OBJECTIFS DE LA RECHERCHE
L'objectif principal de ce TER, au-delà d'une
initiation à la recherche, est d'analyser, à partir d'une
recherche de terrain et d'une démarche géographique, les
transformations engendrées par le phénomène de
l'émigration dans le département de Louga afin de :
- contribuer à une meilleure connaissance des
phénomènes de migration en général,
- contribuer à l'accroissement de la prise de conscience
des décideurs et des
chercheurs vis - à - vis de la nécessite d'une
approche multidisciplinaire des
problèmes de développement et
particulièrement ceux liés aux migrations, - analyser les causes
réelles qui soutendent les migrations internationales,
- appréhender et analyser les transformations
engendrées par l'émigration dans
des zones du département de Louga
.
METHODOLOGIE
L'élaboration d'un travail d'étude et de
recherche exige dès son entame la définition des méthodes,
procédures et techniques à suivre. L'analyse de l'impact des
revenus migratoires en tant que fait isolé étant à nos
yeux une démarche sans intérêt, il nous a paru
nécessaire d'appréhender le phénomène migratoire en
amont et en aval, c'est-àdire partir des facteurs causaux, de son
évolution afin d'arriver aux transformations qu'il engendre sur le
milieu. C'est cet aspect qui a guidé notre démarche
méthodologique qui s'organise en trois étapes.
1- La revue bibliographique
Cette première étape revêt une importance
capitale d'autant plus qu'elle permet une meilleure compréhension du
sujet.
Notre recherche documentaire s'est d'abord orientée sur
des ouvrages généraux ayant traits au phénomène
migratoire et à la région de Louga en générale. Ce
passage nous a semblé incontournable pour avoir une vision
éclairée du problème général de la recherche
mais également de mieux nous rapprocher de notre cible.
La revue de littérature qui s'en est suivie a
porté spécifiquement sur le problème qui nous
intéresse malgré la pauvreté de la documentation sur le
milieu d'étude. Les Travaux d'Etudes et de Recherche (mémoire de
maîtrise et thèse) furent d'un grand apport. Ici toutes les
informations obtenues présentent un caractère scientifique puisse
que découlant de démonstrations et d'analyses pour aboutir en
général à la vérification d'hypothèse. Les
mémoires de Awa Bâ et de Al Assane Samb, traitant respectivement
de « L'impact de l'environnement socioculturel et
politico-économique sur les stratégies d'accumulation et
d'utilisation du profit chez les acteurs de l'informel : l'exemple des «
Modou-Modou » du département de Louga » et d'« Emigration
et lutte contre la pauvreté : analyse socio anthropologique de l'impact
de l'émigration sur la lutte contre la pauvreté dans la commune
de Kebemer », ont apportés un certains nombre d'informations.
Ce travail nous a également conduit partout où
nous pensions trouver des informations relatives au thème des
migrations. Il s'agit principalement des Bibliothèques Universitaires de
l'Université Gaston Berger et de l'Université Cheikh Anta Diop de
Dakar et de leurs centres de documentations. Egalement les centres de
documentations de l' IRD, de l'IFAN, du GIRADEL et du CIERVAL ont
été sollicités. Notons que nous n'avons pas fixé de
délai pour la documentation. Elle s'est déroulée tout au
long de ce TER, à chaque fois que l'opportunité se
présente.
Quelques ouvrages de références apportent un
certains nombre d'éléments. « Louga et sa
région : essai d'intégration des rapports ville-campage dans la
problématique du développement», Moustapha SARR, IFAN
Dakar, 1973 permet de mieux cerner la zone d'étude. En effet cet
ouvrage décrit l'évolution de Louga depuis la période
coloniale en faisant l'historique des différentes étapes des
migrations. Dans ce même registre, « L'atlas des migrations
Ouest africaines vers l'Europe », Nelly ROBIN, éditions de
l'IRD, Paris, 1997 offre une base de données
détaillée sur les migrations ouest africaines. Beaucoup
d'analyses y sont présentées sur les statistiques de
l'émigration à partir de recensement démographique de la
population de ces pays, d'estimation du Bureau International du Travail,
d'enquêtes réalisées dans le cadre de programmes de
recherches. Dans ce document, le Sénégal apparaît comme le
troisième pays d'émigration en Afrique de l'Ouest après le
Ghana et le Nigeria.
« Géographie de la population »
Daniel NOIN, Armand Collin, 2001 reste également un ouvrage de
référence. Dans un des chapitres du livre, intitule «
Les effets des migrations internationales de travailleurs », l'auteur
analyse les impacts à la fois sur les pays d'accueils que les pays de
départ en tirant des exemples sur certaines localités du Mali et
du Sénégal. C'est également dans cette optique que se sont
inscrit Patrick GONIN et Mohamed CHAREF dans « Emigrés -
Immigrés dans le développement local » Agadir
(Maroc), ORMES, 2005. Ce livre reprend les actes du Colloque du même nom
organisé à Saint Louis en 2003. Tout en analysant les impacts
économiques de ces flux migratoires, certains articles
révèlent que les changements dans la morphologie de la ville sont
les éléments les plus visibles de l'impact des revenus
migratoires. En outre dans les campagnes les fonds transférés ne
participent pas toujours au financement des activités agricoles mais
plutôt, à pousser les ruraux vers les villes, augmentant de fait
la pression démographique qui génère des problèmes
environnementaux.
