SECTION 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, COMME OUTIL DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?
Pour pouvoir prendre en compte les préoccupations des
différents acteurs du développement dans la proposition d'une
législation foncière unifiée à mesure de
résoudre les effets pervers de la dualité des régimes
fonciers appliqués jusque-là, nous ferons dans un premier temps,
une présentation sommaire de la situation socio- économique du
Burkina. Ensuite nous procéderons à la définition du
statut
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juridique de la terre et du rôle que pourraient jouer
les différentes autorités politiques. Enfin nous
définirons les droits des différents acteurs en tenant compte des
exigences de sécurité foncière.
I - PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA PAUVRETE AU
BURKINA
Les statistiques de l'INSD fournissent les informations suivantes
sur la population burkinabè.
- Population vivant avec moins de 1 $ US/jour : 27,2% de la
population totale ;
- Population vivant avec moins de 2 $ US/jour : 71,8% de la
population totale ;
- Population vivant en dessous du seuil de pauvreté
(c'est-à-dire disposant d'un revenu annuel ne dépassant pas
82.672 francs CFA) : 46,4% de la population.
Selon ces informations, la majorité des pauvres se
trouve en milieu rural et mène les activités agricoles ou
pastorales. Les couches vulnérables de la population (les femmes, les
jeunes et les enfants) sont les plus exposées à la
pauvreté.
II - LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE
Les différents acteurs du milieu rural qui ont
participé aux ateliers de concertations sur la PNSFMR ont tous soutenu
l'idée que l'Etat ne soit plus l'unique propriétaire de la
terre.
Mais nous avons expliqué dans cette étude que la
loi étant l'instrument des hommes, toutes les personnes physiques qui
ont administré la terre jusque-là, ont fini par agir dans leur
intérêt (personnel ou politique). Une telle attitude porte
atteinte à la cohésion sociale sans laquelle aucune
sécurité réelle des droits n'est possible.
La difficulté d'accorder le droit de
propriété à des structures pilotées par des
personnes physiques est encore plus perceptible lorsque l'on considère
les exigences de sécurité foncière. De notre point de vue,
un lien doit être établi entre la durée de gestion du droit
de propriété (par les personnes habilitées à le
faire et pour la période pendant laquelle elles répondent
vraiment de leur gestion) et celle de l'effectivité du droit
accordé aux utilisateurs du foncier. Car la gestion des hommes peut
être sujette à conflits, alors que les conflits sociaux peuvent
fragiliser la sécurité foncière. En effet, la durée
de gestion foncière des hommes est nettement inférieure à
celle des besoins de sécurité foncière. Les
autorités politiques exercent dans le
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meilleur des cas, leur fonction le temps d'une vie humaine,
mais dans la plupart des cas, sur une période d'une quinzaine
d'années tout au plus. La plupart d'entre elles se soucient beaucoup
plus de leur propre bien-être pendant cette période, que des
conséquences des actes qu'elles posent, dans le futur. La durée
légale des entreprises peut quant à elle, aller jusqu'à
quatre-vingt dix neuf (99) ans. Certaines entreprises exercent bien au
delà de cette durée. La véritable sécurité
foncière doit protéger les investissements de ces entreprises
tant que durent leurs activités, et donc beaucoup plus longtemps
après la période de gestion des autorités politiques, et
même au-delà des régimes politiques qui ont institué
la loi.
Pour ce faire, le droit de propriété doit
être détenu par l'Etat en dépit des positions de certains
acteurs du foncier. Nous pensons que la faculté de l`Etat à
exercer un contrôle de la gestion des droits secondaires par les autres
personnes, doit aussi venir de sa détention du droit de
propriété.
Pour sécuriser les investissements, l'Etat doit octroyer
des droits d'usage incontestables sur des périodes suffisamment longues
pour rassurer l'investisseur.
III- LES ROLES DES DIFFERENTES AUTORITES
POLITIQUES III-1- DANS L'EXERCICE DE LA PROPRIETE DE L'ETAT ET
LE CONTROLE DE
LA GESTION DES TERRES
Le Ministre des finances doit être maintenu dans son
rôle actuel et doit être compétent sur l'ensemble des terres
du Burkina, quelques soient les usages auxquels elles sont destinées.
