Pollution atmosphérique en dioxyde d'azote dans la ville de Kinshasa vue depuis l'espace par satellite Sentinel 5SPpar Paul BOTENDE Université de Kinshasa - Licence 2021 |
CHAPITRE IV. PRESENTATION DES RESULTATS ET DISCUSSIONCe chapitre traite de la présentation des résultats issus de l'analyse des différentes données suivant la méthodologie indiquée dans le troisième chapitre. 4.1. Répartition spatiale des points d'échantillonnage Les points d'échantillonnage ont couvert la partie urbaine de la province de Kinshasa. Cependant, sur les 24 communes de la ville de Kinshasa, ces points couvrent 23 communes de la ville. Il se révèle donc que l'échantillonnage était réellement représentatif de la ville de Kinshasa. Au total il a été pris un total de 63 échantillons ponctuels correspondant aux 63 zones ou pixels de 7x3,5km2. La carte sur la figure 19 donne la visualisation et la répartition spatiale de ces points d'échantillonnage. Carte 4. Carte d'échantillonnage 33 4.2. Analyse spatiale de la pollution de l'air par le dioxyde d'azote (NO2) La figure 20 montre le résultat obtenu avec la donnée collectée par l'instrument TROPOMI pour la ville de Kinshasa. Comme on peut le voir, la carte qui en résulte fournit beaucoup plus d'informations sur la distribution intra-urbaine du N02. Le résultat de cette carte a été obtenus en combinant les informations provenant de six mois de mesures TROPOMI de NO2 et en tenant compte des informations météorologiques locales de la région. Une carte journalière standard de distribution de NO2 pour une date spécifique (un seul passage du satellite) le jour à partir de 12h. Cette carte identifie les différentes zones de pollution atmosphérique dans la ville de Kinshasa. Les niveaux de pollution sont exprimés par une palette des couleurs allant du plus clair pour les faibles niveaux de pollution au rouge foncé pour des niveaux élevés. Carte 5. Distribution spatiale des
concentrations de dioxydes d'azote (NO2) dans l'air de la En effet, en se basant sur la concentration du NO2 dans l'atmosphère de Kinshasa nous constatons que les communes situées dans ces zones fortement polluées sont : la commune Gombe, une grande partie de Bandalungwa, Ngiri-ngiri, Kalamu ; une petite partie de Ngaba, Lemba et l'extrême nord de Kisenso. Toute la commune de Lingwala, Kinshasa, Barumbu, Kasavubu, Limete et Matete. Cette forte pollution serait dû aux trafics routiers intenses dans cette zone. Nous pouvons observer sur la carte ci-dessous où l'on peut comptabiliser plus au moins 30 points chauds (carrefours) et plusieurs industries localisées dans la commune de Colonnes verticales de le 1 5 NO2 (molecule/cm2) x 4,5 4,0 2,5 6,0 5,5 5,0 3,5 3,0 Courbe des colonnes de NO2 en fonction des zones localisées 0 10 20 30 40 50 60 70 Zone cible Figure 3. Graphique représentant le NO2 en fonction des zones localisées 34 Limete. D'après les analyses faites par BAKAMBANA (2019), les valeurs les plus élevées ont été observées dans la partie industrielle de la commune de Limete et ces valeurs été 4 fois supérieures à celles observées dans les autres coins de la ville. Par ailleurs, nous remarquons aussi que la commune de la Gombe regorge dix points chauds ; Lingwala a sept points chauds, Kinshasa quartes points chauds, Barumbu en a deux. Dans la commune de Limete nous avons répertorié onze points chauds, sept points chauds à Kalamu, huit points chauds dans la commune de Kasa-vubu, six points chauds dans la commune de Bandalungwa. La commune de Mont-Ngafula a quatre points chauds et peu polluée ; Kimbanseke a six points chauds mais peu polluée. Sur le graphique ci-dessous, on sait bien voir la courbe des colonnes de NO2 en fonction des zones localisées. Nous observons que la zone 42, 52 et 53 ont une quantité élevée de dioxyde d'azote. Dans ces 3 zones ci-dessus, nous avons la commune Gombe, une grande partie de Bandalungwa, Ngiri-ngiri, Kalamu ; une petite partie de Ngaba, le nord-est de Lemba et l'extrême nord Kisenso. Toute la commune de Lingwala, Kinshasa, Barumbu, Kasavubu, Limete et Matete. Par contre les zones 1, 2, 8, 25, 28 et 36 sont les moins polluées. Dans les zones 1, 2 et 8 il n'y a aucuns points chauds et dans ces zones on retrouve la comune de Mont-Ngafula. La zone 28 a trois points chauds, mais qui n'influence pas trop sur la pollution car elle reste faible. Dans cette zone se situe trois communes : Mont-Ngafula, Selembao et Ngaliema. 35 Tableau 6. Synthèse des résultats
