable ou en recourant à une mesure moins extrême.
A défaut de disposer de cette nouvelle
procédure, nous préconiserons aux actionnaires d'être
prudents, soit par voie statutaire soit par voie de convention, et d'essayer de
restreindre tant que faire se peut la possibilité d'émergence des
conflits. Ses modalités les plus courantes, dont nous recommandons la
pratique dans l'espace OHADA, peuvent être classées en deux
grandes conventions au sens large : les conventions relatives à la
cessibilité des titres et les conventions de vote.
Bien que l'AUSCGIE établisse, de façon
générale, une structure commune à toutes les
sociétés anonymes, le législateur laisse toutefois le soin
de compléter la structure selon les besoins et objectifs particuliers
des actionnaires. L'élaboration de solutions qui leur sont propres,
à l'intérieur d'une convention entre actionnaires, s'avère
un choix judicieux pour prévenir les conflits et les situations
fâcheuses qui risquent de se présenter au cours de l'association.
Selon les besoins spécifiques de chacun, toutes sortes de clauses
préventives des conflits peuvent être inscrites dans une
convention entre actionnaires pourvu qu'elles ne heurtent pas les bonnes moeurs
et l'ordre public.
Les statuts de la société anonyme peuvent
également prévoir une procédure interne de
résolution du conflit ou, plus précisément, l'obligation
de gérer le différend dans une perspective de conciliation et de
médiation. En pareil cas, la réclamation de l'actionnaire
mécontent et le conflit se développeront de manière
similaire aux procédures contentieuses, mais évolueront dans un
cadre contractuel. Le conciliateur ou le médiateur devrait être
partie à cette procédure, dans un rôle de supervision, dans
les limites qui auront été fixées par le contrat
sociétaire.
Cette procédure interne de résolution du litige
repose sur les modes alternatifs de règlement des conflits relevant du
droit civil et commercial, à l'exclusion de l'arbitrage proprement
dit110(*). Rien
n'empêche dès lors que la société anonyme
prévoit, dans ses statuts, que tout litige interne soit in
fine, dévolu à un médiateur ou un conciliateur.
A une époque où le monde entrepreneurial
occidental accélère sa mutation vers des standards de gestion et
de compétitivité anglo-saxons, les milieux d'affaires africains
doivent prendre le train de la modernité et de la flexibilité
dans l'application du droit de la société anonyme de l'OHADA.
Il est donc important de poursuivre les réflexions sur
les perspectives du règlement des conflits entre actionnaires dans
l'espace OHADA. Sur ce point, c'est à la doctrine et à la
jurisprudence qu'il reviendra de peaufiner l'oeuvre entamée et de
nouvelles réformes viendront combler les failles constatées.
Aucune oeuvre humaine n'étant parfaite, tous les systèmes
législatifs sont passés par là./.
SOMMAIRE DES ANNEXES
Annexe 1 : Acte Uniforme relatif au
droit des sociétés commerciales et au groupement
d'intérêt économique : Extrait.
Annexe 2 : Cour d'Appel de Cotonou,
Arrêt 178/99 du 30 Septembre 1999 : Affaire Dame Karamatou IBIKUNLE
c/ Sté CODA Bénin et quatre autres.
Annexe 3 : Cour d'Appel d'Abidjan, Civ.
Com. 25 Février 2000 : Affaire NACI S.A. c/ Société
WIN SARL.
Annexe 4 : Cour d'Appel de Cotonou,
Arrêt 256/2000 du 17 Août 2000 : Affaire CPI, M. Séfou
FAGBOHOUN, SONACOP, M. Cyr KOTY c/ Etat Béninois.
Annexe 5 : Tribunal Arbitral Ad Hoc,
Décision n° 001/TA/2007 du 30 Octobre 2007 : Affaire SARCI
Sarl c/ Atlantique Télécom SA., Télécel
Bénin SA.
Annexe 6 : Code Belge des
Société (Extrait) : Procédure de résolution
des conflits internes.
BIBLIOGRAPHIE
A - OUVRAGES GENERAUX
1- COZIAN (M.), VIANDIER (A.), et DEBOISSY (Fl.), Droit
des sociétés, Paris, Litec, 18ème
édition, 2005, 610 pages.
2- GUYON (Y.), Droit des affaires, T.1, Droit
commercial général et Sociétés
12eme édition Economica, 2003, 405 pages.
3- KONE (M.), Le Nouveau droit commercial des pays
de la zone OHADA : comparaisons avec le droit
français, LGDJ, 2003, 416 pages.
4- MARTOR Boris et alii. Le Droit
Uniforme des Affaires issu de l'OHADA, Paris, Editions Litec
Juris-Classeur, 2004, 325 pages.
5- MERLE (Ph.), Sociétés
commerciales Paris, Précis Dalloz,
10ème édition 2006, 921 pages.