L'unicité juridique de la terre burkinabè, qui résulte de
l'unicité d'autorité, en sera préservée ainsi.
Mais il devra être appuyé dans l'exercice de ses
fonctions par des structures politiques afin que le contrôle de la
gestion des structures coutumières et administratives
décentralisées soit effectué en temps réel par des
structures de même nature. L'exercice du droit de propriété
de l'Etat sera ainsi beaucoup plus perceptible. La mise en oeuvre du
contrôle que l'Etat doit exercer sur la gestion des structures
décentralisées sera ainsi beaucoup plus efficace.
La mise en oeuvre de telles dispositions pourrait se faire de
manière progressive. Les Gouverneurs pourraient par exemple assumer
cette fonction au niveau régional dans un premier temps. Ensuite une
partie de leur responsabilité
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pourrait être conférée à des
structures politiques beaucoup plus déconcentrées au fur et
à mesure.
III-2-DANS LA GESTION DES TERRES
C'est au niveau de la gestion des terres que la dualité
du régime foncier est la plus perceptible. La mise en place
d'institutions locales de manière participative et consensuelle
constitue de notre point de vue la voie d'institution d'une législation
foncière unifiée. La gestion des droits fonciers doit se faire
par stade.
- Le premier stade doit être du ressort
des autorités coutumières. Pour ce faire une loi nationale doit
être prise pour réglementer la constatation et l`exercice des
droits fonciers coutumiers.
Des chartes locales doivent être élaborées
au niveau de chaque commune, entre les détenteurs des droits fonciers
coutumiers et les autorités communales, sur la base de la loi nationale
et en tenant compte de la spécificité des villages, pour
impliquer tous les acteurs dans l'exercice des droits octroyés par la
coutume.
Les autorités communales pourraient intervenir à ce
stade pour constater les différentes occupations et transactions
foncières.
- Le second stade doit être du ressort
des autorités communales. La gestion foncière des
autorités communales doit commencer lorsque la terre a quitté la
compétence de l'autorité coutumière. Le document de
constat de l'occupation ou de la transaction foncière (entre
l'autorité coutumière ou le détenteur de terres
coutumières et l'acquéreur) peut constituer l'acte qui met un
terme à la compétence de l'autorité coutumière. Il
doit être dressé sous la supervision de l'autorité
communale et impliquer la cellule foncière locale du village ainsi que
les représentants du ministre chargé des domaines et des services
concernés par l'activité qui est exercée sur la terre
objet de l'acte.
Les différentes actions de gestion de l'autorité
communale ne doivent commencer qu'après l'élaboration du document
de constat d'occupation ou de transaction foncière.
- Lorsque la transaction est au bénéfice de
l'Etat, d'un de ses services déconcentrés ou d'une structure que
l'Etat appuie, l'interlocuteur de l'autorité coutumière pourrait
être le Gouverneur qui agirait sous le couvert du Ministre des Finances
et par le biais du Service des Domaines.
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- Par souci d'efficacité, la loi doit définir
des délais pour les différentes transactions. L'autorité
coutumière pourrait disposer pour ce faire, d'un délai maximal
pour réagir à toutes sollicitations de l'autorité
politique (centrale ou décentralisée) qui courra à compter
de la date à laquelle la demande de terre est formulée à
son niveau et qui est matérialisée par un document
écrit.
IV- LES DROITS DES DIFFERENTS ACTEURS
FONCIERS
Les différents acteurs du développement
économique du Burkina recourent très souvent aux services des
institutions financières nationales et internationales et à
d'autres structures dans le cadre de leurs activités. Celles-ci exigent
que les droits fonciers, donnés en guarantie de leurs différentes
prestations soient sécurisés afin d'offrir une contrepartie
sûre aux ressources qu'elles mettent à leurs dispositions.
Nous essayerons de définir les éléments
qui conditionnent la sécurisation juridique des droits des utilisateurs
et déterminent le degré de sécurité des
investissements. Mais avant, nous proposerons des mesures qui nous paraissent
déterminantes dans la lutte contre la pauvreté et la mise en
oeuvre d'un véritable développement socio-économique. Car
le développement économique de l'ensemble de la
société Burkinabé constitue de notre point de vue, l'une
des plus importantes garanties des droits fonciers.
