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Reconnaissance et conflit au sein des presbyeriums:une lecture a partir de la lutte pour la reconnaissance d'Axel Honneth


par Charles Dieudonné TOMB TOMB
Université de Lorraine-Metz - Master II en Sciences Humaines et Sociales, mention Théologie Catholique 2022
  

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Conclusion générale

Au terme de ce travail qui a été consacré principalement à la thématique de la reconnaissance chez Axel Honneth, notre objectif a été d'évaluer le passage de la carence ou du déni de reconnaissance à la reconnaissance mutuelle et authentique au sein des presbyteriums. Nous sommes partis de la critique anti-aristotélicienne formulée par Hegel à l'endroit de Hobbes et de Machiavel pour qui les luttes sociales sont interprétées à des motifs de conservation, de survie, d'existence, « d'auto-préservation individuelle » et de recherche d'intérêts matériels. Mais, Axel Honneth, à la suite de Hegel, vient en effet changer cette manière de penser à partir du thème hégélien de « l'idée première » et donne aux conflits moraux une signification ou une interprétation « à teneur normative ». Ce faisant, nous nous sommes intéressés à Axel Honneth et à sa théorie de la lutte pour la reconnaissance mutuelle. C'est ce qui a constitué la clé de voûte de notre recherche sur la reconnaissance et les conflits

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au sein des presbyteriums au à partir de la pensée d'Axel Honneth et plus précisément de son chef-d'oeuvre : La Lutte pour la reconnaissance.

Notre hypothèse de recherche a consisté à savoir pourquoi l'absence de l'harmonie, de la collusion, de la reconnaissance entre les membres d'un même et seul presbyterium surtout là où la reconnaissance devrait mieux se vivre qu'ailleurs. Pour répondre à cette préoccupation, nous avons articulé notre travail en trois chapitres.

D'abord, dans le premier chapitre, d'une part, nous avons tenté de clarifier la notion même de reconnaissance. Avec Axel Honneth, nous avons retenu cette définition qui nous semble être le résumé de ce travail: La reconnaissance est la limitation du désir égocentrique de chacun au profit de l'Autre. Pour nous, la reconnaissance est un mouvement réciproque qui se noue entre le reconnaissant et le reconnu, où chaque partenaire d'interaction cherche à se « décentrer » sur lui-même au profit de l'autre. C'est dans la relation de reconnaissance que les êtres humains apprennent à se voir et à se confirmer mutuellement comme des sujets autonomes et individualisés. Toutefois, « se reconnaître réciproquement ne signifie pas seulement aller à la rencontre de quelqu'un avec une attitude déterminée, confirmatrice, mais cela signifie aussi et d'abord se comporter par rapport à l'autre de la manière déterminée qui est exigée par la forme correspondante de reconnaissance »291. D'Axel Honneth, il en découle qu'une manière déterminée « de traiter réciproquement »292ne signifie pas de poser des actes indépendants. Cela veut dire qu'il existe une pluralité « d'actions qui sont, chacune, caractérisées par leur commune propriété consistant à pouvoir articuler une forme déterminée de la reconnaissance réciproque »293. D'autre part, nous avons mis en exergue les formes d'interaction sociale ou de relations de reconnaissance réciproques qui se rapportent aux différents types de rapports positifs que les sujets peuvent entretenir avec eux-mêmes. D'après Axel Honneth, il existe trois formes de relations de reconnaissance : La reconnaissance amoureuse dont le noyau structurel est l'amour qui donne la voie d'accès à la confiance en soi. La reconnaissance juridique ouvre la voie au respect de soi et permet au sujet de se considérer comme une personne égale en droits à tous les autres membres de la communauté. La reconnaissance culturelle ou celle de la « communauté des valeurs » portent sur l'appréciation positive des capacités pratiques des

291 Honneth, A., Les pathologies de la liberté. Une réactualisation de la philosophie du droit de Hegel, trad. française par Franck Fischbach, op.cit., p. 89.