6- MESTRE (J.) & VELARDOCCHIO (D.), Lamy
sociétés commerciales, Paris, édition Lamy
des sociétés anonymes, 2005.
7- NGUEBOU-TOUKAM (J.) et alii. OHADA
Sociétés Commerciales et G.I.E, Collection
DROIT UNIFORME AFRICAIN, Bruxelles, éd. BRUYLANT, 2002, 317 pages.
8- POUGOUE (P-G), ANOUKAHA (F.) et NGUEBOU (J.):
Le droit des sociétés commerciales et du groupement
d'intérêt économique OHADA, Paris,
Presses universitaire d'Afrique, 1998.
9- PRICE WATERHOUSE COOPERS, Mémento du
droit des sociétés commerciales et GIE OHADA,
Fidafrica Juridique et Fiscale, 1998.
10- RIPERT (Georges) et ROBLOT (René),
Traité de droit commercial, T.1, vol.2, Paris,
LGDJ, 18ème éd., 2002, 760 pages.
B - OUVRAGES SPECIAUX
1- BEZARD (P.), La société
anonyme, Paris, Montchrestien, 1986, 127 pages.
2- FOUCHARD (Ph.), L'OHADA et les perspectives de
l'arbitrage en Afrique, Bruxelles, Bruylant, 2000, 206 pages.
3- GUYON (Y.), Les sociétés,
aménagements statutaires et conventions entre
associés, in Traité des Contrats de
J. Ghestin LGDJ, 5è édition, 2002, 625 pages.
4- GUINCHARD (S.) L'évitement du juge
civil, les transformations de la régulation juridique,
Paris, Dalloz, 2001, 126 pages.
5- MERLE (Ph.) & CHEVALLIER-MERLE (E),
L'application jurisprudentielle de la loi du 24 juillet 1966 sur
les sociétés commerciales, Dalloz, 1976, 203 pages.
6- RACINE (J-B), Pluralisme des modes alternatifs
de résolution des conflits, Paris, éd.
L'hermès, 2002, 125 pages.
7- VIANDIER (A.), Notion
d'associé, Paris, LGDJ, 1978, 314 pages.
C - ARTICLES DE
DOCTRINE
1- CALUWAERTS (M.), « L'exclusion et le
retrait forcé comme solution aux litiges entre
actionnaires », in Revue Jeune Barreau de Bruxelles,
2004, p. 215 et ss.
2- DIAKHATE (M.) & SAMBE (I.)
« Regards croisés sur l'intervention du juge dans
la vie des sociétés commerciales » in
Revue sénégalaise de droit des affaires n°1, janvier-juin
2003, p.11 et ss.
3- FENEON (A.), « La mésentente
entre actionnaires dans les sociétés anonymes régies par
l'acte uniforme OHADA », Recueil Penant,
juillet-septembre 2004, n°848, p.265.
4- JEANTIN (M.), «Les
conventions de vote» Revue de Jurisprudence
Commerciale, n° spécial, nov. 1990, p.124 et ss.
5- LAURIOL (Th.),
« Modernité et
attractivité de l'arbitrage OHADA », in
Marchés Tropicaux du 16 Mars 2001, p.8 et ss.
6- MEUKE (B.Y.), « L'information des
actionnaires minoritaires dans l'OHADA : réflexion sur l'expertise
de gestion », OHADATA D-05-56
édité sur le site
www.ohada.com.
7- PAILLUSSEAU (J.), « L'Acte uniforme
sur le droit des sociétés commerciales »,
Communication à la Journée de l'Association Henri Capitant du 22
novembre 2002, Paris, in Petites Affiches, Le Quotidien Juridique, n° 205,
p.19 et ss.
8- PARLEANI (G.), « Les pactes
d'actionnaires », Revue des sociétés
1991, p.1 et ss.
9- RAYNAUD (B.), « La prévention
des conflits d'intérêts dans les sociétés par
actions », JCP éd. E 2003, 354.
10- SCHMIDT (D.), « Les conflits
d'intérêts dans la société
anonyme », 2ème éd. Joly
édition 2004.
11- TRICOT (D.), « Abus de droit dans
les sociétés, abus de majorité et abus de
minorité », RTD com. 1994, p.617 et ss.
12- STORCK (J.), « La validité des
conventions extrastatutaires », D.89, p.267 et ss.
D - MEMOIRES
1- ADOU Melaine et ETEKA Urbain : Le rôle du
juge dans le règlement des conflits internes au sein de la
société anonyme, Abomey Calavi,
FADESP/UAC, 2002-2003, 60 pages.
2- HOUGA Brice La protection juridique des
actionnaires dans la société anonyme,
Abomey Calavi, FADESP/UAC, 2004-2005, 61 pages.
