3.3. Le fonctionnement de l'Etat et le rôle primordial
de l'administration.
En droit, seul le gouvernement agit, il est le seul ressort
de l'action, même s'il peut être soumis à la pression de
l'opinion et agir sous cette contrainte.
Cependant le gouvernement est en réalité
composé d'un petit nombre de personnes qui incarnent le pouvoir et le
concrétisent par des actes, dans les limites de la loi et de la
volonté du peuple qui s'exprime dans la majorité.
Dans l'Etat moderne, l'action du gouvernement pour qu'elle
soit efficace en termes de résultats, doit recueillir les
données, analyser les tendances, discerner les actions à
accomplir ainsi que l'ordre dans lequel elles doivent être
accomplies,...
Toutes ces procédures nécessitent des
compétences techniques et intellectuelles que ni le gouvernement ni le
peuple ne possèdent. C'est pourquoi l'Etat, pour suppléer aux
défaillances du gouvernement et de la masse, organise et s'appuie sur
l'administration. Le rôle principal de l'administration est de renseigner
le gouvernement pour qu'il puisse délibérer et décider.
Une administration efficace est le socle sur lequel se fonde l'action du
gouvernement. Elle est par ailleurs, un organe efficace d'exécution des
ordres du gouvernement.
Pour que cette efficacité soit garantie,
l'administration doit, tout en servant le gouvernement, garder toute son
autonomie. Cette autonomie se justifie par le fait que les fonctionnaires sont
au service de l'Etat et du gouvernement et non au service des gouvernants. Aux
yeux des citoyens, c'est l'administration - à travers ses
représentants : police, services de la mairie,...-qui incarne la
loi et rend visible l'effectivité du monopole de la violence de l'Etat.
Mais l'on peut se demander si cette description est valable partout.
En effet, historiquement, l'Etat ne s'est pas constitué
partout de la même manière. Aujourd'hui encore subsistent des
différences dans l'organisation du pouvoir, même si, en
définitive, le but (du moins avoué) de l'Etat reste le même
partout : la survie de la communauté historique à travers
des structures qui garantissent le bien - être et la
sécurité à l'intérieur du groupe comme à
l'extérieur. Il y' a cependant des risques dans l'exercice des fonctions
qui peuvent naître du rôle joué par les fonctionnaires de
l'administration, risques liés aussi bien à l'autonomie et
à la compétence ainsi acquises par ceux qui y travaillent depuis
longtemps qu'à la volonté de l'Etat de contrôler
l'administration, en en faisant un simple exécutant. Pour garder la
juste mesure, il y a des précautions à prendre.
3.3.1. Les écueils à éviter par
l'administration.
Toute administration est menacée de sclérose et
de formalisme quand elle échappe au contrôle du gouvernement.
D'autre part, un trop grand pouvoir de l'Etat, en l'occurrence, des
gouvernants c'est - à - dire, de ceux qui détiennent
l'effectivité du pouvoir, peut étouffer l'administration et en
faire un simple exécutant mécanique des ordres qu'elle ne saurait
approuver.
Par contre, une administration dont le pouvoir et
l'interventionnisme seraient trop grands risquerait de briser les
équilibres nécessaires dans les structures étatiques et
dans la communauté toute entière.
En effet, l'administration qui outrepasse son rôle de
conscience rationnelle ou qui ne se réduirait, pour ainsi dire,
qu'à cette unique dimension, devient allergique à toute critique
qu'elle considère comme expression de l'arbitraire individuel et
contestataire, toute résistance devenant pour elle un défi
qu'elle doit vaincre et écraser. Pour cette administration là, le
problème est résolu lorsque son expression est supprimée.
Ce pouvoir ainsi acquis par l'administration, résulte du fait que, dans
les lieux où l'administration possède une longue tradition -
caractérisée par une longue stabilité et une permanence
ordonnée dans l'organisation, la formation, et la succession des
animateurs - les fonctionnaires acquièrent souvent plus
d'expériences et de compétences que les animateurs du
gouvernement. Ceux-ci se révèlent ainsi moins qualifiés
que ceux qui les servent et les renseignent. Il peut arriver que les
rôles s'en trouvent inversés et que ce soit le gouvernement qui
soit le serviteur de l'administration, ne jouant qu'un rôle de figurant
devant les citoyens de qui il est censé avoir reçu mandat
d'exercer l'effectivité du pouvoir.
Bien que les mêmes problèmes se rencontrent
pratiquement partout, ils s'expriment différemment selon les formes de
l'Etat.
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