IV-I QUELQUES MESURES DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Le développement économique s'entend ici, d'une
progression de la situation économique de l'ensemble des couches
composant la société burkinabè. Les conclusions des
enquêtes menées par l'INSD, révèlent qu'une
importante portion de la société burkinabé vit dans une
situation économique relativement précaire et tire l'essentiel de
ses ressources d'activités liées au foncier. On peut subdiviser
la population burkinabè en trois groupes socio-économiques : les
pauvres (environ 40% de la population), les moins pauvres (environ 40% de la
population) et les riches qui constituent à peu près 20% de la
population.
La portion des riches est celle qui dispose de la majeure partie
des terres faisant l'objet de titres de possession.
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Quant à la plus grande portion de la population, (80%
environ), elle vit dans une situation économique difficile, qui
résulte en partie de la précarité de sa situation
foncière. En effet, selon la Banque Mondiale, il existe un lien
étroit entre la possession foncière, la sécurité
des droits et la lutte contre la pauvreté. Elle a publié un
rapport qui abonde dans ce sens et affirme qu' « une
propriété foncière garantie et l'allègement des
contraintes liées à la cession des terres permettent aux pauvres
de mieux se prendre en charge, améliorent la gouvernance et produisent
des avantages économiques pour tous. 1»
Sur la base des recommandations de ce rapport, nous proposons
que la législation foncière favorise l'accès des pauvres
et des moins pauvres du Burkina à la terre et facilite les
modalités d'acquisition des droits fonciers.
1) Pour ce qui est de l'accès des pauvres à la
terre, les mesures tendant d'abord à privilégier les associations
paysannes, que nous proposions pour les couches vulnérables pourraient
s'étendre à l'ensemble des pauvres et des moins pauvres, pour les
terres destinées aux activités agricoles, pastorales et
piscicoles. En plus de résoudre le problème de l'accès
à la terre, elles pourraient insuffler une nouvelle dynamique de
développement économique en résorbant le problème
d'emploi des pauvres. Car selon des enquêtes menées par la
Direction des Etudes et Programmes du Ministère de l'Agriculture en 1988
et interprétées par Monsieur Djibril TRAORE alors Directeur
Général de l'ERPAD (Études et Réalisation de
Projets d'Aménagement et de Développement), la
propriété collective est plus créative d'emplois que la
propriété privée2.
2) La réduction des droits de mutations aura
l'avantage de permettre à une part importante de la population de
satisfaire aux conditions d'acquisition des titres de possession. Ces mesures
pourraient concerner les terres destinées à tous les usages, et
principalement celles destinées aux activités
précédemment énumérées ainsi qu'à
l'habitation et aux activités commerciales dans les zones ordinaires.
Puisque ces différents domaines sont ceux où s'investit la
majorité de la population. Pour le cas spécifique des mutations
des parcelles destinées à l'habitation dans les zones d'habitats
ordinaires ainsi que celles destinées aux activités agricoles,
pastorales et piscicoles, le droit pourrait être indexé sur la
superficie (comme la taxe
1
http://qo.worldbank.org/VYMIQ2R350
2 www.fao.com/ Archives de la FAO. «
L'Etat, la tenure communautaire et la participation populaire au Burkina Faso
»
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de jouissance), au lieu de porter sur le montant de la
transaction (qui inclut la valeur de la parcelle ou celle des investissements
réalisés et qui décourage ainsi l'investissement).
La situation foncière du Burkina montre aujourd'hui
qu'il y a beaucoup d'utilisateurs qui acquièrent les terres et
n'engagent pas ou ne vont pas au bout des formalités de mutation
à cause de leurs coûts élevés. Cette portion
étant plus importante que la première qui est à mesure de
satisfaire aux exigences financières de mutation, l'insuffisance de
recettes qui pourrait résulter de la baisse des tarifs sera
compensée par les sommes provenant des formalités que cette
portion de la population accomplira pour sécuriser ses
investissements.