3- LIGALI Inoussa Adio Le droit des actionnaires
dans les sociétés anonymes en République du
Bénin, Abomey Calavi, FADESP/UAC, 2002-2003, 103 pages.
E- CODES
1- OHADA, Traité et Actes Uniformes Commenté et
Annotés, Juriscope, 2002.
2- Code de Commerce Français, Dalloz, Edition 2006.
3 Code Civil Français, Dalloz, Edition 2007.
4- Nouveau Code de Procédure Civil, Dalloz, Edition
2007.
5- Code Belge des Sociétés, édité
sur le site
http://www.juridat.be/cgi_loi.
6- Code annoté IDEF de l'OHADA, édité sur
le site
http://www.institut-idef.org
F- AUTRES DOCUMENTS
1- Livre Vert sur les modes alternatifs de résolution
des conflits relevant du droit civil et commercial
2- Lexique des termes juridiques, 14è
édition, Dalloz, 2003.
G- SITES WEB CONSULTES
1-
http://www.juriscope.org ; 2-
http://www.ohada.com ; 3-
http://www.legifrance
4-
http://www.juriscom.net 5-
http://www.juridat.be/cgi_loi.
5.
http://www.institut-idef.org
TABLE DES MATIERES
TITRES PAGES
AVERTISSEMENT................................................................................................i
DEDICACES......................................................................................................ii
REMERCIEMENTS..............................................................................................iii
SIGLES ET
ABBREVIATIONS...............................................................................iv
SOMMAIRE.......................................................................................................v
INTRODUCTION
GENERALE..............................................................................2
PREMIERE PARTIE : L'ENCADREMENT JURIDIQUE DES
CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
Chapitre 1 : LES DISPOSITIONS PREVENTIVES DES
CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
................................................................................................9
Section 1. Les droits individuels de
l'actionnaire..........................................................9
§1. Les droits sociaux de
l'actionnaire.........................................................................10
A. Le droit de faire partie de la
société.........................................................................11
B. Le droit de participer aux décisions
collectives...........................................................12
C. Le droit d'être désigné aux fonctions
sociales............................................................12
D. Le droit d'actionnaire d'agir en
justice....................................................................13
§2. Les droits financiers de
l'actionnaire.....................................................................14
A. Le droit aux
bénéfices.......................................................................................15
B. Le droit de souscription aux augmentations du
capital..................................................16
C. Le droit de négocier ses
actions.............................................................................16
D. Le droit au remboursement de la valeur nominale de l'action
et au bénéfice de liquidation.......17
Section 2. La réglementation des
assemblées
d'actionnaires..........................................18
§1. La diversité des assemblées
d'actionnaires...............................................................18
A. L'assemblée générale
ordinaire.............................................................................18
B. L'assemblée générale
extraordinaire.......................................................................19
C. Les assemblées
spéciales....................................................................................20
D. L'assemblée
mixte............................................................................................20
§2. Le fonctionnement des assemblées
d'actionnaires......................................................20
A. La convocation des
actionnaires............................................................................20
B. L'information des
actionnaires..............................................................................22
C. L'organisation de l'assemblée
d'actionnaires.............................................................24
D. La délibération de l'assemblée
d'actionnaires............................................................25
CHAPITRE 2 : LES MODES DE RESOLUTION DES
CONFLITS ENTRE
ACTIONNAIRES.............................................................................................27
Section 1. Le recours au
juge...............................................................................27
§1. La désignation d'un administrateur provisoire
par le juge des référés..............................27
A. Les conditions de désignation de l'administrateur
provisoire.........................................28
B. Les missions de l'administrateur
provisoire..............................................................29
§2. L'introduction d'une action en cas d'abus de
majorité ou de minorité..............................31
A. L'abus de
majorité...........................................................................................31
B. L'abus de
minorité...........................................................................................32
§3. La dissolution de la société pour
justes motifs..........................................................34
Section 2.
