3.2 La mise en place des premiers réseaux :
Il est donc nécessaire de réorganiser la
société autour de toutes les techniques qui servent à
traiter, conserver, transporter l'information, et de mettre sous forme
d'information tout ce qui peut l'être. Dès qu'un nouveau
dispositif est inventé il est immédiatement salué comme
une étape indispensable à la réalisation du nouveau monde.
C'est John Von Neumann en 1945 qui signe les plans d'une nouvelle machine apte
à imiter et à reproduire les caractéristiques du cerveau
humain, inventant ainsi les principes de l'ordinateur moderne conçu sur
la base d'une représentation du cerveau humain lui-même
imaginé sous l'angle de la communication des éléments qui
le composent.
"Vers la machine à gouverner. Une nouvelle science : la
cybernétique". Tel est le titre de l'article paru dans Le Monde fin
décembre 1948, écrit par le père dominicain Dominique
Dubarle. L'ordinateur y est décrit comme une machine appelée
à être de plus en plus grande, qui fonctionnerait à
l'échelle mondiale et tout à fait analogue au cerveau humain.
"Les hommes politiques et, plus généralement, le système
de la politique sont incapables de prendre en charge la gestion des
sociétés au niveau mondial. Le grand intérêt des
nouvelles machines est de laisser entrevoir la possibilité d'une machine
à gouverner rationnelle, qui conduirait éventuellement à
une unification au niveau planétaire, vers un gouvernement unique de la
planète".
3.3 L'influence de la cybernétique :
A partir de la fin des années cinquante on assiste
à un véritable flamboiement de la cybernétique, principal
vecteur du paradigme informationnel. Atteignant toutes les sciences,
fondamentales comme appliquées, elle faisait alors l'objet d'une vaste
campagne de vulgarisation jusque dans le grand public.
L'un de ses principaux supports sera le thème du cerveau
artificiel, des animaux électroniques et plus tard de l'intelligence
artificielle, ce thème servant à promouvoir une vision
informationnelle de l'homme. Se développe également un discours
prospectif qui met en scène la société de demain comme
entièrement structurée par les nouveaux dispositifs
techniques.
En Union Soviétique la cybernétique devient le
moyen idéal du paradis rêvé sur terre par bien des
communistes.
"L'abolition du chef, de l'autorité, du dogme et des
partis (permettra l'avènement) des mécanismes auto-adaptatifs,
auto-évolutifs".
Mais sans doute en partie parce que trop de promesses ont
été faites sans être jamais tenues, elle finit par tomber
en clandestinité, accusée même de jouer un rôle
central dans la transformation de la science et la technique comme
idéologie (Jürgen Habermas).
Réhabilitée dans les années soixante elle
gagne les sciences humaines et sociales.
Son influence avec le paradigme informationnel sur la biologie
est également très forte. La notion d'information irrigue
conceptuellement la découverte du code génétique au
début des années cinquante. Tout un lexique conceptuel est ainsi
importé jusqu'à la notion de programme, et la "double
hélice" est bien un regard informationnel porté jusqu'au coeur du
vivant. Le champ, immense, ouvert par les manipulations
génétiques trouve son principal soubassement dans l'idée
cybernétique d'un homme nouveau que l'on détacherait de sa nature
initiale pour le remodeler à loisir.
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