IV- 2 -PROPOSITIONS DE RESOLUTION DE QUELQUES PROBLEMES
IV - 2 -1- Les problèmes des habitats spontanés
Les habitats spontanés constituent de véritables
obstacles à la mise en oeuvre des opérations de lotissement et le
contrôle de leur installation ainsi que la précision des
conditions de leur prise en compte pour les attributions doivent être
clarifiés.
Les difficultés causées par les habitats
spontanés proviennent aussi bien des dispositions législatives
que des pratiques des propriétaires fonciers.
En effet, l'article 155 du décret 97-054/PRES/PM
portant modalités d'application de la RAF, permet d'attribuer des
parcelles aux autochtones résidant dans les villages englobés par
les opérations de lotissement. Quant à l'article 156 il donne la
priorité d'attribution aux demandeurs résidents déguerpis.
Le manque de précisions de ces deux (2) dispositions et les pratiques
des propriétaires fonciers coutumiers créent des
difficultés dans les opérations d'attribution des parcelles des
zones nouvellement loties. En effet, que renferment exactement les notions de
déguerpissement, d'autochtones et de résidence ?
- Les résidents déguerpis. Le droit de la
personne déguerpie est-il lié à sa possession d'une maison
duquel il est déguerpi ou au fait qu'elle résidait sur les lieux
du lotissement ? Car plusieurs personnes peuvent occuper la même maison,
avoir l'âge minimum requis pour postuler à la possession d'une
parcelle. Par exemple trois (3) personnes adultes peuvent habiter une maison de
trois pièces (3 chambres), appartenant à l'une d'entre elles ou
même à une tierce personne.
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Chacune d'elles peut occuper une des pièces avec sa
femme et même ses enfants. Si ces personnes sont contraintes de quitter
la maison à cause de l'opération de lotissement, chaque famille
subira le préjudice du déguerpissement. L'article 156 stipule que
le demandeur résident déguerpi est prioritaire. Ces trois
personnes ne sont-elles pas fondées à demander une parcelle
puisqu'elles résidaient toutes sur les lieux avant le lotissement ?
- Les autochtones Comment déterminer
l'autochtone ? Car la notion d'autochtone exige des précisions sur les
origines des populations qui habitent les villages que les autorités
communales ne peuvent définir seules. Face à cette
difficulté, les maires et les préfets associent les
autorités coutumières, ou laissent cette tâche à
leur diligence. Alors que depuis 1984 (date de la première RAF), elles
ne sont plus censées participer aux activités foncières.
Comment contrôler alors la véracité des listes que
celles-ci établissent ?
- La condition de n'avoir jamais été
attributaire d'une parcelle dans la même ville. La gestion des
attributions est laissée à la seule diligence des
autorités communales qui ne disposent pas de moyens logistiques
suffisants pour contrôler les attributions (informatisation
systématique des listes d'attribution, établissement de banques
de données sur les attributions par commune et mise en réseau de
ces informations...). En plus, celles-ci n'ont pas ou ne perçoivent pas
forcement l'intérêt de mener des contrôles sur les
attributions, de nature à rendre effectif le respect de cette condition
pour postuler à une parcelle. En effet, pendant les activités de
lotissements, certaines autorités communales inscrivent dans leurs
priorités, d'attribuer des parcelles à leurs proches (parents et
amis politiques qui ne remplissent pas forcement cette condition) ou d'en
vendre tout simplement quelques unes, soit pour assurer les frais de
lotissement, soit pour se faire un peu d'argent. La règle de l'offre et
de la demande, qui détermine les coûts des biens enseigne que plus
la demande est importante par rapport à l'offre, plus les prix montent.
Le respect de cette condition pour prétendre à une attribution
permettrait d'écarter bien de postulants, ce qui diminuerait la demande
et partant, amoindrirait les prix auxquels les parcelles peuvent être
vendues. Devant un tel calcul, qui s'obligerait à dépenser pour
contrôler le respect de cette condition et agir en même temps
contre ses propres intérêts ?
