SECTION 2 : LE GUERILLERO ET LES GARANTIES
HUMAINES.
Le Guérillero en tant que sujet de droit international
jouit des mêmes droits et garanties humaines que le soldat
régulier, en cas de capture, le statut de prisonnier de guerre doit lui
être attribué, et dans le cas où ce dernier ait commis des
crimes de guerre, il doit avoir droit à un jugement équitable.
Nous verrons tout d'abord l'octroi du statut de prisonnier de
guerre, ensuite nous verrons les conditions de jugement équitable
attribué au guérillero par le DIH et leur degré
d'applicabilité.
1-L'octroi du statut de prisonnier de guerre.
Le prisonnier de guerre est en théorie, tout individu
appartenant à une partie dans un conflit qui tombe entre les mains d'une
partie adverse. L'octroi de ce statut comporte un nombre important de garanties
dont bénéficie toute personne qui se le verra attribué.
Signalons quand même que si l'octroi de ce statut est chose facile dans
le cadre d'un conflit armé international, tel n'est pas le cas dans le
cadre d'un CANI.
En adoptant les dispositions de l'article 4 de la
IIIe Conventions, les négociateurs de 1949 ont
réalisé une extension importante du statut de prisonnier de
guerre par rapport aux textes existants auparavant. En 1977 avec l'adoption des
deux protocoles additionnels, le statut de prisonnier de guerre sera
élargi d'avantage, notamment en élargissant la notion de forces
armées et celle de Combattant.
Concernant le premier protocole additionnel, l'article 4 3
stipule que « les forces armées d'une partie au conflit se
composent de toutes les forces, tous les groupes et toutes les unités
armés et organisés qui sont placés sous un commandement
responsable de la conduite de ses subordonnés devant cette Partie,
même si celle-ci est représentée par un gouvernement ou une
autorité non reconnus par une Partie adverse. Ces forces armées
doivent être soumises à un régime de discipline interne qui
assure, notamment, le respect des règles du droit international
applicable dans les conflits armés.
La première disposition de l'article 44 du dit protocole
stipule que tout combattant entrant dans l'une de ces catégories
citées dans l'article 43, qui tombe sous le pouvoir d'une partie
adverse est un prisonnier de guerre. La
disposition est claire, tout combattant capturé devrait
immédiatement avoir droit au statut de « Prisonnier de Guerre
», et bénéficier des dispositions de la troisième
convention de Genève relative à la protection des prisonniers de
guerre. Mais, la seule appréciation dépend des gouvernements.
En effet, malgré l'existence de coutumes
internationales relatives aux prisonniers de guerre, les Etats ont toujours
cherché à déroger l'ennemi capturé du statut de
prisonnier de guerre. Pendant la seconde guerre mondiale, certains
belligérants ont utilisé la notion de « Capturé
» pour refuser le statut de prisonnier de guerre à plusieurs
milliers de membres de la Wehrmacht et des forces armées japonaises
(43) . Cette dérogation est beaucoup plus accentuée
dans le cadre d'un CANI.
Toute personne considérée comme «
prisonnier de guerre » aura droit à la protection de la
troisième convention de Genève relative au traitement des
prisonniers de guerre, et tout violation à l'une de ces dispositions
sera perçue comme une violation du DIH.
L'un des principaux avantages dont bénéficie un
prisonnier de guerre est celui de « l'immunité du Combattant
». Selon ce principe, le prisonnier de guerre ne pourra en aucun cas
être jugé pour le seul fait de s'être battu, et il devra
être libéré dès la fin des hostilités. Dans
le cas d'un CANI, on peut comprendre la réticence des Etats à
attribuer ce statut à leurs citoyens ayant pris les armes contre eux.
Autre disposition protégeant le prisonnier de guerre
est elle qui interdit les interrogatoires à ces derniers dans le but de
leur soutirer des informations, et ce par le recours à des pratiques
interdites en DIH. En effet, la puissance détentrice n'a le droit
d'interroger les prisonniers de guerre que sur leur nom et prénom,
(43) HAROUEL- BURELOUP Véronique, Traité de
droit humanitaire, PUF, Paris, 2005, p.292.
grade et numéro de matricule militaire.
Avant d'aller plus loin, il convient de revenir à
l'article 1è de la IIIe CG relative au traitement des PG.
ARTICLE 17. -« Chaque prisonnier de guerre ne sera tenu de
déclarer, quand il est interrogé à ce sujet, que ses nom,
prénoms et grade, sa date de naissance et son numéro matricule
ou, à défaut, une indication équivalente.
