Toute proposition visant à améliorer le
fonctionnement d'un système devrait partir de la projection du but que
souhaite atteindre l'organisation, en l'aidant à préciser
celui-ci, pour choisir en fonction de la situation les leviers les plus
pertinents pour y parvenir.
Une autre démarche, plus courante mais que nous
n'emprunterons pas, consisterait à se focaliser sur la recherche des
causes explicatives des dysfonctionnements, supposés ou réels, au
risque de faire « toujours plus de la même chose »,
ou de considérer que l'objectif à atteindre se réduit
à résoudre le problème identifié au
départ.
Le facteur humain a battu en brèche la relation de
causalité chère à la pensée rationaliste, pour qui
toute reproduction de la cause identifiée reproduit invariablement les
mêmes effets. L'exemple déjà ancien mais toujours
cité de l'expérience de Elton MAYO, avec la Westhern Electric, a
mis en évidence une relation de comportement-finalité, là
où la non réversibilité de la relation de cause à
effet ne pouvait plus expliquer les comportements des ouvriers59(*)
Cette expérience doit nous inciter à la
prudence.
Dans le cas présent, la finalité de
l'organisation est insuffisamment précisée, ce qui rejaillit
nécessairement sur la définition des étapes
intermédiaires. A l'examen, le vocabulaire employé porte les
stigmates de cette perte de précision du sens : « le
RESOF a appuyé, ...a participé... » (sous quelle forme,
pour arriver à quoi ?).
Les termes « consolidation »,
« promouvoir » participent également de ce qui
pourrait être qualifié d'évitement de la précision
pour décrire les activités réalisées et les
processus qui y ont conduit.
Les conséquences de cette
« culture » sont traduites de la même
façon : soucis (récurrent) de
« de-dynamiser » le réseau, « prise en
charge plus affirmée de la capitalisation des
expériences », (recherche de l') « accroissement de
l'implication des collectivités locales dans les activités du
réseau », etc.
Comme le note très justement Dominique BERIOT, dans le
cas où l'on s'appuie sur l'objectif désigné,
l'énergie mobilisée est entièrement tournée vers le
futur, tandis qu(avec l'analyse des causes, l'expérience montre que
cette énergie tend à se dissiper dans la compréhension du
passé, qu'il faut reconstituer sans jamais y parvenir à
l'identique, pour finir par s'y perdre.
Notre préférence va bien sûr, on l'aura
compris, à la logique systémique, qui nous paraît plus
adaptée à la complexité du champ d'étude que la
logique analytique, qui va délier des éléments qui ne font
sens que par les relations qui les unissent.
Ce choix nous permet maintenant de revenir à la
question de départ : un fonctionnement
perfectible ?
Un recadrage nous paraît nécessaire pour
ambitionner une vision partagée du rôle du réseau, et de
ses objectifs.
Décliner en termes plus explicites pour être
opérationnels les finalités et objectifs actuels, très
généraux, passe par la formulation de résultats attendus
et bien évidemment d'indicateurs mesurables.
Cette remise à plat (un effort collectif de
clarification) permettrait à moyen terme de rendre plus visibles les
avancées dont le RESOF pourrait se prévaloir, et valoriserait les
étapes intermédiaires dans la mesure où le chemin serait
mieux balisé ; nous y voyons là une source puissante de
satisfaction pour ses membres. Or, la satisfaction entretient la motivation, et
la motivation est la clé de l'engagement des acteurs.
Conduite avec doigté et toute la qualité
d'écoute requise, cette entreprise de clarification des objectifs ne
devrait pas mettre en danger l'actuel consensus, obtenu presque par
défaut tant ses bases paraissent floues. Une approche plus
concrète pourrait au contraire « piquer » la
curiosité et redonner du tonus à une organisation qui s'est
déjà essoufflée à plusieurs reprises.
Davantage de concret, ce peut être par exemple tester de
nouvelles approches, ou produire des références :
- n Flux de formation, devenir des formés
- n S'intéresser aux déséquilibres dans l'accès
à la formation (géographique, genre) :
l'équité.
- n Relevé des coûts pratiqués par les opérateurs
et les différents dispositifs
- n Repérage et documentation en matière d'innovation
localisée (construction socialisée de la demande, modes
d'apprentissage, nouveaux thèmes ou processus de suivi
novateur).
Plus de concret ne signifie pas nécessairement se
lancer dans la mise en oeuvre et la gestion de sessions ou plans de formation,
avec l'objectif premier de satisfaire la demande de formation des ruraux ;
dans le champ opérationnel, les acteurs en lice sont pléthores et
les actions de formation, sous leur forme la plus classique, y sont
nombreuses.
Un acteur supplémentaire n'aurait que peu d'incidences
sur la configuration du paysage, et un tel positionnement dans un secteur
hautement concurrentiel pourrait être mal perçu, jusqu'à
hypothéquer les interactions recherchées.