« Migration, transfert de fonds et
développement », OCDE 2005, fait le point sur l'importance
des revenus migratoires. Cet ouvrage étudie l'impact des transferts de
fonds sur le développement économique dans les pays d'origines
des migrants.
Enfin certains travaux de chercheurs sur les migrations au
Sénégal demeurent des références incontournables
pour ce qui est du phénomène migratoire au Sénégal.
A ce titre citons : Malick NDIAYE dans « Les « Modou-Modou
» ou ethos du développement au Sénégal, Presse
Universitaire de Dakar, 1998 ; et Babacar NDIONE dans « Tendances
récentes des migrations internationales dans le Sénégal
urbain. Existe-t-il une dynamique de quartier ? Les exemples de Dakar, Touba et
Kaolack ».
2- La phase de visite et d'enquête de
terrain
2-1 l'information préliminaire auprès des
services techniques et des diverses institutions
En dehors des données bibliographiques nous avons
recherché des informations au niveau des diverses institutions à
Louga. Cette phase s'est déroulée du 1ier au 16 mars
2007. Elle a été principalement axée sur la visite de
toutes les structures susceptibles de nous fournir des informations sur la
question étudiée. Cette étape a été
réalisée avec le concours des étudiantes de
l'Université de Turin inscrites dans le même
projet4.
Les services techniques
régionaux visités comprennent les services
régionaux de l'Urbanisme, du Cadastre, des Impôts et Domaines, de
la direction de l'Agriculture. Ces structures nous ont fourni essentiellement
des documents administratifs et des rapports. Le dépouillement de ces
documents a permis de faire une présentation de la zone d'étude
à partir des données statistiques, des plans ainsi que des cartes
obtenues.
C'est au niveau des collectivités
locales que l'on a pu avoir les documents de stratégies
d'intervention des autorités pour mieux accompagner les transformations
qui s'opèrent. Nous avons eu des entretiens avec des responsables du
Conseil Régional et de la Mairie de Louga sur les politiques et les
mesures prises en faveur des émigrés. Il faut
4 Il s'agit de Agnése et de Esther,
étudiantes en Master de Science Politique à l'Université
de Turin-Unito.
également souligner que le Conseil Régional de
Louga a spécialement ouvert un bureau pour les émigrés.
Les associations
d'émigrés établies dans la commune, comme le
« Self Help » et le « FESPOP », ont été
également approchées. Elles ont facilité le contact avec
des émigrés en vacance qui ont bien voulu apporter leur
contribution à ce travail.
Les projets et ONG établis
à Louga (AQUADEV, projet SIG, CISV) ont mis à notre disposition
une cartographie de la région de Louga et des informations sur leurs
activités.
Les structures de transferts
d'argent établies à Louga nous ont tour à
tour accueilli. Malgré leur réticence dans la mise à
disposition de certaines informations (pour des raisons de
confidentialité), leurs contributions nous ont permis d'avoir une
idée sur les montants, les fréquences et les destinations des
sommes transférées, mais également il faut comprendre que
parallèlement à ces circuits officiels de transferts d'argent se
sont développés des canaux informels bien rodés.
2-2- Choix des sites d'études
Le choix du département de Louga pour notre
étude de l'impact des revenus migratoires se justifie par l'importance
numérique des émigrés dans la localité et surtout
l'accroissement considérable des revenus transférés par
ces derniers. D'autres part, il faut souligner que ce travail s'inscrit dans
une dynamique de recherche en équipe. Ainsi plusieurs aspects de
l'émigration lougatoise sont étudiés par d'autres membres
de l'équipe, selon une approche soit sociologique ou économique,
dans d'autres localités de la région de Louga.
Pour nous, les premiers éléments recueillis ont
permis de définir les zones d'étude en milieu urbain et en milieu
rural. Puisque cette étude porte sur l'espace départemental, il
fallait procéder à un échantillonnage de sites
représentatifs de l'impact des revenus migratoires. Ces choix ont
été essentiellement opérés à partir des
entretiens avec
certaines personnes ressources5 et des documents
obtenus lors de la phase précédente de recherche
d'informations.