Au regard de toutes ces difficultés, il convient de
contrôler les installations dans les zones non loties. Pour y parvenir la
mise à contribution des autorités
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coutumières et leurs désintéressements
conséquents, établis en fonction des espaces à lotir qui
leur appartiennent pourraient les amener à conserver leurs terres au
lieu de les vendre à moindre prix aux personnes qui construisent les
habitats spontanés.
Par ailleurs, les opérations de recensements
révèlent de forte densité d'habitants sur les espaces
avant les lotissements. Il n'est pas rare par exemple de recenser trois (3),
quatre (4) ou même plus de logements sur un espace de deux cents
cinquante mètres carrés (250 m2) par exemple; lequel espace
correspond tout au plus à une parcelle dans certains lotissements. Cette
situation (qui est très fréquente) aboutit des fois à
l'établissement de listes de résidents comportant plus de
personnes que de parcelles disponibles sur l'ensemble du lotissement. Comment
satisfaire toutes ces personnes, ainsi que toutes celles qui ont le droit de
postuler, même si elles ne résident pas dans les zones en voie de
lotissement ? Face à cette situation, les autorités communales
fixent des conditions spécifiques d'attributions pour chaque
lotissement. Ces conditions peuvent aussi être subjectives ou servir des
intérêts autres que ceux des populations. Face à ces
difficultés, il convient :
1) de subordonner la prise en compte des personnes occupant
les habitats spontanés par le respect par elles, de conditions
d'occupations des zones non loties, qui soient harmonisées sur
l'ensemble du territoire.
2) de définir des superficies minimales dont
l'occupation peut permettre de recenser une personne comme résidente. La
prise en compte du résident pourrait ainsi être indexée
à la superficie de l'espace sur lequel il a investi au lieu d'être
subordonnée à la seule condition de résidence.
Considérons par exemple une zone où les parcelles loties ont des
superficies de deux cents cinquante (250) mètres carrés. Si dans
cette zone l'on établit que l'occupation de quatre cent (400) ou cinq
cents (500) mètres carrés de zone non lotie donne droit à
l'inscription d'un nom sur la liste des résidents, les personnes qui
installent des maisons sur des superficies de moindre grandeur seront
contraintes de s'associer pour pouvoir postuler à une parcelle au risque
de perdre. L'espace que chacun doit occuper pour espérer obtenir une
parcelle étant supérieure à la superficie d'une parcelle
lotie , le risque d'avoir plus de résidents que de parcelles pourrait
être quelque peu résorbé.
3) d'impliquer les autorités coutumières et les
populations autochtones dans le contrôle des habitats spontanés.
Pour y parvenir, il convient d'instituer un titre d'occupation foncière
coutumière que celles-ci délivreront aux personnes à qui
elles
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cèdent des terres. La délivrance de ce titre ne
devra être possible que pour une superficie au moins égale
à la superficie minimale dont l'occupation peut permettre de se faire
recenser comme résidant dans la zone non lotie. Ainsi, pour la
périphérie des villes telles que Ouagadougou et Bobo-Dioulasso
où la superficie des parcelles des zones d'habitation traditionnelle
peut atteindre 300 ou 400 mètres carrés, les propriétaires
fonciers coutumiers ne doivent pouvoir délivrer de titre d'occupation
foncière coutumière que pour les terres dont les superficies sont
supérieures d'au moins 100 mètres carrés à celles
des parcelles loties. La liste des personnes vivant dans les zones non loties
et pouvant prétendre à une attribution de parcelle doit
être conforme à la situation des personnes détenant les
titres d'occupation foncière coutumière. Cela permettra de
connaître à tout moment la situation exacte de l'occupation des
zones non loties et d'éviter aussi tous les abus qui ont cours dans les
opérations de recensement avant les lotissements.
4) d'appliquer le principe de
l'égalité de tous devant la loi et de réguler les
appétits des autorités coutumières. Celles-ci
n'hésitent pas des fois à exiger des centaines de parcelles ou
à prétexter l'existence de sites de cultes fictifs sur de grands
espaces (de plusieurs hectares) pour en demander l'attribution. La
reconnaissance de prérogatives foncières à
l'autorité coutumières peut se traduire par l'attribution de
quelques parcelles supplémentaires mais doit être
régulée pour éviter les abus.