L'arbitrage.........................................................................................35
§1. Les opérations
d'arbitrage.................................................................................35
A. Le déclenchement de la
procédure........................................................................35
B. Les effets du déclenchement de la
procédure............................................................36
§2. La décision
arbitrale........................................................................................38
A. La sentence
arbitrale.........................................................................................38
B. Les voies de
recours.........................................................................................39
DEUXIEME PARTIE : LES PERSPECTIVES DU REGLEMENT
DES CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
Chapitre 1 : LA PREVENTION INTERNE DES CONFLITS
PAR LES PACTES
D'ACTIONNAIRES............................................................................................43
Section 1. Les conventions de vote entre
actionnaires...................................................43
§1. Le régime des conventions de
vote........................................................................44
A. Les principes
généraux.......................................................................................44
B. Efficacité et sanction des conventions de
vote............................................................45
§2. Typologie des conventions de
vote........................................................................46
A. L'engagement ponctuel de voter dans un sens
déterminé...............................................46
B. Les conventions relatives au statut des
dirigeants........................................................47
C. Les conventions relatives au fonctionnement des
organes..............................................48
Section 2. Les conventions relatives à la
cessibilité des
actions........................................49
§1. Le régime des clauses restrictives de
cessibilité des actions..........................................50
A. Les conditions de
validité...................................................................................50
B. Les
sanctions..................................................................................................53
§2 Typologie des clauses relatives à la
cessibilité des
actions.............................................54
A. Les clauses d'inaliénabilité,
d'agrément et de
préemption.............................................55
B. Les autres clauses issues de la
pratique....................................................................56
Chapitre 2 : LES NOUVEAUX MECANISMES DE RESOLUTION DES
CONFLITS ENTRE
ACTIONNAIRES...............................................................................................60
Section 1. L'exclusion et le retrait judiciaire d'un
actionnaire........................................60
§1. L'exclusion judiciaire pour justes
motifs.................................................................61
A. La procédure d'exclusion d'un
actionnaire...............................................................61
B. Les effets de l'exclusion pour justes
motifs...............................................................63
§2. Le retrait judiciaire pour justes
motifs....................................................................64
A. Les similitudes avec le mécanisme
d'exclusion..........................................................64
B. Les différences avec le mécanisme
d'exclusion..........................................................65
Section 2. La médiation et la
conciliation..................................................................66
§1. La médiation dans les contentieux entre
actionnaires...................................................67
A. La médiation
conventionnelle..............................................................................67
B. La médiation
judiciaire.......................................................................................68
§2. La conciliation dans le contentieux entre
actionnaires..................................................70
A. Les principes
généraux.......................................................................................70
B. La procédure de
conciliation................................................................................71
CONCLUSION
GENERALE................................................................................74
ANNEXES.......................................................................................................76
BIBLIOGRAPHIE.............................................................................................78
TABLE DES
MATIERES.....................................................................................80
* 1 Avant la réforme
OHADA, le droit des sociétés de la plupart des pays africains
concernés portait la marque de l'héritage du droit
français articulés essentiellement autour du Code civil (articles
1832 à 1873), du Code de commerce (articles 18 à 43), de la loi
du 24 juillet 1867 sur les sociétés par actions et la loi du 7
mars 1925 sur les sociétés à responsabilité
limitée.
* 2 GUILLEN R. et VINCENT J.,
Lexique des termes juridiques, 2003, Paris Dalloz, V°
Société Anonyme.
* 3 Au Bénin,
récemment, la crise des GSM a provoqué des conflits plus ou moins
aigus entre actionnaires opérant dans ce secteur : différend
entre Sarci et Atlantique Telecom, tous deux actionnaires dans la
société Telecel Bénin SA (Moov), qui aboutit à la
saisine d'un tribunal arbitral ad hoc. De même, Sogreci sarl
détenant 35% du capital de Spacetel Bénin SA (Areeba) a
assigné en justice Mtn pour achat frauduleux de 75 % des actions de
ladite société.
* 4 Applicable dans la
plupart des pays africains. Voir supra, note 1.
* 5 Article 4 alinéa 2
de l'Acte uniforme.
* 6 Art. 157 et 158, Acte
uniforme.
* 7 V° Arbitrage, in
Lexique des termes juridique Dalloz.
* 8 Sur cette question, voir
notamment l'interprétation du Professeur Dorothé SOSSA :
« Avec l'article 6 C.civ. on est fondé à utiliser
l'argument a contrario pour conclure qu'on peut déroger par des
conventions particulières toutes les lois qui n'intéressent pas
l'ordre public et les bonnes moeurs », in Introduction à
l'Etude du Droit, Cotonou, Editions Tundé 2007, p. 68
* 9 Clause de sortie commune,
clause de promesse d'achat, clause de promesse de vente, clause de blocage
partiel, etc.
* 10 Paris 30 juin 1995, JCP
éd. E 1996, II, 795, J-J Daigre.
* 11 Articles 636 à
643 Code Belge des Sociétés. Vr Extrait en Annexe.
* 12 Nouveau code de
procédure civile français, art. 127 à 131 et 131-1
à 131-15 s.
www.legifrance consulté le
12/02/08.
* 13 Même si
aujourd'hui c'est la loi qui réglemente les divers droits individuels de
l'actionnaire, ces derniers ont été par le passé
dégagés par la jurisprudence. Cf. Bull. Joly 1990, Grands
arrêts du droit des affaires, Dalloz, p. 500.
