cONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
Le concept de bonne gouvernance a pris toute sa place dans
l'élaboration et le suivi des politiques économiques, surtout
dans les PED et une omission de la gouvernance aboutit à une
représentation erronée de la situation macroéconomique et
des options qui s'ouvrent aux responsables publics. La politique
macroéconomique d'un pays se doit se mener en fonction de la
qualité de sa gouvernance. Les recommandations des experts en
matière de politique économique doivent tenir compte de
l'état de la gouvernance du pays considéré.
Nous avons voulu examiner le rôle de la mauvaise
gouvernance dans la faible efficience des dépenses militaires en
Afrique. A travers des tests de corrélation entre l'efficience et la
gouvernance dans la période 1989-2004, nos résultats montrent que
les indicateurs de gouvernance ont un impact négatif sur le niveau des
dépenses militaires et un impact positif sur la qualité de ces
dépenses.
La gouvernance affecte l'efficacité de la politique
économique : les réformes institutionnelles et juridiques sont
une arme de politique économique et doivent donc être
envisagées comme telles.
CONCLUSION GENERALE
La notion de sécurité a profondément
évolué depuis la fin des années 1980. La
sécurité ne peut plus être uniquement envisagée sous
l'angle national. On constate, en effet, que de nombreuses crises internes
résultent plus ou moins directement d'un conflit éprouvant un
pays frontalier ou bien sont alimentées par des éléments
nationaux ou étrangers séjournant dans des pays tiers.
L'obligation d'assurer la sécurité des populations est le
défi majeur posé aux Etats. Leur stabilité dépend
de leur capacité à assurer la sécurité des biens et
des personnes. Cette sécurité est non seulement physique mais
également juridique, judiciaire et économique. La
sécurité, enjeu de pouvoir et de survie, peut être
considérée, à ce titre, comme un bien public mondial.
Dans un contexte africain caractérisé par une
instabilité chronique pouvant être déclinée aussi
bien en termes d'instabilités politique, économique et sociale,
il nous a semblé que les dépenses militaires devraient avoir
outre l'impact sur la souveraineté et la sécurité, des
externalités positives sur l'économie à travers la
croissance, l'investissement et l'emploi. L'objectif de ce mémoire
était alors d'apprécier l'efficience économique des
dépenses militaires en Afrique Sub-saharienne et de dégager les
facteurs qui permettraient d'améliorer cette efficience. Afin de
réaliser ce travail, nous avons calculé, dans une première
partie, le score d'efficience des dépenses militaires de 30 pays
africains durant la période 1988-2004. Puis dans une deuxième
partie, nous avons testé la relation entre la gouvernance et
l'efficience.
Dans la première partie, tout d'abord il a
été question de présenter l'analyse de présenter
l'analyse économique de la défense, discipline qui permet de
mieux comprendre le volet économique du secteur de la défense, et
ceci en tenant compte des différents courants de pensée
particuliers qu'on y retrouve. L'analyse économique de la défense
aide à dégager les secteurs de l'économie d'un pays
où les dépenses militaires ont des effets directs ou indirects.
Il s'agit entre autres de la croissance économique, de l'investissement,
de l'emploi et de l'inflation. Par la suite, à partir de ces secteurs
que nous avons fixé comme objectifs économiques à
atteindre au moyen des dépenses militaires, il a été
possible de calculer des scores d'efficience de ces dépenses militaires
au moyen de la méthode d'enveloppement des données (DEA),
technique non paramétrique ayant l'avantage de ne pas exiger de
spécification explicite de la relation liant l'input à l'output.
Nous obtenons comme résultat que les pays africains sont en moyenne
inefficients entre 1988 et 2004, ce qui confirme notre hypothèse de
départ. Ce qui amène à conclure que les dépenses
militaires n'exercent qu'un très faible impact sur l'économie en
Afrique. Ce résultat rejoint celui de Tanzi et Schuknecht (1997) et
Romdhane et Neticha (2006) qui montrent que les dépenses publiques des
pays africains sont très peu efficientes. Toutefois, il existe quelques
pays qui sont très efficients et il s'est avéré
intéressant de déterminer les facteurs particuliers, à
l'instar de la gouvernance, qui expliquent cette efficience. Cette recherche a
fait l'objet de notre deuxième partie.
