VIII. Pays en retard de développement, communication,
médias à base de réseau :
1 Un exemple, l'Afrique tisse
une toile disparate :
Rappelons tout d'abord que prés du tiers de
l'humanité vit avec moins de 1 dollar par jour (source association ATD
Quart Monde), et que en France la couverture maladie universelle concernerait
actuellement environ 5 millions de personnes (journée mondiale du refus
de la misère oct 2001).
La vague d'expansion des réseaux a atteint l'Afrique.
Là-bas, certains pays tentent de prendre ce train en marche, mais la
disparité entre les différents Etats s'aggrave. On reste loin de
l'utilisation individuelle et les enjeux actuels sont plutôt
l'accès au forum international et l'accélération des
communications pour dynamiser les économies.
La situation se retrouve très diversifiée. Certains
pays comme l'Afrique de Sud, le Maroc ou le Sénégal ont pris une
réelle conscience des enjeux. D'autres pays sont beaucoup plus en
retard, et si tous les pays africains sont aujourd'hui connectés, il
s'agit encore parfois d'une seule liaison à faible débit pour
l'ensemble du pays, et, dans la plupart des cas, le débit des liaisons
internationales par satellite est relativement très faible.
En proportion, pour dix mille postes connectés dans les
pays industrialisés, il en existe un seul dans les pays en voie de
développement. De plus, jusqu'à présent les initiatives
venaient des pays du nord, et si elles ont eu des effets positifs, elles ont eu
aussi les inconvénients des modèles importés :
l'intégration locale, le transfert des technologies associées
n'ont qu'insuffisamment été pris en compte.
A ce jour encore et faute de noeuds d'échanges
régionaux, les communications entre les pays africains transitent
souvent par les réseaux des opérateurs du Nord. Un message
envoyé du Sénégal vers la Mauritanie passe ainsi par la
France ou même par les Etats-Unis. Cependant, une phase nouvelle
d'appropriation des technologies avec une floraison de fournisseurs
d'accès dans la plupart des pays du sud semble avoir pris son essor.
Les infrastructures terrestres et le coût de certains
matériels restent sans doute des handicaps majeurs. Il faut se rappeler
qu'en moyenne, en Afrique, on compte moins de une ligne
téléphonique pour cent habitants, alors que dans les pays
développés on en dispose généralement de
trente-deux.
Certains analystes affirment que ce retard peut au contraire
s'avérer être un atout. En effet, les technologies sans fil
permettent de déployer un réseau moderne et bien adapté
à l'Afrique et à ses différents pays, ceci à un
coût bien moindre que celui des infrastructures
précédentes, ce qui serait vraiment une chance pour se placer
dans l'espace des échanges internationaux. Malheureusement bien peu des
pays de ce continent s'en saisiraient jusqu'à présent.
Les problèmes rencontrés sont multiples.
Tout d'abord, dans la plupart des Etats les produits
importés sont fortement taxés. Toute proportion gardée,
l'équipement d'un malien est probablement vingt fois plus onéreux
que celui d'un français et combien de fois moins performant.
Deuxièmement, les législations sont parfois
complètement inadaptées, voire inexistantes, et un monopole
strict est occupé par l'opérateur historique ; cette situation
s'avère le plus souvent particulièrement bloquante, d'autant que,
sans concurrent, il n'innove pas.
Troisièmement, on note partout, sauf exception notoire,
l'absence de formations supérieures en technologies de l'information, ce
qui, entre autres, semble être à la source d'une fuite des
cerveaux vers les pays du Nord, aussi parce que les perspectives
financières y paraissent plus faciles et meilleures.
L'Afrique souffre donc d'un réel déficit
d'expertise pourtant nécessaire à l'intégration des
nouvelles technologies de l'information et de la communication dans les
contextes économiques locaux, et à la création
d'applications adaptées.
Quatrièmement, les régimes politiques sont plus ou
moins enclins à la libre circulation des informations. Des pays comme le
Maroc, le Kenya et le Sénégal s'ouvrent ; d'autres tels
l'Algérie, la Lybie ou le Niger reste particulièrement
fermés voire autoritaires dans leur régime. Le
Sénégal, par exemple, a supprimé les taxes sur les
matériels informatiques importés et développe son
infrastructure de télécommunications tout en offrant des
formations de bon niveau à ses étudiants. A Dakar a même
été envisagée une structure d'assemblage d'ordinateur
personnel.