* 14 Philippe MERLE
distingue «droits pécuniaires » et «droits extra
pécuniaires» : Vr MERLE (Ph.), Sociétés
commerciales Paris, Précis Dalloz, 10ème
édition 2006, p.149. Une autre classification distingue
« droits politiques, patrimoniaux et financiers » : Vr
POUGOUE (P-G), ANOUKAHA (F.) et NGUEBOU (J.): Le droit des
sociétés commerciales et du groupement d'intérêt
économique OHADA, Paris, Presses universitaire d'Afrique, 1998, p.
101.
* 15 Com. 21 oct. 1997,
Bull. Joly 1998, p. 40, n° 10, P. Le Cannu.
* 16 Article 203 de l'acte
uniforme de l'OHADA portant organisation des procédures collectives.
* 17 La cour de cassation
française affirme clairement que les statuts ne peuvent pas supprimer le
droit de vote d'un actionnaire. Cf Cass. Com. 9 février 1999,
Château d'Yquem, Rev . Soc., 1999, 81, note Le Cannu.
* 18 VIANDIER A. in
Observations sur les conventions de vote, JCP édit. E 1986,
15405, cité par Merle Ph. Op.cit p.364
* 19 Com. 17 juin 1974,
Rev. Sociétés 1977, 84, D. Randoux.
* 20 Il a été
jugé qu'un tel mandat privait le cessionnaire de ses droits essentiels
et notamment de sa liberté de vote. RTD com. 1975, p.534,
n°8.
* 21 Cf. E. Buttet, Vote
par correspondance, Bull. Joly 1987, p.761.
* 22 Nous y reviendrons. Vr.
Infra Chap. 2, Sect. 1.
* 23 L'expression est
empruntée à COZIAN et VIANDIER, Droit des
Sociétés, LITEC, 1991, p.114, N° 369
* 24 Article 4 de l'Acte
Uniforme. Ce texte met sur le même pied, le partage et le fait de
profiter des économies.
* 25 Com. 26 mai 2004,
Rev. Sociétés 2005, p. 169, H. Le Nabasque ;
Bull. Joly 2004, p. 1100, n° 215, J.F. Barbieri.
* 26Ainsi certaines
sociétés anonymes du secteur cimentier peuvent distribuer des
ciments aux actionnaires.
* 27 Merles Ph., op. cit. p.
218.
* 28 « Par
exemple, lorsqu'il y a contestation sur les droits d'un très grand
nombre d'actionnaires, de telle sorte que toute majorité pourrait
être faussée ». Nous tenons cet exemple du doyen HAMEL
cité par Inoussa LIGALI in Le droit des actionnaires dans les
sociétés anonymes en République du Bénin,
Mémoire de Maîtrise es Sciences Juridiques, sous la direction de
Me Barnabé GBAGO, FADESP-UAC, Année Académique 2002 - 2003
P. 32
* 29 Une modification
statutaire ne peut pas être tacite, 1ère Civ. 21 mars
2000, Rev. Sociétés 2000, p. 509, Y. Guyon.
* 30 La Cour suprême
du Niger (n° 01-158/C du 16/8/01, SNAR LEYMA c/ Groupe HIMA SOULEY)
précise que le juge de référé est compétent
pour désigner le mandataire, édité sur le site
www.ohada.com.
* 31 TPI Yaoundé
ordonnance référé N° 494/06 février 2001,
NDJEUDJUI Thaddée c/ Continental Business machines édité
sur le site
www.ohada.com.
* 32 Les articles 806 s.
Code de Procédure Civile sur les pouvoirs reconnus au juge des
référés, sont les fondements légaux de
l'administration provisoire.
* 33 La jurisprudence donne
une définition assez large de la notion d'urgence, jugeant qu'il y a
urgence dès que « la crainte d'un préjudice d'une
certaine gravité, voire d'inconvénient sérieux, rend une
décision immédiate souhaitable » Cass., 11 mai 1990,
RDC, 774.
* 34 La nomination d'un
administrateur provisoire ne peut intervenir sans que ne soient examinés
au fond les problèmes de la société en cause. (Cotonou,
n° 178/99, 30/9/99, Affaire Dame Karamatou IBIKUNLE c/ Sté
CODA-BENIN et quatre autres), édité sur le site
www.ohada.com
* 35 RIPERT (Georges) et
ROBLOT (René), Traité de droit commercial, T.1, vol.2,
Paris, LGDJ, 18ème éd., 2002, p.119.
* 36 Une mésentente
entre associés, même caractérisée, qui ne paralyse
pas la société ne aurait justifier la nomination d'un
administrateur provisoire (Abidjan, n° 258, 25 février 2000,
Affaire Société Négoce Afrique Côte d'Ivoire dite
NACI - SA c/ Sté WIN SARL) édité sur le site
www.ohada.com.