292 Ibid.

293 Ibid., p. 89-90.

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sujets ainsi que sur leurs qualités propres. La solidarité est à la base de cette forme de reconnaissance et consolide l'estime de soi entre les sujets qui partagent les mêmes fins.

Ensuite, dans le second chapitre, notre intérêt a porté essentiellement sur les expériences négatives qui portent atteinte à l'intégrité physique, sociale et à la dignité de la personne humaine. C'est ce qu'Axel Honneth appelle « mépris » ou « offense ». Le mépris est la négation ou le manque de reconnaissance. Il désigne aussi le refus de décentrement de soi vers l'autre. A partir des modalités de reconnaissance avec ses aspects de la relation pratique à soi-même, Axel Honneth dégage trois figures du mépris ou du déni de reconnaissance : La première figure du mépris est liée à la violence physique, la seconde au déni du droit et la troisième figure à la mésestime. S'appuyant sur la relation pratique à soi, nous avons déduit à partir de la typologie des figures de mépris identifiée par Honneth les causes qui sont à l'origine des conflits ou du déni de reconnaissance au sein des presbyteriums. Nous avons entre autres la dissolution de la confiance en soi, la perte du respect de soi et la mésestime ou la perte de l'estime de soi. A ces trois dénis de reconnaissance, nous en avons ajouté un autre que Guillaume Le Blanc appellent les dénis de propriétés sociales qui concernent les capabilités de base et les capacités éthiques d'une vie qui « se voit se mutiler ». C'est-à-dire une vie dont on ne reconnaît pas la valeur, le droit et la dignité. Il s'agit là d'une vie disqualifiée ou « rendue invisible ». Une personne qui fait l'expérience d'une telle vie a socialement le sentiment d'être inutile dans la société. Dans les presbyteriums, ceux qui font de telles expériences ont aussi le sentiment de perdre leur dignité et leur intégrité, d'être invisibles, inutiles et voire placés aux calendes grecques.

S'il est vrai que le seul désir du déni de reconnaissance est le désir de reconnaissance, toute personne soucieuse de son autoréalisation pour une vie bonne et réussie est contrainte de s'engager à la lutte intersubjective ou pour la reconnaissance. C'est la raison pour laquelle, dans le présent travail, notre objectif n'était pas d'explorer dans la globalité la pensée d'Axel Honneth, mais à partir de sa théorie de lutte pour la reconnaissance mutuelle de tenter de trouver les causes de l'absence ou de la carence de la reconnaissance au sein des presbyteriums ainsi que les solutions pour faire face à ce déni. A la lumière de cette théorie, nous avons dégagé les différentes formes de reconnaissance qui vont toujours de pairs avec des situations d'offense, d'humiliation et même d'injustice. C'est ce qui nous a amené à la phase ultime de notre recherche qui consiste en la proposition de quelques pistes pour la résolution des conflits au sein des presbyteriums et la valorisation de ses membres.

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Enfin, quant au dernier chapitre, il a été question pour nous de proposer de manière explicite et concrète l'apport de la théorie de lutte pour la reconnaissance mutuelle dans l'intégration sociale des personnes et plus précisément celle des membres des presbyteriums pour passer d'une société de mépris à une société de justice où des relations de reconnaissance seront plus harmonieuses et basées sur des valeurs éthiques telles que l'amour, le droit et la solidarité qui sont selon Honneth « les conditions formelles des rapports d'interaction dans lesquels les êtres humains peuvent être assurés de leur « dignité » et de leur intégrité »294

L'amour est le noyau structurel élémentaire qui donne accès à la confiance en soi. C'est en son sein que les membres de la collectivité apprennent « à considérer l'autre comme un individu irremplaçable ».

Le droit est la seconde sphère où la personne humaine est reconnue sur le plan universel comme égale en droits par rapport à tous les autres membres de la communauté. Le respect de soi est au droit, ce que la confiance en soi est à l'amour.

La solidarité est la dernière sphère de la relation de reconnaissance où est développée l'estime de soi. C'est le résumé entre la confiance en soi et le respect de soi.

