3.2.2 Les taxes
Plutôt que d'exiger ou d'interdire, l'État peut
intervenir de façon que le calcul rationnel des agents
économiques intègre les externalités. Il faut pour cela
faire en sorte que le coût privéqui entre dans le
calcul des agents soit le même que le vrai coût de
l'activité (coût social)
grâce à la mise en oeuvre de taxes dans le cas
des externalités négatives et de subventions dans le cas des
externalités positives. Ainsi, l'usine qui génère des
nuisances de bruit importantes se verra dans l'obligation de payer un
impôt qu'elle intégrera dans son calcul de coût. Le
coût marginal augmentant du fait de ces taxes, l'entreprise
réduira sa production (et par conséquent ses nuisances).
Les solutions publiques ne sont pas les seules. Certains
économistes libéraux pensent que l'intervention des pouvoirs
publics n'est pas nécessairement légitimée par la
présence d'externalités. Ainsi, Ronald Coase explique, dans»
Le Problème du coût social» (1960), que l'Etat ne doit pas
intervenir économiquement en taxant ou en subventionnant, et ainsi en
modifiant la répartition des revenus. Coase considère qu'il
suffit de définir les droits de propriété qui peuvent
être échangés.
Supposons deux entreprises fabriquant au fil de l'eau (exemple
tiré de l'ouvrage de F. Lévêque) l'une, A, fabrique du cuir
pour un producteur de chaussures et pollue la rivière; l'autre, B,
fabrique de la bière en aval de A et a besoin d'eau pure pour nettoyer
ses cuves de fermentation; la quantité de pollution varie
proportionnellement à la quantité de cuir produite; B traite
l'eau qu'elle consomme en fonction de la quantité de tanins
déversés par A dans la rivière . Ce coût marginal de
purification, c'est le préjudice que subit l'entreprise de
FIG. 8 -
bière B
Cette figure montre comment la présence d'une
externalité met en échec la main invisible.
Cherchant à maximiser son profit, la tannerie produit
jusqu'au point où son bénéfice marginal devient nul. Du
point de vue de l'intérêt général, qui se
réduit ici au bien-être des deux agents, cette situation n'est pas
optimale car la richesse totale est maximisée pour q = q* et
non q0. La solution canonique du problème de l'externalité est de
réglementer. Le réglementeur doit calculer le » niveau
optimal de production d'externalités » et mettre en place un
mécanisme qui va contraindre (ou inciter) les agents économiques
à l'atteindre (imposer au pollueur une norme, qui limite ses
émissions à q*, ou taxer le pollueur) Coase estime
qu'il n'est pas nécessaire de recourir à l'Etat
réglementeur pour régler ce problème d'externalité
négative. Il suffit d'introduire dans notre exemple un droit de
propriété sur la rivière. Supposons qu'elle appartienne
à la fabrique de cuir. Admettons que les entreprises se connaissent et
peuvent signer des accords entre elles. Négligeons enfin le coût
des accords en considérant que la négociation, la mise en oeuvre
et la surveillance d'un contrat n'entraînent pas de dépenses
(coûts de transaction négligeables). Une
diminution des rejets de ?q = (q0-q) apporte au polluéB un gain (qXRq0)
qui est supérieur à la perte subie par A (qYq0). Le fabriquant de
bière a
donc intérêt à entrer en négociation
avec la tannerie pour lui proposer de limiter ses émissions en
échange d'une contrepartie monétaire.
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