* 37 Cf. MERLE (Ph.),
op. cit., p. 687
* 38 Cf. Y. Guyon, La
mission des administrateurs provisoires de sociétés, in
Mélanges D. Bastian, t.1, p. 103
* 39 Ainsi une
décision du Président du Tribunal de Bruxelles a nommé un
administrateur provisoire chargé d'assister sans voix
délibérative mais avec un droit de veto à tous les
conseils d'administration Cf. Commerce Bruxelles
(référés), 18/10/1988, TRV 89, p. 195.
* 40 Cf. MERLE (Ph.),
op. cit., p.689
* 41 Vr G. Kengne
« Le rôle du juge en matière d'abus du droit de
vote », Petites Affiches 12 juin 2000, n° 116.10
* 42 Cass. Com. arrêt
N° 322 du 24/09/1999 Revue Juridique Tchadienne, 2002 p.3
* 43 Com. 6 juin 1990, Bull.
Joly 1990, note P. LE CANNU, Grands arrêts du droit des
affaires, Dalloz, p. 500
* 44 Trib.
1ère Instance, Abidjan n° 1245 du 21 juin 2001, Michel
Jacob et autres c/ Société Scierie Bandema-Etablissements Jacob
et autres, Ecodroit n° juillet 2001, p.49.
* 45 Vr D. Schmidt, Les
droits de la minorité dans la société anonyme,
n° 187, p.139
* 46 Cour d'appel de
Besançon 5/6/57 D.1957. Il ressort des faits de l'espèce qu'un
actionnaire minoritaire en l'occurrence le sieur Clavey, refusait sans aucune
raison sérieuse, de voter la modification statutaire souhaitée.
Par son vote hostile il tenait fermement en échec les autres
actionnaires, incapables de réunir sans lui le quorum requis. La Cour de
Besançon a donc condamné formellement l'abus de minorité
pratiqué par le sieur Clavey actionnaire minoritaire qui s'était
opposé aux résolutions proposées.
* 47 Arrêt FLANDIN c/
SARL Alarm Service, cass. com. Grands Arrêt du Droit des Affaires P.
498
* 48 Cass. Com. 21 oct.
1997, (Pelissier c/ Clinique Sainte-Cathérine), Rev.
Sociétés, 1998 p.310, note H. MATSOPULOU
* 49 Com. 16 juin 1992,
Bull. Joly 1992, p. 944n n° 305, P. Le Cannu.
* 50 Com. 26 avr. 1982,
Rev. Sociétés 1984, 93, J. L. Sibon. Exemples
cités par Merle Ph., op.cit., p.144 s.
* 51 Com. 25 févr.
1964, Rev. Sociétés 1964, Bull. civ. III, n° 98 p.
85
* 52 Trib. Com. Versailles,
18 janv. 1967, RTD Com. 1967, p. 790, n° 3, Cl. Champaud.
* 53 Ainsi, le Tribunal
Arbitral saisi pour régler le différend qui oppose la
société Sarci et la société Atlantique Telecom, a
été institué conformément à l'article 43 des
statuts de Telecel Bénin S.A. portant clause compromissoire. Vr Annexe.
* 54 Paris, 9 juill. 1992,
Rev. Arb. 1994, 133, note Théry, cité par J. Vincent et
S. Guinchard, in Procédure Civile, Paris, Dalloz, 2003, p.
1183.
* 55 La
société par actions simplifiée (SAS) en est une autre
illustration en droit positif français.
* 56 Professeur Pedro SANTOS
in Cours de Droit des Sociétés, non publié, DESS
Droit des Affaires et Fiscalité, 2006-2007, p. 73.
* 57 CA Paris
30-6-1995 : JCP E 1996 n° 795 note J-J Daigre, tenant pour licite un
engagement de vote en faveur d'une augmentation de capital et rappelant la
faculté d'une exécution en nature.
* 58 Cass. 13 avril 1989,
TRV 1989, p.321 et note W. WYCKAERT.
* 59 Com. 10 janv. 1972, JCP
1972, II, 17134
* 60 Douai 24 mai 1962, JCP
1962, II, 12871, D. Bastian.
* 61 Cass. Com. 2 juillet 1985,
Bull. Joly 1986, p.229
* 62 Les définitions
de l'intérêt social, on le sait, oscillent entre
l'intérêt patrimonial des associés et une notion plus large
englobant des intérêts plus hétérogènes
liés à la continuité de l'entreprise.
* 63 Trib. Com. Paris 4 mai
1981, Rev. Jurisp. Com. 1982, p. 2, P. de Fontbressin.
* 64 Y. Guyon, Les
sociétés, aménagements statutaires et convention entre
associés, in Traité des contrats, de J.
Ghestin LGDJ, 5è édition, 2002, p. 362
* 65 Sur la difficile
conciliation entre le droit des contrats et le fonctionnement de la
société, on peut consulter avec profit D. Schmidt,
Rév. Société 1985, 108.
* 66 Un arrêt
récent s'est engagé dans une voie plus contraignante, obligeant
la société à un second vote. Paris, 30 juin 1995, JCP,
1996, éd. E, 795, note Daigre.