Dans la deuxième partie, nous avons dans un premier
temps exploré la littérature économique d'où se
dégage l'idée force que la bonne gouvernance a des effets
positifs sur l'efficience des dépenses publiques. En effet, toute
dépense allouée et utilisée de manière efficace ne
peut qu'avoir un impact quantitatif et qualitatif important sur les
économies africaines. Dès lors, dans un second temps, il s'est
agit de trouver une mesure de la gouvernance et de tester le lien entre
celle-ci et l'efficience des dépenses militaires. A partir des
indicateurs de gouvernance de Kaufmann et al (2007), nous avons calculé
un indice synthétique de gouvernance à l'aide de l'Analyse en
Composantes Principales (ACP).
Nous avons alors procédé à une analyse de
rang en comparant le rang de chaque pays par rapport à l'efficience des
dépenses militaires d'une part, et à la gouvernance d'autre part.
nous avons obtenu des résultats assez conformes à nos attentes,
quoique nous ayons trouvé quelques cas atypiques. Dans le but de
confirmer nos hypothèses, nous avons procédé à un
test de corrélation à la Pearson. Les signes que nous escomptions
sont bien présents dans les résultats obtenus, à savoir
que la gouvernance permet d'améliorer l'efficience des dépenses
militaires. De la même manière, chacun des six indicateurs de
gouvernance de Kaufmann et al (2007) a un effet positif sur l'efficience.
Néanmoins, la corrélation entre l'efficience et les variables de
gouvernance est assez faible et dans certains cas non-significative. Ce qui
peut suggérer que l'efficience des dépenses militaires ne
dépend pas que de la qualité de la gouvernance.
Dans le but d'améliorer les recherches futures, le
calcul de l'efficience des dépenses militaires tiendra compte des
objectifs stratégiques de ces dépenses, notamment des facteurs
tels que la stabilité politique, les menaces extérieures à
la sécurité, entre autres. Par ailleurs, l'effet
économique des dépenses militaires étant assez indirect en
Afrique, notamment du fait que les pays africains sont pour la plupart
uniquement demandeurs de services militaires. L'objectif n'est donc pas le
même que pour les pays développés, qui sont producteurs et
ont des objectifs de conquête de parts de marché, ce qui influe
directement sur l'économie. Par ailleurs, les pays africains
étant presque exclusivement demandeurs de services militaires, il serait
intéressant d'étudier les effets des dépenses militaires
sur l'économie à travers la balance commerciale, la masse
monétaire et la dette extérieure de ces pays.
D'autres méthodes d'investigation
économétrique peuvent être mobilisées pour
appréhender l'impact de la gouvernance sur les performances
macroéconomiques. Il nous semble en particulier que les méthodes
de l'économétrie spatiale sont susceptibles d'apporter des
résultats intéressants. Il est en effet probable que la
gouvernance des autres pays affecte plus ou moins fortement les performances
d'un pays donné. Cependant, les indicateurs de gouvernance
utilisés ici sont à considérer avec précaution,
surtout pour les comparaisons internationales (Boutaleb, 2004), à cause
notamment des écart-types trop grands entre les variables. Dans le
même temps, ces mesures de gouvernance ne sont pas objectives, elles
reposent sur des appréciations et des évaluations subjectives
d'experts nationaux ou des évaluations de la population lors
d'enquêtes réalisées par des organisations internationales
et des organisations non gouvernementales (Edison, 2003).
En définitive, il convient de définir les
besoins de sécurité et les moyens budgétaires et
industriels alloués pour les satisfaire. Plus simplement,
l'économie des systèmes de défense revient à
analyser les choix publics qui président à la meilleure
allocation des ressources économiques disponibles pour un État.
En effet, l'action du décideur public trouve sa justification dans le
niveau de défense à « fournir » et à «
produire ». Par delà cette dichotomie classique dans la
théorie des choix économiques, il est important de distinguer ce
qui relève d'une action d'économie politique d'une politique
économique. Il s'agit de comprendre comment un pays définit son
besoin de défense au plan national et régional,
c'est-à-dire en opérant un arbitrage entre dépenses
publiques. Il convient donc de repenser l'utilisation des deniers publics en
recadrant les choix d'équipements et la manière dont les forces
armées sont équipées pour à la fois mieux
répondre aux menaces et missions des forces et améliorer
l'efficacité de la dépense en termes d'efficacité
productive et de maîtrise de la dépense.
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