La gestion des risques de taux d'intérêt et de change par l'approche ALM: Le cas de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD)par Arouna Soro CESAG - Master en Banque et Finance 2006 |
2.2.2/- Nécessité de la gestion du risqueLe management ou gestion du risque est « l'ensemble des outils, des techniques et des dispositifs organisationnels qui permettent de mesurer et de contrôler les risques25(*) ». La réglementation prudentielle, qu'elle soit nationale ou internationale, impose aux banques et établissements financiers une meilleure gestion des risques afin de préserver la stabilité du système bancaire et financier. Mais, il importe également pour ces établissements de consacrer une bonne partie de leurs tâches à la question de la gestion des risques encourus. En effet, « jusqu'aux années 60, aux Etats-Unis, le manque de compétition et la réglementation permettaient aux banques de gérer leur bilan suivant la règle du 3-6-3 : payer 3% pour les dépôts, consentir des prêts à 6% et partir pour le golf à 3 heures de l'après midi »26(*). Mais la volatilité des taux d'intérêt des années 70 et la déréglementation financière des années 80 ont eu raison de cette règle en causant la faillite des Saving and Loans. On comprend alors que l'ALM se soit alors développée au début des années 90, c'est-à-dire à l'occasion de ce problème de faillite des caisses d'épargnes américaines. Récemment, une étude réalisée en 2004 par la Banque des Règlements Internationaux et résumée dans le tableau ci-dessous, a prouvé que les principales causes des crises bancaires récentes dans les économies matures (pays du G10) sont à rechercher dans la mauvaise gestion du risque de crédit (85%), du risque de marché (31%) et du risque opérationnel (38%). Tableau 2 : Causes majeures des crises bancaires récentes dans les économies matures27(*)
Fort de ces chiffres, l'on peut déduire que ne pas gérer son risque ou mal le gérer, c'est manquer d'un outil puissant d'aide à la décision. C'est également mettre en péril la qualité de ses résultats, sa solvabilité et sa pérennité. Une saine gestion des risques permet aux banques : - de mieux comparer et contrôler entre elles des entités telles que les centres de responsabilité, les produits ou activités et les clients par intégration du risque au reporting interne des performances28(*). - de mieux définir leurs politiques de mobilisation de ressources - d'affiner leurs politiques commerciales en incorporant aux taux clients le coût des risques pris lors de leurs engagements - de bien élaborer les éventuelles politiques correctives. C'est par exemple le cas lorsque l'on réoriente les portefeuilles d'engagement vers les opportunités les plus rentables au regard de leur profil de risque29(*). - de maximiser la valeur des investissements puis celle de l'établissement et mieux rémunérer les actionnaires à travers une plus grande création de valeur. En effet, le principe de financement stipule que la combinaison de fonds propres et de dette choisie pour financer des investissements devrait maximiser la valeur des investissements effectués30(*). S'il est avéré que « le risque augmente de façon exponentielle avec le rythme de l'évolution, mais que les banquiers sont lents à corriger leur perception du risque31(*) », alors pour une banque, ne pas gérer parfaitement son risque, c'est courir également le risque de se laisser distancer, avec le temps, par la concurrence lorsque les turbulences défavorables de l'environnement se réalisent. C'est pourquoi « une gestion des risques n'a pas de sens indépendamment des performances attendues et son objectif est d'optimiser le couple risque/rentabilité »32(*) car la gestion des risques et la rentabilité vont de pair. Deux (2) concepts forts utilisés par les banquiers sont à cet effet apparus dans le cadre de la gestion des risques : la valeur exposée au risque ou Value-at-Risk (VAR) et le Risque Maximum Tolérable (RMT)33(*). Le premier concept est relatif aux éléments du bilan et du hors-bilan concernés par un type de risque donné. Le second, quant à lui, considère la part des fonds propres, des bénéfices futurs et des garanties qu'une banque est prête à perdre si ce risque venait à se réaliser. Le lien entre ces deux (2) notions et les risques encourus par un établissement de crédit est schématisé ci après : Figure 3 : Risques bancaires, VaR et RMT Risques Politiques - Risques de management - Risques de stratégie - Risques éthiques - Risques extérieurs Risques bancaires et parabancaires - Risques économiques - Risques de contrepartie - Risques de marché - Risques sur autres activités parabancaires Risques Techniques - Risques opérationnels - Risques environnementaux - Risques sur systèmes d'information - Risques autres Choix du niveau de risque acceptable Fonds propres Bénéfices Garanties Valeur exposée au risque RMT Ce schéma34(*) montre bien que les risques, qu'ils soient politiques, techniques, bancaires et parabancaires, font supporter des coûts aux établissements de crédit du fait de l'exposition des éléments de bilan et de hors bilan à ces risques. C'est au regard de la valeur exposée au risque de son bilan et de son hors bilan qu'une banque doit choisir un niveau de risque acceptable, ce seuil acceptable découlant de la fraction des fonds propres, des bénéfices et des garanties qu'elle sacrifierait si le ou les risques advenaient. * 25 Le Cabinet Afrique Consulting Group, op. cité p.103. * 26 Denis Dupré et Mohamed El Babsiri, op.cité, p.17. * 27 Traduit de Deloitte : « Financial Services Update », April 2005, p. 5 (www.deloitte.com) * 28 Joël Bessis, « Gestion des Risques et Gestion Actif/Passif des Banques », Dalloz, Paris, 1995, p.37 * 29 BOAD, Gestion Actif/Passif, Cahier n° 1, Les Procédures, Juillet 2001, p.19 * 30 Aswath Damodaran, op. cité, p.4 * 31 Hennie van Greuning et Sonja Brajovic Bratanovic : « Analyse et Gestion du Risque Bancaire : Un Cadre de Référence pour l'Evaluation de la Gouvernance d'Entreprise et du Risque Financier », 1ère éd., Editions ESKA, Paris, 2004, p.9 * 32 Joël Bessis, op. cité, p.24 * 33 Gilles Morisson : « Méthodes d'Analyse Financière des Etablissements de Crédit », Secrétariat Général de la Commission Bancaire (SGCB) / Formation Professionnelle et Assistance Technique, 2001, p. 35 * 34 Gilles Morisson, op. cité, p. 36 |
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