* 67 Civ. Gand
(1ère Ch.), 6 février 1998, R.W. 1998-99, p. 1047
* 68 Vr. Ch. Freyria,
Etude de la jurisprudence sur les conventions portant atteinte à la
liberté du vote dans les sociétés, RTD com. 1951, p.
419
* 69 Vr. l'ouvrage
fondamental d'Y. GUYON, op. cit., pp. 337 et suiv.
* 70 Dans son arrêt de
principe, déjà cité (voy. note 58), la Cour de cassation
belge a considéré comme licite l'engagement pris par un
actionnaire, dans une convention de vote, de ne pas révoquer un
administrateur.
* 71 La solution a
été particulièrement affirmée en matière de
groupe de sociétés où il a été admis qu'un
protocole d'accord pouvait prévoir une répartition
égalitaire des sièges d'administrateurs afin de permettre un
contrôle paritaire dans le fonctionnement d'une filiale commune. Trib.
Com. Paris 1er Août 1974, Rev. Sociétés
1974, 685, Notes B. Oppetit.
* 72 Voir n° 57.
* 73 Vr. par ex. art.751
AUSCGIE
* 74 Vr. Olivier de Boeck,
Vade mecum de l'administrateur de sociétés anonymes,
édité sur le site
www.lexfori.be
* 75 Comp. art. 765
AUSCGIE.
* 76 Le régime en cas
d'offre publique d'achat (OPA) obéit à un autre mécanisme,
et s'applique seulement aux sociétés dont les titres sont
côtés en bourses.
* 77 CA Dijon, 8 mars 1977,
Rev. Sociétés 1977, 279, note D. Randoux, JCP 1977, II, 18722,
note A. Rabut, p.71
* 78 Voir infra §2.B
* 79 L'article L. 262-14 C.
com dispose que les statuts peuvent prévoir
l'inaliénabilité de toutes les actions ou de certaines d'entre
elles pour une durée n'excédant pas 10 ans.
* 80 V. par ex. Poitiers 12
nov. 2002, Dr. Sociétés 2003, n° 107, H. Hovasse.
* 81 Cf. E. Boulenger,
Le « dénoyautage » des entreprises
privatisées, Rev. Droit bancaire 1989, p. 188.
* 82 On peut rapprocher ces
dispositions de celles de l'art. 765 de l'Acte Uniforme sur les
Sociétés Commerciales et GIE.
* 83 Vr. Paris 23 Paris
1962, D. 1963, 570, note Bigot pour une clause insérée dans un
règlement intérieur non publié.
* 84 C'est ainsi que la Cour
d'appel de Paris a été amenée à annuler pour
indétermination du prix, une promesse de cession d'action portant un
prix de vente augmenté, à la date de la levée de l'option,
de l'évolution de l'actif net de l'entreprise, ce qui rendait le prix,
aux dires de la Cour, directement dépendant de l'activité de
l'entreprise. Cf. MERLE (Ph.), Sociétés commerciales
Paris, Précis Dalloz, 10ème édition 2006, 921
pages.
* 85 Voy. par ex.
Versailles, 29 juin 2000, Bull. Joly, 2000, 1149, note Le Cannu.
* 86 Cass. Civ. 26 octobre
1982, Bull. civ. III, p.154.
* 87 Les conventions
conclues entre ces actionnaires prévoyaient, de manière
originale, une inaliénabilité temporaire, avec des durées
variables : ainsi, pour les actions du groupe Havas rachetées
à l'Etat, il avait été prévu un blocage pendant
trois ans de la totalité des actions, de 80% pendant les deux ans qui
suivent et enfin, leur aliénabilité était ensuite
subordonnée à l'accord du conseil d'administration dans un
nouveau délai de trois ans. Exemple cité par Ph. Merle, op.
cit., p. 335 in fine.
* 88La doctrine
française rapporte le cas d'une clause d'incessibilité
stipulée pour assurer à un tiers (prêteur) qu'un
actionnaire ou un groupe d'actionnaire détiendra, pour la durée
d'une opération de financement, un certain nombre de titres afin de
garantir la solvabilité de l'emprunteur qui prenait l'engagement de ne
pas aliéner. En s'assurant que son débiteur demeurait la filiale
d'une société dont la solvabilité ne faisait pas de doute,
la société créditrice espérait pouvoir se couvrir
de risques attachés à une détérioration de
l'état financier de la filiale. Vr. S. Prat, Les pactes
d'actionnaires, Litec, Paris, 1992, n° 199, p. 116.
* 89 J.J. Daigre et M.
Sentilles, Les pactes d'actionnaires, Ed. GLN Joly, Paris, 1995, p. 25
* 90 Pour une description
détaillée de ces clauses, voy. S. Prat, op. cit. p. 122
et 123.