C'est dans ces trois sphères qu'un être humain peut être reconnu et se voir confirmé dans sa singularité, son universalité et sa particularité. Cependant, il apparaît clairement que la reconnaissance de soi par autrui n'est pas le seul et unique moyen de reconnaissance des sujets humains. La reconnaissance interobjective est une possibilité de reconnaissance à envisager que nous pouvons qualifier de reconnaissance par des choses, à l'instar de la reconnaissance par le travail. Toutefois, nous sommes conscients de n'avoir pas abordé tous les aspects de la question de reconnaissance au sein des presbyteriums. Nous avons essayé à notre niveau d'ouvrir la piste sur des éventuelles recherches, entre autres sur : La reconnaissance et les cultures, la reconnaissance et la question de la retraite des prêtres, la reconnaissance et la mémoire historique...

La question de la reconnaissance a fort bien retenu notre attention. Elle nous a permis de comprendre que les luttes sociales en l'occurrence des conflits au sein des presbyteriums ne peuvent pas seulement être interprétés à des motifs d'existence, de survie, de pouvoir, d'avoir, de recherche d'intérêts matériels et « d'auto-préservation individuelle » mais à des « mobiles

294 Honneth, A., « Reconnaissance et reproduction sociale », in Jean-Paul Payet et Alain Battegay (sous dir.), La reconnaissance à l'épreuve. Explorations socio-anthropologiques, op.cit., p. 45-58.

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moraux ». Au regard de ce qui précède, il en résulte que le déni de reconnaissance qui se traduit par le refus ou le rejet ou par une autre forme d'injustice sont à la source des conflits au sein des presbyteriums.

Cependant, quoi qu'on dise, bien que les membres des presbyteriums soient tendus vers la quête pour la reconnaissance dans l'optique de leur autoréalisation individuelle, ils ont aussi besoin des moyens matériels et financiers pour s'accomplir pleinement dans un contexte surtout du manque et parfois d'injustice dans la répartition des biens. C'est pourquoi, à la fin de ce travail, nous reprenons le point de vue de Nancy Fraser qui stipule que : « Pas de reconnaissance sans redistribution ». Celui-ci nous semble pertinent surtout dans le contexte des églises d'Afrique où le problème matériel des membres des presbyteriums se pose encore sérieusement. Face à cette objection qui exclut la dimension de la redistribution matérielle dans l'ancrage de la reconnaissance, Honneth pense que « c'est Nancy Fraser qui a le plus fortement formulé ce reproche qui n'a pas manqué de frapper les esprits : elle soutient qu'une morale sociale de la reconnaissance ne peut prendre en compte que ce qu'on nomme aujourd'hui la « politique de l'identité », mais que dans ce cadre, les formes traditionnelles de la politique de redistribution ne peuvent être prises en compte »295.

Toutefois, Honneth continue sa réflexion en ces termes : « Je suis convaincu que ce reproche repose sur un grave malentendu que rend d'ailleurs tout à fait compréhensible une certaine tendance répandue dans les publications politico-philosophiques [...]. Je crois qu'il y a là un malentendu ruineux provoqué en premier lieux par Charles Taylor dans son livre sur La politique de la reconnaissance »296. De ces objections de Nancy Fraser et Charles Taylor, Honneth arrive à la conclusion selon laquelle :

Dans la conception de l'éthicité démocratique que j'ai proposée, les revendications touchant à la redistribution matérielle découlent de deux sources différentes. D'un côté, elles dérivent des implications normatives de l'égalité des droits, laquelle promet aux membres d'une communauté démocratique une égalité de traitement basée sur le droit : il est clair en effet que la garantie des droits sociaux, ainsi que la redistribution qui en découle, ont pour fonction normative de donner à chaque citoyen et citoyenne la chance effective de participer au processus démocratique de la construction publique d'une communauté de droit. D'un autre côté, les exigences

295 Ibid.

296 Ibid.

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relatives à la redistribution découlent également de l'idée normative selon laquelle chaque membre d'une société démocratique doit avoir la chance d'être estimé socialement ses contributions individuelles297.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams