II.3.5 L'opposition
imparfait/passe simple
Le passé simple s'oppose à l'imparfait sur la
ligne du temps avec une action ponctuelle.
II. 3.5- 1.L'opposition
aspectuelle entre imparfait et passé simple
Le passé simple et l'imparfait s'opposent sous la
catégorie de l'aspect. L'aspect indique de quelle manière on
envisage le procès dénoté par un verbe. Le passé
simple est un temps perfectif, en ce qu'il saisit le procès de
l'extérieur, dans sa globalité, à la manière d'un
point apparu à un momentdonné. L'imparfait, en revanche, est un
temps imperfectif. Il présente le procèsde
l'intérieur, dans son déroulement, sans lui assigner de bornes
temporellesévidentes. Lorsqu'on utilise l'imparfait, on signale que le
procès est en coursau moment choisi comme point de repère, mais
on ne donne pas d'indicationquant à son achèvement. Si le
passé simple est donc limitatif, l'imparfait peutêtre dit
non limitatif.
Excepté le côté aspectuel, le couple
imparfait/passé simple joue un autre rôle
d'importance dans la construction romanesque. Cette fois c'est la mise en
relief.
II.3.5- 2. La mise en relief
La mise en relief est une notion linguistique inventée
par Harald Weinrich. Pour lui il y a mise en relief quand il y a alternance de
deux temps tels que le passé simple et l'imparfait. L'imparfait sert
à la description du second plan, du décor en quelque sorte,
tandis que le passé simple est privilégié pour les actions
du premier plan.
Dans son oeuvre Le temps(1973 : 114), Harald
Weinrichdépartage ces deux temps en mettant l'accent sur les deux
notions d'arrière-plan et de premier plan :
« L'imparfait est dans le récit le temps de
l'arrière-plan, le Passé simple le temps du premier plan
»
Autrement dit, le passé simple permet d'asseoir dans le
récit, au premier, plan tout ce qui est action, péripétie
et événement qui font progresser l'intrigue, tandis que
l'imparfait joue le rôle d'un canevas, d'une ossature, sinon de tout ce
qui constitue le fond sur lequel se détachent les
événements marquants exprimés par le passé simple,
et qui permet, en revanche, de dessiner la toile de fond, ou ce que H.
Weinrichdésigne sous le concept d'arrière-plan.
II.3.5- 3. L'imparfait de
rupture
Il faut noter que l'usage narratif de l'imparfait ne se limite
pas exclusivement à l'exercice d'une fonction d'arrière-plan.
L'imparfait peut en effet s'introduire au terme d'une série de formes
perfectives pour, si l'on veut, faire progresser le récit. Il faut
préciser, cependant, qu'il a alors pour rôle spécifique de
signifier la clôture soit d'un épisode du récit,
soit du récit lui-même. Il est souvent accompagné d'un
complément circonstanciel qui lui assure son inscription temporelle. Tel
est l'imparfait de rupture (ou imparfait historique). Son emploi est courant
dans la seconde moitié du XIXe siècle, particulièrement
dans les contes et nouvelles de Maupassant. Ainsi, dans La Ficelle, le
personnage d'Hauchecorne cherche désespérément à
prouver son innocence dans une affaire de vol de portefeuille:
« Il ne rencontra que des incrédules.Il
en fut malade toute la nuit.Le lendemain, vers une heure de
l'après-midi, Marius Paumelle [...] rendaitle portefeuille et son
contenu à Maître Houlbrèque, de Manne
ville. »
L'imparfait marque bien ici la clôture d'un
épisode narratif, mais non celle du récit. En effet, la reddition
du portefeuille par Paumelle ne suffit pas à laver Hauchecorne des
soupçons de la rumeur publique, ce qui finit par le conduire à la
folie et à la mort.
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