VIII. DEFINITION DE CONCEPTS
D'après GIANOLA, « l'examen de tout
phénomène commence par sa compréhension. Mais avant toute
étude, il est nécessaire de définir les
caractéristiques essentielles autour desquelles s'articule un concept
pour pouvoir ensuite formuler une définition englobant ces
caractéristiques et seulement celles-ci. » 58. Dans ce sens,
la définition des notions clés procède d'une logique du
travail scientifique. D'où la nécessité de clarifier le
concept litiges fonciers, foncier urbain, ville.
1. Conflit
Le mot conflit tire ses origines de l'étymologie latine
« litigium » qui signifie contestation donnant
matière à un procès. De même, en droit, on le
définie comme un différend entraînant la saisie d'un
tribunal ou le recours à un arbitrage59.
Selon le dictionnaire de la sociologie, les conflits sont les
manifestations d'antagonismes ouverts entre deux acteurs (individuels ou
collectifs) aux intérêts momentanément incompatibles quant
à la possession ou à la gestion de biens rares matériels
ou symboliques. Il peut s'agir d'un affrontement des États (guerres) ou,
au sein d'une même société, des groupes religieux,
nationaux ou ethniques, des classes sociales ou toutes autres institutions
sociales (églises, partis, entreprises, organisions, et associations
diverses) au sein d'une même collectivité (famille, syndicat).
Ainsi, les acteurs peuvent s'opposer en fonction des intérêts
visés, de leurs statuts et rôles différents.
Pour la tradition marxiste60, « le conflit
est inscrit dans la nature même du social et procède du
caractère essentiellement contradictoire des rapports sociaux de
production ». Les conflits sociaux historiquement important sont donc
tous ramenés des conflits de classes définis par la
propriété ou la non-propriété des moyens de
production, et aboutissent inéluctablement aux révolutions qui
transforment l'organisation économique, politique et sociale.
En sociologie GRAWITZ définit le vocable conflit
« comme les oppositions ou les affrontements plus ou moins aigus, ou
violents entre deux ou plusieurs parties : (nations,
58 GIANOLA E.C. (2011). La sécurisation
foncière, le développement socio-économique et la force du
droit : le cas des économies ouest-africaines de plantation (la
Côte d'Ivoire, le Ghana et le Mali) ; Logiques juridiques ; Paris,
l'Harmattan, p.237
59 Le Grand Robert de la langue française,
version électronique, le CD-ROM du Grand Robert
60 MARX K et ENGELS F. (1848). Le manifeste du
parti communiste, Editions Sociales, Collections Essentielles
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groupes, classes, personnes ou encore entre tendances,
aspirations, motifs, à l'intérieur d'un même individu)
».
De ce qui précède, nous pouvons définir
les litiges comme un ensemble des tensions structurées autour des enjeux
divers.
2. Le foncier
C'est un concept issu du latin « fundus »
qui veut dire « fonds de terre ». Il appartient au
vocabulaire juridique et désigne les rapports de droit réel entre
les personnes, et un fond de terre ou de terrain. Cependant, le foncier est un
concept polysémique, car il fait appel à plusieurs approches qui
tentent de lui donner un contenu.
Le foncier « est l'ensemble des règles
définissant les droits d'accès, d'exploitation et de
contrôle concernant la terre et les ressources naturelles
»61. Cette définition met l'accent sur la dimension
sociale du foncier, rapport entre les hommes et les groupes sociaux, partie
intégrante du fonctionnement de la société. Le foncier
inclus donc les rapports entre les hommes et les femmes concernant
l'accès, le contrôle, la transmission et les usages de la terre et
des ressources qu'elle porte. Ces rapports sociaux sont principalement
déterminés par les facteurs économiques (accumulation
privative du capital et extraction de rente), juridique (norme d'appropriation
et modalités de règlements de conflits) puis par les techniques
d'aménagement pouvant matérialiser et caractériser ces
rapports en autant de région distincte.
Partant de cette définition, le foncier peut
être défini comme, « tout ce qui constitue un fond de
terre ». Il peut également signifier ce qui est relatif aux
fonds de terre en milieu rural qu'urbain. Et par foncier urbain, l'ensemble de
biens et fonds de terre présent dans une ville.
3. Ville
La ville peut être appréhendée du point de
vue infrastructurel est essentiellement caractérisée par la
primauté du cadre bâti sur l'environnement, naturel et comprise
comme « un ensemble d'habitations regroupées dans un espace
réduit et structuré ».62 D'un point de vue
purement social, c'est « un établissement relativement important,
dense et permanent d'individus socialement hétérogène
»63
61 LE BRIS E. et al. (1991). Circulation des
Hommes et Urbanisation : les politiques en échec, Paris,
l'harmattan, p.13
62 ALPE Y., cité par MBEN LISSOUCK Ferdinand
in « Violence administrative et indocilité populaire à
Yaoundé », Mémoire de Master en Sociologie,
Urbanité et Ruralité, FALSH, Université de Yaoundé
I, p.27
63 WIRTH Louis cité par GRAFMEYER Y. (1994). In
Sociologie urbaine, Paris, Nathan, p.16
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La ville de ce fait peut être définie du point de
vue géographique et social. Cependant, pour mieux la cerner, la ville
doit être appréhendée à un double niveau spatial et
social puisqu'elle se veut,
à la fois territoire et population, cadre
matériel et unité de vie collective, configuration d'objets
physiques et noeud de relations entre les sujets sociaux. Dans ce sens, la
ville recouvre deux dimensions : une dimension géographique renvoyant
à l'espace habité par les acteurs sociaux et une dimension
relationnelle qu'entretiennent ces acteurs autour des terres urbaines.
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De ces définitions qui précèdent, nous
pouvons définir la ville comme un lieu stratégique de lutte
autour des terres, et où l'individualisme foncier est poussé.
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