IV-2-2- Le problème des parcelles non mises ou
insuffisamment mises en valeur
Une importante portion des parcelles attribuées aussi
bien en zone urbaine que rurale ne sont pas mises en valeur ou le sont
insuffisamment. Pendant que la satisfaction des demandes de parcelles est de
plus en plus difficile, certains attributaires ne réalisent aucun
investissement sur les espaces attribués, ne respectent pas les
délais impartis pour s'acquitter des droits et taxes ou pour la mise en
valeur des parcelles. Les délais de mise en valeur et de paiement des
droits et taxes sont pourtant clairement définis par la RAF et sont
connus de la quasi-totalité des acteurs fonciers.
Il convient de veiller au respect strict desdites conditions
et de sanctionner les manquements par des retraits. Car les objectifs de
spéculations foncières ne sont pas toujours étrangers
à ce genre de pratiques. Surtout que les parcelles acquièrent
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toujours de la valeur au Burkina, par le simple fait du temps
qui passe, même si elles ne sont pas mises en valeur. Sinon, comment
expliquer que les populations s'organisent pour mener diverses actions
revendicatives, quelques fois violentes afin d'obtenir des parcelles, au motif
qu'elles n'ont pas de logement ; mais dès qu'elles sont satisfaites, les
rythmes des investissement qui étaient si élevés au moment
où les zones n'étaient pas loties, diminuent ? L'application des
mesures de retrait empêchera une minorité de se faire attribuer
des parcelles qu'elle ne peut mettre en valeur, juste dans le but de
spéculer et de les revendre à prix d'or quelques années
plus tard. Ces mesures doivent être appliquées à toutes les
zones car la spéculation est plus importante dans les zones où
les parcelles sont les plus coûteuses (zones commerciales, industrielles,
résidentielles...)
IV-3- LES DROITS FONCIERS DES UTILISATEURS ET LES ELEMENTS
DETERMINANTS DE LEUR SECURISATION
La sécurisation des droits détenus sur la terre
est un facteur déterminant du développement économique car
elle constitue l'une des principales exigences du financement de
l`activité économique. Ainsi que nous l'avons expliqué
précédemment, la véritable sécurité provient
beaucoup plus de la non contestation des droits par la société,
que de la nature des droits détenus. Un titre de propriété
ne vaut propriété que si la société reconnaît
le droit du détenteur et le respecte. Il peut être valable
quelques années ou le temps d'un régime politique, mais les
changements à la tête de l'Etat et les exigences sociales qui les
insufflent peuvent fragiliser la sécurité offerte par le titre si
la société l'exige.
Mais les exigences sociales sont plus lentes à
s'exprimer que celles économiques. Pour satisfaire aux impératifs
économiques qui sont actuels, il convient d'offrir aux différents
utilisateurs de la terre, des droits qui protègent effectivement les
investissements réalisés.
Les différents droits démembrés du droit
de propriété prévus par le code civil peuvent être
détenus par les utilisateurs et peuvent sécuriser les
investissements. Il s'agit principalement:
- de l'usufruit des biens immeubles ;
- du droit d'usage et d'habitation ;
- de l'emphytéose ou bail emphytéotique ;
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- du droit de superficie.
Ces droits sont à même de sécuriser les
investissements et les titres permettant de les constater peuvent offrir la
guarantie exigée par les investisseurs et les institutions
financières, si les droits constatés ne sont pas susceptibles de
contestations incontrôlées et s'ils sont acquis pour une
période suffisamment longue (de la même durée que celle des
entreprises par exemple).
C'est une législation foncière au service du
développement et du bien être de l'ensemble de la population qui
peut offrir aux différents acteurs de la vie économique du
Burkina, la sécurité pérenne des droits fonciers. Elle
doit donc être le reflet de la société dont elle veut
servir les ambitions de développement économique, en
intégrant le pluralisme culturel et juridique car « aucune
société n'étant totalement homogène, le pluralisme
juridique est la conséquence du pluralisme culturel.1
»
1 Confère Archives de la FAO au
www.fao.com/ Titre : « le foncier -environnement : fondements
juridico - institutionnels », page 3
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