36 Il est important de dégager le lien entre la concentration du dioxyde d'azote (NO2) et l'évolution pluviométrique et la température de l'air dans la ville de Kinshasa. La simulation a été réalisée durant les mois de Janvier à Juin ; lesquels correspondent aux mois de prélèvements des taux de concentration de NO2 dans l'air. Etant donné que le dioxyde d'azote (NO2) est un gaz à effet de serre, sa concentration dans l'air dans des proportions anormalement élevées contribue sans nul doute au phénomène de changement climatique. Le graphique suivant sur la figure 22 permet de visualiser la température de la ville de Kinshasa en 2020. Nous observons sur ce graphique que le mois de Janvier et Février ont enregistré une moyenne de 25,8°C et en Juillet 22,8°C qui correspond à la saison sèche. La température joue un rôle dans la dispersion verticale des polluants atmosphériques (ce processus serait moins efficace si l'air ambiant est chaud [Cfr Article Atmosphère dans tous ces états]. Température °C 26,5 22,5 22 21,5 21 26 25,5 25 24,5 24 23,5 23 Figure 4. Températures à Kinshasa durant les prélèvements des NO2 en 2020 Dans le graphique ci-dessous, les mois de janvier, Avril et Novembre 2020 ont été marqués par des précipitations abondantes, largement supérieures à la normale. De manière générale, les plus grands volumes des pluies dans la ville de Kinshasa sont recueillis pendant les mois d'avril et de novembre qui conduisent aux phénomènes d'inondations et de ravinements mortels. 37 Précipitation en mm 400
Figure 5. Moyenne mensuelle des précipitations de Kinshasa en 2020 La pluie est un facteur de réduction de la concentration des polluants dans l'air par le phénomène d'absorption en les entrainant au sol. Les niveaux de polluants sont d'autant plus élevés quand l'atmosphère est alors souvent stable (Breizh, 2014). La forte pluviométrie dans la ville de Kinshasa serait un facteur de réduction de la concentration des NO2 dans l'atmosphère. Cependant, cela ne l'épargne pas la ville de la pollution atmosphérique. 4.3. Règlementation Face à de tels risques, la meilleure solution est d'agir en amont de la pollution, et de protéger les individus de l'exposition plutôt que d'en traiter les conséquences souvent lourdes. Alors, il convient de mettre en place des réglementations visant à contrôler la qualité de l'air. La pollution de l'air ne connait pas de limite et les polluants émis localement se retrouvent dispersés sur l'ensemble du globe. De ce fait, il existe des conventions telles que la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance (Directive, 2008). Ecrite en 1979 à Genève par la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe et signée par 51 pays dont des pays européens, le Canada et les États-Unis, elle a permis la mise en place de protocoles visant à contrôler les émissions polluantes dans l'hémisphère nord. L'Union Européenne mène une politique visant à réduire la pollution atmosphérique depuis plus de 50 ans. Aujourd'hui, la qualité de l'air est régie par deux directives européennes. Il s'agit de la directive 2008/50/CE concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe (Directive, 2008), et la directive 2004/107/CE (Fikih, 2012). Elles remplacent en réalité un ensemble de directives appliquées en Europe depuis les années 1980, notamment la directive 96/62/EC et ses directives filles qui concernaient le dioxyde de soufre, le plomb, les particules fines, le dioxyde d'azote et l'ozone (Cellule interrégional de 38 l'environnement, 2019). Il en découle de nombreuses définitions concernant les termes présents dans le vocabulaire utilisé pour décrire la qualité de l'air comme la valeur cible, les polluants, la description des milieux, qui sont parfois issus d'une directive antérieure, la directive 96/62/CE concernant l'évaluation et la gestion de la qualité de l'air ambiant. Pareillement, les méthodes d'évaluation et de mesures sont renseignées aux Etats membres, qui doivent alors vérifier ces méthodes et assurer l'exactitude des données récoltées et diffusées. De ce fait, les Etats membres désignent des organismes compétents afin de mettre en place un programme de surveillance de la qualité de l'air au sein de diverses zones géographiques. L'objectif est de maintenir une bonne qualité de l'air si cette dernière l'est déjà, ou de l'améliorer dans le cas contraire. Il existe donc des valeurs cibles à atteindre et des exigences pour chacun des polluants listés afin de maintenir la meilleure qualité de l'air possible, et dans le cas contraire, savoir quoi faire en cas de dépassement des valeurs cibles et de l'atteinte des seuils d'alerte. Ces objectifs à moyen et long terme sont déterminés selon l'impact du polluant d'intérêt sur la santé humaine et environnementale, en tenant compte de la faisabilité technique et financière des opérations à réaliser. Par exemple, l'avancée technologique au sein des industries européennes pourrait permettre de prévenir 100 000 décès prématurés par an [Commission européen]. En 2013, une révision de cette directive est réalisée et présente de nouveaux objectifs plus stricts à atteindre dans le but d'améliorer la qualité de l'air en Europe (Tableau 2). Tableau 7. Nouvelles valeurs limites à respecter selon les polluants émis
Ceci s'accompagne de la création de deux nouvelles directives, la directive 2016/2284/EU concernant les plafonds d'émissions et la directive MCP 2015/2193/EU concernant les émissions des installations de combustion (Directive, 2008). D'autres directives plus spécifiques existent. A la suite du protocole de Göteborg sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance afin de diminuer l'acidification, l'eutrophisation et l'ozone au sol, la directive 2001/81/CE fixe les plafonds d'émissions nationaux durant la période 2010 à 2019 concernant les oxydes d'azote, l'ammoniac, le dioxyde de soufre et les composés organiques volatils non méthaniques pour 27 états membres de l'Union Européenne (Directive, 2004). La directive 2016/2284 lui a succédé pour fixer les plafonds à respecter entre 2020 et 2029 en tenant compte dorénavant des particules fines PM2.5 39 et d'une multitude de polluants supplémentaires, et non plus uniquement des polluants acidifiants ou eutrophisants et des précurseurs de l'ozone (Directive, 2001). Tous ces efforts sont fournis afin d'obtenir des niveaux de pollution en accord avec les valeurs guides de l'OMS d'ici 2050. En 2021, les recommandations de l'OMS furent révisées et sont désormais plus sévères que celles données pour l'Europe. Elles ont pour but de réduire considérablement la pollution de l'air pour protéger la santé des citoyens, voire d'éviter des morts prématurées et protéger la santé des écosystèmes (Directive, 2008). Ces améliorations permettraient de réduire le pourcentage de population urbaine exposée à des concentrations en polluants excessives, notamment en particules fines, en ozone et en NO2. Le pourcentage de population exposée à des concentrations ne respectant pas les valeurs guides de l'OMS publiées en 2021 (Tableau 3) (Europe Environnement Agence, 2019). L'ozone, les particules fines PM2.5 et PM10 ainsi que le benzo[a]pyrène en sont les principaux concernés [The Lancet Planetary Health, 2021]. Tableau 8. Valeurs guides de l'OMS concernant la qualité de l'air extérieur éditées en 2021
Source : (Directive OMS, 2021) En effet, l'OMS exige que les états accentuent les mesures mises en oeuvre pour respecter les normes relatives à la qualité de l'air en surveillant et en identifiant les sources polluantes, notamment en favorisant l'utilisation d'énergies propres dans les secteurs automobile et résidentiel (Directive, 2016). 40 CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS L'objet de cette étude, vise à évaluer et à analyser les niveaux de pollution de l'atmosphère en dioxyde d'azote dans la ville de Kinshasa, de quantifier les concentrations du polluant atmosphérique et d'identifier les zones les plus touchées par la pollution de l'air. Pour ce faire, les données issues du satellite Sentinel-5 Precursor de l'Agence spatiale européenne nous a été très utile. Ces données ont couvert une période de 6 mois, soit de Janvier 2020 à Juin 2020. Cependant, il sied de noter que les valeurs émanant de données du Satellite Sentinel 5 Precursor reflètent la concentration