En milieu urbain, la commune de Louga se compose de 12
quartiers.6 En raison de la forte spéculation foncière
et de la rareté des terrains, il reste à peine 5% de terres
communales situées vers l'est de la ville7. Les
émigrés ont tendance à occuper les quartiers
périphériques grignotant de fait les terres de la
communauté rurale de Nguidilé. Parallèlement, les vieux
quartiers centraux subissent des transformations sous l'influence des revenus
migratoires. Ainsi dans notre étude, les quartiers de Djang Bambodj, de
Voile d'or et de Keur Serigne Louga ont été retenus. Ces
quartiers présentent un fort pourcentage
d'émigrés8. Il s'agira par ailleurs, d'étudier
le centre- ville afin d'analyser les transformations de l'habitat et celles
liées à l'activité commerciale dues aux investissements
des émigrés.
Pour ce qui est du milieu rural, les associations
d'émigrés et les ONG nous ont beaucoup aidé dans le choix
des sites à étudier. Dans les campagnes lougatoises, certains
villages se distinguent nettement en raison de l'architecture remarquable de
leurs maisons. Ces villages qui donnent l'aspect de quartiers
résidentiels se singularisent par leur nombre élevé
d'émigrés (exemple : 800 émigrés à
Niomré). Deux (2) communautés rurales de l'arrondissement de
Mbédiéne ont été ciblées : Nguidilé
et Niomré où respectivement deux villages (Djélerlou Syll
et Maka Bra Gueye) et un village (Niomré) ont été
enquêtés.
2-3- L'enquête
Le premier séjour de terrain nous a également
servi de phase de pré-enquête et de test du
questionnaire9 établi. C'est ainsi, puisque nous habitons
dans la zone d'étude, les grandes vacances scolaires ont permis de
réaliser l'enquête aussi bien en milieu rural qu'urbain. Elle
s'est déroulée du 3 août au 29 août 2007. L'univers
de notre enquête concerne : les émigrés en vacances, les
anciens émigrés reconvertis dans des activités
5 Il s'agit du personnel des services administratifs,
des associations d'émigrés, des émigrés
rencontrés
6 Service du cadastre
7 Bamba Sylla, agent municipal, président de la
commission domaine et foncier
8 Il n'existe pas de chiffre exact sur le nombre
d'émigrés
9 Voir en annexe
économiques, les ménages
d'émigrés, les relais d'émigrés. Soulignons que les
relais d'émigrés sont des individus qui sont sur place et
constituent les hommes de confiance des émigrés, ils
gèrent leurs transferts et agissent à leur nom.
La délimitation des échantillons dans les
quartiers cibles ne fut guère facile. Mais en utilisant les
données sur le nombre de ménages dans chaque quartier, nous avons
enquêtés 10% de ces ménages en ce qui concerne la commune
de Louga. Le choix des ménages s'est basé sur une
déduction empirique, par rapport au standing de la maison. Dans chaque
ménage, une seule personne a été enquêtée.
Le total de l'effectif enquêté est de 162
personnes dont 99 femmes, reparti comme suit : Commune de Louga : 78 dont
35 à Djang Bambodj, 31 à Keur Serigne Louga et 12 à Voile
d'or.
Niomré : 48
Djélerlou Syll : 22
Maka Bra Gueye: 14
Il fait noter qu'en milieu rural, c'est grâce à
l'assistance des autorités locales que nous avons pu interroger les
populations.
3- Traitement des données
Après les phases de collecte des données
à la fois qualitatives et quantitatives, nous avons
procédé au dépouillement et au traitement des
données. En dehors de la transcription des entretiens10 les
données alphanumériques et cartographiques ont été
traitées à l'informatique grâce à des logiciels
adaptés.
3-1- Les données alphanumériques
(statistiques)
Le traitement des données recueillies durant
l'enquête a permis de faire des tableaux et graphiques pour étayer
l'analyse du phénomène migratoire dans le département des
Louga. Grâce aux logiciels EXCEL et WORD nous avons pu faire des
diagrammes et courbes de l'évolution des transferts, de la part des
émigrés dans les pays d'accueils entre autre.
10 Tous les entretiens ont été
enregistrés.
3-2- Les données cartographiques
Au départ, un stage au niveau de la cellule
cartographie de l'AQUADEV devait nous donner la possibilité de
réaliser entièrement la cartographie. Faute de ce stage, nous
nous sommes orientés vers la cellule SIG de l'Agence Régional de
Développement (ARD) de Louga et du Centre de Suivi Ecologique (CSE). Ces
deux structures nous ont particulièrement aidé dans la
réalisation de nos cartes. La plupart des cartes ont été
faites avec Arc View, moins nous avons également utilisé
les logiciels Autocad, MapInfo, Micro Station et Paint.
D'autres parts, grâce à Google Earth
nous avons pu récupérer quelques photos satellites des zones
étudiées dans le but de suivre l'évolution des
périmètres communaux et villageois. Les photos prises offrent une
résolution pas très nette mais les différents aspects
recherchés ont été mis en évidence. Ce travail a
été complété par des prises de photographie sur le
terrain pour mieux illustrer les transformations sur l'habitat.
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