Actuellement encore les enjeux sont d'adapter les interfaces et
les services au contexte africain, afin de favoriser l'accès au
particulier qui reste jusqu'ici plutôt rare. Il est nécessaire de
développer l'usage des messageries électroniques utilisant
plutôt l'oral que l'écrit, parce qu'un fort taux d'usagers
potentiels est peu alphabétisé. Il faut également
multiplier les télé centres qui sont des structures
communautaires de proximité qui ont fait leurs preuves dans l'usage du
téléphone et du fax, en leur permettant d'offrir services
Internet et compétences.
A plus court terme c'est le fonctionnement de chaque pays qui
pourrait changer, l'objectif étant de gagner du temps dans les
communications, car la lenteur actuelle des échanges, elle-même
due au manque d'infrastructures telles que routes et postes, paralyse en partie
le système tout en le rendant peu compétitif. Réduire les
délais est crucial pour certains secteurs de l'économie. Par
exemple, pour la Compagnie Malienne du textile. C'est la première
entreprise de son pays, et elle déploie Internet dans ses divers centres
afin d'optimiser sa gestion et le suivi des récoltes.
C'est un secteur où la demande est très forte, et
pour lequel l'Afrique représente un marché pour des services
Internet adaptés.
Il est nécessaire également de créer, un
organisme africain, comme il en existe ailleurs dans le monde, capable de
fédérer les activités Internet au niveau du continent
ainsi que d'informer et de former les acteurs locaux.
Il est hélas évident qu'Internet n'est pas
l'entité la mieux distribuée du monde et sur le plan mondial, et
que les Etats-Unis continuent de dominer le scène mondiale avec la
moitié environ des utilisateurs et surtout un mainmise importante sur la
recherche et les développements.
Le ralentissement de la croissance suivi d'un début de
récession dans ce pays reflète probablement l'approche du point
d'inflexion que rencontre tout processus naturel de croissance, là
où les contraintes dues à la croissance deviennent significatives
par rapport aux facteurs la favorisant.
Dans le cas des Etats-Unis, la croissance doit maintenant si
possible s'effectuer dans des couches moins favorisées de la population
américaine, une situation aidée en partie, mais pas
complètement, par la baisse du prix des ordinateurs et de la bande
passante.
L'étude quantitative de la Toile révèle par
ailleurs un phénomène assez extraordinaire : après plus de
six ans, elle demeure largement ouverte à tous et même largement
gratuite.
Le monde francophone n'y constitue qu'un petit îlot et il
faudrait peut-être se poser bien des questions à cet égard.
En effet, la France se compare plus à l'Europe du Sud qu'à celle
du Nord, et le Québec ne doit sa place forte en francophonie qu'à
sa localisation nord-américaine. En revanche, il ne se compare pas
favorablement, tant s'en faut, au reste du Canada et aux Etats-Unis. Faut-il y
voir le signe de quelque tension entre les civilisations francophones et le
Réseau ?
Dans certains pays, l'accès dit "universel" renvoie en
fait à une accessibilité partout sur le terrain, à
condition de répondre aux conditions du marché. Dans les pays
riches, les politiques d'accès se fraient un chemin ambigu entre les
tyrannies du marché et le service public. D'où ces
stratégies empruntées au modèle du transport en commun.
Celui-ci est censé corriger les inégalités
engendrées par une possession inégale des voitures. Des bornes
gratuites d'accès sont ainsi placées à la disposition du
public, souvent dans les bibliothèques, parfois plutôt dans des
écoles. Par ailleurs, l'inégalité devant la technologie
n'est pas née avec l'Internet ou les réseaux : la moitié
de l'humanité au moins n'a jamais eu l'occasion de donner un seul coup
de téléphone, encore moins de prendre l'avion. Il faut observer également que les causes
majeures de la mauvaise santé de la population échappent presque
totalement au pouvoir des scientifiques, plutôt liées qu'elles
sont aux conditions de vie, à la pauvreté, aux
inégalités devant les soins, à l'archaïsme des
moeurs.
Concernant les nouvelles technologies dans ces zones du monde, il
faut une approche plus pragmatique qui mettent en évidence le manque de
personnel qualifié et de financement, les carences des infrastructures
et l'absence d'un environnement législatif cohérent, et qui
cherche des solutions dans chacun des cas. L`impact des ntic, qui restent le
chaînon principal du processus de la mondialisation, se mesure aussi par
la création de milliers de petits emplois techniques souvent
précaires, aux formations improvisées, certes, mais au fort
potentiel. Il se peut même que se trouve ainsi la possibilité
d `engendrer un retournement profond des économies
concernées.
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