Dans le cas où il enfreindrait volontairement cette
règle, il risquerait de s'exposer à une restriction des avantages
accordés aux prisonniers de son grade ou statut.
Chaque Partie au conflit sera tenue de fournir à toute
personne placée sous sa juridiction, qui est susceptible de devenir
prisonnier de guerre, une carte d'identité indiquant ses nom,
prénoms et grade, numéro matricule ou indication
équivalente, et sa date de naissance. Cette carte d'identité
pourra en outre comporter la signature ou les empreintes digitales ou les deux,
ainsi que toutes autres indications que les Parties au conflit peuvent
être désireuses d'ajouter concernant les personnes appartenant
à leurs forces armées. Autant que possible, elle mesurera 6,5 X
10 cm et sera établie en double exemplaire. Le prisonnier de guerre
devra présenter cette carte d'identité à toute
réquisition, mais elle ne pourra en aucun cas lui être
enlevée.
Aucune torture physique ou morale ni aucune contrainte ne pourra
être exercée sur les prisonniers de guerre pour obtenir d'eux des
renseignements de quelque sorte que ce soit. Les prisonniers qui refuseront de
répondre ne pourront être ni menacés, ni insultés,
ni exposés à des désagréments ou
désavantages de quelque nature que ce soit.
Les prisonniers de guerre qui se trouvent dans
l'incapacité, en raison de leur état physique ou mental, de
donner leur identité, seront confiés au Service de
santé.
L'identité de ces prisonniers sera établie par tous
les moyens possibles, sous réserve des dispositions de l'alinéa
précédent.
L'interrogatoire des prisonniers de guerre aura lieu dans une
langue qu'ils comprennent. »
L'interdiction du recours à certaines méthodes
d'interrogations représente la pierre angulaire du refus des Etats
à accorder le statut de PG à leurs détenus. En effet, les
Etats engagés dans ce qu'ils appellent « la lutte contre terrorisme
» doivent souvent faire recours aux méthodes interdites par le
premier paragraphe de l'article 3 commun et l'article 17 ci-dessus. C'est l'une
des raisons pour
lesquels les Etats utilisent l'argument de la non conciliation
de l'application des dispositions du DIH et la politique de lutte contre le
terrorisme (44), puisque des méthodes comme les traitements
cruels, tortures et supplices peuvent malheureusement donner des
résultats.
Pendant la guerre d'Afghanistan en 2001, les Etats-Unis
adoptèrent un nouveau concept pour désigner les combattant
capturés, à savoir : la notion de « Combattant
illégal » (45).
Ces derniers utilisent cette notion pour désigner les
combattant qui n'ont pas respecté leurs obligations et devoir, et en
conséquent ne peuvent jouir ni de la protection de l'article 3 commun ni
de celle de la IIIe CG.
Le concept de « combattant illégal »
représente tout d'abord un grave danger pour la personne à qui il
est attribué, et il est utilisé comme un moyen pour les Etats de
se dispenser de la moindre application du DIH à l'égard de cette
catégorie de combattant capturé. Du point de vue juridique, cette
notion ne possède aucun fondement valable, si le capturé jouit du
statut de combattant, il sera protégé par la IIIe CG, sinon il
devra bénéficier de la protection de l'article 3 commun, et en
cas de doute sur son statut le deuxième paragraphe de l'article 5 de la
IIIe CG stipule , qu'en cas de doute sur le statut juridique du capturé,
le statut de prisonnier de guerre doit leur être attribué en
attendant qu'un tribunal compétant puisse déterminer leur
statut.
Les dérogations à l'octroi du statut de PG sont
beaucoup plus accentuées lorsqu'il s'agit d'attribuer le statut de PG
à un individu ayant contesté l'autorité de la puissance
colonisatrice dans le cadre d'une guerre de libération
(44) SASSOLI Marco et BOUVIER Antoine A., op.cit, cas n° 57,
Etats-Unis d'Amérique, le président rejette le protocole I, p 798
Genève, 2003.
(45)Laurent Colassis, Personnes privées de
liberté en Irak ; la protection du droit international humanitaire,
CICR, p.4.
nationale ou celle du pouvoir en place. Dans de tels cas, les
gouvernements sont juges et parties.
Le refus des Etats à attribuer le statut de PG au
guérilléro peut s'expliquer, d'une part, par le fait ne pas avoir
à leur appliquer les dispositions de la IIIe convention de
Genève, puisque son application risque d'entraver leur processus de
« lutte contre le terrorisme », et d'autre part pour pouvoir les
neutraliser au sein de l'ordre interne. Chose qui bafoue le droit du
guérillero en tant que sujet du droit international et susceptible de
jouir de garanties et de conditions de jugement équitable.
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