Section 2. Problème et hypothèses
2.1. Le problème
La situation coloniale est un phénomène global
et de nature inégalitaire. En effet, les mutations sociales
observées avec l'arrivée du régime colonial s'accompagnent
d'une accélération du phénomène de mutations
culturelles. La prise en compte de cette situation par les sciences met en
cause la nature des rapports Europe-Afrique comme fait dominant/dominé
et de ce fait, entraîne en conséquence des nouvelles formes
d'analyse scientifique. A cet effet, deux faits sociaux apparemment primitifs
et irrationnels ont leurs raisons d'être face aux
phénomènes modernes. Aujourd'hui, il faut bien reconnaître
que la problématique de cette approche historique aboutit à
situer, comme une fatalité, les sociétés africaines dites
traditionnelles en face des sociétés modernes.
Cette problématique apparaît fondamental comme
« caractéristique commune aux pays qui sont le plus
avancés en matière de développement technologique,
politique, économique, social et culturel ». Par contre, la
notion de société traditionnelle apparaît dans la
littérature anthropologique et sociologique de façon ambiguë
et sans définir le type de modèle formalisé comme tel,
mais plutôt par opposition que par critères spécifiques
reconnus : société traditionnelle - société
industrielle ; société traditionnelle - société
urbaine. Face à cette dualité, notre étude qui porte sur
la dynamique villageoise nous oblige à axer notre réflexion sur
le milieu rural pour mieux faire ressortir les rapports dominants
dominés.
Dans la mesure où la société
traditionnelle nous apparaît comme le milieu par excellence où
cette dualité s'exprime le mieux. Pour coller à cette vision,
Henri Lefebvre disait que « le milieu rural peut se définir
comme étant le lieu de la reproduction des rapports sociaux
contradictoires, espace au départ homogène, se décomposant
et se désarticulant entre périphérie et contrée. Un
tel espace se peuple selon les décrets du pouvoir et permet soit
d'imposer sous une apparente cohérence, rationnelle et objective les
contradictions de la réalité »3. La question
qui nous « taraude » l'esprit est celle de savoir si les changements
socioculturels sont essentiellement caractéristiques des
sociétés paysannes. Comment pouvons-nous saisir les
transformations imposées par celles-ci ? Comment les changements
s'opèrent-ils et quelles en sont leurs origines ?
3 Henri Lefebvre, Le droit à la vie,
Paris, Anthropos, 1968, p. 173.
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