de NO2 qu'aux alentours de 12h00. Les résultats de cette étude indiquent que l'air de la ville de Kinshasa connait effectivement une pollution par la présence des dioxydes d'azote (NO2) dans des proportions inquiétantes surtout dans la partie ville centre. L'étude décèle que les communes les plus polluées sont celles de la Gombe, Ngiri-ngiri, Kalamu ; une grande partie de Bandalungwa ; une petite partie de Ngaba, Lemba et Kisenso ; toute la commune de Lingwala, Kinshasa, Barumbu, Kasavubu, Limete et Matete ont des valeurs de NO2 supérieures à 5,64 molécules par cm2x1015. Les communes de Kalamu dans sa partie sud, Bumbu, Makala, Ngaba, le Nord de Lemba, la partie Est de Limette et L'Ouest de Masina et le Nord de Nsele connaissent une pollution moyenne qui pourrait être dû à leurs proximités aux communes les plus polluées, soit à une forte densité de population, mais aussi aux points chauds. Dans les communes périurbaines de Kinshasa, la valeur de NO2 sont 4 molécules par cm2x1015. L'utilisation des données satellitaire permet de jauger le niveau de la pollution de l'Atmosphère en NO2 à Kinshasa sans dépendre de campagnes de mesure in situ. Le but à long terme serait de faire un suivit en temps et dans l'espace de l'état de l'atmosphère car notre survie en dépend aussi. La détérioration de l'atmosphère serait tributaire de nombreuses méfaits sur l'organisme notamment. D'où la nécessité d'y veiller. D'autre part, l'absence de système collecte et gestions des données sur la pollution de l'atmosphère ne nous a poursuivre notre étude sur une longue période et d'actualiser nos données. Les acteurs étatiques ayant dans leurs attribution la gestion de notre écosystème et santé, doivent prendre conscience de l'état quotidien de notre atmosphère. A cela s'ajoute aussi l'ignorance de la part des autorités et de la population sur les effets néfastes de la pollution atmosphérique sur l'écosystème terrestre en général. C'est dans ce sens que nous invitons les scientifiques à s'y pencher afin d'approfondir des recherches dans cette thématique, car nous sommes une bonne source de connaissance et d'information en la matière. En effet, l'on peut se permettre d'affirmer que l'urbanisation, a également contribué aux défis environnementaux, y compris le changement climatique, la pollution, les embouteillages, et la croissance rapide des bidonvilles en Afrique et particulièrement à 41 Kinshasa. D'où nous devons veiller à ce que nos villes soient durable a fin d'atténuer les conséquences des activités humaines dans l'atmosphère terrestre. Ainsi donc, nous recommandons ce qui suit : - Elaborer des mesures restrictives à travers une loi par exemple sur la pollution atmosphérique ; - Encourager l'utilisation des transports publics et du covoiturage pour réduire les émissions de gaz d'échappement des véhicules ; - Investir dans des énergies propres et renouvelables, telles que l'énergie solaire ou éolienne, pour la dépendance aux combustibles fossiles ; - Réduire l'importation de véhicule de mauvais état dans la ville de Kinshasa ; - Aménager de gares-routiers, des parkings et des arrêts de bus afin de réduire les embouteillages dans la ville ; - Instaurer un système de circulation alternée ; - Promouvoir l'utilisation de véhicules électriques ou hybrides pour réduire les émissions de gaz à effet de serre ; - Sensibiliser le public à l'importance de la qualité de l'air et aux actions individuelles qu'ils peuvent entreprendre, comme réduire la combustion de déchets, - Planter d'avantage d'arbres et créer des espaces verts pour améliorer la qualité de l'air et réduire la pollution dans la ville ; - Mettre en place des systèmes de surveillance de la qualité de l'atmosphère en investissant dans les équipements de collecte de données en temps réel afin d'avoir une meilleure connaissance de la situation et de prendre des mesures en conséquence. 42 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
43 Scientific Reports, 5, 12064, 2015.Pépin, M. H. (2015) : L'ancêtre de La Météorologie disponible en ligne. La Météorologie, 8(89), 3, 2015.
44 Site web
45 ANNEXES Annexe 1 : Carte du résultat d'analyse sur l'ensemble de l'espace couvert par l'instrument TROPOMI. |
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