* 91 Paris, 10
décembre 1998, Bull. Joly 1999, 482, note Daigre.
* 92 Cass. 5 novembre 1998,
RPS 1999, p.59 et s.
* 93 G. Parleani, Les
pactes d'actionnaires, Rev. Soc. 1991, p. 24, n° 39 ; Y. Guyon,
op. cit., p. 283, n° 220 in fine.
* 94 Les juges indiquent que
la dissolution est une mesure exceptionnelle qui ne se justifie que lorsqu'il
n'est pas possible de résoudre les conflits par d'autre mesures,
Bédard c. Journeaux, C.S. Montréal, n°
500-11-028537-062, 7 déc. 2006.
* 95 En France, l'exclusion
décidée par le seul tribunal suscite beaucoup
d'opposition. Certaines juridictions du fond estiment cependant qu'en cas de
conflit irréductible entre actionnaires, l'élimination d'une
partie d'entre eux est préférable à la dissolution pour
mésintelligence grave. La Cour de cassation s'y est opposée. Voy.
Tilquin, Les conflits dans la société anonyme et l'exclusion
d'un associé, RPS 1991, n° 6560.
* 96 La
mésintelligence grave et permanente entre actionnaires est la
catégorie reine des justes motifs, puisqu'en pratique la plupart des
motifs évocables aboutiront à une telle mésentente entre
les actionnaires. Mais pour autant un simple différend n'est pas
suffisant. Le désaccord doit être profond et durable et doit nuire
sérieusement au fonctionnement de la société et/ou
à la poursuite par celle-ci de son objet social.
* 97 Bruxelles, 14 avril
2000, Revue Pratique des Sociétés 2001, p. 187 ss. et
obs. Ph. Malherbe.
* 98 J. F. Goffin
« Les actions en cession forcée et en reprise
forcée » J.T. 1998, p. 324
* 99 Bruxelles, 7 septembre
1999, RPS 2000, p. 334 et note Derijcke.
* 100 Bruxelles, 26
septembre 2000, RPS 2000, p. 117
* 101 Liège, 17 juin
1999, RPS 1999, p. 260.
* 102 E. Pottier et M. de
Roeck, op. cit., p .583.
* 103 L'arbitrage est en
effet un mode de résolution des litiges qui s'apparente plus aux
procédures juridictionnelles qu'aux modes alternatifs dans la mesure
où la sentence arbitrale vise à remplacer la décision de
justice. L'arbitrage est très réglementé (cf. Supra Ch. 2
Sec. 2).
* 104 Edité sur le
site
www.legifrance
* 105 Ces dispositions
n'ont pas été jugées d'ordre public et les parties peuvent
convenir de rémunérer directement le médiateur. Cf Paris,
2 juill. Et 18 sept. 1997, RGDP 1998. 169, obs. Jarrosson.
* 106 Il est parfois
malaisé de distinguer la médiation de la conciliation, la
jurisprudence considérant la médiation comme modalité
d'application de la conciliation. La Cour de cassation française a ainsi
jugé, dans un arrêt du 16 juin 1993 (Civ. 2è,
Bruère c/ Caisse régionale de Garantie, D. 1993-inf.176) que la
médiation, dont l'objet est de procéder à la confrontation
des prétentions respectives des parties en vue de parvenir à un
accord proposé par le médiateur, est une modalité
d'application de la conciliation. Sur une comparaison entre les deux notions,
cf. Julie Joly Hurard, Conciliation et médiation judiciaires,
thèse Paris 2, PUAM, 2003, préface de S. Guinchard.
* 107 Cf. Nouveau Code de
Procédure Civile, Titre VI, articles 127 à 131.
* 108 Cette
formalité est requise à peine de nullité, Trib. Com.
Châlons-sur-Marne, 1er juin 1978.2.555 ; note Decheix,
RTD civ. 1979.198, obs. Perrot.
* 109 Ce qui n'est pas le
cas des mécanismes « traditionnels » de sortie de
crise : liquider la société (c'est-à-dire la mettre
à mort et chacun touche sa part) ou la scinder (c'est-à-dire la
couper en plusieurs morceaux que les parties se partagent). Ce sont là
des solutions brutales, qu'il faut dépasser en recueillant dans notre
droit positif des solutions plus modernes et ne provoquant pas la mort de
l'entreprise.
* 110 En
réalité, l'idée de régler les litiges sous une
forme différente de la justice publique et sous appellation anglaise
«Alternative Dispute Resolution » (ADR) s'est
considérablement épanouie ces dernières années. Ces
modes privés de règlement des litiges, plus ou moins connus de
nos systèmes juridiques d'inspiration francophone, offrent une
alternative possible à l'arbitrage qui comporte un aspect
juridictionnel.
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