Section 2 : Efficacité de l'Aide en termes de
croissance économique
L'analyse de Burnside et Dollar (1997, 2000) est au coeur du
débat sur l'efficacité de l'aide qui a animé la
communauté internationale dans les années 1990. Ainsi, cette
analyse marque un tournant dans l'étude de l'efficacité de
l'aide, puisqu'elle aborde la question des conditions macro-économiques
favorables à une plus grande efficacité ouvrant ainsi la voie
à un vaste champ de recherche, alors inexploré. Ensuite, la
recherche menée par ces auteurs a eu des implications politiques
très importantes, puisqu'elle fonde les recommandations exprimées
dans le rapport Assessing Aid publié par la Banque mondiale en
1998. Elle est également une avancée majeure de la
réflexion menée par la Banque sur une allocation sélective
de l'aide fondée sur les performances et dont certains bailleurs de
fonds bilatéraux se sont inspirés pour élaborer leurs
stratégies d'aide au développement.
2.1. L'Analyse de Burnside et Dollar
Depuis le début des années 1990, l'aide
internationale était fortement en baisse et traversait une crise de
légitimité liée notamment à la fin de la guerre
froide et à la recrudescence des études critiques de son
efficacité. En effet, les conclusions pessimistes des analyses de
l'efficacité macro-économique de l'aide, combinées
à la mise en lumière des coûts sociaux et humains des
programmes d'ajustement structurels ont amené la Banque Mondiale
à relancer le débat sur l'efficacité de l'aide. C'est
justement suivant ce contexte que les travaux de Burnside et Dollar (1997
,2000) ont été élaborés.
L'idée développée, par Burnside et Dollar
et repris dans le rapport Assessing Aid de la Banque Mondiale, est que
l'efficacité de l'aide en termes de croissance dépend de la
qualité des politiques économiques mises en oeuvre par les pays
en développement. Cette réflexion se fonde sur des travaux
économétriques dans lesquels les auteurs estiment des
équations de croissance incluant une variable aide et un terme d'aide en
interaction avec un indicateur de politique économique. Cependant, la
qualité des politiques macro-économiques est
appréhendée par la maîtrise de l'inflation,
l'équilibre budgétaire et la mise en oeuvre d'une politique
d'ouverture commerciale.
La conclusion selon laquelle l'efficacité de l'aide
dépend de la qualité des politiques économiques
résulte alors de la mise en évidence, dans les estimations de
croissance, d'un effet significativement positif du terme croisé de
l'aide avec l'indicateur de politique économique. Ce résultat
économétrique, qui est au coeur du débat sur
l'efficacité de l'aide, est reproduit dans l'équation suivant
:
Croissance = - 0.60. (Revenu initial par habitant)
+0.71**. (POL) - 0.021.(Aide/PIB) + 0.19**. (Aide/PIB x POL)+
â X
R2= 0.3 6, N = 270, ** : significatif au seuil de
5%. Où POL représente un indicateur
agrégé de politiques macroéconomiques et â X
est un ensemble de variables de contrôle (la
fragmentation ethno-linguistique, les assassinats politiques, la
profondeur financière, la qualité institutionnelle).
La principale conclusion de l'analyse de Burnside et Dollar
est que si l'aide est plus efficace dans un bon environnement
macro-économique, elle devrait alors cibler les pays les plus pauvres et
ayant de bonnes politiques économiques. C'est ainsi, s'esquisse alors un
principe de sélectivité des pays receveurs dans la logique d'une
conditionnalité ex-ante fondée sur la qualité des
politiques économiques. Peut-être parce qu'elle avait de telles
implications politiques, l'analyse de Burnside et Dollar a fait l'objet de
nombreuses critiques dont l'hypothèse de sélectivité et
les conditionnalités.
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